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Congrès
national de Belgique
Séance du
jeudi 30 juin 1831 après-midi
Sommaire
1) Projet de décret tendant
à interdire la réunion des états provinciaux pour la session ordinaire de 1831
(Van Meenen, Van Snick, Ch. Rogier, de Sauvage, de Muelenaere, Desmanet de Biesme, Rogier, Desmanet de Biesme, de Robaulx, Van Snick, Rogier, Beyts, A. Rodenbach, d’Oreye, Duval de Beaulieu, d’Huart, Rogier, de Robaulx, Fleussu, De Lehaye, Duval de Beaulieu, Dubus, Duval de Beaulieu, F. Lehon, Deleeuw, Le Bègue, Beyts, Desmanet de Biesme, François, Desmanet de Biesme, Jaminé, Rogier, Frison, de Sauvage)
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles,
Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie,
1844, tome 3)
(page 360) (Présidence de M. Raikem, premier vice-président)
La
séance publique est ouverte à deux heures. (M. B., 2 juill.)
Un des secrétaires donne
lecture du procès-verbal ; il est adopté. (P. V.)
PROJET DE DECRET TENDANT A INTERDIRE
M. de Behr fait, au nom de la section centrale,
un rapport sur le projet de décret, qui a pour but d'empêcher la réunion des
états provinciaux le premier mardi de juillet. Il en propose (page 361)
l’adoption, moyennant diverses modifications. (M. B., 2 juill.)
-
Personne ne demandant la parole sur l'ensemble du projet de la section
centrale, on passe immédiatement à la discussion de l'article 1er, dont voici
les termes :
Article 1
« Art.
1er. Il n'y aura pas d'assemblée des états provinciaux le premier mardi de
juillet pour la session ordinaire de 1831.» (M. B., 2 juill., et P. V.)
- Cet
article est adopté sans discussion. (P. V.)
« Art.
2. Les affaires qui devaient être soumises à ces assemblées seront renvoyées au
conseil provincial, qui les remplacera.» (P. V.)
M. Van
Meenen
propose un amendement tendant à supprimer les mots : qui les remplacera.
(M. B., 2 juill.)
M. Van Snick – Cet article,
il me semble, ne laisse rien à désirer quant à sa rédaction, et je m'oppose à
la suppression proposée par (page 362) l'honorable M. Van Meenen. Quelle
a été en effet la pensée qui a présidé à la rédaction de cet article ? . C'est
de faire remplacer l'assemblée des états par le conseil provincial ; il fallait
bien le dire, sans cela on aurait- pu croire que les affaires seraient soumises
aux conseils provinciaux, qui seront organisés 'après la loi présentée par M.
le ministre de l’intérieur, et qui n'est pas encore discutée. (M. B., 2 juill.)
M.
Charles Rogier – Il est bien que les affaires soient renvoyées au conseil
provincial à défaut de réunion de l'assemblée des états ; mais encore faut-il
que le conseil provincial se réunisse avant la fin du mois de 1831, soit pour
expédier les affaires urgentes, soit pour régler le budget de 1832. Il faudrait
donc ajouter à l'article une disposition en ce sens. (M. B., 2 juill.)
M. le chevalier de Sauvage,
ministre de l'intérieur – Je n'ai pas dit dans le décret que le
conseil s'assemblerait avant la fin de l'année, parce que j'ai pensé qu'on
aurait le temps de discuter et d'adopter la loi organique que j'ai présentée,
et qu'en vertu de cette loi les états pourront s'assembler et vaquer aux
affaires de la province. Cependant, et par précaution, j'appuierai l'adoption
d'un amendement conçu dans le sens de l'observation de l'honorable préopinant.
(M. B., 2 juill.)
M. de Muelenaere – Je m'opposerai à l'adoption de
l'amendement de M. Van Meenen, qui, d'après les observations déjà présentées
par un des préopinants, a sans doute senti l'erreur dans laquelle il est
tombé. Le décret qui nous est proposé porte que l'assemblée ordinaire des
états n'aura pas lieu pour cette année à l'époque fixée ; l'assemblée générale
étant supprimée, il fallait bien dire que les conseils provinciaux conserveraient
leur pouvoir et remplaceraient l'assemblée générale. Je voterai donc contre
l'amendement. (M. B., 2 juill.)
