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matières de l’Essai
« ESSAI HISTORIQUE & POLITIQUE SUR
Par
Jean-Baptiste Nothomb
CHAPITRE VI - Récapitulation:
état de la question belge. - Tâche des générations contemporaines.
(page 91) Considérées du point de vue où les actes secondaires s'effacent, les négociations que la révolution belge a fait naître présentent deux résultats : le traité du 15 novembre 1831 et la convention du 21 mai 1833[1].
Le traité du 15 novembre, conclu avec les cinq grandes puissances, constitue le droit public du nouvel État belge par rapport à l'Europe.
Cet acte n'a pu
dispenser
Ce traité direct n'ayant
pu être conclu, la convention du 21 mai
Un état définitif eût sans doute été préférable, si le choix avait été possible ; mais ces sortes de situations intermédiaires, qui déconcertent les combinaisons purement logiques, semblent commandées par la force des choses ; les affaires humaines ne se font que graduellement et à l'aide d'inévitables transitions.
(page 92) La convention
du 2l mai a laissé subsister le traité du 15 novembre comme droit public de
C'est ce que les négociations, reprises à Londres en juillet 1833 et suspendues au mois de septembre suivant, ont démontré.
La suspension des
négociations a laissé
Elle a été amenée par une cause étrangère au cabinet belge.
C'est après cette mise
en demeure que le gouvernement hollandais s'est adressé à
En l'absence de ce consentement, les négociations restent suspendues : suspension qui ne porte aucune atteinte au statu quo du 21 mai.
Ainsi, pas d'abandon du statu quo avant l'arrangement définitif.
Pas de reprise des
négociations à Londres pour parvenir à cet arrangement, qu'après l'adhésion de
Tel est le double
principe sur lequel doit reposer la politique du cabinet belge, politique
résumée en ces (page 93) termes dans la réponse faite par le Roi à l'adresse de
Il faut encore en conclure:
Que tout désistement d’une partie du statu quo avant l'arrangement définitif, serait prématuré ;
Que toute reprise des
négociations, avant la solution de la question du Luxembourg par
De sorte que l'interruption pure et simple des négociations se prolongera tant que le gouvernement hollandais n'aura pas rempli la condition dont l'accomplisscnient préalable a été exigé en septembre 1833.
La principale de ces difficultés
consiste à savoir si la rive droite de
Question grave sans
doute pour l'Allemagne, pour
Spectateurs, en quelque
sorte, de ces débats, nous (page 94) n'avons qu'à nous maintenir dans la
situation négative que nous a faite la convention du 21 mai ; nous en sortirons
le, jour où l'on viendra nous dire: Voici le consentement de
La question luxembourgeoise avait servi, en 1830, de point de départ aux négociations, qui sont venues en 1833 se heurter au même obstacle.
On a souvent reproché à la diplomatie belge d'avoir inconsidérément compliqué la question belge proprement dite de la question luxembourgeoise ; on a dit que, si le Luxembourg était resté en dehors de la révolution, si la question luxembourgeoise n'était pas venue compromettre la question belge, le nouvel État serait depuis longtemps constitué.
Il n'est donc pas hors de propos de soumettre cette question, durant cette espèce d'entr’acte diplomatique, à un nouvel examen, d'entreprendre de prouver que la révolution belge a consulté et son droit et son intérêt, que l'occupation du Luxembourg n'a été ni un crime politique, ni une faute.
En confirmant, dans sa séance du 18 novembre 1830, la prise de possession du Luxembourg, le Congrès national a invoqué le fait ancien et la volonté actuelle : le fait ancien, car le Luxembourg faisait, en1790, partie intégrante des Pays-Bas autrichiens, sans avoir avec l'Allemagne des rapports autres que ceux qu'avaient toutes les provinces[2]; la volonté actuelle, car les (page 95) populations luxembourgeoises se sont volontairement, sans provocation extérieure, associées aux événements de 1830.
