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Chambre des représentants de Belgique
Séance du mercredi 25 novembre 1846
Sommaire
1) Pièces adressées à la
chambre, notamment pétition relative au service de la Meuse à Liége (Delfosse)
2) Projet de budget de la
chambre des représentants pour 1847 (Mast de Vries)
3) Rapport sur la situation
sanitaire de l’établissement de Santo-Thomas
4) Projet de loi portant le
budget du département des finances pour l’exercice 1847. Discussion générale.
Traitements du personnel de l’administration centrale (Osy,
Malou), droits sur les cuirs, droits différentiels,
patente sur les dividendes des sociétés anonymes (Osy, Malou), arrêté organique du personnel de l’Etat (21 novembre
1845), notamment possibilité de promotion accélérée et possibilité pour le
ministre de défendre à un fonctionnaire d’accepter un mandat électif (Verhaegen, Malou), droits sur les cuirs (David), patente
sur les dividendes des sociétés anonymes (Osy, Orban, Malou, Osy,
Lejeune) possibilité pour le ministre de défendre à un fonctionnaire
d’accepter un mandat électif (Verhaegen), traitements
du personnel de l’administration centrale (Malou, Orban, Malou, de
Brouckere, Malou, Orban),
matériel de l’administration centrale (Malou, Zoude), réorganisation de l’administration des contributions
directes (Malou), secours aux anciens employés (de Brouckere, Orban)
(Annales parlementaires de Belgique, session 1846-1847)
(Présidence de M. Liedts.)
(page 124)
M. Huveners
procède à l’appel nominal à 1 heure.
La séance est ouverte.
M. de Man d’Attenrode donne
lecture du procès-verbal de la séance d’hier, dont la rédaction est approuvée.
M. Huveners
présente l’analyse des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
(page 110) « Le sieur Giess, facteur à
la station du chemin de fer à Louvain, prie la chambre de le relever de la
déchéance de naturalisation qu’il a encourue pour avoir laissé passer le délai
fixé pour payer le droit d’enregistrement. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
________________
« Les messagers de la cour d’appel de Bruxelles
demandent une augmentation de traitement. »
- Renvoi
à la section centrale du budget de la justice.
« Plusieurs
habitants de la Boverie, Froidmont et Vannes (communes et province de Liége)
demandent l’exécution des travaux de rectification de la Meuse, proposés par M.
l’ingénieur Kummer. »
M. Delfosse. - La
chambre, en adoptant il y a quelques jours l’amendement que mes honorables
collègues de Liége et moi nous avons présenté au projet d’adresse, a montré
l’importance qu’elle attache aux travaux qui concernent le régime des eaux et
les voies navigables.
La pétition par laquelle les habitants de la
Boverie demandent que l’on entreprenne le plus tôt possible les travaux qui
doivent les mettre à l’abri des inondations, ne saurait donc manquer de
recevoir ici un accueil favorable.
J’en propose le renvoi à la section centrale
chargée de l’examen du budget des travaux publics.
J’aime à croire que le rapport de cette section
sera conçu de manière à faire comprendre au gouvernement qu’il a en ce moment
un grand devoir à remplir ; nous aurons, dans tous les cas, plus d’une occasion
de le lui rappeler.
- Cette proposition est adoptée.
_______________
« Le sieur Raikem, contrôleur de l’atelier
général et du timbre extraordinaire, demande la place de conseiller vacante à
la cour des comptes. »
« Même demande du sieur de Coppin, ancien
membre du gouvernement provisoire et du congrès national, ancien gouverneur de
la province du Brabant. »
- Dépôt au bureau des renseignements.
_______________
M. le ministre de
la guerre (M. Prisse). adresse à la chambre des explications sur la
pétition du sieur de Menten de Horne tendant à obtenir une demi-solde de
lieutenant de grosse cavalerie du chef de ses services de France.
- Dépôt au bureau des renseignements.
________________
M. le président. - La
chambre a chargé le bureau de nommer plusieurs
commissions, pour examiner des projets de délimitation de commune.
Pour les communes de Molen-Beersel, Kinroy,
Kessenich et d’Ophoven, le bureau conserve la commission qui s’est déjà occupée
de cet objet.
Elle était composée de MM. Fleussu, Scheyven,
Rogier, de la Coste et Huveners.
Pour le projet de loi relatif à la nouvelle
commune de Saint-Léonard, le bureau a nommé MM. Veydt, Scheyven, Osy, de Man et
Dahus (Albéric).
Pour le projet de loi relatif à la commune de
Grapfontaine et autre du Luxembourg, le bureau n nommé MM. Fallon, Zoude, Orban, de Tornaco et d’Hoffschmidt.
Pour l’examen des propositions de MM. Osy, Verhaegen et Vanden Eynde,
au sujet de la démission de M. Marbais du Graty, le bureau a nommé MM. de Brouckere, Brabant, Dolez,
Fallon et de La Coste.
PROJET DE BUDGET DE LA CHAMBRE DES REPRESENTANTS POUR L’EXERCICE 1847
M. Mast de
Vries. -
J’ai l’honneur de déposer sur le bureau le rapport de la commission de
comptabilité pour le budget de la chambre.
M. le président. – Il
est donné acte à M. le rapporteur du dépôt de ce rapport. Il sera imprimé et
distribué aux membres de la chambre. Ce budget se discute ordinairement en
comité général. La chambre veut-elle fixer dès aujourd’hui le jour où cette
discussion aura lieu ?
M. Mast de
Vries. - La
chambre aura à s’occuper de la nomination d’un bibliothécaire. Avant de
procéder à cette nomination, je pense que la chambre devrait voter son budget ;
la commission de comptabilité proposait de fixer définitivement le traitement
du bibliothécaire pour ne pas être exposé à l’avenir à des demandes
d’augmentation de traitement.
La commission propose de fixer les appointements
à 3 mille francs au lieu de 2,800 qu’ils sont aujourd’hui. Ces appointements
étant fixés, celui qui sollicitera la place n’aura plus rien à demander quand
il l’aura obtenue.
J’ai un autre projet à vous soumettre, c’est une
demande de crédit supplémentaire de 90 mille fr. au budget de 1846. La session ayant duré dix mois, et une session
extraordinaire ayant eu lieu, le budget que vous avez voté ne peut pas suffire
aux dépenses faites.
Vous aurez à voter sur ces diverses propositions
dans une séance secrète, suivant vos précédents.
- La chambre, consultée, fixe à mardi prochain
la discussion de son budget et des propositions qui s’y rapportent.
