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Congrès
national de Belgique
Séance du
mardi 31 mai 1831
Sommaire
1) Communications des pièces
adressées au congrès
2) Propositions relatives à la mise à l'ordre du jour de la question du choix du chef de l'Etat, à l'élection du prince Léopold de
Saxe-Cobourg, aux négociations préalables
à cette élection, à l'évacuation des ennemis du territoire de
3)
Vérification des pouvoirs d’un nouveau membre du congrès (Picquet)
4)
Propositions relatives à la mise à l'ordre du jour de la question du choix du chef de l'Etat, à l'élection du prince Léopold de
Saxe-Cobourg, aux négociations
préalables à cette élection, à l'évacuation des ennemis du territoire de
(E. HUYTTENS, Discussions du Congrès national de Belgique, Bruxelles,
Société typographique belge, Adolphe Wahlen et Cie, 1844, tome 3)
(page 184) (Présidence de M. de Gerlache)
La
séance est ouverte à onze heures. (P. V.)
M. Henri de Brouckere, secrétaire, donne lecture du procès-verbal ; il
est adopté. (P. V.)
COMMUNICATION DE PIECES
ADRESSEES AU CONGRES
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII, secrétaire, lit une lettre de M.
Fontaine-Spitaels, qui déclare ne pouvoir accepter les fonctions de député. (I.,
2 juin.)
- Pris
pour notification. (P. V.)
M. Liedts, secrétaire, présente l'analyse des pétitions
suivantes :
M.
Pierre Klopfenstein, à Malines, demande des lettres de naturalisation.
Cinquante-huit
habitants de Quiévrain et soixante-huit de Genappe demandent l'élection du
prince de Saxe-Cobourg, comme roi des Belges.
M.
Prost, capitaine adjudant-major de la garde nationale de Paris, au nom du
général Gustave de Dumas, propose de fournir à
M. Henri de Brouckere, à la demande de l'assemblée, donne
lecture de la lettre de M. Prost. (I., 2 juin.)
-
Cette lettre est renvoyée à la commission des pétitions. (P. V.)
Quelques membres demandent que la commission fasse
son rapport au plus tôt. (E., 2 juin.)
M. Liedts, secrétaire, continuant l'analyse des pétitions
:
Quarante-sept
médecins et chirurgiens de Bruxelles demandent l'abolition du droit de patente
pour ceux qui exercent leur profession.
Trois
sauniers d'Alost présentent des observations concernant le projet de décret sur
le sel.
M. du
Bois-Quenesson, à Dour, fait des observations relatives à la loi de 1822 sur
les vins.
Des
distillateurs de Ruremonde présentent des observations concernant le projet de
décret sur les distilleries. (I., 2 juin, et P. V.)
- Les
pétitions sont renvoyées à la commission. (P. V.)
PROPOSITIONS
RELATIVES 1° : A
L'ordre
du jour appelle la discussion sur les propositions de MM. Constantin Rodenbach,
Van. de Weyer, Blargnies, de Robaulx et Nothomb. (I., 2 juin)
M. le président – La parole est à
M. l'abbé Dehaerne. (E., 2 juin.)
M. Constantin
Rodenbach (pour une motion d’ordre) – Je demande à faire une
motion d'ordre. Messieurs, dans la séance d'hier, plusieurs orateurs, au lieu de
discuter la priorité, ont cru devoir entamer le fond de la question ; il me
semble qu'il y aurait lieu, sauf votre approbation, d'ouvrir la discussion
générale. (Agitation.) (I., 2 juin.)
Plusieurs voix – Cela a été décidé hier. (I., 2 juin.)
M. Constantin
Rodenbach – M. Lebeau l'a proposé, mais il n'y a pas eu de décision. (I.,
2 juin.)
M. le président – M. Lebeau a
proposé et l’assemblée a décidé que la discussion serait ouverte sur le fond de
toutes les questions. (I., 2 juin.)
De toutes parts – Oui ! oui ! (I., 2 juin.)
M. Pirson (pour une
autre motion d’ordre) – Je demande la parole pour une motion d'ordre :
messieurs, je demande la permission (page
185) de faire aux
ministres quelques questions importantes ; mais comme je ne vois pas ici le ministre des affaires
étrangères, je prendrai la parole, si on me le permet, quand il sera présent. (I.,
2 juin.)
M. le président – L'assemblée veut-elle intervertir l'ordre du
jour pour entendre M. Pirson? (Oui !
oui ! Non! non! Agitation.) (I., 2 juin.)
M. Blargnies – Je pense que
les interpellations que M. Pirson se propose de faire à M. le ministre des affaires
étrangères ont pour but d’éclairer la discussion des questions
importantes dont nous cherchons la solution. J'estime donc qu’il convient d'entendre
M. Pirson, d'autant plus que le ministre n'a pas pris
ici l'initiative, puisqu’il n'a rien dit sur la lettre extraordinaire de lord
Ponsonby, et que nous avons intérêt de pénétrer ce mystère dont
s'enveloppe le ministre. (I., 2 juin.)
M. le président – Il a été convenu précédemment que, dans le cas où on aurait
des questions à adresser aux ministres, on les leur communiquerait, (Réclamations.
Non, non, ce n'est pas cela !) (E., 2
juin.)
M. le comte Duval de
Beaulieu – Il s’agit ici de la question de priorité.
Pour savoir s’il faut entendre M. Pirson, il suffit d'examiner si ses questions ont
rapport
à la question de priorité. (I., 2 juin.)
M. le président – Il paraît que quelques membres croient encore qu'il ne
s'agit que de discuter la question de priorité, je vais consulter l’assemblée pour qu'elle
décide une fois pour toutes que la discussion a lieu sur le fond. (I., 2
juin.)
- L’épreuve est faite par assis et levé, l'assemblée le que la
discussion au fond est ouverte.
M. Pirson sera entendu. (I., 2 juin.)
M.
Camille de Smet, rapporteur de la commission pour la vérification des
pouvoirs des élus et suppléants élus par la province de Hainaut propose
l'admission de M. Picquet, député suppléant de Mons, en
remplacement de M. Fontaine-Spitaels, non-acceptation. (E., 2 juin.)
- Cette admission est prononcée. (P. V.)
PROPOSITIONS
RELATIVES 1° : A
Discussion générale
M. l’abbé Dehaerne – Messieurs, j'ai
toujours cru qu'un peuple sortant d'une révolution devait faire ses affaires
lui-même et ne recourir à la diplomatie qu'après avoir obtenu par la force ce
qui lui revient de droit. C'est pour nous isoler le plus possible de l'action
des puissances hostiles à notre révolution que j'ai voté pour la république ;
c'est encore pour cette raison que j'ai soutenu, aussi longtemps qu'il y avait
quelque espoir de réussite, la candidature d'un prince indigène, et qu'enfin,
lorsqu'il a fallu renoncer à la monarchie indigène comme à la république, j'ai
préféré le candidat qui était le moins en contact avec nos ennemis de
Voix nombreuses – Parlez
! parlez ! (I., 2 juin.)
(page 186) M. le président –
C'est l'opinion de
l'orateur, on ne peut l'interrompre. (J. F., suppl., 3 juin.)
M. Alexandre Gendebien
– Les opinions sont
libres, il faut les respecter. (Parlez ! parlez !) (I., 2
juin.)
M. l’abbé Dehaerne – C'est là ma
conviction, vous avez la faculté de la combattre.
L'orateur
continuant – Si vous demandez à notre ministre si le prince voudrait bien
accepter la couronne que nous lui présenterions, quelle est sa réponse ? Que le
prince n'acceptera en tout cas que s'il est élu par une grande majorité du
congrès qui fasse connaître l'assentiment général de la nation, c'est-à-dire,
selon moi, qu'il se réserve une belle excuse pour refuser quand il le jugera à
propos. Et comment le prince de Saxe-Cobourg aurait-il pour lui l'assentiment
unanime de la nation, lorsque presque tous les membres du congrès avouent
ingénument que ce choix n'est pas actuellement national, quoique l'homme qu'ils
choisissent puisse devenir plus tard l'homme de la nation ?
On ne
peut pas se dissimuler, messieurs, que l'opinion catholique, qui est l'opinion
des masses, l'opinion de la nation, si jamais il y eut une opinion unanime dans
une nation quelconque, se prononce contre la candidature du prince Léopold.
Cette opinion, il.est vrai, ne se manifeste pas jusqu’à présent avec violence :
mais elle n'en existe pas moins réellement, et elle éclatera à la première
occasion, comme elle a éclaté contre le roi Guillaume par les nombreuses
pétitions qui ont été notre révolution légale et le prélude des barricades. Il
est vrai, messieurs., que les journaux anglais, en voyant arriver à Londres nos
commissaires, qu'ils prenaient pour les représentants de l'opinion catholique,
se sont extasiés sur notre esprit de tolérance et sont revenus à l'instant de
l'opinion qu'ils avaient de la bigoterie des Belges. Voilà, se sont-ils dit, un
peuple éclairé qui ne tient aucun compte de la religion dans le choix de son
souverain, et qui même, en renonçant à toutes les candidatures catholiques
qu'il pourrait trouver ou chez lui ou à l'étranger, semble venir de préférence
déposer la couronne aux pieds d'un prince protestant. Qu'on dise encore que
c'est là un peuple fanatique et qui n'a fait sa révolution qu'au profit de la
liberté religieuse ! Voilà, messieurs, le compliment qu'on nous fait ; je ne
sais jusqu'à quel point vous en êtes flattés. Toujours est-il que ni les
Anglais, ni les Allemands, ni peut-être aucune autre nation ne pousseraient la
tolérance à ce point, et qu'il est inouï qu'un peuple ait choisi librement un
roi qui ne partageât pas ses opinions religieuses.
Je
vous le demande, messieurs, s'il en faudrait davantage en Angleterre pour faire
éclater une révolution, et pour mettre tout le royaume sens dessus dessous, que
de proposer un roi catholique ? Je ne vous citerai pas
Messieurs,
sachons comprendre le mouvement qui emporte l'Europe. Que veulent les peuples
en se jetant au milieu des hasards des révolutions ? Ils veulent revenir à
leurs anciennes habitudes dont la centralisation européenne, système de
Irez-vous,
messieurs, contester ce droit, parce que ces coutumes ne sont pas les vôtres ?
Irez-vous anéantir ces libertés parce que vous y êtes indifférents pour
vous-mêmes ? Certainement non. Eh bien, messieurs, il en est de même du droit
que réclame une nation d'avoir un souverain de sa religion.