L'occupation du Luxembourg était un fait d'une haute (page 96) portée politique ; produit inévitable du mouvement qui entraînait le royaume des Pays-Bas, il devait être accepté par les hommes qui ont entrepris de faire sortir de ce mouvement un état nouveau. La question a été tardivement éclaircie; cependant elle renferme un intérêt belge, un intérêt français, qu'il est impossible de méconnaître.
Un ministre de Louis-Philippe a résumé par ce trait rapide les conséquences de la révolution de 1830 :
« Vous me demandez
ce que
Le royaume des Pays-Bas
n'était pas la « seule hostilité », si nous pouvons parler ainsi,
élevée sur nos frontières contre
Jetez les yeux sur la carte de l'Europe telle qu'elle a été reconstituée en 1814 ; vous y verrez que le grand-duché, de Luxembourg occupe environ 25 lieues, le royaume des Pays-Bas environ 50 lieues sur les frontières Nord-Est de France ; ainsi, par rapport à l'étendue des frontières, le grand-duché seul a l’'importance de la moitié du royaume entier[4].
(page 97) Une
stipulation particulière rendait même le grand-duché de Luxembourg plus hostile
que le royaume des Pays-Bas : le grand-duché, comme État fédéral, était compris
dans le système militaire de
La ligne des forteresses
élevées dans le royaume des Pays-Bas et qui, par un coup de main, pouvaient
tomber au pouvoir de
Enfin; la partie de
Ainsi, non pour rentrer
dans un système de conquête, mais pour se faire jour de ce côté, pour respirer,
pour se mouvoir à l'aise, dans les limites de 1790,
Cette double œuvre de destruction, nous l'avons entreprise sans consulter le gouvernement français, nous l'avons poursuivie malgré lui ; plus tard seulement il est venu se joindre à nous. mais la première faute était commise.
En conservant la
possession du Luxembourg,
Pour se conformer à ces
traités, le roi grand-duc aurait dû constituer à part le grand-duché de
Luxembourg, créer des États luxembourgeois, aux termes de l'article 13 de
l'acte fédéral, en un mot, gouverner le grand-duché comme une principauté
distincte du royaume des Pays-Bas. Au lieu de cela, qu'a-t-il fait? Il a
incorporé le grand-duché au royaume[5],
il a (page 99) appliqué au grand-duché les conditions mises à la fondation du
royaume par les huit articles de Londres du 21 juillet 1814[6] ;
il a aboli le droit spécial de succession en proposant la loi du 25 mai 1816[7]
; il a dépouillé le grand-duché de son caractère germanique, pour en faire une
province belge. Cette réunion ne s'est pas opérée à huis-clos, mais à la face
de l'Europe ; pas un cabinet ne l'a ignorée; pas un cabinet n'a protesté. Le
principe de l'incorporation était tellement passé dans le droit public, que,
dans les traités de limites conclus avec
La réunion du Luxembourg
au royaume des Pays-Bas (page 100) son assimilation aux provinces méridionales,
a donc été le fait, non de la révolution de 1830, mais de la volonté du Roi
grand-duc, volonté respectée pendant quinze ans. S'il y a eu violation des
traités, elle date de 1815 :
Par cette incorporation,
le Roi grand-duc avait d'avance associé le grand-duché aux destinées belges ;
si cette province avait été constituée comme État à part, la nature des choses
l'aurait peut-être tenue en dehors d'une révolution qui eût éclaté dans le
royaume des Pays-Bas ; le grand-duché étant réuni au royaume, le même mouvement
devait nécessairement emporter l'un et l'autre. Et lorsque le roi Guillaume a
imploré l'aide de
(page 101) La révolution
belge a pris les choses dans l'état où les avait mises le Roi grand-duc; elle
n'a point opéré la réunion du Luxembourg à
Qu’on le remarque bien, nous ne nous prévalons point de l'existence des traités de 1815 pour revendiquer le Luxembourg[9]; c'est de la violation de ces traités que nous nous prévalons. Les traités de 1815 avaient séparé le Luxembourg des provinces belges; malgré ces traités, le roi Guillaume a considéré le Luxembourg comme partie intégrante des provinces belges ; la l'évolution a adopté le système du roi Guillaume, en le rétorquant contre lui.