RAPPORT SUR LA SITUATION DE L’ETABLISSEMENT DE SANTO-THOMAS
M. le ministre des affaires étrangères (M. Dechamps).
dépose la suite du rapport de M. Blondeel sur la colonie de Santo-Thomas.
- La chambre ordonne l’impression et la
distribution de ce document.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
Discussion générale
M. le président. - La discussion est ouverte sur l’ensemble du
budget.
M. Osy. - Dans le Moniteur d’hier, nous avons vu
l’organisation de cinq ministères. Mais je crois que personne n’a pu étudier
assez ces arrêtés pour que nous puissions fixer, par le budget en discussion,
les nouveaux traitements qu’on va proposer en vertu de ces arrêtés. Pour ma part, je regrette que ces arrêtés
n’aient pas paru quelque temps avant la discussion du budget ; car je ne puis
donner mon assentiment aux augmentations avant de connaître toutes les
dispositions de ces arrêtés, d’autant plus que dans le premier arrêté je vois
que le gouvernement est décidé à faire emploi de tout l’argent que nous votons.
Ce qui m’a frappé, c’est l’article 9 de cet
arrêté dont le deuxième paragraphe est ainsi conçu : « L’excédant
sera alloué aux employés qui ne jouissent point encore du traitement de leur
grade ; le surplus pourra être distribué à titre d’encouragement aux autres employés et gens de service. »
D’après cela, il n’y a rien de fixe. Le gouvernement disposera de l’excédant de
tous les fonds que nous voterons.
M. le ministre des finances va venir nous
demander des augmentations. (Dénégation
de la part de M. le ministre des finances). Fort bien ; il est donc
entendu que nous voterons sur les chiffres proposés au budget, que l’arrêté ne
sera mis à exécution que pour 1848. J’attendrai les explications de M. le
ministre à ce sujet.
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Pour que la chambre n’occupe pas inutilement
ses moments, je déclare tout d’abord que l’organisation faite par arrêté du 21
novembre n’exige pas de nouveaux crédits. Je me suis attaché (j’avoue que
c’était une très grande difficulté) à réorganiser complétement l’administration
sans sortir des crédits qui ont été affectés jusqu’à présent à l’administration
centrale.
il m’est impossible de dire si en 1848 on pourra
se maintenir dans ces limites, parce qu’il peut survenir tel changement qui
exige des augmentations. Alors l’avenir portera sa peine ; on aura à justifier
les augmentations qui devraient être demandées.
(page 125)
Pour le moment, en ce qui concerne l’administration centrale, je me bornerai à
demander a régulariser certaines imputations qui ont été faites jusqu’à présent, de manière (comme le vœu en
a souvent été exprimé) que la chambre ait la garantie qu’aucun chiffre autre
que celui voté pour l’administration centrale ne recevra cette imputation.
M. Osy. -
Messieurs, d’après les déclarations de M. le ministre des finances, nous
attendrons les propositions qu’il viendra nous faire pour l’administration
centrale. Je l’engagerai à les déposer dès aujourd’hui pour que nous puissions
les examiner avant d’en venir à la discussion des articles.
Messieurs, à l’occasion du budget des finances,
je vous parlerai également commerce et administration.
Depuis deux ans, messieurs, une industrie très
intéressante dans le pays, celle des tanneries, réclame un changement à la loi
du 2l juillet 1844. Dans la session dernière, j’ai prouvé à l’évidence, et M.
le ministre n’a pu me combattre, que dans cette loi il y n une faute radicale ;
c’est-à-dire que, alors que
nous voulions protéger les importations directes des lieux de production, on
parvient précisément au résultat contraire.
On peut maintenant importer des produits des pays étrangers à un droit
beaucoup moindre que des pays de production. Par exemple, le navire américain
venant des Etats-Unis avec des cuirs de Buenos-Ayres, ne paye que 5 centimes,
tandis que ces mêmes cuirs importés par navires américains des pays de
production, de Buenos-Ayres, de Montevideo. de Rio de Janeiro, du Mexique, sont
taxés d’un droit de 3 fr. 50.
Messieurs, c’est là véritablement un cadeau que
nous faisons à l’Allemagne. Depuis deux ans, la chambre de commerce d’Anvers,
l’association commerciale, nous-mêmes dans cette enceinte, avons réclamé contre
une injustice pareille. Je dis contre une injustice, car c’est une injustice
que de mettre nos industriels dans l’impossibilité de lutter avec ceux du
Zollverein. Comment voulez-vous, par exemple, qu’à Stavelot qui se trouve à
côté de Malmédy, les industriels puissent produire à aussi bon marché que les
Prussiens, alors qu’ils doivent payer sur les cuirs arrivant par navires
américains, des pays de production, un droit de 3 fr. 50, alors que les
tanneurs de Malmédy obtiennent en transit et sans aucun droit les mêmes cuirs ?
Comment voulez-vous que notre industrie puisse lutter contre celle du
Zollverein ?
Messieurs, ce ne sont pas seulement les
industriels de Stavelot, ce sont ceux de Huy, Luxembourg, Louvain ; ce sont
ceux de Liége, de toutes les localités enfin où l’on s’occupe de cette
industrie. Si nous ne portons pas, messieurs, un remède à la situation
actuelle, nous perdrons le marché allemand.
Nous exportons également beaucoup de cuirs
tannés pour Hambourg, pour la Norwége, pour la Suède. Eh bien, les industriels
allemands auront l’avantage sur nous, puisqu’ils peuvent produire à meilleur
compte ne payant pas de droits pour la matière première.
Je demande donc, messieurs, au gouvernement de
prendre l’engagement de nous présenter, sous peu de temps, et de manière à
pouvoir l’examiner dans cette session, un projet de loi réformant celle du l
juillet 1844, en ce qui concerne l’article « cuirs ».
Messieurs, j’aurai une autre question très grave
à traiter ; mais, pour ne pas compliquer la discussion du budget des finances,
je la traiterai lorsque nous nous occuperons du budget des affaires étrangères
ou de celui du budget des voies et moyens. Je veux parler de la question des
relâches qui, pour le pays et pour le commerce, est de la plus haute
importance. Je m’entendrai avec M. le ministre pour savoir le moment où il
désire que cette discussion ait lieu. Je suis armé de toutes les pièces
nécessaires pour démontrer combien les dispositions en vigueur sont funestes au
commerce.
Maintenant je viens à l’administration
proprement dite du ministre des finances.
Hier, j’ai eu le regret de
devoir démontrer à M. le ministre des finances qu’il avait fait prendre un
arrêté inconstitutionnel ; aujourd’hui encore, j’ai un pénible devoir à
remplir, mais rien ne me coûte, quand il s’agit d’un devoir à remplir envers
mes concitoyens.