(page 187) Vous ne m'accuserez pas ici qu'en me déclarant pour un
roi catholique j’aie l'intention de vouloir placer la religion sous la tutelle
du chef de l'État. Je me suis expliqué assez ouvertement à cet égard dans
d'autres circonstances. Je vous ai dit, messieurs, que la vérité subsiste et se
propage par elle-même, et qu'elle n'a besoin pour cela d'autre protection, que
c'est avilir et ravaler la religion que de la faire dépendre de l'appui d'un
bras de chair. Loin de moi, messieurs, l’idée de demander une protection
spéciale pour la religion catholique, dont je me fais gloire d'être le ministre
; je crois au contraire que rien ne peut lui être plus funeste que les faveurs
du pouvoir.
Aussi,
messieurs, quand les catholiques demandent un chef de leur religion, ce n'est
pas pour l’investir du protectorat de leurs croyances et de leur culte, mais
parce qu'ils croient trouver en lui plus de garanties pour la liberté
religieuse, garanties auxquelles certainement ils ont droit, lorsqu'ils forment
la presque totalité de la population.
On
nous a fait entendre que, pour être bons unionistes nous ne pouvions pas
préférer un prince catholique à un protestant. On pourrait prouver de la même
manière que, pour être unionistes, nous devons être fort indifférents au choix
des fonctionnaires, et qu'en vertu des principes de l’union, nous n'aurions
rien à redire à ce que toutes les places fussent occupées par des
anticatholiques et que les bons unionistes fussent mis de côté. Messieurs ceux
qui interprètent l'unionisme de cette manière ont peut-être intérêt de le
faire, mais ce n'est pas ainsi que nous autres catholiques, nous entendons ces
maximes. Nous voulons l’union comme nous l'avons toujours voulue, mais non pas
au point de sacrifier pour elle tous nos intérêts. Il est possible que quelques
libéraux non catholiques s'imaginent que nous ayons plus besoin d'eux qu'ils
n'ont besoin de nous, et qu'ils croient nous faire peur en nous menaçant de
nous abandonner. Nous ne voulons rompre avec personne, parce que l'union est
dans les principes de la tolérance et du christianisme ; nous craignons même
tout ce qui pourrait avoir l'ombre d'une division : mais cependant, messieurs,
cette crainte ne va pas si loin qu'on pourrait le croire ; car nous sommes
persuadés que, si ces messieurs croyaient pouvoir se passer de nous à présent,
le moment se présenterait bientôt où ils auraient besoin de nous, et où ils
nous tendraient la main pour marcher ensemble à la conquête de nos libertés
communes. Et pour en revenir à ce qui regarde le chef de l'État, à qui est-ce à
céder en vertu des principes de l'union ? aux catholiques qui forment la grande
majorité de la nation, ou bien aux libéraux anticatholiques ? Certainement la
question ne peut pas rester longtemps douteuse.
Messieurs,
si j'ai été un peu long à traiter la question sous son rapport religieux, c'est
parce que, sous ce rapport, je la crois d'un plus grand intérêt que plusieurs
membres de cette assemblée ne semblent le penser, et que je crois que c'est
parce que le prince Léopold en apprécie si bien l'importance qu'il a dit, sans
doute pour plus d'une raison, mais pour celle-ci en particulier, qu'il
n'accepterait la couronne qu'avec l'assurance qu'elle lui serait déférée avec
l'assentiment unanime de la nation. Je ne sais comment on lui a représenté
l'opinion catholique, mais il aura sans doute appris par les journaux que tous
les catholiques belges préféreraient infiniment un souverain catholique à un
souverain protestant. J'en conclus, messieurs, que lorsque le prince sera bien
informé de l'état des esprits en Belgique, ce sera un des motifs qu'il
alléguera pour refuser la couronne que nous lui aurons offerte.
Et
qu'on ne se fasse pas illusion, messieurs, sur la certitude du refus ! Il est
un fait incontestable, c'est que le prince de Saxe-Cobourg n'acceptera jamais
contre le gré des puissances. Or, messieurs, à quelle condition les puissances
nous l'accorderont-elles, supposé qu'elles aient jamais pensé à nous l'accorder
? à condition que nous acceptions les protocoles, auxquels elles tiennent
toujours avec la même opiniâtreté. Je ne vous répéterai pas, messieurs, tous
les arguments qu'a fait valoir M. Jottrand sur ce point ; je ne vous dirai pas
que toutes les pièces qu'on voudrait faire valoir pour démontrer qu'il a été
dérogé aux protocoles, démontrent au contraire qu'ils subsistent toujours, et
qu'on voudrait nous y faire souscrire d'une manière indirecte. Si les
puissances, messieurs, voulaient notre liberté, si elles respectaient notre
constitution et notre indépendance, que ne nous laissent-elles choisir un chef indigène
? Qu'elles fassent un peu de diplomatie à cet égard ! qu'elles nous indiquent
seulement le candidat qui leur serait agréable, et dans vingt-quatre heures
nous sommes constitués. Or, messieurs, de ce que les puissances n'agissent pas
ainsi envers nous, j'en conclus qu'elles sont hostiles à nos libertés et à
notre indépendance, et que nous n'obtiendrons ces choses que lorsque nous les
prendrons de force.
C'est
là qu'il faudra en venir enfin. Soit que le prince Léopold accepte ou n'accepte
pas, nous ne pourrons terminer nos affaires que par la guerre, à moins que nous
ne voulions courber la tête (page 188)
devant
-
Pendant ce discours, M. Lebeau, ministre des affaires étrangères, est entré
dans la salle.
M. le président annonce que la
parole est à M. Blargnies. (E., 2 juin.)
M. Pirson réclame la parole pour poser
ses questions, le ministre des affaires étrangères étant présent. (Mouvements
divers.) On finit par accéder à ce que demande M. Pirson, qui s'exprime
ainsi - Messieurs, sans ministre de la guerre (il arrive tout essoufflé, car il
est resté plusieurs jours en route) ;
Sans
ministre des finances (il a donné sa démission hier) ;
On ne
peut pas faire la guerre avec assurance.
Sans
ministre des relations extérieures, on ne peut contre-protocoliser.
Je
demande à M. le ministre des relations extérieures combien de temps encore il
espère ou il croit rester ministre. (Grande rumeur dans une partie de la
salle.) Ne murmurez pas, messieurs ; ma question n'est pas aussi saugrenue
qu'elle vous le paraît.
Au
milieu de tous nos embarras, des menaces qui nous viennent de tous côtés,
d'accusations de toutes espèces ; ne voyez-vous pas qu'on organise l'anarchie :
pardonnez-moi le terme, il implique contradiction, mais il rend bien l'idée de
l'anarchie concertée et méditée, plus dangereuse que celle provenant de
quelques malheureux excités dans la rue. Au reste, je passe à une question plus
sérieuse.
Je
prie M. le ministre des affaires étrangères de nous dire si c'est lui qui a
engagé notre collègue M. Nothomb, son secrétaire général, à proposer au congrès
d'autoriser le gouvernement de proposer (à la conférence), que, sans préjudice
à sa souveraineté, il soit mis temporairement dans la forteresse de Maestricht,
une garnison mixte étrangère quelconque autre que hollandaise. (J. F., 2
juin.)
M. Henri de Brouckere – Je m'oppose à la position des
questions du préopinant. Chaque membre ici a le droit de faire les propositions
qu'il juge convenable, et personne n'a le droit de lui demander pourquoi ni à
l'instigation de qui il les fait. Les questions de M. Pirson me paraissent tout
à fait déplacées ; je demande l'ordre du jour. (Appuyé ! appuyé
!) (I., 2 juin.)
M. Lebeau, ministre des affaires étrangères,
se lève pour répondre. (I., 2 juin.)
De toutes parts – C'est
inutile ! c'est inutile ! (I., 2 juin.)
M. Nothomb – Je demande la parole pour un fait personnel.
(Non, c'est inutile /) Mais c'est moi qu'on accuse. (I., 2 juin.)
Un grand nombre de voix – C'est inutile ! c'est inutile ! (Grand tumulte.) (I., 2
juin.)
M. Pirson, au milieu du bruit – Je
demande acte du refus de M. le ministre des affaires étrangères de répondre à
mes questions. (Oh ! oh ! violents murmures.) (I., 2 juin.)
M. Lebeau, ministre des affaires étrangères
– Je demande acte de la déclaration que je fais que je suis prêt à répondre aux
questions de M. Pirson, quoique je les trouve fort peu parlementaires. (I., 2 juin.)
-
L'assemblée passe à l'ordre du jour.
M. le président – M. Blargnies a
la parole. (J. D.. 2 juin.)
M.
Blargnies – Messieurs, je demande la priorité pour la proposition que
j'ai eu l'honneur de vous faire.
La
conférence de Londres veut se débarrasser (page
189) momentanément de nous, et de ce
quelque chose p populaire que nous présentons, comme par hasard, au sein
de l'Europe.
Quant
à nous dire le définitif qu'elle nous destine, elle attend meilleure occasion.
Pouvez-vous
croire sincèrement que
Je
vois l'Angleterre, l'Autriche,
Tout
ce qui nous vient de la conférence doit donc exciter notre défiance, et nous
forcer à agir comme si elle voulait nous tromper. Car au fond c’est son
intention, c'est son but.
Pouvez-vous
croire à la sincérité des promesses de la diplomatie relativement à l'élection
du prince de Saxe-Cobourg, lorsque vous voyez notre ministère se décharger sur
vous de toute responsabilité à cet égard, cherchant â se cacher au milieu d'une
majorité, ne pas oser prendre sur lui de vous conseiller l'élection ?
Je
suis avocat ; j'ai étudié les pièces du procès avec la plus scrupuleuse
attention.
Je
vois, d'un côté, des protocoles, des actes authentiques signés des cinq grandes
puissances l'Europe et acceptés par la. Hollande ; leur examen m'a convaincu
que nous devons renoncer au Limbourg, à la rive gauche de l'Escaut, au
Luxembourg, et payer une partie de la dette hollandaise.
D'un
autre côté, je vois des lettres particulières de M. Belliard et de lord
Ponsonby , qui nous font entrevoir l'espérance du rachat du Luxembourg,
pour des indemnités dont nous ne connaissons pas, dont vous ne voulez pas
connaître les bases et sur la fixation desquelles le roi Guillaume aura trop à
dire.