Avant de s'être enquis
des faits, le ministère dont M. Laffitte était le chef, s'est prononcé contre
nous, dès le mois de novembre 1830, à une époque où même aucun rapport
diplomatique n'était établi avec
« Les
plénipotentiaires ont, en outre, jugé nécessaire d'approuver le soin qu'ont eu
MM. Cartwright et Bresson, d'écarter des projets de réponse qui leur ont été
présentés pendant leur dernier séjour à Bruxelles toute mention du grand-duché
de Luxembourg. Ce duché fait partie de
Bien que le Luxembourg
fût, par le défaut de mention, exclu de la suspension d'armes, bien que le protocole
du 20 décembre, en posant le principe de l'indépendance belge, celui du 20
janvier, en fixant les bases de séparation, eussent dénié tout droit à
Mieux instruit des
faits, le cabinet français a d'abord soutenu que le duché de Bouillon n'avait
point été donné au grand-duché de Luxembourg proprement dit, mais au royaume
des Pays-Bas, et il a demandé que la forteresse de Bouillon, avec un territoire
convenable, restât (page 103) à la Belgique[10].
L'on commençait à comprendre qu'il était de l'intérêt de
L'élection du prince qui
nous gouverne est venue nous donner de plus belles espérances;
Le cabinet français
restait néanmoins convaincu qu'il était de son intérêt d'avoir le nouvel État
belge pour voisin dans le Luxembourg ; de là l'échange supposé entre une partie
du Luxembourg et une partie du Limbourg, et le morcellement de ces deux
malheureuses provinces. Ici encore les notions positives ont manqué ; c'est sur
une réclamation partie de Bruxelles que la délimitation projetée d'abord a été
subitement rectifiée, mais presque au hasard[11]
; la ligne aurait dû être tirée, non vers la route de Longwy, mais vers la
route de Thionville;
Si donc on nous posait cette question: qu'est-ce que la .France a gagné au dehors? Nous répondrions: la . destruction du royaume-uni des Pays-Bas et d'une partie du grand-duché de Luxembourg.
Nous. ajouterions :
Nous avons dit que le Luxembourg avait été
tacitement exclu de la suspension d'armes de novembre 1830. Lorsque, à la suite
des mesures coercitives, il s'est agi de conclure un arrangement provisoire
avec
Résumons la marche des
événements dans leur rapport avec le Luxembourg. Malgré le silence de la
première suspension d'armes, et sans égard à l'opinion du ministère Laffiffe,
Ainsi, la révolution
belge, en se maintenant dans le grand-duché, s'est protégée elle-même; elle a
obéi à une loi suprême: celle de la conservation personnelle. Elle avait le
droit pour elle; mais, en l'absence du droit, elle eût subi une nécessité qui
n'était point son ouvrage. Après quinze années d'existence commune, elle ne
pouvait, aux jours de la tempête, rompre le câble qui attachait le Luxembourg à
La diplomatie belge pourra donc avouer devant l'histoire l'occupation du Luxembourg ; elle pourra défendre cet acte au nom du droit et au nom de l'intérêt.
C'est un malheur que
cette question soit venue suspendre les négociations en 1833; mais cette
difficulté n'eût-elle point existé, un ajournement n'en était pas moins
inévitable ; la question luxembourgeoise n'a été qu’un prétexte pour le cabinet
de
La convention du 2l mai a rendu le désarmement possible ; la convention de Zonhoven l'a réalisé, et c' est parce que ce résultat était un bien inappréciable, que l'on a pu, à l'égard de ce dernier acte, passer sur quelques vices de forme.