Messieurs, je vous parlerai de la loi des
patentes. Cette loi est de 1825.
M. le ministre des
finances (M. Malou). - De 1819.
M. Osy. -
Oui, mais la loi de 1819 a été changée par celle de 1825.
C’est donc une loi qui pendant sept ans a été
exécutée sous l’ancien gouvernement, et depuis la révolution pendant 10 ans
sous six ou sept ministères différents ; eh bien, concevez-vous, messieurs, que
M. le ministre des finances, par un arrêté ministériel qui n’a pas été publié,
change entièrement un article de cette loi ?
L’article 9 de la loi de 1825 porte en termes
bien clairs :
« Le droit pour les sociétés anonymes fixé
par le tableau n°9 à deux pour cent du montant cumulé des dividendes, est
réduit à un pour cent et un tiers ; seront désormais considérés comme
dividendes donnant ouverture au droit, les remboursements et accroissements des
capitaux.
« Cependant le droit ne sera pas dû sur les
sommes remboursées, lorsque les sociétés feront conster de la première mise de
fonds et des remboursements qui ont eu lieu depuis, de manière à ce que les
remboursements du capital placé ou fourni peuvent être suffisamment distingués
des dividendes.»
J’ai eu l’éveil de cette affaire par un arrêté
royal que j’ai trouvé dans le Moniteur
du 25 octobre, et qui a été signé par le Roi le 19 octobre.
Jusqu’à présent, depuis 23 ans, tontes les
sociétés anonymes n’ont payé le droit de patente que sur le dividende, après le
payement des intérêts ; M. le ministre des finances, par un arrêté ministériel,
entortille extrêmement cette affaire, pour tâcher de prouver que la loi exige qu’on paye également
le droit de patente sur les intérêts.
Messieurs, quand, sous l’ancien gouvernement, on
a fait la loi de 1819 qui a été changée en 1823, pourquoi n’a-t-on pas fait payer un droit de patente sur
les intérêts ? Nous avons beaucoup de rentiers qui se bornent à couper leurs
coupons. Mais nous avons aussi dans le pays des rentiers qui vont beaucoup plus
loin et qui donnent leurs fonds à l’industrie, qui disent : « Nous voulons
exposer nos capitaux pour faire progresser l’industrie du pays. » (Interruption.) Il est possible
qu’on puisse gagner des dividendes ; mais vous tous souvenez, messieurs, que
depuis 10356, grand nombre de sociétés non seulement n’ont pas donné de
dividende, mais n’ont pas même payé d’intérêts.
Aujourd’hui, M. le ministre des finances, de son autorité privée, veut faire
payer un droit de patente sur les intérêts ; ou tous les ministres des finances
de 1823 à 1830, et de 1830 à 1845, ont négligé la loi, ou M. le ministre des finances actuel
est beaucoup plus adroit que les neuf ou dix ministres qui ont été
successivement aux affaires. (Interruption.)
Oui, il y a un dilemme dont vous ne pouvez pas sortir : ou les anciens
ministres des finances ont négligé les intérêts du trésor pendant25ans ; ou
vous avez tort, ou vous, M. le ministre des finances, vous faites payer aux
sociétés ce qu’elles ne doivent pas. Vous ne sortirez pas de ce dilemme ; car
la loi n’est pas changée, c’est encore la loi de 1823 qui existe aujourd’hui.
Ce qui m’a le plus étonné, c’est l’arrêté royal du 19 octobre. Une société linière,
à Gand, a réclamé contre l’arrêté ministériel du 31 décembre. Elle a commencé
par payer le droit de patente exigé, mais elle s’est adressée à la députation
des états, pour réclamer justice. Toute la députation de Gand n trouvé que le
gouvernement n tort. Cette députation était présidée par l’ancien ministre des
finances qui, pendant qu’il était au timon des affaires, ne vous a pas fait
payer un droit de patente sur les intérêts ; et cependant, c’est cet ancien
ministre qui a réclamé cet arrêté du 19 octobre. Sur la réclamation du
gouverneur de la Flandre orientale, la décision de la députation a été cassée,
non en vertu de la loi, mais d’un arrêté ministériel du 31 décembre 1845. Je
sais que M. le ministre des finances me dira encore : C’est un fait accompli.
Si nous ne pouvons pas faire redresser ce grief,
le gouvernement se trouvera en procès avec toutes les sociétés anonymes du
pays. Je n’aime pas les procès, quand je puis les éviter à mes concitoyens ;
par ce que je dis à la tribune, je crois rendre un grand service à la société.
Ces procès auront lieu inévitablement, car il s’agit de sommes très importantes
; je connais une seule société à qui cet arrêté peut coûter 40 mille francs par
an. Vous me direz : C’est autant de pris pour le trésor, Si M. le ministre des
finances pense qu’il est juste qu’on paye le droit de patente sur les intérêts
des capitaux engagés dans les sociétés industrielles, je lui prouverai que
c’est l’income tax qu’il veut
établir.
Est-il vrai que moi, rentier, qui aime mieux exposer
mes capitaux dans une industrie dont le développement intéresse le pays, je
doive payer un droit de patente sur les intérêts de mes fonds, tandis que le
rentier qui a placé ses fonds sur l’Etat et va chercher au trésor des intérêts
certains sans courir de risques, ne payerait pas cc droit de patente ? Je ne
comprends pas cette exigence de M. le ministre des finances. Si M. le ministre
avait étudié les lois de 1819, de 1823, il aurait vu qu’avant de devoir payer
le droit de patente sur le dividende, les membres des sociétés doivent prélever
les intérêts. Je ne comprends pas comment M. le ministre a pu prendre un arrêté
pareil à celui que j’attaque, arrêté qui n’a pas été publié, que nous ne
connaissons que depuis qu’on nous a avertis de payer un droit de patente sur
les intérêts.
Les sociétés se sont émues, on a été chez les
répartiteurs, ils ont montré l’arrêté du 31 décembre 18845, qui a été envoyé
aux inspecteurs par les directeurs.
Jusqu’à présent nous ne connaissons que la
décision d’une députation. Là tous les députés de la Flandre ont décidé que la
loi était mal exécutée. Nous ne connaissons pas encore l’opinion des autres
députations, je ne serais pas étonné qu’elle fût conforme à celle de la députation de la Flandre orientale. Qu’arrivera-t-il
si M. le ministre persiste dans son arrêté ? Une foule de procès qu’on sera
obligé de soutenir contre toutes les sociétés.