Je ne
serais pas grand partisan d'un roi régnant de par
Telle
est la question.
Quels
résultats, je vous le demande, aura produits la révolution dans
Elle y
aura maintenu la quiétude de tous les ennemis des changements politiques.
Elle y
aura comblé, trop tôt sans doute, les espérances d'une foule de partisans
intéressés d'une Belgique quelconque.
Elle y
aura satisfait les vœux des catholiques par la liberté des cultes, des opinions
religieuses, de l'enseignement et des associations.
Serait-ce
une raison pour abandonner les points de notre territoire, sans la possession
desquels il n'y a pas de prospérité possible pour une grande partie de nos
industriels ? Livrerons-nous à l'ennemi un grand nombre de nos frères ?
Ouvrirons-nous
Je
ferais une trop sanglante injure aux catholiques et à ceux qui jouissent des
bienfaits de la révolution, si je leur prêtais de telles intentions.
Le
prince de Saxe-Cobourg a compris qu'il devait régner sur
Il ne
peut honorablement accepter notre couronne qu'à la condition de vider à notre
avantage la question de territoire que nous confessons ne pouvoir résoudre
nous-mêmes.
Il va
donc négocier et engager contre les protocoles la lutte que nous avions
hautement proclamé devoir se décider par l'épée de nos braves. (Nouvelle
sensation.)
Nous
le suivrons de nos vœux, dans cette guerre vraiment révolutionnaire et de
nouvelle espèce.
Il
aura devant lui le roi Guillaume et tous les princes de l'Europe.
La
question du Luxembourg dure depuis plusieurs mois ; elle est loin d'être
aplanie, et l'on a eu à peine le temps de qualifier celle du Limbourg,
que l'on dit européenne.
Je
souhaite beaucoup de patience à ce bon prince, mais je pense que s'il ne vient
ici qu'après avoir l'emporté la victoire, nous ne le verrons jamais.
Ne
vaut-il pas mieux employer une partie du temps précieux que nous allons perdre
à nous assurer que l'élection du prince nous donnera l'intégrité du territoire
? N'est-ce pas là le parti le plus sage et le plus digne de vous ? Ne
ferez-vous donc plus aucun effort pour conserver le Limbourg, aujourd’hui que
vous le voyez vous échapper pour (page
190) toujours, et avec lui l'honneur de la révolution ?
Que
dira-t-on de nous, que deviendrons-nous, nous qui craignons l'anarchie, si après
de longues négociations le prince refusait notre couronne ou disait ne pouvoir
l'accepter qu'à des conditions, qu'à l'avance je qualifierai de déplorables
? Après avoir épuisé la coupe des humiliations, il faudrait passer sous les
Fourches Caudines, avouer qu'une révolution était au-dessus de nos forces, ou
nous jeter dans les dangers d'une guerre peut-être impossible alors.
. Nous
avons perdu trop de temps ; mettons à profit celui qui nous reste ; sachons
reconnaître que toute notre force est dans la crainte que nous n'allumions une
guerre générale ; ayons au moins la politique de profiter de cette position, et
ne nous hâtons pas de nous livrer pieds et poings liés à
Les
partisans de l'élection immédiate disent que nous allons faire preuve de bonne
volonté envers les grandes puissances, et nous concilier leur bienveillance ; -
je crains bien que cette bonne volonté ne soit prise pour faiblesse et acte
d'impuissance ;
Que
nous leur ôterons la crainte que le prince ne soit pas élu par le congrès,
après qu'elles auraient satisfait à nos réclamations, - comme s'il ne leur
était pas facile de mettre l'élection du prince pour condition à leur décision,
qu'elles prendraient dans notre intérêt ;
Que
nous aurons dans le prince un représentant à Londres. - On regardera comme gens
de bien bonne composition, des révolutionnaires forcés de se donner un tuteur
royal près
De ces
jolis raisonnements, des idées de lord Ponsonby et de la missive non signée de
M. Belliard, on conclut qu'il est infiniment probable que le prince, devenu
roi, nous procurera l'intégrité de notre territoire et nous délivrera de la
dette hollandaise.
On
n'oublie, dans ce gentil petit cadre, que la volonté immuable des cinq grandes
puissances, les protocoles et le Je maintiendrai, de notre ancien roi !
Messieurs,
je ne sais pas, je ne veux pas me faire illusion à ce point.
Je ne
crois pas encore la partie désespérée ou perdue.
Ne
nous abandonnons pas si facilement à la conférence et à ses menaces ;
rappelons-nous le passé.
Ayons
aussi un peu de politique, on ne s'en fait pas faute contre nous.
Le prince
est le candidat de l'Angleterre ; il importe à cette puissance qu'il règne
à Bruxelles, qu'il nous éloigne de
Si
nous élisons immédiatement, sans protester contre la lettre de lord Ponsonby,
nous nous lions envers les cinq puissances, nous nous abandonnons à leur bon
plaisir pour le territoire et la dette ; réclamez ensuite vos limites, et vous
verrez si l'Angleterre,
Par
l'élection immédiate, nous sortons de la révolution, avant d'avoir tenté aucun effort digne de
nous pour la conservation de notre territoire, de nos finances et de notre
commerce ; nous ne faisons pas seulement acte de bonne volonté,. Nous cédons
volontairement ; nous décourageons l’armée et les volontaires ; nous perdons
toute force morale, toute consistance à l'intérieur et au dehors.
Notre force
est dans la crainte d'une réunion à
De
deux choses l’une : ou l'on dit vrai, quand on affirme que l'on veut de la
paix à tout prix, et dans cette hypothèse l'on ne s'engagera pas dans une
guerre générale pour notre querelle avec
Deux
mots encore : Vous regardez et les diplomates étrangers regardent le prince
comme seul et unique moyen de récupérer le Luxembourg et le Limbourg : je ne
veux pas user le moyen avant de l’avoir employé ; or c'est l'user, ce moyen,
que de satisfaire ceux sur qui il doit agir avant d'avoir obtenu le prix de
cette satisfaction.
Il me
reste un argument à opposer à nos adversaires.
Dans
mon opinion, élire immédiatement c'est (page
191) reconnaître les protocoles, c'est au moins exposer le territoire à un
démembrement certain ; c'est se mettre en contradiction avec les plus beaux
actes du congrès, avec les grandes vérités qu'il a proclamées.
Rappelons-nous
que le comité diplomatique, dans une note verbale du 3 janvier 1831, protesta contre
le renouvellement du système de 1814 et 1815, revendiqua le grand-duché de
Luxembourg, le Limbourg et la rive gauche de l'Escaut, et insista sur la
prompte ouverture de ce fleuve.
Cette
note fut ignominieusement renvoyée par la conférence.
« Les
commissaires envoyés à Londres, y est-il dit, sont munis d'instructions suffisantes
pour être entendus sur toutes les affaires de
Le 6
janvier, une note signée Sylvain Van de Weyer et H. Vilain XIIII revient
avec plus de force sur les mêmes principes. - L'orateur en cite les passages
les plus saillants.
Enfin,
ajoute l'honorable membre, par une décision solennelle du 1er février, vous avez protesté contre le protocole du 20
du même mois, que la lettre de lord Ponsonby et le protocole n°22 nous
présentent aujourd'hui comme irrévocable.
Il est
bon de remettre sous vos yeux quelques-uns des termes de cette protestation :
« Considérant,
disiez-vous, que ce n'est point par un système de conquête et d'agrandissement que
le peuple belge comprend dans son territoire le grand-duché de Luxembourg, le
Limbourg et la rive gauche de l'Escaut, mais en vertu du droit de postliminie
ou par suite de cession ;
« Qu'en
effet le grand-duché de Luxembourg et la majeure partie du Limbourg ont
appartenu à l’ancienne Belgique et se sont spontanément associés à la
révolution belge de 1830, etc. »
Voilà
les prémisses honorables que vous avez établies vous-mêmes, et j'espère que
vous n'en dévierez pas, si vous ne voulez déshonorer la nation.
Je
viens de vous indiquer le véritable sens de ma proposition.
Elle
ne tend pas à nous jeter dans les lenteurs des négociations.
Elle a
pour but de rendre le rôle de la diplomatie beaucoup plus court.
Je
voudrais que la conférence fût placée dans la nécessité de décider, sous très
peu de jours, si les sacrifices auxquels nous consentirons peuvent ou non nous
assurer et le roi et le territoire ; car je ne vois pas le terme des
négociations que le prince Léopold doit entamer, s'il est élu avant la solution
des questions de territoire, et pour rendre sa tâche plus facile et son
intervention plus efficace, il convient, selon moi, de lui donner des bases de
transaction. (E., 2 juin.)
M. Henri de Brouckere – Messieurs, ainsi que j'ai eu
l'honneur de le dire hier, mon intention n'était pas de prendre la parole dans
cette discussion, parce que j'ai déjà fait connaître mon opinion en faveur de
l'élection du prince de Saxe-Cobourg ; mais un orateur, entendu hier, a avancé
sur la province de Limbourg des faits inexacts et qui méritent une réponse. Je
vous prie de vouloir bien me prêter quelques moments d'attention.
S'il
faut en croire l'honorable orateur, les prétentions de
Messieurs,
avant de vous dire quelles sont les vues de
Quant
aux droits de
En
adhérant au protocole pour ce qui concerne le Limbourg, nous nous livrerions à
la discrétion de la conférence, sous ce rapport ; c'est elle qui déciderait en
dernier ressort quelles villes appartiendraient à
Mais,
dira-t-on peut-être, vous n'adhérez pas au protocole et vous ne voulez pas la
guerre. Cependant on ne vous laisse que cette alternative ; vous serez donc
forcés de faire la guerre ? Non, messieurs, et en vain le diplomate anglais,
par sa lettre, que je ne sais comment qualifier, et qui n'est qu'un tissu de
contradictions bizarres et (page 193)
choquantes, vous dit qu'à moins que
M. Van Hoobrouck de Mooreghem renonce à la
parole. (J. B., 2 juin.)
M. le baron de Leuze craint la guerre et
ses calamités. Il dit qu'en 1790 le maréchal Felder arriva si vite que l'on dit
qu'il avait des bottes de sept lieues. Cependant Léopold d'Autriche nous traita
comme ses enfants, et nous donna pour nous gouverner son fils l'archiduc
Charles, que vous avez trouvé trop grand pour nous gouverner. (Explosion
d'éclats de rire.) L'orateur continue en disant que la guerre est toujours
comparée aux plus cruels fléaux, la famine et la peste. Que faut-il faire, dit
l'orateur, traiter, ou modifier notre constitution ? (Oh ! oh ! Murmure
général.) Je le déclare, je veux la paix ; que faut-il faire encore ? le
roi… (Rire général.) (J. F., 2 juin.)