Le désarmement a placé
On ne manquera point de citer l'invasion d'août 1831 ; on dira: si, à cette époque, le roi Guillaume a violé les engagements pris envers les cinq puissances, pourquoi ne violerait-il pas les engagements contractés depuis avec deux de ces puissances? .
La suspension d'armes,
conclue par de simples déclarations en novembre 1830 et que
Cette éventualité, nous ne l'ignorons point, entre dans les calculs du chef du cabinet de La Haye; mais jusqu'aujourd'hui les faits lui ont donné le plus insultant démenti.
Si nous avions à
personnaliser la politique hollandaise, nous supposerions qu'il existe un homme
d'État, déçu, depuis trois ans, dans toutes ses espérances ; pour tracer le
portrait de ce personnage, en ce moment imaginaire, nous dirions : tous les
événements lui ont fait faute ; favorables à ses adversaires, il en niait
l'efficacité; défavorables, il en exagérait la portée. Il a cru que les
révolutions de France et de Belgique étaient, à l'intérieur, sans condition
d'ordre ; au dehors, sans principe de réconciliation avec l'Europe. Il a vu, au
signal de
Cet exposé, est-ce le tableau réel ou fantastique du passé? Ce portrait, est-ce une fiction ou une réalité[14].
(page 111) Le mystère
enveloppe encore les congrès dont l'Allemagne a été le silencieux témoin. Ces
réunions, si pompeusement annoncées, ont été un peu tardives; elles auraient pu
alarmer, il y a deux ans, quand
de l'assemblée des
plénipotentiaires à l'assemblée des rois. Par la mesure décisive qui a marqué
la fin de l'année 1832,
Cette considération doit inspirer toute sécurité sur notre avenir et sur celui des deux grands peuples qui protègent notre cause: la question de la nationalité belge est chose jugée, il n'y a pas de tribunal assez haut placé pour évoquer à lui ce procès. Le temps des congrès de Laybach et de Vérone est passé: les situations sont changées; telle position est défensive d'offensive qu'elle avait été,.
Le sort de
Pour que
La question belge est
maintenant tout intérieure; c'est au milieu de nous, que se décident nos
destinées. Nous faisons, de l'aveu de l'Europe, un essai d'indépendance; nous
pouvons convertir cet essai en un résultat indestructible. Prouver que nous
savons nous gouverner, là est le problème. Pour faire accepter notre
nationalité par autrui, il faut commencer par l'accepter nous-mêmes; on ne
croira en nous qu'autant que nous y croirons. Il ne faut pas que
Défiez-vous donc de ces prétendus apôtres du progrès, qui veulent tout contester, depuis la propriété jusqu'à la royauté, qui révoquent tout en doute, et l'état de famille et l'état social. L'individu peut se faire une existence purement philosophique; vivant au jour la journée, sondant toutes les questions jusque dans leur source, comme dirait Pascal, ne jetant l'ancre dans aucun système, épuisant toutes les hypothèses humaines, il peut se complaire dans cette anarchie intellectuelle. Au milieu du scepticisme le plus absolu, l'homme subsiste; mais l'existence sociale n'est qu'artificielle, la nation qui doute cesse d'être, l'association se dissout le jour où elle vient à nier les principes en vertu desquels elle s'est formée. Otez les institutions qui constituent, pour ainsi dire, la forme extérieure de son existence, vous dépouillez la société de son corps; il n'y a plus rien de saisissable, le principe de la nationalité peut trouver un refuge dans quelques têtes; mais il s'échappe des masses. Laissons à l'homme son besoin de changement, ses idées de perfectibilité indéfinie, ses désirs et (page 115) ses doutes ; mais mobile comme individu; renfermons-le dans une société presque immobile, lentement progressive, soudée par sa base. à certains principes d'ordre, de liberté, de propriété. L’association n'absorbera jamais l'homme tout entier: hors de quelques principes sociaux, elle lui laissera l'existence absolue de la nature ; il ne faut pas que, de son côté, l'individu entraîne la société entière dans le mouvement particulier auquel il lui plaira de s'abandonner.