Je désire que M. le ministre en reconnaisse
l’illégalité et ne nous oblige pas à casser encore un arrêté royal, car la
faute tomberait non sur nous, mais sur le ministre, car l’arrêté royal du 19
octobre n’est que la conséquence de l’arrêté ministériel.
Je répète que depuis 23 ans
la loi a été entendue en ce sens, qu’on payait le droit de patente de 1 1/2 p.c. sur le dividende après avoir
prélevé les intérêts. Maintenant, M. le ministre veut faire payer le droit de
patente sur les intérêts. Nous serons obligés de prendre encore une mesure
contre M. le ministre des finances. J’en serai bien fâché, mais s’il ne veut
pas se rendre à de bonnes raisons, j’y serai force quoi que cela me coûte.
Il y a un mois déjà que j’ai vu l’arrêté ; j’ai
écrit aussitôt à M. le ministre
en l’engageant à examiner, avec soin, son arrêté que je trouvais illégal, le
prévenant que je serais obligé d’en entretenir la chambre s’il le maintenait.
Je verrai si mes collègues veulent s’occuper
aujourd’hui de cette affaire et s’il y a lieu d’en faire une proposition.
(page 126)
M. le ministre des finances (M. Malou). –
L’honorable M ? Osy est revenu sur la discussion d’hier, en émettant de
nouveau l’opinion que l’arrêté est inconstitutionnel. D’autres membres ont
soutenu une opinion contraire, et la chambre a décidé qu’elle examinerait
ultérieurement la question. Je me borne donc à faire mes réserves pour ne pas
paraître adhérer à l’opinion de l’honorable M. Osy.
L’honorable membre a traité trois autres
questions : ma question des cuirs, celle de la relâche à Cowes et, en
troisième lieu, la question des patentes des sociétés anonymes.
Dans l’intérêt de nos tanneries, je me hâte de
déclarer que le gouvernement a fait un mûr examen de cette question. Sous peu
de jours, une proposition pourra être soumise à la chambre. Je m’explique d’une
manière catégorique, parce que cette industrie excite à bon droit les
sympathies de la chambre, et que j’ai entendu plusieurs membres demander la
parole.
L’honorable membre vous a dit qu’il était armé
de toutes pièces pour discuter la question de la relâche à Cowes. Je me trouve
dans la même position. Comme elle doit se représenter à l’occasion du budget
des affaires étrangères ou de celui des voies et moyens, autant vaut la
discuter aujourd’hui : je suis prêt. Je ne dirai pas la même chose de ce
qui concerne les patentes, il me parait que l’on pourrait s’en occuper lors de
la discussion du budget des voies et moyens ; je ne me suis pas muni des
pièces qui me seraient nécessaires pour discuter la question ; je me
bornerai seulement à rectifier les faits.
Lorsqu’il s’agit du recouvrement des impôts,
c’est un vœu auquel je m’associe bien volontiers que d’éviter tout
procès ; mais il ne faut pas se faire illusion, le gouvernement ne
pourrait remplir sous ce rapport sa mission ; le ministre des finances ne
pourrait remplir le devoir pénible de faire payer des personnes qui n’en ont
pas envie, sans avoir de temps en temps des procès.
Cette
question de sociétés anonymes a été examinée très mûrement. Lorsque l’examen a
été terminé, j’ai donné des instructions aux fonctionnaires. Une difficulté
étant survenue, j’ai fait l’application d’une des dispositions de la loi
provinciale ; j’ai proposé au Roi d’annuler une décision qui me paraissait
contraire à la loi. On n’annule pas une décision d’une députation parce qu’elle
est contraire à un arrêté ministériel non publié ; cette décision a été
annulée parce que, dans l’opinion du gouvernement, elle est contraire à la loi.
Je ne touche pas au fond de la question ;
je fais seulement remarquer comment les choses se sont passées.
Messieurs, je n’aurai pas la prétention d’avoir
été plus adroit qu’aucun de mes prédécesseurs. Mais voici comment je comprends
les devoirs du ministre des finances. Lorsqu’il se présente sur l’application
de l’impôt une question nouvelle, c’est pour lui un devoir d’examiner quelle
est l’application légitime de la loi. Sans doute, il doit consulter les
précédents et la jurisprudence, mais si de cet examen résulte pour lui la
conviction que des sommes considérables sont distraites du trésor, il ne doit
pas reculer devant l’éventualité d’un procès pour sauvegarder les droits du
trésor.
M. Verhaegen. –
Comme les années précédentes, je voterai contre le budget des finances, car
tous les griefs que j’ai fait valoir précédemment subsistent encore
aujourd’hui. Comme toujours il y a luxe dans les hautes régions de
l’administration, tous les gros appointements sont assignés aux fonctionnaires
qui font preuve de dévouement dans le sens que MM. Les ministres assignent à ce
mot, et les petits employés qui travaillent du matin au soir, sans s’occuper de
politique, les receveurs ruraux, par exemple, ne trouvent pas dans leur trop
modeste salaire de quoi subvenir au strict nécessaire.
Ensuite, comme toujours, j’ai à reprocher à M.
le ministre des finances les plus craints abus en matière d’avancement ;
ainsi, l’année dernière je signalais la scandaleuse promotion dot avait été
favorisé le frère d’un des membres du cabinet au détriment d’une foule de
fonctionnaires inspecteurs et contrôleurs qui comptaient 25 et 30 années de
loyaux services, aujourd’hui je viens vous signaler une promotion non moins
révoltante qu’a su obtenir, il y a peu de temps, un receveur d’un de nos
faubourgs qui n’a d’autres titres à invoquer que de nombreux services
électoraux.
Mais ce qui met
à nu la conduite du gouvernement, c’est le système qu’il a développé
dans les arrêtés d’organisation de l’administration centrale du 21 novembre
courant, et ces arrêtés confirment mes anciens griefs.
Puisque l’occasion m’est offerte de dire
quelques mots de ces arrêtés, je la saisis avec empressement sauf à y revenir
encore plus tard lorsqu’un examen approfondi nous en aura fait apprécier toute
la portée.
D’abord, quel but a-t-on voulu atteindre en
procédant à l’organisation de l’administration centrale, et ce but a-t-il été
atteint ?
Messieurs, on a voulu un travail qui pût établir
autant que possible de l’uniformité dans l’administration. MM. Les secrétaires
généraux ont été chargés de jeter les bases d’un projet que les ministres ont
examiné ensuite. On s’est bien gardé de demander les avis des chefs de service
qui auraient pu cependant, à raison de leur expérience, apporter dans ce
travail un contingent de lumière.