M. le baron de Sécus (père) – La conférence
prend pour base les traités existants. La république française, qui certes
attachait de l'importance à la souveraineté du peuple, reconnaissait les
traités. Mais ces traités peuvent être modifiés par d'autres traités, et la
conférence ne laisse pas d'être disposée à remédier aux choses qui peuvent être
contraires aux intérêts de
M.
Fransman vote
en faveur de l'élection immédiate, et pour qu'on obtienne les pays contestés
par des négociations dont il attend un heureux résultat. (I., 2 juin.)
M. Demelin exprime en peu de mots les
mêmes vœux que le préopinant. (I., 2 juin.)
M. de Robaulx – Messieurs, trois propositions
principales vous sont soumises : les uns, sans égard à la situation actuelle des
affaires européennes, sans prendre garde aux pièges que vous tend
D'autres,
moins confiants dans les notes verbales et les lettres officieuses fabriquées
pour l'opportunité des circonstances, demandent qu'avant (page 194) l'élection d'un chef présenté par la conférence de
Londres, le congrès belge règle les arrangements qui facilitent l'acceptation
de la couronne.
Une
troisième proposition (c'est la mienne) a pour but de charger le pouvoir
exécutif de prendre immédiatement des mesures, même par la force, pour chasser
les Hollandais de notre territoire.
Avant
d'examiner à fond chacune de ces propositions, ainsi que leurs variantes, le
congrès doit décider celle à laquelle il veut accorder la priorité.
Cette
discussion, que je ne considérais que comme un point purement d'ordre et ne
préjugeant rien, a cependant été entamée avec tant de soin et d'importance par
tous les orateurs qui m'ont précédé, qu'il est maintenant impossible de ne pas
la regarder comme devant exprimer l'opinion du congrès sur la marche que doit
suivre le gouvernement.
Tel
est le motif qui m'engage dès à présent à exprimer mon avis sur l'opportunité
et les résultats probables de ces propositions.
Sans
examiner si le prince de Saxe-Cobourg, par son origine, sa position et ses
antécédents, est le chef qui convient à
Sans
examiner si cette candidature n'est pas un nouveau stratagème politique,
possibilité que nous devons conserver pour exercer quelque influence sur les
négociations. Voilà pour l'élection immédiate de Saxe-Cobourg, première
proposition.
Quant
à la proposition de M. Blargnies, abstraction faite du nom propre qu'elle
contient, ce que je viens de dire prouve que je lui donnerais mon suffrage, si
le congrès jugeait encore à propos de faire de la diplomatie et mettait son veto
à la guerre d'expulsion, que je considère comme ardemment désirée par la
nation.
Pour
ce qui regarde la proposition que j'ai faite, tendant à reprendre les
hostilités contre les Hollandais qui occupent encore quelques points de notre
territoire, j'ai déjà donné les principaux motifs qui l'appuient, je m'y réfère
; j'ajouterai cependant .quelques considérations.
En
fait de révolutions, on l'a souvent dit, il faut marcher droit à son but, il
faut renverser, sans aucun égard, tous les obstacles pour l'atteindre ;
s'arrêter, c'est perdre du terrain ; c'est reculer ; nous en avons la
preuve chez nous.
Si la
révolution avait été continuée par ceux qui l'ont entreprise, si l'ardeur de
nos volontaires n'avait été paralysée par une malencontreuse suspension d'armes
dont il est réservé à l'histoire de qualifier les causes, n'est-il pas évident
qu'aujourd'hui nous serions constitués, après avoir nous-mêmes dicté les
conditions, tandis qu'à présent on veut les imposer ? On exige même de nous la
dernière des infamies : on veut que nous livrions aux bourreaux de Guillaume
les révolutionnaires de Venloo et du Luxembourg... ce sont nos frères
cependant. On a beau ergoter pour pallier ce résultat, il n'est que trop vrai,
c'est là où l'on nous mène en attendant pis.
Depuis
que les hommes de la révolution se sont adjoint les aristocraties de noblesse
et d'argent, ils ont été peu à peu expulsés du pouvoir ; les timides se
sont montrés en majorité, ils ont tout envahi ; la révolution, qui ne s'était
sans doute pas faite par eux, a été faussée par leurs tergiversations et leurs
faiblesses. Pour peu que cela continue, la trahison pourra venir couronner
l'œuvre.
En
novembre dernier il fallait à tout prix arrêter le torrent de la révolution
belge, on a inventé un armistice ; aujourd'hui ce moyen est usé, le voile est
déchiré ; il est constant que nous avons été dupes ; on s'aperçoit que la
nation irritée se prépare à se débarrasser de ses entraves, vite, de par
Je
crains d'autant moins cette combinaison que, comme le disait M. Lebeau, séance
du 19 janvier,
Alors
l'inquiétude et la défiance se propageront, le peuple ne pourra entrevoir le
terme de ses souffrances, l'industrie abattue ne se relèvera pas, et dans
quelques semaines la misère publique amènera l'anarchie, but unique des
partisans de la restauration.
La
position que je conseille au congrès de prendre, est plus rassurante pour la
nation : en décrétant l'expulsion des Hollandais, nous donnerons la preuve que
nous voulons en effet achever la révolution et fixer les destinées du
pays ; et, en nous bornant là, nous donnons aux puissances une juste idée et de
notre énergie et de notre modération, en ne faisant pas de conquête.
Si,
comme je n'en doute pas, nous devons tôt ou tard en finir par les armes avec
les Hollandais, puisque les négociations de six mois n'ont rien produit,
j'estime qu'il est nécessaire de profiter de la saison favorable pour la guerre
; et puisque notre armée, qui est sur le pied de guerre, coûte immensément à
l'État, il faut l'utiliser ; sinon les douze millions que vous avez votés
seront bientôt absorbés, et il faudra avoir recours à de nouveaux sacrifices, à
des contributions nouvelles, que la nation supportera à regret parce que ce
sera votre faute.
Si
vous adoptez les propositions qui ramènent de nouvelles négociations pour une
élection inconsidérée, vous assumez une immense responsabilité que je ne
partagerai point : en temporisant de nouveau, vous préparez pour l'hiver
prochain une situation terrible à cause du dénuement complet des classes
inférieures de la société.
En
demandant la guerre d'expulsion contre les Hollandais, je crois satisfaire à l'honneur
national. C’est à ce titre que je persiste. (Applaudissements dans la salle
et dans les tribunes. )
En
effet, quoi qu'en aient dit les ministres et les acolytes de la diplomatie, il
est constant que le protocole du 20 janvier est et demeure la règle invariable
dont la conférence de Londres ne veut pas se départir pour la fixation de nos
limites, et l’on veut nous tromper quand on dit que la lettre de lord Ponsonby
est une preuve que le protocole 20 janvier est abandonné par la conférence,
tandis que le protocole n° 22 , qui a, je crois. pour date le 11 mai, confirme
le premier, le déclare irrévocable et charge lord Ponsonby, qui l'a en
poche, de nous le signifier.
Il est
irrévocable comme volonté et principe des puissances qui nous sont
contraires.
Il est
irrévocable parce qu'il est accepté par le roi Guillaume, qui ne
renoncera jamais volontairement à Maestricht, position militaire et
commerciale..
Il est
irrévocable puisqu'un ministre n'a pas osé, sur interpellation de M.
Rodenbach, prendre sous sa responsabilité d'assurer que la lettre de lord
Ponsonby y déroge.
Il est
certain aussi que le prince de Saxe-Cobourg n'acceptera pas la couronne sans
l'assentiment de la conférence, qui, à son tour, a déclaré, par le protocole n°
22, qu'elle ne reconnaîtrait pas le souverain de
Ces
faits posés, il en résulte que si vous procédez à l'élection avant tout
arrangement, vous devez négocier après l'élection pour aplanir l'acceptation, que
je regarde comme impossible ; et alors de deux choses l’une : ou le congrès
maintiendra l'intégrité du territoire et rejettera le protocole du 20 janvier ;
ou par lassitude, par crainte ou autrement, il adhérera au protocole.
Dans
le premier cas, le prince refusera, parce que, comme il l'a dit, il ne veut pas
nous apporter la guerre, lui qui ne veut régner qu'en paix ; et pour lors ce
refus, qui n'arrivera qu'après des négociations assez longues, jettera le pays
dans une crise qu'il aura droit de nous reprocher.
Dans
le second cas, c'est-à-dire si le congrès pouvait adhérer au protocole, il
s'ensuivrait que l'élection aurait été faite par vingt-cinq députés étrangers à
Voilà
un des inconvénients inséparables d'une élection prématurée et irréfléchie :
ajoutez à cela qu'en nommant Saxe-Cobourg avec les dispositions qu'il a
manifestées, c'est nous livrer sans défense à la merci des puissances ; c'est
renoncer à la menace de la république ou de la réunion à
M. Van de Weyer – Messieurs, je
tâcherai d'être court, et je me renfermerai dans l'examen des cinq propositions.
Je commence par déclarer que le champ de la discussion a été tout à fait
méconnu. On vous a dit que nous voulions que le (page 196) prince de Saxe-Cobourg fût élu immédiatement et sans
condition. On vous a dit qu'il s'agissait d'accepter le protocole du 20 janvier
et de renoncer aux protestations énergiques qui furent faites contre ce
protocole, et qu'a si bien fait ressortir notre collègue M. Blargnies. Eh bien,
messieurs, je le déclare, s'il fallait désavouer ces actes qui font la gloire
de
Je
sais bien, messieurs, qu'il est facile, qu'en jetant dans un discours quelques
mots brillants, qu'en prononçant les mots de guerre, de conquête, de gloire, on
peut acquérir vingt-quatre jours de popularité. Lorsque la trompette sonne, un
cheval fougueux frappe du pied, ses yeux brillent, sa crinière se dresse, ses
naseaux s'élargissent. Ainsi, au mot de guerre, le Belge lève la tête, son cœur
bat, il brûle de voler au champ d'honneur ; mais, messieurs, l'homme qui tient
entre ses mains la gloire et le bonheur de son pays doit être plus calme. Ce
n'est pas moi qui ai exposé ma tête pendant la révolution, ce n'est pas moi qui
ai fait tous mes efforts pour en assurer le succès, qui dirai : Périsse
J'examinerai
maintenant la proposition de M. Blargnies, proposition qu'il nous a présentée
avec tant d'énergie et tant de lucidité, et, je me hâte de le dire, si cette
proposition ne devait pas nous faire perdre trop de temps en négociations, je
m'empresserais de l'adopter ; mais elle a ce tort à mes yeux, que, loin
d'abréger les négociations, elle tend à les allonger indéfiniment :
inconvénient grave au moment où toutes les mesures à prendre doivent être
courtes et rapides.