M. le vicomte Desmanet de Biesme – Je
m'oppose pour ma part à l'amendement de M. Rogier ; il est impossible de
confier aux députations, telles qu'elles sont composées, le soin de régler des
affaires des provinces, et surtout de voter un budget. Voulez-vous que trois ou
quatre individus, car la plupart des députations ne sont pas plus nombreuses,
votent des dépenses pour les routes, les canaux, et règlent tant d'autres affaires
importantes ? Cela est impossible, et je n'y consentirai jamais. (M. B., 2
juill.)
M. le président – Voici comment est conçu l'amendement
de M. Rogier :
« Si
le conseil provincial ne peut être réuni avant le 1er novembre 1831, les
affaires urgentes, et entre autres le budget de 1832, seront soumises à la
députation permanente des états. » (M. B., 2 juill.)
M. Charles Rogier
– Il ne s'agit pas, comme
on voit dans mon amendement, d'attribuer toutes les affaires à la députation,
mais seulement les affaires urgentes et qui ne peuvent souffrir de retard, par
exemple le budget. Et je ne crois pas qu'il y ait un grand inconvénient,
lorsque d’ailleurs c'est la nécessité qui le commande, à ce que la députation
règle pour une seule fois le budget de la province. (M. B., 2 juill.)
M. le vicomte Desmanet de Biesme – Il
me semble impossible qu'on donne à la députation un droit aussi exorbitant. (M.
B., 2 juill.)
M. Charles Rogier
– Je demande
comment, sans cela, on réglera le budget de 1832. (M. B., 2 juill.)
M. de Robaulx – Je remarque, messieurs, que plus nous
voulons développer notre loi fondamentale, et moins nous avançons dans notre
marche constitutionnelle. Sous la loi fondamentale de 1815, nous avions des
conseils provinciaux électifs, d'après un système vicieux sans doute, mais
enfin ils étaient nommés par le peuple, au moins en partie. Au lieu de nous
faire jouir des avantages de la loi fondamentale et sous prétexte de nous
donner les droits consacrés par la constitution, on supprime l'assemblée
générale des états et on veut donner tous les pouvoirs de cette assemblée à la
députation. Ainsi nous allons avoir des députations de cinq ou six membres pour
régler les affaires de toute une province. Il me semble, messieurs, qu'il
valait mieux conserver les conseils tels qu'ils étaient en attendant la loi
d'organisation. Que sont en effet les députations permanentes ? Elles sont
composées de députés de l'assemblée ; vous supprimez l'assemblée et vous
conservez la députation. Cela me semble tout à fait contradictoire. Je voterai
donc contre l'article et contre tout le projet si pareille doctrine y était
consacrée. (M. B., 2 juill.)
M. Van Snick combat aussi
l'amendement de M. Rogier ; il fait observer que plusieurs députations ont été
diminuées par la mort de quelques-uns de leurs membres. Dans le Hainaut, par
exemple, deux députés sont morts, et il y aurait imprudence à confier aux
membres restants la décision des affaires de la province. (M. B., 2 juill.)
M.
Charles Rogier – Si on croit dangereux de confier les affaires urgentes à la
députation, je restreindrai mon amendement au budget seul. (M. B., 2 juill.)
(page 363) M. le baron Beyts – Je demande la parole pour m'opposer à
l'amendement de M. Rogier, même avec la restriction qu'il vient d'y apporter.
Nous sommes dans la nécessité de réorganiser les conseils provinciaux, une loi
nous est proposée à cet effet, et je crains que tous ces amendements qui
disent : «En attendant la réorganisation, les pouvoirs seront exercés par
telle et telle autorité,» ne nous entraînent dans des délais interminables et
ne favorisent la paresse, sous le prétexte que les choses marcheront tant bien
que mal. Nous avons le projet ministériel, il a été présenté et renvoyé aux
sections, rien n'autorise à penser que d'ici à la fin de l'année ce projet ne
sera pas adopté et mis à exécution. On dit : « Mais il est composé de soixante
articles.» Eh ! messieurs, commençons par aborder le premier, puis le deuxième,
ainsi de suite, et nous arriverons au soixantième. (On rit.) Je m’oppose
de toutes mes forces à l'amendement de M. Rogier, parce qu'avec ces provisoires
nous n’arriverions jamais au définitif, et au lieu d'aller en avant dans notre marche
constitutionnelle, nous aurions, comme l'a très bien dit M. de Robaulx, fait
trois pas en arrière. (M. B., 2 juill.)