MM. les secrétaires généraux ou au moins
plusieurs d’entre eux, en cherchant à s’attirer toutes les affaires traitées
par les chefs de service, paraissent avoir eu en vue de se créer des ministères
au petit pied. IL n’y a qu’au ministère des travaux publics où il soit stipulé
que le ministre travaille directement avec les chefs de division : partout
ailleurs, c’est par l’intermédiaire du secrétaire général que se fait le
travail.
Si cette disposition est mise à exécution, il en résultera dans la plupart des cas
que le ministre, qui ne connaîtra les affaires que par l’intermédiaire du
secrétaire général et qui ne travaillera qu’avec lui, ne pourra pas s’entourer
de tous les renseignements de détail ; car les affaires se traitent beaucoup
mieux, dans une foule de cas, de vive voix, de chefs de service à ministre,
qu’elles ne se traitent par écrit et par l’intermédiaire d’un secrétaire
général. C’est donc sous prétexte d’établir de la régularité, qu’on veut
s’exposer à des pertes de temps inévitable, et à des examens très incomplets
des affaires. Mais dans la pratique, il n’en sera pas ainsi, et l’on aura écrit
tout simplement une chose inutile.
Quant à l’uniformité que l’on a voulu établir et
qui entrait dans les vues de la chambre, elle n’existe pas dans les arrêtés
d’organisation du 21 novembre. Ainsi, dans deux ministères les affaires les
plus importantes de l’Etat sont confiées à des chefs de division ; à la justice et aux affaires étrangères, on conserve des
directeurs, des fonctionnaires chargés d’une direction. Au ministère de
l’intérieur on n’a point indiqué les attributions des chefs de division : dans
les autres ministères ces attributions ont été nettement déterminées.
On pourrait signaler bien d’autres bigarrures,
mais il est des points beaucoup plus importants que j’ai à signaler à
l’attention de la chambre. Il s’agit de certaines mesures sur lesquelles tons
les ministres sont parfaitement d’accord, et qui mettent tous les
fonctionnaires dans la complète dépendance du gouvernement, en même temps
qu’elles en font de véritables ressorts électoraux.
Dans chacun des règlements d’organisation, on
trouve établies avec beaucoup d’emphase les conditions à l’admission et à
l’avancement ; mais immédiatement après arrive une petite disposition
exceptionnelle qui sape par sa base le principe général, en mettant tous les
fonctionnaires sous la dépendance et le bon plaisir du ministre.
Dans le règlement pour l’organisation de
l’administration centrale au département de l’intérieur on trouve sous
l’article 19 la disposition suivante :
« Il peut néanmoins être dérogé à l’article
précédent, si les intérêts de l’administration
l’exigent ou lorsqu’il s’agit de
récompenser soit des services dont l’importance a été dûment constatée, soit
des preuves d’une capacité ou d’un déroutement extraordinaire. »
Le règlement pour les départements des finances
contient (article 52) une disposition en tous points identiques.
Dans les règlements pour les départements des affaires étrangères, de la justice et des travaux publics, on rencontre aussi
les mêmes dispositions, sauf qu’aux mots « dévouement extraordinaire », on a substitué les mots
« zèle extraordinaire ». Il
paraît que dans ces trois départements il y a eu encore un peu plus de pudeur.
Voyez l’article 24 du règlement pour le département des affaires étrangères,
l’article 17 du règlement, pour le département de la justice, et l’article 24
du règlement pour le département des travaux publics.
Ainsi, le fonctionnaire qui n’aura donné aucune
preuve de capacité, qui n’aura subi aucun examen, pourra, sans égard à des
droits d’ancienneté, être promu au poste le plus éminent par cela seul qu’il
aura fait acte de dévouement, et
M. le ministre de la guerre, dans un moment d’abandon et de naïveté, a déclaré
il y a peu de jours comment il entendait ce dévouement. D’ailleurs, d’après les
règlements mêmes, « dévouement »
est autre chose que « services
rendus au gouvernement », que « capacité », que « zèle », qu’ « aptitude » dans l’exercice des
fonctions ; c’est vraiment édifiant !
Ensuite ces règlements d’organisation font
défense aux fonctionnaires publics d’accepter un mandat électif « sans l’assentiment du ministre ».
On conçoit que le cumul des fonctions rétribuées
soit défendu, mais le mandat électif échappe à la censure ou à l’assentiment
ministériel. C’est presque violer la Constitution que de faire une pareille
défense, la loi seule peut prescrire les incompatibilités ; l’assentiment
du ministre serait une véritable mystification ; il aurait mieux valu déclarer
en termes généraux, que les fonctionnaires ne peuvent, dans aucun cas, accepter
un mandat électif, car il est évident que les électeurs repousseront toujours
l’homme qui aura accepté la candidature avec la permission du ministre. Déjà
naguère dans nos associations politiques on avait proposé de ne pas admettre
comme candidats des fonctionnaires publics. Que sera-ce à l’avenir lorsqu’ils
se présenteront porteurs d’une permission d’un ministre ?
On nous a assuré que c’est l’honorable M. Malou qui est l’auteur des
articles quant au mandat électif ; mais si le principe qu’il proclame est bon,
il aurait dû dans le temps se l’appliquer à lui-même et donner sa démission de
directeur au ministère de la justice, le jour où il a été élu représentant à
Ypres, le jour surtout où il a fait une vive opposition au gouvernement.
Il est vrai que quelque temps après M Malou a
donné sa démission, mais c’était sans doute alors, selon l’expression que M.
Nothomb s’est appliquée à lui-même, « dans le but d’améliorer sa position ». Il est à croire que
les velléités d’opposition dont M. Malou a si souvent fait preuve à la chambre
lorsqu’il était directeur au département de la justice, lui ont fait
reconnaître que la position d’un fonctionnaire représentant était trop délicate
et trop difficile ; c’est sans doute pour éviter des inconvénients semblables à
ceux qu’avait amenés naguère sa position
personnelle qu’il a fait insérer l’article. Fabricando fabri fimus.
Si c’est pour que les fonctionnaires dépendant
de l’administration centrale ne puissent pas être distraits de
leurs travaux, que la défense d’user (page
127) du droit le plus précieux du citoyen leur est faite, à plus forte
raison, cette défense devrait être faite
à MM. les gouverneurs des provinces commissaires d’arrondissement, qui
sont d’autant pins distraits de leurs travaux qu’ils ne résident pas aux lieux
où ils exercent leurs fonctions.
Il y aurait beaucoup d’autres choses à dire
encore sur les règlements du 2l novembre, par exemple, quant aux examens que
l’on fait subir aux employés jusqu’au grade de chef de bureau, alors qu’on n’en
exige pas de ceux qui occupent des fonctions plus élevées et qui souvent sont
plus incapables que leurs subalternes. Mais nous le savons, le dévouement et
surtout le dévouement en matière
électorale tient place de capacité.