Ici
l'orateur rappelle la proposition de M. Blargnies et ajoute – Eh bien, avant
que vous n’ayez arrêté les bases des indemnités, avant que vous n'ayez soumis
vos propositions à la conférence ; avant que vous n'ayez reçu la réponse
de Londres, il s'écoulera bien du temps, pendant lequel nous serons précisément
dans ce provisoire contre lequel on crie si fort et avec tant de raison. Avec
notre mode, au contraire, nous nous constituons promptement, et nous donnons à
la conférence une garantie que nous ne voulons point de réunion à
La proposition qui vous a été faite de
reprendre les hostilités et d'expulser les Hollandais du territoire, me paraît
dangereuse, et de plus elle n'atteint pas le but qu'elle se propose. Je
suppose effectivement que nous nous soyons rendus maîtres de Maestricht, de la
citadelle d'Anvers, en un mot que toute
On vous
a cité des exemples. On vous a parlé de
Je
pense donc qu'il convient de procéder sans délai à l'élection du prince de
Saxe-Cobourg, en fixant un délai pour le terme des négociations, avec cette
condition que si elles n'étaient pas honorables pour
M. d’Elhoungne – Messieurs, dire que je ne partage pas
la confiance que l'un des honorables préopinants a manifestée en faveur des
agents de la diplomatie, c'est assez dire que je persévère dans l’adhésion que
j'ai donnée à la proposition de M. Blargnies.
Dès
hier, le champ de la discussion n'a fait que s’étendre; l'assemblée me
permettra de me renfermer dans la question de priorité, qui est vraiment le
sujet de ses délibérations.
Envisagée
sous ce point de vue, la délibération actuelle peut se résumer en une simple
question que voici :
Faut-il
procéder à une élection pure et simple, qui, laissant subsister tous les points
litigieux entre la conférence et nous, rend l'acceptation douteuse, et en
recule le terme ; ou convient-il de la rendre conditionnelle, pour ne pas
livrer le pays aux exigences étrangères ?
S'il
est un point constant, d'après tous les renseignements officieux et officiels
communiqués au congrès, c'est d'abord que le prince Léopold subordonne son
acceptation à l'obtention de l'assentiment de la conférence à son élévation ;
et en second lieu, que la conférence à son tour subordonne son assentiment à
l'acceptation pure et simple de la part de
Mais
ce protocole, messieurs, vous l'avez refusé, vous l'avez répudié avec mépris,
vous avez protesté contre son contenu.
Les
choses ne sont donc plus entières : le congrès se trouve lié ; le gouvernement
l'est, et le prince le sera, à moins que vous ne commenciez par révoquer en
entier, ou à modifier dans son application l'une de vos délibérations qui ont
trouvé le plus d'écho dans la nation et de sympathie parmi les peuples
étrangers.
Le
maintien de votre décret et l'élection pure et simple sont donc choses
inconciliables. Pourquoi ? parce qu'il y a impossibilité absolue de contenter
la conférence, impossibilité ainsi d'obtenir l'acceptation du prince, et que
dès lors il devient oiseux de procéder à une élection sans résultat effectif.
L'assemblée
veut pourtant élire ; commençons donc par assurer un effet réel à l'élection,
en levant au préalable tous les obstacles qui s'opposent à une acceptation
immédiate, à l'acceptation pure et simple de la part de l'élu.
Que
faut-il faire pour atteindre ce but ?
Suivre
la marche que l'honorable M. Blargnies nous a indiquée le premier, en vous
décidant entre sa proposition et celle que trois honorables membres du bureau vous
ont ensuite soumise ; ou, mieux encore, en amendant l'une par l'autre.
Fixer
les bases d'un arrangement définitif ; les faire connaître au prince et à la
conférence, et vous prononcer ensuite sur la proposition de l'élire, d'après
l'issue des négociations, tel est le fond de la proposition de l'honorable
député du Hainaut. Cette marche est franche ; elle mène droit au but et tend à
épargner au congrès l'humiliation d'un second refus.
Apposer
des conditions à l'élection ; imposer (page
198) des restrictions à l'élu, tout en allant au-devant du joug dangereux
d'une occupation partielle, voilà le fond de l'autre proposition.
Telle
qu'elle vous est présentée et telle que la section centrale la reproduit, elle
n'obtiendra pas mon assentiment. Modifiée ainsi que l'honneur, la sûreté et les
intérêts du pays l'exigent, je pourrais m'y rallier, quoique dans mon opinion,
la marche indiquée par notre honorable collègue M. Blargnies me semble
préférable, parce qu'elle est plus rationnelle, plus digne et tend plus franchement
vers le but qu'on se propose.
Mais,
dit-on, cette marche retardera l'élection.
Se
jeter au-devant du joug qu'on veut nous imposer ; donner tête baissée dans
toutes les embûches qu'on nous tend ; livrer le pays à la discrétion de
Ce
n'est pas dans le retard de l'élection que serait le danger : il serait plutôt
dans le retard de l'acceptation, et ce retard est inévitable, il est
inséparable d'une élection pure et simple, à moins de se livrer, pieds et
poings. liés, à la discrétion de la conférence.
Mais,
dit-on, il faut clore la révolution ; et le bon moyen, messieurs, que
l'élection d'un étranger qui ne nous apporte rien !
Au
fond, que nous procurera cette opération ? Un homme de plus ; et c'est dans ce
faible renfort, c'est dans ce roseau auquel il faudra que nous prêtions appui,
que l'on veut que le pays place son espoir, pour arrêter le mouvement qui agite
la nation !
Une
présomption singulière doit s'être emparée de nous, si nous pensons qu'un
homme, un seul homme, armé d'un décret du congrès, va clore la révolution.
L'Europe,
messieurs, grâce à la légitimité, n'a faute de princes souverains ; et l'Europe
est agitée de
Et
c'est en donnant à
L'opinion
que nous combattons, messieurs, prend sa source dans deux illusions. Nous
oublions que notre révolution n'est qu'un épisode dans le vaste drame qui, dès
longtemps préparé, a éclaté en 1789, et ne finira que, lorsque s'étant
complètement déroulé, et ayant enveloppé l'Europe entière dans son tourbillon,
les besoins qui ont donné naissance à la grande réformation politique du XVIIIe
siècle seront satisfaits.
Vouloir,
comme on vous l'a dit, rendre le calme à
A côté
du désir louable de clore la révolution par un décret, est le danger d'exciter
de nombreux orages, en contrariant les vœux du peuple, qui l’a faite, et en
trompant les intérêts du pays.
On ne
peut se le dissimuler, messieurs, les explications des diplomates sont loin de
paraître au public, qui nous juge, aussi satisfaisantes qu’à une notable partie
de l'assemblée.
La
question du Luxembourg ne lui paraîtra vidée que quand les bases de l'indemnité
pécuniaire seront fixées entre les parties. La question du Limbourg lui paraît
encore moins avancée et d'une tout autre importance, pour qu'à la question
d'indépendance et d'intégrité du territoire, se trouve liée une question
d'honneur, d'humanité, de justice et d’existence. La question de la rive gauche
de l'Escaut est à ses yeux une question vitale, sur laquelle il ne se montre
guère disposé à adopter l'opinion de la conférence ; et quant à la dette,
comment croire qu'e la conférence renoncera à la traiter, à la décider, à la
trancher à notre détriment, quand on songe que tous les capitalistes de
l'Europe ont intérêt d'en mettre une large part à la charge de
Dans
cet état de choses, une élection pure et simple, dont l'adhésion aux protocoles
serait la conséquence immédiate, si l'on veut qu'elle produise effet, me semble
la résolution la plus dangereuse que le congrès pourrait prendre. En
conséquence, je demanderai la priorité pour la proposition de M. Blargnies, et
subsidiairement je me rallierai à celle de M. Nothomb, sauf les amendements
qu'elle réclame pour la dignité et la prospérité du pays. (E., 2
juin.)
M. le baron Beyts
appuie l'élection
immédiate du prince de Saxe-Cobourg, mais en insistant pour le maintien de
notre constitution. Il (page 199) ne
veut pas de garnison étrangère dans Maestricht ; il invoque les traités. En
élisant immédiatement le prince Léopold, nous avons, dit-il, sur la proposition
de M. Blargnies deux avantages : le premier, que nous aurons des négociateurs
intéressés à la chose ; le second, qu'on accordera peut-être au roi que nous
allons élire ce que nous ne pouvons obtenir comme peuple encore en révolution.
(J. F., 2 juin.)
M.
Charles de Brouckere – Il est inutile de vous dire, messieurs, que vous ne trouverez
dans mes paroles aucune allusion aux opinions de mes anciens collègues, ni à ce
qui s'est passé dans le conseil ; je raisonne d'après des pièces et des faits
patents.
Les
protocoles, un ministre nous l'a rappelé hier, sont les procès-verbaux de la
conférence, et par conséquent les seules pièces revêtues d'un acte authentique.
Nous
connaissons officiellement le protocole du 20 janvier. Depuis, rien n'est venu
modifier cet acte ; au contraire, le protocole n° 22 confirme en entier la
teneur du premier. Il ne nous a pas été notifié ; il suivait de trop près le
vote des douze millions accordés par acclamation pour faire la guerre ; il
eût provoqué une explosion.
Tout
est changé parmi nous : pour ne pas nous effrayer on nous communique une
lettre… Je ne saurais trouver de termes assez énergiques pour flétrir
convenablement les expressions de cette lettre, Quoi ! c'est un lord anglais
qui menace tout un peuple de l'extinction de son nom ! Ah ! ce nom vivra malgré
lui et les siens ; aucune force ne parviendra à nous le ravir dans l'avenir, à
l'effacer dans le passé ! (Ces mots, prononcés avec énergie, provoquent une
explosion prolongée de bravos et d’applaudissements dans l'assemblée et dans
les tribunes.)