M.
Alexandre Rodenbach – Je m'oppose d’autant plus à l'amendement de M. Rogier, que
nous avons sur le bureau un projet présenté par le ministre de l'intérieur. Si
ce projet n'est pas trouvé bon, il en présentera un autre, puis un autre,
trois, quatre, cinq et six s'il le faut, jusqu'à ce que nous en ayons adopté
un. (Hilarité générale.) (M. B., 2 juill.)
M. Doreye –
Je m'oppose aussi à l'amendement proposé. La députation permanente n'est
qu’une émanation du conseil provincial ; elle en est pour ainsi dire la
quintessence. Comment, si vous refusez votre confiance à l'assemblée des états,
l’accorderiez-vous à la députation ? cela est impossible. Les affaires en
éprouveront du retard, dit-on ? ce sera un motif de hâter la discussion du
projet organique qui nous a été présenté. Le budget provincial n'est pas peu de
chose, messieurs ; il est pour les provinces d'un intérêt aussi majeur que le
budget du gouvernement l'est pour l'État, et je ne crois pas que les provinces
fussent contentes d’abandonner le règlement du budget à la députation. (M. B.,
2 juill.)
M.
le comte Duval de Beaulieu – Je partage entièrement l'opinion du préopinant et celle de M.
de Robaulx ; je crois comme eux qu'il y aurait inconvénient à accorder à la
députation les pouvoirs de l'assemblée. Il y a un autre inconvénient : les
assemblées des états étaient électives, il est vrai, mais le choix de la
députation était soumis à quelques influences, qui n'existent plus aujourd'hui,
à la vérité, mais qui peuvent être devenues permanentes par l'habitude. Il me
semble que l'art. 137 de la constitution, qui porte : « La loi
fondamentale du 24 août 1815 est abolie, ainsi que les statuts provinciaux et
locaux. Cependant les autorités provinciales et locales conservent leurs
attributions jusqu'à ce que la loi y ait autrement pourvu ; » il me
semble, dis-je, que cet article pourrait être simplement mis à exécution, en
déclarant que le tiers sortant des états restera jusqu'à ce que la loi
organique , ait pourvu au remplacement des états provinciaux. (M. B., 2 juill.)
M.
le baron d’Huart propose de rédiger l'article 2 en ces termes :
« Les
affaires qui devraient être soumises à ces assemblées, seront renvoyées avant
le 1er novembre prochain au conseil provincial, qui les remplacera pour cette
époque. » (A.)
M.
Charles Rogier – En proposant mon amendement, je n'ai pas entendu retarder
l'adoption de la loi organique. J'ai voulu seulement parer au cas où elle ne
serait pas rendue avant la fin de l'année. On nous dit : Elle le sera. Qui nous
le prouve ? En France on a attendu vainement pendant seize ans la loi
départementale. (M. B., 2 juill.)
M. de Robaulx – Raison de plus pour que nous
n'allions pas confier pendant quatorze ou quinze ans, si la loi n'était pas
rendue, l'administration des provinces à cinq ou six députés suspects. (M. B.,
2 juill.)
M. Fleussu combat la proposition de M. Duval de
Beaulieu, comme tendante à maintenir des mandats qui expirent cette année. Ces
mandats sont émanés du peuple, et l'honorable membre ne pense pas que le
congrès ait le droit de les proroger. (M. B., 2 juill.)
M. De Lehaye – Dans
M. le président – Voici les termes de l'amendement de
M. Duval :
« Les
états provinciaux, tels qu'ils étaient composés en 1830, se réuniront à
l'époque déterminée par la loi fondamentale de 1815, conformément à l'art. 137
de la constitution. A cet effet, le tiers qui devait être remplacé cette année
continuera provisoirement d'en faire partie. » (M. B.. 2 juill., et A.)