On a voulu garantir aux employés un avancement
qui est dû à leur ancienneté, à leurs travaux ; mais on ne la leur garantit
réellement que jusqu’au grade de chef de bureau, dont le maximum de traitement
peut s’élever qu’à 4,000 francs. Ainsi en entrant dans l’administration un
jeune homme d’intelligence et de science peut espérer, après une longue
carrière administrative, d’atteindre au grade de chef de bureau et à un
traitement maximum de 4,000 fr. Mais les gros emplois, les gros traitements
sont livrés à l’arbitraire ministériel ; quelle que soit la capacité de
l’employé, il n’a aucune certitude d’arriver plus haut que le grade de chef de
bureau s’il ne montre un dévouement qui
ressemble à de la servilité ! Quelle position !
Nous concevons qu’il y ait certains emplois de
confiance, celui, par exemple, de directeur des affaires étrangères au
département des affaire étrangères, qui doivent être laissés à l’arbitraire du
ministre ; mais il n’en est pas de même de la plupart des hauts emplois pour
lesquels il aurait fallu, pour être juste, déterminer d’une manière invariable
les condition d’avancement.
Nous ferons, enfin, remarquer que M. le ministre
de l’intérieur a fait dans son département l’organisation la plus modeste et
qu’il a laissé la plus large part au ministre des finances, dont l’influence
dans les élections sera assurément la plus grande. Ainsi, il y a aux finances
trois directeurs généraux, des inspecteurs généraux, des directeurs, et tandis
qu’à l’intérieur il n’y a que de simples chefs de division moins rétribués que
les directeurs du département des finances.
On peut tirer, de tout ce
que nous venons de dire, diverses conséquences ; mais, nous nous bornerons à faire remarquer qu’il est assez
singulier que quelques jours avant d’obtenir la signature du Roi à ces arrêtés
d’organisation, M. le ministre de l’intérieur ait en quelque sorte violé
d’avance le principe qu’il comptait mettre à exécution peu de temps après. La
nomination ex abrupto d’un chef
de division à l’agriculture, qui peut connaître cette science, mais qui n’a
donné aucune preuve de son aptitude administrative, a fait voir aux
fonctionnaires de son département qu’il n’a aucun égard à leurs droits et que
toujours l’esprit de parti prend la place des sentiments de justice et d’équité.
Messieurs, nous reviendrons plus tard sur toutes
ces questions palpitantes d’intérêt. Nous voulions une organisation générale
pour tous les fonctionnaires, et non une organisation restreinte à la seule
administration centrale. Nous voulions une organisation par la législature, et
non par le pouvoir exécutif ; et les observations préliminaires que nous venons
de vous soumettre prouvent que nous avions raison. Nous nous réservons d’user
de notre droit d’initiative si, comme nous l’espérons, nos observations
trouvent de l’écho dans cette enceinte. Nous pouvons annoncer que notre travail
est presque achevé.
M. le ministre des
finances (M. Malou). – Messieurs, depuis plusieurs années on a demandé dans cette chambre
l’organisation des administrations centrales. L’honorable M. Verhaegen (et je crois que, sous
ce rapport, il était à peu près seul de son avis) demandait que cette
organisation fût introduite par une loi ; d’autres membres admettaient qu’il
était utile, nécessaire même jusqu’à
un certain point, de fixer les cadres, les conditions d’avancement, etc., mais
par des arrêtés royaux organiques. Nous avons satisfait, messieurs, et je
n’hésite pas à déclarer que nous avons satisfait d’une manière loyale et
complète au vœu des chambres ; aucune des questions soulevées, aucune de
garanties réclamées dans l’intérêt des fonctionnaires et dans l’intérêt du
gouvernement lui-même n’a été négligée.
On a voulu d’abord partir d’une idée trop
absolue et on n’a pas résisté à l’examen
; on a voulu que tous les arrêtés organiques fussent identiquement les mêmes,
qu’il n’y eût pas la moindre différence entre les administrations centrales des
divers départements. Eh bien, messieurs, des études suivies et approfondies ont
démontré l’impossibilité d’arriver à cette uniformité. il y a, messieurs, entre
les administrations centrales, des différences telles, que l’uniformité
absolue, telle que vient de la préconiser l’honorable membre, serait la
destruction de ces administrations et des services que le pays peut en
attendre. Ainsi, pour n’insister que sur une seule, je vais comparer le
ministère des finances qui a plusieurs hiérarchies dans les provinces, et un
ministère qui n’a point de fonctionnaires correspondants dans les provinces, et
je démontrerai par-là quelles sont les nécessités de l’organisation centrale
des deux départements.
J’ai été attaché au ministère de la justice qui
n’a dans les provinces d’autres administrations que des administrations en
quelque sorte indépendantes, le pouvoir judiciaire. Je suis arrivé au grade de
directeur après quatre années de service
dans l’administration de la justice. Au ministère des finances, au contraire, il existe une hiérarchie
établie non pas seulement depuis le grade de surnuméraire qui est le juste
objet de l’ambition d’un très grand nombre de personnes, mais depuis la
position d’aspirant surnuméraire, jusqu’au grade de directeur, qui correspond
au grade de directeur en province. On n’obtient ce titre qu’après une longue
carrière, après avoir passé par tous les emplois en province.
Ces fonctionnaires doivent donc être rétribués
convenablement, si l’on veut que l’administration centrale du ministère des
finances réunisse les plus grandes capacités qui se révèlent dans le service
des provinces, et nous devons le vouloir tous, puisque l’administration
centrale doit être la tête, la partie la plus intelligente et la plus active de
l’administration.
Il y a donc, messieurs, entre cette
administration et d’autres, des différences que l’on ne pourrait s’abstenir de
traduire dans les faits.
Cependant, messieurs, en écartant le principe
d’une uniformité absolue, nous nous sommes attachés avec le plus grand soin à
avoir la plus grande communauté possible de principes dans l’organisation, et
ce résultat n’a pas été obtenu sans difficulté.
Ainsi, messieurs, pour les points principaux,
pour les grades qui peuvent être assimilés quant au traitement et aux
conditions, d’admissibilité ou d’avancement, sauf de bien légères différences
qui chacune ont leurs motifs péremptoires, l’uniformité existe de la manière
dont la chambre l’a réclamé précédemment.
Je signale encore, messieurs, une autre
différence qui a fait l’objet des observations de l’honorable M. Verhaegen.