Et
cependant, cette lettre a servi de texte à un honorable membre pour soutenir
que nous avions plus de chances de réussite pour l'acceptation du prince de
Saxe-Cobourg, que nous n'en avions eu pour celle du duc de Nemours. A-t-il donc
oublié que notre envoyé à Paris, par plusieurs lettres, non officielles il est
vrai, répondit du succès ; que les agents de la cour et du ministère français
nous donnèrent les mêmes assurances ; qu'une lettre du ministre des affaires
étrangères nous fut communiquée ? Qu'est-il advenu ?
Ah !
si l'élection du duc de Nemours fut une courtoisie, celle du prince de
Saxe-Cobourg, n'en déplaise à l'honorable membre, est une véritable
mystification.
Nos
adversaires nous tiennent un singulier langage ; ils nous disent : Vous ne
voulez pas l'élection immédiate, prouvez que vous êtes certains de la réussite
de la guerre. Il serait plus logique, pour nous ramener à cette opinion, de
nous prouver qu'on est certain de l'acceptation ; qu'au moins elle est probable
; mais le refus est certain, aux termes mêmes de la lettre de lord Ponsonby ! à
moins de soumission aux protocoles.
Nous
ne pouvons répondre de l'issue de la guerre, mais les chances sont toutes en
notre faveur. Jamais
Mais,
nous a dit un orateur, le temps de faire la guerre n'est pas arrivé. Quand donc
arrivera le moment propice ? Sera-ce quand les Polonais auront été vaincus par
le nombre, si le nombre peut vaincre cette nation héroïque ? Sera-ce quand
l'Italie aura été subjuguée par l'Autriche ? Sera-ce quand les provinces
rhénanes seront amollies par le funeste exemple de notre apathie ?
Le
moment de faire la guerre n'est pas encore arrivé ! On a voulu dire, sans
doute, qu'il était passé. Et en effet, que les hommes sont changés depuis deux
mois ! Mais il nous reste encore de l'énergie ; on cherche à là paralyser par
les négociations.
Vouloir
l'élection immédiate, c'est se soumettre aux protocoles, ou au moins, comme on
l'a avoué ingénument, c'est reconnaître les limites de 1790, moins la province
de Luxembourg, qui faisait alors partie de nos provinces.
Il y
aura des échanges, nous dit-on encore, ou, en d'autres termes, nous vendrons
nos frères à
Aujourd'hui,
comme après la paix de Munster, on négociera pendant dix-huit ans ; et, de
guerre lasse, chacun conservera la position qui lui est assignée par les
protocoles.
Mes
alarmes sont chimériques, suivant quelques orateurs : la conférence a déjà fait
un grand pas, dit-on ; elle ne bornera pas là sa générosité. Vous l'avez
entendu, messieurs : en nous cédant le Luxembourg, la conférence a révolutionné
l'Allemagne. Singulière révolution ! Ne savons-nous donc pas qu'ici la landwehr
se réunit aux cris de : Vivent les Belges ! que là, elle marche en chantant
Où
est-il écrit que la conférence nous accorde le Luxembourg ? Dans la lettre de
lord Ponsonby ? Oui, le noble lord nous cède le Luxembourg moyennant une juste
indemnité ; c'est-à-dire moyennant l'abandon d'une autre partie du territoire,
et non, comme on l'insinué, à prix d'argent, à moins qu'on n'exige l'un et
l'autre.
Messieurs,
il s'agit de résoudre une question d'honneur. Unis par les traités, unis par
l'insurrection, il y a, suivant moi, lâcheté à trafiquer des hommes comme de
propriétés immobilières. Dût une restauration être la suite de notre
résolution, plutôt mille fois la restauration que l'ignominie (mouvement
prononcé) ; plutôt des fers pour quelques années encore que la perte d'une
réputation qui a traversé les siècles, que le démenti du nom que nous a donné
César, que le sacrifice de l'avenir tout entier ! (Nouveau mouvement.)
Mais
la restauration est impossible. L'exemple de
Ce
qu'il peut nous arriver de pis, c'est de subir par la force ce que nous voulons
offrir aujourd'hui, et, alors au moins, nous Limbourgeois, nous n'aurons pas le
droit de maudire ceux avec qui nous avons fait la révolution.
Ne
nous y trompons pas, ce n'est pas par amour pour nous que les autres puissances
interviennent dans nos affaires : l'Europe entière est sous les armes ; elle
conservera cette attitude aussi longtemps que nous ne serons pas constitués ;
de là l'incertitude sur l'avenir de paix ou de guerre, et, par suite, la stagnation
du commerce et de l'industrie. Les puissances ont donc le plus grand intérêt à
voir terminer nos affaires ; elles réclament l'élection du prince de
Saxe-Cobourg, c'est pour nous un motif puissant de ne pas la consommer sans
connaître les conditions de notre existence.
Ce que
je demande, c'est la conséquence de la lettre écrite en notre nom au ministre
des affaires étrangères de Hollande ; c'est la reprise des hostilités à la
première infraction des conditions de la suspension d'armes ; ici je ne parle
pas de quelques coups de fusil échangés entre les avant-postes, qui ne peuvent
être considérés que comme des actes d'indiscipline ; mais j'entends par
infraction le prélèvement d'impôts dans nos communes, les inondations de nos
propriétés, la violation du territoire par une flotte ou une troupe armée. Je
demande qu'au lieu de recourir dorénavant à des tiers, qui insultent à notre
caractère, nous repoussions la force par la force. Je demande enfin qu’il soit
fait immédiatement des offres réelles à la conférence.
Je
suis disposé à acheter la paix à prix d'argent, à faire à l'avenir du pays tous
les sacrifices, celui de l'honneur, et suivant moi l'élection préalable ne peut
se faire qu'aux dépens de l'honneur national. (Bravo ! bravo !) (I., 2 juin.)
M.
Destouvelles – Messieurs, j'ai partagé l'impression profonde qu'a produite sur
l'assemblée la communication de la lettre adressée par lord Ponsonby au
ministre des relations extérieures. Je ne sais, messieurs ; ce dont je dois le
plus m'étonner, de l'étrange aveuglement du diplomate anglais, dont
l'expérience est reconnue et qu’un séjour de plusieurs mois dans la capitale de
Improvisation,
longue conférence, me paraissent difficiles à concilier. Je m'abstiens, quant à
présent, de provoquer des explications qui embarrasseraient la question qui
nous occupe, et, par des incidents graves, en retarderaient la solution. Je
réserve pour une autre époque un examen qui peut, qui doit même être différé.
Mais si j'écarte avec soin ce qui ne se rattache pas essentiellement à l'objet qui appelle en ce moment toute
notre (page 201) sollicitude,
l'élection du chef de l'État, je ne puis laisser inaperçue l'investigation au
moins indiscrète faite hier à cette tribune par un de nos honorables collègues.
Le
général Belliard est-il accrédité à Bruxelles comme envoyé extraordinaire de
L'a-t-on
sommé de décliner ses qualités quand tout récemment encore il a, par ses bons
offices, obtenu l'éloignement de la flotte hollandaise portant 294 bouches à
feu et qui se rapprochait de la citadelle ?
Ne
nous privons pas par une méfiance déplacée de l'appui d'un homme qui, diplomate
ou non, peu doit nous importer, n'a signalé sa présence ici que par des actes
qui attestent sa sympathie pour la cause belge et pour nos plus chers intérêts.
Acceptons le bien, de quelques mains qu'il nous vienne, et combattons le mal
quelque élevée que soit la position de celui qui se constituerait vis-à-vis de
nous dans une attitude hostile. Quant à moi, je m'accommode facilement d'une
médiation qui écarte d'une de nos villes les plus souffrantes, des calamités
qui combleraient la mesure de ses malheurs. La diplomatie, je le dis à regret,
ne m'a pas jusqu'à présent familiarisé avec de semblables résultats. Après
cette courte digression, toute dans nos intérêts, et dans laquelle j'ai
considéré les choses abstraction faite des personnes, je reviens, messieurs, à
la question principale.
Le
congrès élira-t-il le prince de Saxe-Cobourg roi des Belges ?
L'élira-t-il
sans aucune condition ? Sûr la première question, je m'empresse de répondre
affirmativement. Je résous négativement la seconde. Ne nous le dissimulons pas,
messieurs, la position du pays est grave. Il est inutile de vous l'exposer :
elle vous est connue. Il est plus que temps d'y mettre un terme. En vain on
vous dit : Élisez un souverain quelconque ; ce langage est démenti par les
faits particuliers, qui dans plusieurs circonstances vous ont été révélés et
que je juge inutile de reproduire. Ce n'est point un souverain quelconque que
réclame notre situation, c'est un roi qui soit reconnu immédiatement par les
puissances. Sans cette reconnaissance un nouveau provisoire succédera à ceux
qui l'ont précédé. Cette reconnaissance, premier acheminement vers un état plus
prospère, vous avez l'espoir, je dirai plus, la certitude de l’obtenir si vous
élisez le prince de Saxe-Cobourg. Jusqu'à ce jour les portes de la conférence
ont été fermées à vos envoyés ; ils ont été conviés aux festins des Grey, des
Talleyrand, des Palmerston : stérile avantage ; mais ils n'ont pas été admis à
s'asseoir à côté des ministres des cinq grandes puissances, qui se sont
attribué le pouvoir de prononcer souverainement sur nos intérêts, sans même
nous admettre à prendre part à la discussion.
Notre
séquestre diplomatique ne peut être levé que par un prince qui se présentera à
la conférence, non comme un ambassadeur, mais avec le titre de roi. Le peuple
belge, dira-t-il m'a décerné la couronne. Cette couronne, il dépend des grandes
puissances gue je la place sur ma tête. Si elles attachent de l'importance à
maintenir la paix présente, à assurer la paix future, mon élévation au trône de
Doutez-vous,
messieurs, de l'ascendant qu'exercerait ce noble langage sur les ministres des
souverains, sur les souverains eux-mêmes ? Et s'ils dédaignaient de l’écouter,
ils assumeraient l'immense responsabilité d'une guerre dont les conséquences
compromettraient peut-être l'existence des trônes, et attireraient certainement
sur les peuples des fléaux dont il est de leur devoir de les préserver.
