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« Mémoires pour servir à l’histoire contemporaine de la
Belgique », par Ch. WOESTE, tome 1
(1859-1894)
(Bruxelles, Dewit, 1927)
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AVANT-PROPOS
(page 51) J’ai tracé
ces pages pour jeter quelque lumière sur la vie politique de la Belgique
contemporaine. Elles ne constituent pas un ouvrage d’histoire ; mais elles sont
destinées à contribuer à l’étude de ce temps, en révélant, sur les hommes et
les choses, des dessous que le public n’a pas connus et que souvent il n’a pas
même soupçonnés.
Je n’ignore
pas l’écueil des Mémoires : ceux qui les écrivent sont tentés de se mettre en
scène et de faire leur apologie. Je crois cependant ne pas avoir oublié que
l’histoire doit être, suivant l’expression de Thucydide, ‘une œuvre faite pour
l’éternité », et que, par suite, les matériaux appelés à la confectionner
sont appelés à présenter le même caractère.
Est-ce à
dire que tout sentiment personnel puisse demeurer étranger aux auteurs de
Mémoires ? Ce serait demander trop à la faiblesse humaine. Et, d’ailleurs,
comment reprocher des préoccupations de cet ordre à ceux qui, comme moi, on
vécu plus de cinquante ans de la vie publique, qui y ont joué un rôle, et qui,
combattant (page 52) toujours, ont
été aussi toujours combattus ? Serait-il juste de les incriminer, s’ils mettent
en relief leur ligne de conduite, alors que celle-ci a marqué les événements de
son empreinte ? Ne serait-ce pas leur enlever une partie d’eux-mêmes s’ils dissimulaient
que, délibérément, constamment, passionnément, ils sont restés les serviteurs
d’une grande cause et que ce souci a dominé leurs actes, leurs plans, leurs
discours ? Je me suis donc efforcé d’obéir aux exigences de la vérité et du
désintéressement. Je n’ai pas oublié que, si ces pages paraissent jamais, la
tombe aura refroidi bien des luttes, bien des impulsions qui les expliquent.
Mais il n’en est pas moins vrai que, si l’humanité agit dans le présent et
prépare l’avenir, elle est le fruit du passé, et que ce n’est rien exagérer que
de dégager, des traces laissées par les disparus, des enseignements pour les
vivants.
Peut-être
m’abusé-je ? Quoi qu’il en soit, ces Mémoires auront mérité de ne pas passer
inaperçus s’ils alimentent l’expérience des hommes mûrs et s’ils aident à
enrôler des jeunes gens sous les drapeaux de l’Eglise et de la Patrie.