Dans certains ministères, le système de centralisation absolue, qui ramène
toutes les affaires au ministre par l’intermédiaire du secrétaire général, est
possible ; dans d’autres il ne l’est pas. Je tiens qu’en principe, d’après mon
expérience, la centralisation absolue, c’est-à-dire le passage de toutes les
affaires par le secrétaire général, est le meilleur système d’administration
centrale partout où il est praticable ; mais il est des ministères où il est
impossible, je citerai le ministère des finances : quelque laborieux que
puisse être un secrétaire général du ministère des finances, il est impossible,
à raison de la spécialité des affaires, à raison de leur nombre, que la
centralisation qui existe de temps immémorial au ministère de la justice, par
exemple, soit introduite.
Il a fallu, messieurs, dans le règlement
organique admettre cette différence, différence d’une nécessité telle que si,
demain, j’avais pour successeur l’honorable M. Verhaegen, je ne doute pas qu’il
ne la reconnût à l’instant même.
Ce serait, d’ailleurs, une erreur de croire que
ce système de centralisation établi dans quelques ministères ait pour
conséquence d’empêcher tout rapport direct entre le ministre et les chefs de
service ; le contraire s’est toujours pratiqué et doit pouvoir se pratiquer
encore ; aussi les nouveaux règlements organiques ne l’interdisent-ils pas.
En établissant ce système d’organisation, nous
nous sommes préoccupés aussi, messieurs, des faits existants ; nous avons pensé
que l’expérience était le meilleur guide pour le gouvernement, qu’il ne fallait
pas faire des essais sur l’administration centrale, mais qu’il fallait profiter
les faits acquis, de tout ce qui avait été reconnu utile et ne changer qu’à bon
escient. C’est ainsi, messieurs, que se réalisent les véritables progrès.
L’honorable M. Verhaegen a principalement
critiqué deux dispositions qui se trouvent dans tous les règlements ; l’une est
l’exception faite aux conditions d’avancement, l’autre est l’article relatif
aux incompatibilités. Messieurs, il faut singulièrement tourmenter la langue
française pour voir dans le mot « dévouement » autre chose que ce que
nous y voyons ; lorsque dans un arrêté organique on parle de zèle ou de
dévouement extraordinaire, il est évident, évident pour quiconque veut lire
sans préoccupation cette disposition, que l’on a entendu parler du zèle, du
dévouement pour les devoirs administratifs. Telle a été notre pensée commune,
et je m’étonne véritablement que l’honorable membre, qui a quelque habitude de
l’interprétation des lois, ait pu s’y méprendre.
Je justifierai l’exception par un deuxième
motif. Nous avons posé des règles très rigoureuses pour l’avancement il faut
passer d’un grade à l’autre ; il faut une durée de service pour pouvoir obtenir
une augmentation de traitement ; mais nous nous sommes demandé s’il n’était pas
l’intérêt de l’administration, que dans certaines circonstances le gouvernement
pût déroger à ces règles. Veuillez remarquer, messieurs, comment est conçue la
disposition. Nous avons voulu empêcher que ces conditions d’avancement, exigées
par l’intérêt individuel, fussent nuisibles à l’intérêt public, à l’intérêt du
gouvernement, et c’est ce que porte expressément l’article invoqué par
l’honorable membre. Ainsi, dans l’administration centrale, on parcourt huit ou
dix grades ; il se révèle parmi les jeunes gens une capacité extraordinaire ;
lorsqu’un homme pourrait rendre de très grands services, si la règle était
absolue, il faudrait vingt ans avant qu’on pût donner à cet homme distingué,
qui se serait révélé dans les rangs de l’administration, le poste où
l’appellent ses capacités, au profit de l’administration, au profit du gouvernement, et
nullement dans un intérêt électorat et politique, dont nous ne nous sommes pas
occupés lorsque cette exception a été admise.
L’article relatif aux incompatibilités est en partie
reproduit des lois que la chambre a admises pour l’ordre judiciaire et pour la
cour des comptes, et des dispositions que le gouvernement a prises en ce qui
concerne les commissaires d’arrondissement.
Il nous a paru, messieurs, que le gouvernement,
alors qu’il assurait la position des fonctionnaires des administrations
centrales, alors qu’il leur donnait en quelque sorte une constitution, avait le
droit d’exiger d’eux qu’ils se consacrassent entièrement à leurs fonctions.
C’est là, et c’est là exclusivement le motif de l’interdiction que nous avons
cru devoir admettre ; elle est tout entière dans l’intérêt du service.
(page 128)
L’honorable M. Verhaegen parlait des gros emplois et des petits emplois. Eh
bien, messieurs, quel est le motif de l’exception faite quant aux
incompatibilités ? C’est l’intérêt des petits fonctionnaires peu rétribués et à
l’égard desquels une règle trop absolue eût été une espèce d’injustice. Ainsi
il y a dans les administrations centrales des fonctionnaires très peu rétribués
dont les femmes tiennent un commerce ; et c’est exclusivement dans leur intérêt
qu’on a admis la possibilité d’exceptions pour les fonctionnaires inférieurs au
grade de chef de bureau.
Vous le voyez donc, c’est ici, que l’honorable
membre me permette de le dire, une disposition pour laquelle j’espérais
rencontrer au moins de l’indulgence, sinon de l’approbation.
L’honorable M. Verhaegen m’a attribué cette disposition tout entière J’en revendique
volontiers ma part.
La règle qui a été posée notamment en ce qui
concerne le mandat électif, je me la suis appliquée à moi-même en 1841.
Il y a une distinction que l’honorable M.
Verhaegen a complètement perdue de vue : l’autorisation ministérielle pour
accepter un mandat électif et l’exercice de ce mandat lui-même.
Pour moi, je ne comprendrais pas, indépendamment
de toutes règles écrites, qu’un fonctionnaire d’une administration centrale pût
se porter candidat à quelque degré que ce fût, sans en avoir averti le chef du
département, sans avoir obtenu son assentiment.
Mais, messieurs, de ce que cette autorisation
est donnée, s’ensuit-il d’une manière quelconque que le fonctionnaire ainsi élu
aliène son indépendance ? Mais non, messieurs, et c’est ainsi, lorsque la
question s’est présentée pour moi, que je m’en suis expliqué avec l’honorable
M. Leclercq, qui dirigeait alors le département de la justice. J’ai cru,
messieurs, bien que ce texte n’existât pas, qu’il y avait des raisons de
convenance suffisantes pour ne pas me charger d’occupations autres que celles
qui m’étaient confiées par le gouvernement, pour ne pas accepter un autre
mandat, sans l’assentiment du ministre.