Il y a donc pour chaque
société qui veut être, des institutions publiques et privées hors de toute
atteinte ; et si le Congrès a placé à la fin de son œuvre le principe d'une
révision, en l'exprimant même d'une manière générale, c'est qu'il savait que ce
principe était limité par la force des choses. Notre Constitution soumet
également le Code civil à une révision ; est-ce à dire que la propriété et
l'état de famille pourront être abolis, et que constitutionnellement on puisse
demander cette abolition? L'indépendance belge, la monarchie héréditaire,
représentative et nationale sont des principes antérieurs et supérieurs à
Et au fond, avons-nous à demander à une autre forme de gouvernement quelque chose que nous ait refusé le système monarchique tel que nous l'avons fait? Avons-nous une institution à envier à la république? Qu’on me cite une liberté, une garantie absente, et je me hâterai de réclamer ce complément de garantie, de liberté. Que dis-je? La république reculerait devant notre Constitution monarchique; elle redouterait cc déploiement continu de forces populaires. Pour essayer de vivre, elle nous demanderait des moyens dont la monarchie a pu se passer; elle nous demanderait, pour son président, plus de pouvoir que nous n’en avons donné à notre Roi. Que si la république, pour être, sinon un progrès, du moins une innovation, nous apportait quelque chose, ce ne serait ni une garantie, ni une liberté qui nous manque; pour innover, il faudrait qu'elle creusât jusque dans les fondements de la société, et je vais vous dire où elle arriverait en descendant jusque-là. Voici comme parlait un grand orateur, dans les derniers jours de l'assemblée constituante; il répondait à des hommes qui en appelaient aussi à un autre système, et on croirait ces paroles écrites pour nous. « Vous avez fait, disait-il, ce qui était bon pour la liberté, pour l'égalité.: vous avez rendu tous les hommes égaux devant la loi civile et la loi politique; vous avez institué le gouvernement le plus libéral qui (page 117) fût jamais; de là résulte cette grande vérité, que si la révolution fait un pas de plus, elle ne peut le faire sans danger; c'est que dans la ligne de la liberté,. le seul acte qui reste à poser serait l'anéantissement de la royauté, c'est que dans la ligne de l'égalité, le seul acte qui pourrait suivre serait l'atteinte à la propriété. »
Qu'on ne se méprenne
donc pas sur ces mots de « république », de « gouvernement de
l’avenir » ; le pays doit savoir, et s'il l'ignorait, il faudrait avoir le
courage de le lui dire, que notre monarchie nous a donné toutes les libertés en
ne conservant que deux inégalités sociales: la royauté et la propriété;
qu'autour de ces deux grandes inégalités tout le terrain est déblayé, nivelé;
qu'en Belgique,
Le peuple belge a donc
atteint son état normal; il n'a plus rien à demander aux théories politiques.
Constituer
Ce n'est pas condamner à
l'inaction la jeunesse contemporaine que de lui interdire de nouvelles
révolutions ; une autre carrière reste ouverte: qu'elle s'y précipite. Une
nation qui a la conscience d'elle-même est à la fois une puissance
intellectuelle et politique;
Arrêtons-nous un
instant: avant d'indiquer les causes de notre décadence, suivons du regard le
beau mouvement intellectuel qui, au XVIe siècle, place notre patrie au premier
rang avec l'Italie. Chaque science, chaque art a son représentant;. Louvain
apparaît comme la métropole des lettres. Le mécanisme des langues anciennes
était encore ignoré; Clénard, de Diest, conçoit la première grammaire grecque;
Despautère, de Ninove, la première grammaire latine. Les écrivains de Rome et
d'Athènes trouvent des éditeurs, des commentateurs, des émules; Boch est
surnommé le Virgile belge ; l'Allemagne protestante appelle Sleidan son Tite-Live;
Juste-Lipse forme avec Casaubon et Scaliger (page 123) le triumvirat de
l'érudition. Van Helmont, de Vilvorde, esprit audacieux, donne une vive
impulsion à la chimie. L'homme physique était resté un secret; Vésale, de
Bruxelles, crée l'anatomie humaine; persécuté comme Galilée, il est condamné
par l'inquisition au pèlerinage de.