Je
pense donc que l'intérêt bien entendu de
Loin
de moi la pensée d'abdiquer ces actes dont le caractère a été si dignement
relevé par notre (page 202)
honorable collègue M. Blargnies. Loin de moi le projet, qu'aucune expression
assez flétrissante ne pourrait qualifier, d'abandonner ces fortes et honorables
positions dont nous avons su nous emparer. C'est pour les conserver que je veux
accélérer l'élection du prince de Saxe-Cobourg, non pas l'élection absolue,
mais à la condition de ne prendre possession du trône qu'après avoir prêté le
serment prescrit par l'article 80 de la constitution. La question de salut pour
Et
quant au territoire et quant à la dette, l'article 68 de la constitution est
précis. Instruit d'avance que ce serment est pour lui une impérieuse
obligation, le prince, s'il attache du prix à régner sur un peuple libre,
brave, industrieux, et qu'il me soit permis de croire qu'un avenir aussi
glorieux doit lui sourire, le prince deviendra, près de la conférence, un
médiateur que les ministres des grandes puissances accueilleront avec
empressement.
Le
prince confondra vos intérêts avec les siens. Sa cause deviendra inséparable de
la nôtre. En soutenant l'une il défendra l'autre ; et ses efforts seront
couronnés d'un succès conforme à tous les intérêts, puisqu'il garantira la paix
générale, objet des vœux de toutes les puissances.
Voilà,
messieurs, comme j'entends l'élection du prince Léopold de Saxe-Cobourg.
Mais,
m'objectera-t-on, si la conférence résiste au prince, nous aurons perdu des instants
précieux. S'il échoue, je vous le demande, vos agents, en supposant qu'ils
soient reçus, seront-ils plus heureux ? Pourront-ils imprimer à leurs
négociations un mouvement plus accéléré ? Vainement nous nous en flatterions.
Donc, dans toute hypothèse, perte de temps éventuelle ; mais dans la première,
espoir fondé de succès ; dans l'autre, la honte d'une dernière tentative qui ne
nous apportera qu'une nouvelle humiliation. Vos négociateurs ne seront pas même
reçus ; j'ai le passé pour garant de l’avenir à cet égard. Ce sont donc ces
chances de succès que je veux saisir, quand il en est temps encore, c'est cette
nouvelle humiliation que je désire sauver au peuple belge.
Si
après avoir épuisé tous les moyens, la guerre, je ne puis prononcer ce mot sans
effroi, devient une nécessité, cette nécessité sera imposée par ces mêmes
puissances qui ont fait jusqu'ici de grands sacrifices à la conservation de la
paix. Elles s'exposeraient à en perdre le fruit.
J'augure
mieux du bon sens des cabinets, de leur amour pour l'humanité. Et en dernier
résultat, quoi qu'il en arrive alors,
Je
voterai donc pour l'élection immédiate du prince Léopold de Saxe-Cobourg. (E.,
7 juin.)
M. Lebeau, ministre des affaires
étrangères – Je demande la parole pour un fait personnel. Messieurs, comme ministre,
il n'est pas dans les convenances que je puisse examiner et censurer les actes
émanés des cabinets étrangers ; mais comme député, mon opinion est inaliénable.
Je le déclare donc en me renfermant dans qualité de député, je suis prêt à
protester aussi haut que qui que ce soit dans cette assemblée contre la lettre
de lord Ponsonby. Mais lorsqu'une communication est faite au ministre et que le
ministre vous en donne connaissance, il ne lui appartient pas de porter un
jugement sur cette communication. C'est ainsi que mon honorable prédécesseur
vous a communiqué des protocoles contre lesquels ensuite il a fait avec vous
des protestations énergiques. Voilà, messieurs, l'explication de ma conduite ;
et qu'on ne parle pas de résignation, les actes auxquels je me suis associé, et
devant lesquels l'honorable préopinant a reculé, prouvent que ce mot ne m'est
pas applicable. J’ajouterai, messieurs, que, si cette lettre est une lettre
particulière, elle ne l'est que par des considérations que vous apprécierez
facilement. Il y était question d'une personne dont le nom ne pouvait se
trouver dans une pièce officielle, cette seule considération a été cause qu'on
ne m'a pas fait une réponse officielle ; vous auriez à l'instant cette réponse
si on voulait effacer de la lettre le nom de la personne à laquelle on fait
allusion : du reste, il ne faut pas se méprendre sur le caractère de lord
Ponsonby ; il n'est ici que l'interprète de la conférence, et c'est à la
conférence, non à lui, que doivent s'adresser vos reproches. On a parlé hier de
la position du général Belliard auprès du gouvernement belge. Messieurs, il est
ici en qualité de ministre plénipotentiaire de France non accrédité près du
gouvernement ; vous n'avez pas oublié qu'il s'est rendu ici à la prière de
votre ancien président, qui est aujourd'hui régent du royaume. Il n'a pas
encore rempli les formalités nécessaires pour être accrédité officiellement :
j’ignorais cette circonstance, car ce n'est pas moi qui l'ai présenté à M. le
régent, mais j'ai sa parole d'honneur que dans peu de jours il présentera ses
lettres de créance. (I., 2 juin.)
M.
Destouvelles – Je ne m'attendais pas, messieurs, à ce qu'un mot qui se trouve dans mon
discours provoquât une réponse comme celle qui (page 203) vient d'être faite par M. le ministre. Sa réponse ne
change rien à mon opinion, et je persiste à soutenir que le mot résignation est
très convenable. Quant à l'allusion faite par le préopinant à un acte de
courage par lequel il se serait signalé, je pense qu'il a voulu parler de
l'exclusion des Nassau. Eh bien ! messieurs, j'ai voté contre l'exclusion ;
mais qu'on regarde mon vote et les motifs sur lesquels je l'appuyais ; on verra
de quel côté est le courage, de celui qui vote avec une faible minorité, ou de
celui qui s'est laissé entraîner par le torrent de la majorité. (Bravo !
bravo !) (I., 2 juin.)
M. Van de Weyer – Messieurs, je
dois quelques mots d'explication sur ce qui s'est passé à l’arrivée de M. le général
Belliard à Bruxelles. Lorsque M. Belliard fut envoyé en Belgique, notre envoyé,
quoique arrivé à Paris, n'avait pas été reçu officiellement. M. le comte
Belliard s'étant présenté au ministère des affaires étrangères, et m'ayant prié
de le présenter, je lui fis observer que, notre envoyé à Paris n'étant pas
encore reçu, je me contenterais de le présenter à M. le régent, et qu'il
resterait sur ce pied jusqu'au moment où pourrait me montrer ses lettres de
créance. Mais, depuis cette époque, tous les actes faits par M. le général
Belliard, il ne les a pas faits comme simple particulier, mais comme ministre
plénipotentiaire de France auprès du gouvernement belge. (I., 2 juin.)
M. de Robaulx – Il me paraît, messieurs, que si en
effet M. le général Belliard était porteur de lettres de créance, il serait
urgent qu'il les produisît. S'il est réellement ambassadeur depuis le temps
qu'il est à Bruxelles, il aurait dû se faire accréditer. Remarquez, en effet,
que nous avons eu des agents diplomatiques sans caractère officiel. MM. Bresson
et Cart… Cartwright, je ne peux jamais prononcer ce nom-là (on rit), eux
aussi nous faisaient des communications, et quand nous avons voulu nous en
prévaloir, on nous a dit que nous étions bien fous de nous en être rapportés à
eux. Prenons garde qu'il n'en soit de même aujourd'hui, et que plus tard on ne
vienne désavouer les communications de M. Belliard. J'insiste donc pour que M.
le ministre des affaires étrangères lui demande ses lettres de créance. (I., 2
juin.)
M. Lebeau, ministre des affaires
étrangères – M. le général Belliard a répondu, à l'invitation que je lui ai adressée
de me communiquer ses lettres de créance, que les motifs qui l'avaient fait
différer jusqu'à ce jour de remplir cette formalité étaient indépendants de sa
volonté ; mais il a donné sa parole d'honneur qu'il écrirait de suite à M.
Sébastiani, pour qu'il le mît à même de remplir sans retard les formalités
nécessaires. J'ai vu avec peine que le préopinant associât le nom de M. le
comte Belliard à d'autres noms que nous ne pouvons prononcer sans peine. M.
Belliard a tenu depuis son séjour à Bruxelles une conduite franche, loyale,
généreuse, et toutes ses démarches ont eu pour but le bonheur et l'indépendance
de
Quant
à ce qu'on dit relativement au vote sur l'exclusion des Nassau, n'oubliez pas
qu'au moment de voter l'exclusion, nous étions menacés par
M. de Robaulx – Je tiens à ce que l'on ne prête pas à
mes expressions une intention hostile au général Belliard. J'ai dit et je
répète que s'il est vrai, comme le dit M. Lebeau, que M. Belliard soit
accrédité comme ministre plénipotentiaire près le régent, et qu'il soit porteur
de ses lettres de créance, il est vraiment extraordinaire qu'après un aussi
long séjour ici, il n'ait pas encore exhibé ses titres ; lorsque j'ai dit que l'absence
des lettres de créance pourrait donner lieu à des désaveux de la part du
gouvernement français si les circonstances l'exigeaient comme cela avait eu
lieu à l'égard de M. Bresson, je n'ai entendu attaquer que M. Sébastiani, qui
nous a déjà donné des échantillons de sa mauvaise foi politique ; mais quant à
M. Belliard, je le considère comme personnellement ami des Belges. Il a même
souvent montré qu'il leur portait un vif intérêt. J'en excepte cependant
certaine lettre qu'il a récemment écrite au général Chassé, dans laquelle il
nous traite assez mal et montre contre nous beaucoup de partialité et
d'injustice. (E., 2 juin.)
M. Fleussu, dans un discours énergique et
serré, se prononce pour la proposition de M. Blargnies. Il pense qu'il faut
terminer nos affaires promptement, et que ce n'est pas au jour du (page 204) danger que les députés du
pays se montreront moins fiers que lorsqu'il a été question de protester contre
le protocole du 20 janvier, protestation noble à laquelle le pays et l'Europe
tout entière ont applaudi. (I., 2 juin.)
M. Lecocq – Messieurs, je viens vous soumettre,
en peu de mots, à l'appui des conclusions de la section centrale, dont j'avais
l'honneur de faire partie, quelques réflexions nées de la discussion.
La
constitution détermine les obligations du prince appelé à régner sur
Il n'y
a pas de roi avant la prestation de ce serment.
Qu'a-t-on
fait lors de l'élection du duc de Nemours ? A-t-on préférablement fait
reconnaître les limites constitutionnelles par les puissances ?... Non.