(page 364) M. Dubus - La question préalable ! Il ne me sera pas difficile de la
justifier. L'article proposé par M. Duval est directement contraire à ce que l'assemblée
a décidé en adoptant l'article 1er. (M. B., 2 juill.)
- On entend
sur la question préalable, M.
le comte Duval de Beaulieu, M. François Lehon, M. Deleeuw,
M. Le Bègue, M. le baron Beyts, M. le vicomte Desmanet de
Biesme, et M. François
; tous ces honorables
membres, à l'exception du premier, appuient la question préalable. (M. B., 2
juill.)
- La
question préalable est mise aux voix et adoptée. (P. V.)
On met
ensuite successivement aux voix les amendements de MM. Van Meenen et le baron
d'Huart ; ils sont rejetés. (P. V.)
L'article
2 est adopté. (P. V.)
La
disposition additionnelle proposée par M. Charles Rogier est rejetée. (P. V.)
« Art.
3. Les députations permanentes des états et les autorités qui, dans quelques
provinces, remplacent ces mêmes députations, resteront composées comme elles le
sont actuellement, et continueront leurs fonctions jusqu'à leur remplacement
par les conseils provinciaux.» (P. V.)
M. le vicomte Desmanet de Biesme – S'il manquait
des membres à la députation permanente, le gouvernement devrait-il assembler
les états et faire nommer d'autres députés ? L'article n'en dit rien. (J. B., 2
juill.)
M. Jaminé – Un seul membre de la province de Limbourg
s'est rendu à Hasselt. Le gouvernement a dû remplacer les autres, le fera-t-il
encore ? (J. B., 2 juill.)
M.
Charles Rogier – Parmi les membres actuels, il en est dont le mandat expire au
1er juillet. L'article demande explication. (J. B., 2 juill.)
M.
Frison – Depuis
une heure, nous discutons sur le projet du ministre et il n'a pas demandé une
seule fois la parole. (J. B., 2 juill.)
M. le chevalier de Sauvage, ministre de
l'intérieur – Je croyais avoir suffisamment motivé le projet. On doute que le pouvoir
constituant puisse continuer certains pouvoirs, il le peut certainement et vous
l'avez reconnu en adoptant les art. 1 et 2. On a allégué l'art. 87 de la
constitution qui abolit les statuts provinciaux et locaux ; vous ne les
continuez que pour un temps aussi court que vous le voulez ; au bout de peu de
séances, vous pourrez terminer le décret sur l’organisation provinciale. (J.
B., 2 juill.)
-
L'article 3 est adopté tel qu'il a été proposé par la section centrale. (P. V.)
Article 4
« Art.
4. Le présent décret sera obligatoire le deuxième jour après celui de sa
date. » (P. V.)
Cet
article est adopté ainsi que les considérants qui sont conçus en ces termes :
« Vu
l'art. 137 de la constitution qui abolit la loi fondamentale du 24 août 1815,
ainsi que les statuts provinciaux et locaux, et conserve néanmoins aux
autorités provinciales et locales leurs attributions jusqu'à ce que la loi y
ait autrement pourvu ;
« Considérant
que les assemblées des états provinciaux, par la sortie du tiers de leurs
membres qui doit avoir lieu cette année aux termes de l'art. 11 du règlement
pour la formation desdits états, se trouveront nécessairement incomplètes, les
élections pour le renouvellement de ce tiers n'ayant pu avoir lieu en vertu de
règlements abolis. » (P. V.)
Vote sur
l’ensemble
On
passe au vote par appel nominal sur l’ensemble du décret ; 147 membres
répondent à l'appel : 130 votent pour, 17 contre ; en
conséquence le décret est adopté. (P. V.)
Ont
voté contre : MM. Jacques, le vicomte Desmanet de Biesme, François
Lehon, Wannaar, Allard, Beaucarne, Helias d'Huddeghem, Dumont, Seron, Frison,
Van der Looy, le baron Frédéric de Sécus, de Robaulx, de Labeville, le comte Duval
de Beaulieu, Destriveaux, Picquet. (M. B., 2 juill.)
- La
séance est levée à cinq heures. (P. V.)