Hâtons-nous cependant
d'ajouter, quoiqu'à regret : à ce siècle il manque deux choses: une langue
nationale et l'unité nationale. Le latin vient étouffer l'ancienne langue de la
cour de Bourgogne, le roman et l'idiome des masses, le flamand. Ce fut un grand
malheur ; si les poètes et les historiens du XVIe siècle avaient conservé la
langue de Philippe de Comines et de Froissard, leurs (page 125) écrits auraient
échappé à l'oubli. Un plus grand malheur fut la perte du sentiment de la
nationalité. Au milieu du grand travail de centralisation des gouvernements et
des peuples, le principe monarchique avait conduit à un principe d'un ordre
plus élevé: au principe européen de l'équilibre politique. Avant le principe
monarchique, les provinces d'un même Etat avaient existé par juxtaposition; la
royauté vint leur imposer l'unité. Avant le principe de l'équilibre, les États
de l'Europe avaient également existé par juxtaposition; le droit public vint
donner à l'Europe même le sentiment de l'unité. Par un concours fatal de
circonstances,
Nous venons de parcourir
rapidement dix-huit siècles; personnage inévitable dans ce grand drame,
FIN DE LA PREMIERE CONTINUATION
[1] Les négociations de Londres sont
succinctement résumées dans les deux brochures ayant pour titre: Lettre à lord
Aberdeen, par VICTOR DE
[2] Le duché de Luxembourg, depuis sa
réunion aux États de Bourgogne, sous Philippe le Bon, l461, a partagé le sort
des provinces méridionales des Pays-Bas. (Voyez t. I, p. 122)
Il
était placé depuis 1548, avec ces provinces, dans le cercle de Bourgogne,
tandis que la principauté de Liége, qui formait un État distinct des Pays-Bas,
faisait partie du cercle de Westphalie.
Il
est compris dans les traités sous la dénomination générale de Pays- Bas, et
notamment dans le traité d'Utrecht, du 11 avril 1713, par lequel les Pays-Bas
ont été cédés à la maison d'Autriche.
Connue
partie intégrante de
Le
système qui tend à faire considérer l'ancien duché de Luxembourg comme un État
distinct des Pays-Bas autrichiens ou espagnols n'a aucun fondement historique.
Le
président Neny, dans ses Mémoires historiques et politiques sur les Pays-Bas
autrichiens, ne fait aucune distinction entre le duché de Luxembourg et les
autres provinces.
. La
province de Luxembourg n'a eu de rapports particuliers avec l'Allemagne qu'en
vertu des traités de 1815 qui l'ont considéré comme substitué aux quatre
anciennes possessions de la maison de Nassau: Hadamar, Siegen, Dietz et
Nassau-Dillenbourg. (Art. 5 de l'acte général du 9 juin 1815.)
Il
est à remarquer que ces quatre principautés n'avaient, sur une surface de 45
milles carrés, qu'une population de 120,000 habitants, tandis que le
Luxembourg, non compris le duché de Bouillon, en avait une de 269,000
habitants, sur une étendue de 129 milles carrés. (SCHOELL, Histoire abrégée des
tratés de paix, t. XI, p. 123 et 124.)
Lé
grand-duché de Luxembourg, tel qu'il est réduit par le traité de Londres du 15
novembre 1831, comprend une population d'environ 150,000 habitants: c'est plus
que l'équivalent des anciennes possessions nassauviennes. (Note de la 3"
édition.)