A-t-on
pris d'autres précautions pour la garantie de l'intégrité du territoire que
celles prescrites par la constitution ?... Non.
Y
a-t-il raison de faire autre chose aujourd'hui ? Peut-être... L'opinion
publique ne l'exige-t-elle pas dans les circonstances présentes ? Mais que
faire ? Eh bien, décréter que l'élection du chef de l'État sera proclamée dans
les termes fixés par le décret du 29 janvier dernier, nous paraît très convenable
pour tranquilliser les esprits au dehors ; c'est d'ailleurs une nouvelle
profession de foi de notre part. Viennent ensuite les dispositions relatives à
la nature de nos sacrifices ; mais des sacrifices purement pécuniaires et
quelques concessions pour l'occupation temporaire militaire de la forteresse de
Maestricht. Moyennant ce, qu'est-ce qui peut s'opposer encore à l'élection ?
L'intérêt même qu'aura le roi à faire obtenir ce que la nation désire, ce
qu'elle croit nécessaire à sa félicité, à sa stabilité, à son honneur, cet
intérêt est pour moi le gage du succès. .
Eh !
peut-on supposer qu'un caractère noble et généreux, flatté de l'offre d'une
couronne comme celle de
Le
Belge a besoin d'une patrie ; oui, mais d'une patrie dont il soit fier, et
l'honneur national nous permet-il d'abandonner Maestricht et Venloo ?...
Venloo qui nous a ouvert ses portes, nous la livrerions à ses anciens maîtres !
non, nous ne nous entacherons pas d'une pareille infamie ; et ici le besoin de
conserver sous le rapport des intérêts commerciaux se réunit au besoin de
conserver sous le rapport de l'honneur.
Ces
mêmes intérêts commerciaux réclament la restitution de la rive gauche de
l'Escaut, et nos droits à cet égard, établis d'une manière si lumineuse par
l'honorable M. Beyts, seront appréciés et appuyés par le monarque futur.
La
conférence ne nous connaissait pas encore bien, elle nous connaîtra mieux après
l'élection : les doutes qu'elle pouvait nourrir sur notre esprit
d'indépendance, de nationalité et de monarchisme, tous ces doutes seront alors
dissipés ; elle saura ce que nous voulons et ce que nous consentons pour
l'obtenir... De l'or, jamais le sacrifice de l'honneur. Le prince
épousera cet honneur, et la conférence ne voudra pas compromettre le sort de
l'Europe. Déjà, comme l'a dit l'honorable M. Nothomb, je crois, déjà et sur la
simple apparence d'une élection de nature à tout concilier, la conférence abandonne
ce terrible protocole n° 22, qui hier mettait toute la nation en émoi ; mais
cela ne nous suffit pas, et ce qui nous manque, le prince se fera gloire de
l'obtenir pour nous et pour lui.
Les
puissances ont autant d'intérêt que nous, si non plus, au maintien de la paix ;
mais en attendant la décision, ne nous endormons pas, préparons nos armes : au
premier signal nos soldats citoyens, impatiemment contenus jusque-là,
s’élanceront comme la foudre.
Un tel
langage, partant de bancs que l'on appelle modérés, doit apprendre au
corps diplomatique ce qu'est réellement l'esprit de la nation.
D'autre
part, je ne partage pas les craintes de l'honorable M. Jottrand sur
d'arrière-pensées dans le gouvernement français... Ce gouvernement, plus
éclairé sur l'esprit de la grande (page
205) majorité du peuple belge, sentira enfin que, pour
Ainsi
donc, et dans mon opinion, nous ne compromettons pas, en procédant à l'élection
de la manière que je l'entends avec la section centrale, nous ne compromettons
pas le principe de l'intégrité du territoire ; nous ne sommes infidèles à
notre protestation contre le protocole du 20 janvier ; nous ne nous
livrons pas pieds et poings liés à
J'avoue
que je vote un peu de confiance, mais honte et malédiction aux étrangers qui
interviennent dans nos affaires ; quels que soient leur rang et leur qualité,
malédiction et honte si, comme l’appréhendent d'honorables collègues, nous
étions ici victimes d'une infernale mystification ! Cet anathème d'un peuple au
désespoir retentirait au loin. Il poursuivrait les coupables ; un jour cet
anathème porterait fruit ; il nous vengerait ! (J. B., supp. 2 juin.)
M. le président –
Il n'y a plus d'orateurs
inscrits. (Aux voix ! aux voix !) (I., 2 juin.)
- La
clôture est prononcée. (I., 2 juin.)
Une
longue discussion s'engage sur la position de la question. (I., 2 juin.)
Plusieurs observations sont présentées par M. de Robaulx, M.
de Brouckere, M. Raikem, M. Jottrand et M. Van Meenen. (I., 2 juin.)
M.
le vicomte Charles Vilain XIIII fait remarquer que, quoiqu'il y ait cinq propositions,
il n'y a réellement que deux systèmes : l'un est pour l'élection immédiate ;
l'autre, pour la guerre ou les négociations avant l'élection. On pourrait donc,
dit l'honorable membre, décider la question de priorité, non pour les
propositions, mais pour l'un des deux systèmes. (Appuyé ! appuyé
!) (I., 2 juin.)
M. le président – D'après ce que
vient de dire M. Vilain XIIII, la question serait ainsi posée : La discussion
sera-t-elle ouverte sur le système d'élection immédiate ? (Oui !
oui !) (I., 2 juin.)
-
Après un léger débat, on convient que la question sera posée en ces termes :
La
priorité sera-t-elle donnée à la discussion sur l'élection immédiate ? (I., 2
juin, et P. V.)
M. le président consulte
l'assemblée, qui se lève presque à l'unanimité pour l'affirmative. (I., 2
juin.)
M.
de Robaulx et quelques autres membres demandent l'appel nominal. (I., 2 juin.)
Après
un assez vif débat, il est procédé au vote par appel nominal ; 185 membres
répondent à l'appel : 137 se prononcent pour la priorité ; 48 contre
; en conséquence l'assemblée accorde la priorité à la discussion sur
l'élection immédiate. (Agitation prolongée.). (P. V.)
Ont
voté pour : MM. Liedts, Jaminé, Van de Weyer, Van Hoobrouck de
Mooreghem, Van der Belen, Gendebien (père), de Coninck, le comte d'Arschot, de
Behr, Simons, le chevalier de Theux de Meylandt, Constantin Rodenbach, Zoude
(de Saint-Hubert), le baron de Terbecq, Marcq, Roels, de Decker, l'abbé
Andries, Le Bègue, de Roo, le baron de Sécus (père), de Schiervel, Du Bus,
Domis, le baron de Leuze, Verwilghen, l'abbé Van Crombrugghe, le vicomte
Desmanet de Biesme, Bischoff, le baron Frédéric de Sécus, Thorn, Berger, le
baron Joseph d'Hooghvorst, de Man, d'Hanis Van Cannart, Marlet, Allard, Pirson,
Thienpont, Van Innis, Le Bon, Joos, Fransman, Baugniet, de Rouillé, le baron
Osy. Lefebvre, Blomme, Devaux, Cauvin, le vicomte Charles Vilain XIIII,
Deswert, Struye-Provoost. François, le comte de Bocarmé, Coppieters, Ooms,
l'abbé Pollin, Fendius, le baron Verseyden de Varick, Van Meenen, le marquis
Rodriguez d'Evora y Vega, Olislagers de Sipernau, Henry, le vicomte de
Bousies de Rouveroy, d'Hanens-Peers, (page
206) Isidore Fallon, le comte Duval de Beaulieu, le baron de Viron, Mulle,
de Lehaye, Demelin, le baron de Liedel de Well, Albert Cogels, le baron de
Coppin, .Henri de Brouckere, Gustave de Jonghe, Masbourg, Béthune,
Goethals-Bisschoff, Vercruysse-Bruneel, Claes (d'Anvers), Jacobs, le comte
Félix de Mérode, Nopener, Jean Goethals, le comte de Bergeyck, Destouvelles, de
Muelenaere, Cols, le vicomte de Jonghe d'Ardoie, de Sebille, Dumont,
Morel-Danheel, le comte d'Ansembourg, Trentesaux, Delwarde, Doreye, Du Bois, le
baron Van Volden de Lombeke, Lebeau, le baron de Woelmont, Barthélemy, le
marquis de Rodes, l'abbé Wallaert, Maclagan, le comte de Renesse, Charles Le
Hon, Bosmans, Hippolyte Vilain XIIII, Le Grelle, le baron Beyts, Serruys, le
baron de Pélichy Van Huerne, le comte de Quarré, Vandenhove, Pirmez, de Nef,
l'abbé Boucqueau de Villeraie, Buylaert, le comte Werner de Mérode, Charles
Rogier, Lecocq, Jacques, le comte d'Oultremont, l'abbé Corten, Rouppe, Nothomb,
le baron de Stockhem, Geudens, Meeûs, Annez de Zillebeecke, Peeters, Barbanson,
de Gerlache, Van Snick, Surmont de Volsberghe.
Ont
voté contre : MM. Forgeur, Drèze, Thonus, le baron de Meer de Moorsel,
Lardinois, d'Elhoungne, Bredart, le baron d'Huart, Blargnies, l'abbé Dehaerne,
Seron, de Tiecken de Terhove, Van der Looy, Alexandre Gendebien, Claes (de
Louvain), Jottrand, de Labeville, d'Martigny, Frison, Beaucarne,
Vergauwen-Goethals, Collet, Rosseeuw, l'abbé Joseph de Smet, Eugène de Smet,
Gelders, l'abbé Van de Kerckhove, Watlet, Roeser, de Selys Longchamps, Louis
Coppens, Destriveaux, Henri Cogels, Jean-Baptiste Gendebien, Davignon, Wannaar,
Helias d'Huddeghem, Teuwens, Nalinne, Charles Coppens, Camille de Smet, de
Robaulx, Brabant, Charles de Brouckere, Dams, Defacqz, Fleussu, l'abbé Verduyn.
(P. V.)
M. Charles de Brouckere
demande qu'il soit fait
mention de son vote négatif au procès-verbal. (E., 2 juin.)
- Tous
les députés qui ont voté contre le système d'élection immédiate font la même
demande. (E., 2 juin.)
Il est
décidé que les noms de tous les votants seront insérés au procès-verbal. (P.
V.)
La
séance est levée à cinq heures. (P. V.)