[3] Paroles de M. Thiers.
Voyez
aussi la brochure: De
[4] II s'est même agi au Congrès de
Vienne de placer
[5] Il serait fastidieux d'énumérer tous
les faits qui attestent que pendant quinze ans le grand-duché de Luxembourg a
été considéré comme partie intégrante du royaume des Pays-Bas et comme l'une
des neuf provinces méridionales.
La
révision de la loi fondamentale de 1814, qui a sanctionné la réunion des
provinces méridionales et septentrionales, a été faite en commun, par
l'établissement d'une commission où siégeait un Luxembourgeois (arrêté du 22
avril 1815) et par la convocation des notables indistinctement (proclamations
du 27 juillet et du 24 août 1815; voyez le tableau du relevé des votes par
provinces, t. I, p. 66).
Le principe
d'une représentation égale à celle des provinces septentrionales ayant été
admis par les provinces méridionales, le grand-duché de Luxembourg a été appelé
à nommer 4 députés dans les 55 attribués à ces dernières. .
La
question de la séparation des provinces méridionales d'avec les provinces
septentrionales ayant été, en septembre 1830, soumise aux États-Généraux, les 4
députés luxembourgeois ont pris part au vote.
Enfin,
les 55 députés des provinces septentrionales s'étant constitués à part le 20 octobre
1830, les 4 députés luxembourgeois se sont abstenus de siéger.
[6] C'est en vertu de l'article 6 des
huit articles du 21 juillet 1814 que le grand-duché de Luxembourg a, pendant quinze
ans, contribué au payement des dettes mises à la charge du royaume des Pays-Bas
et que les forêts domaniales situées dans le grand-duché ont été vendues au
profit du trésor général.
[7] Le texte de cette loi est rapporté,
t. I, p. 123.
[8] On lit dans le traité conclu le 26
juin 1816 avec
«
Art. 5. Oberbillig, situé sur la rive droite de
«
Art.
« ...
La petite île située près d'Echternath... continuera d'appartenir au royaume
des Pays-Bas. »
[9] On s'est plu souvent à attribuer
cette absurdité à l'auteur de cet ouvrage.(Note de la 3" édition.)
Voyez
la discussion de la question du Luxembourg au Congrès national et le discours
de M. Nothomb du 17 novembre 1830, p. 4 du Recueil des discours. (Note de la 4°
édition.)
[10] Le premier traité de Paris du 30 mai
1814, art. 3, avait cédé à
L'acte
général du Congrès de Vienne, du 9 juin 1815, article 69, déclara que la partie
non cédée à
Le
deuxième traité de Paris du 20 novembre 1815, art. 1e, plaça tout le duché de
Bouillon hors des frontières de France.
Le
recès général de la commission territoriale de Francfort, du 20 juillet 1819,
art. 34, assigna au roi des Pays-Bas, grand-duc de Luxembourg, la partie du
duché de Bouillon enlevée à
[11] On s'est même servi d'une ancienne
carte aujourd'hui inexacte. Aux termes de l'article 2 des vingt-quatre
articles, la route d'Arlon à Bastogne doit appartenir à
Comme
il y a néanmoins quelques maisons à droite ou à l'est, on finit par admettre
qu'il existe deux Martelange, dont l'un, le principal, à l'ouest de la route,
resta à
Art.
1e du traité de La Haye du 5 novembre 1842. (Note de la 4e édition.)
[12] L'idée première de
[13] Congrès de Munchengräz, 1833.
[14] M Van de Weyer, dans l'ouvrage
«
C'est un étrange spectacle, dit M. Van de Weyer, que celle longue obstination
du roi Guillaume, que celte persévérance inébranlable à résister aux instances,
aux conseils, aux menaces de ses meilleurs amis! C'est chose curieuse de se
rappeler de quel œil impatient et avide il a suivi la marche de tous les
événements arrivés depuis deux ans, dans l'espoir de voir naître quelque
catastrophe qui lui permît de réaliser ses vœux secrets et de faire expier aux
Belges, dans les murs même de Bruxelles, le crime d'avoir voulu remonter au
rang de peuple indépendant ! Il épiait avec inquiétude les moindres mouvements
de l'Europe; partout où se trahissait un peu d'agitation, il entrevoyait une
révolution, une guerre, que sais-je? Un embarras, un accident, un discours
d'opposition, un article de gazette, un rien, tout lui était bon pour y
rattacher ses illusions. Il n’est pas de mauvaises passions auxquelles il n'ait
applaudi en secret; pas d'émeute à laquelle il n'ait souri ; pas de malheur qui
ne fût pour lui une source de joie; tantôt c'est le procès des ministres en
France; tantôt la chute de Varsovie; plus tard, les troubles de
« Mais tout dort, et l'armée, et les, vents,
et Neptune!
« Partout
la paix, le repos partout, hormis dans l'imagination malade du roi Guillaume.
Tandis qu'il espérait en vain des changements dans le monde politique, il s'en
opérait un naturellement dans l'opinion de ses sujets. Cc changement, produit
du temps, de la réflexion, de souffrances réelles, il n'y croira point; il en
méconnaîtra la source et la nature. » (Extrait de la brochure:
[15] Godefroy, né à Baisy, village entre
Genappe et Nivelles, dans le Brabant wallon, 7e duc de Bouillon, marquis d'Anvers,
duc de
Il
eut pour successeur son frère, Baudouin Ier.
Ces
deux Brabançons reposaient, avant l'incendie de 1807, au pied du Calvaire, non
loin du tombeau de Jésus-Christ.
« Je
ne sortis point de l'enceinte sacrée sans m'arrêter aux monuments de Godefroy
et de Baudouin; ils font. face à la porte de l'église et sont appuyés contre le
mur du chœur. .Je saluai les cendres.de ces rois chevaliers qui méritèrent. de
reposer près du grand sépulcre qu'ils avaient délivré. Ces cendres sont des
cendres françaises et les seules qui
soient ensevelies à l'ombre du tombeau de Jésus-Christ. Quel titre d'honneur
pour ma patrie! » Chateaubriand. (Note de la 3° édition.)
Dans
cette Jérusalem de Godefroy et des Baudouin,
[16] Baudouin, Vle du nom, comme comte de
Hainaut, XIe comme comte de Flandre, Ie comme empereur de Constantinople. Il
était né à valenciennes; il est mort en captivité vers 1206. (Note de la 3°
édition.)
[17] On suppose communément que Rubens
est lié à Cologne, où ses parents, bourgeois d'Anvers, s'étaient réfugiés
pendant les troubles du XVI siècle; mais il n'existe aucune preuve matérielle
du fait. Villenfagne, en s'appuyant de l'opinion de Mantelius, a essayé
d'établir que Rubens est né à Curenge, dans l'ancien comté de Looz. ( Voyez
DEWEZ, Histoire du pays de Liége, t. II, p. 347.) Le jour de la naissance de
Rubens n'est connu que parce que c'est celui des saints dont il porte le nom,
Pierre et Paul, 20 juin 1577.
[18] Roland Lassus, de Lattre, Orlando
Lasso, né à Mons en 1520, est mort à Munich le 13 juin 1593. Les Allemands, ct
particulièrement les Bavarois, se plaisent à le considérer comme leur
compatriote; il a laissé un grand nombre d'ouvrages; il avait composé les sept
psaumes pénitentiaux pour Charles IX. (Voyez PAQUOT, t. l, p. 372.)
[19] Il faudrait peut-être excepter
Lambrechts, ministre de la justice sous
[20] Froissard, né à Valenciennes en
1337, mort à Chimay vers 1400; Olivier de
Ces
trois écrivains appartiennent au moins autant à