S’ensuivait-il que, le mandat une fois conféré,
mon indépendance ne restât pas entière ? Il n’est aucun de vous, messieurs, qui
puisse l’admettre.
Cette disposition est prise dans le même but que
les autres interdictions. On a voulu que les fonctionnaires dont le sort était
assuré, était amélioré, consacrassent tout leur temps à leurs fonctions. Ce
serait encore une erreur d’interprétation de croire que le paragraphe relatif
aux exceptions porte sur le mandat électif. Il est évident, d’après la
rédaction de l’article, que l’exception qui
est faite ne porte que sur l’interdiction de participer à la direction
d’un établissement industriel ou sur l’interdiction d’exercer un commerce, et
que tous les fonctionnaires, quel que soit leur rang, se trouvent placés sur la
même ligne en ce qui concerne la première partie du paragraphe 2.
L’honorable membre a fait une autre observation,
et il m’est difficile de lui assigner une portée sérieuse. Il a compté le
nombre des articles de chacun des règlements, et il a dit qu’ils étaient
d’autant plus électoraux qu’ils étaient plus longs ; d’où il s’ensuivait que le
ministère des finances devait avoir 82 articles...
M. Verhaegen. -
J’ai dit cela ?
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Vous avez dit qu’on avait fait la plus large
part au département des finances, parce que c’était le ministère le plus
électoral, tandis que le département des affaires étrangères, qui était moins
électoral, avait moins de place au Moniteur.
M. Verhaegen. - Les
articles ne font rien. C’est le fond.
M. le ministre
des finances (M. Malou). - Soit. Je reproduis l’objection, et je crois y
avoir répondu en la reproduisant.
Messieurs, dans un ministère, par exemple, comme celui des affaires étrangères, où
il se trouve trois directions, qui n’ont que très peu de personnel au dehors, où
les affaires sont très importantes, je le reconnais, mais peu nombreuses,
faut-il des cadres aussi étendus qu’il en faut pour le département des
finances, qui a en province une hiérarchie de 9,000 fonctionnaires et employés,
qui a, pour le nombre, dix à
quinze fois autant d’affaires que le ministère des affaires étrangères ?
Peut-on admettre que les cadres seront les mêmes dans l’un et dans l’autre ? et
si l’on ne peut pas l’admettre, que devient l’observation de l’honorable M. Verhaegen ?
Ainsi, au ministère des finances il existe
quatre grandes administrations ; et deux de ces administrations ont, pour le
nombre des affaires, pour le personnel qu’elles exigent, un plus grand
développement que tel autre de nos départements ministériels tout entier. Et vous
vous étonnez après cela que les cadres ne soient pas les mêmes, qu’on n’ait pas
le même nombre de chefs de division, le même nombre de chefs de bureau dans les
départements ? Mais, messieurs, on aurait fait, permettez-moi l’expression, une
organisation à rebours du sens commun, si l’on avait voulu pousser l’amour de
l’uniformité jusque-là.
L’honorable M. Verhaegen s’étonne que les gros
emplois soient plus rétribués et que les emplois inférieurs soient moins
rétribués. Messieurs, ici encore il m’est impossible d’être de son avis. Il
faut bien que l’avancement donne des droits à un traitement plus fort. Il
faudrait prouver que la hiérarchie des traitements qui est établie, ne l’est
pas selon les règles de la justice, selon les véritables intérêts de l’administration.
Or, à cet égard l’on n’a pas même essayé une preuve.
L’honorable M. Verhaegen m’a parlé des
traitements des receveurs en province. Il ne s’agit pas ici des traitements des
receveurs en province. C’est une hiérarchie complétement différente ; nous
pourrons discuter un jour, et déjà
je m’en suis occupé, quel est le meilleur système de rémunération de tous les
fonctionnaires en province. Mais ici, il s’agit de savoir si les traitements
comparés les uns aux autres, comparés même à ceux qui existent en province, ont
été établis conformément aux règles de la justice distributive et aux intérêts
bien entendus de l’administration/
Messieurs, l’honorable membre a reproduit cette
assertion, qu’au ministère des finances toutes les places seraient données à la
faveur, à ce qu’on appelle le dévouement.
Je proteste contre une telle allégation ; elle
est complètement inexacte ; des nominations que j’ai faites dans
l’administration des contributions, il n’y en a pas une qu’administrativement
je ne sois prêt à justifier.
Ainsi, l’honorable membre a fait allusion à la
nomination d’un receveur à Bruxelles ; si j’ai bien compris, il s’agit du
receveur de Molenbeek, nommé à Bruxelles. Voici ce qui s’est passé pour cette
nomination. J’ai essuyé dans le journal l’Observateur
une très violente attaque au sujet de cette nomination ; j’ai fait
insérer au Moniteur dix lignes
purement administratives où j’ai expliqué les titres du fonctionnaire qui avait
été nommé ; l’Observateur, je
le reconnais, a eu la bonne foi de reproduire l’article du Moniteur, et il n’y
a pas ajouté un mot...
M. Verhaegen. - Il
ne s’agit pas de cette nomination-là.
M. le ministre des finances (M. Malou). - Je
serais charmé de savoir de quelle autre nomination il s’agit ; je ne me
rappelle pas la nomination d’un receveur de campagne qui aurait été transféré à
Bruxelles depuis plusieurs années. (Interruption.)
L’honorable M. Verhaegen me donne une indication
qui me met sur la voie du fait dont il a voulu parler. Il s’agit d’un
fonctionnaire que j’ai trouvé dans une des sections de Bruxelles, qui a passé
d’une section dans une autre, sans qu’il en résulte pour lui une bien grande
amélioration.
Je le répète, sans craindre aucun démenti :
depuis que je suis au ministère des finances, je me suis attaché, dans toutes
les nominations, à être juste envers les fonctionnaires, à avoir égard à leurs
services et à leurs titres, et c’est ainsi seulement qu’on peut établir dans
une hiérarchie aussi vaste le sentiment de la justice et de la confiance envers
le gouvernement, le sentiment du devoir et de l’émulation dans tous les ordres
de fonctionnaires ; sans ces sentiments, cette grande administration ne
pourrait rendre au pays les services que les chambres et le gouvernement sont
en droit d’en attendre.
M. David. -
Messieurs, l’honorable ministre des finances, en répondant tout à l’heure à
l’une des trois questions qui ont été soulevées à l’ouverture de la séance par l’honorable
M. Osy, a fait observer que le reproches, adressés par cet honorable membre à
la loi des droits différentiels, étaient prématurés. Pour moi, messieurs, je ne
vois rien de prématuré dans la critique faite à l’occasion d’une fâcheuse loi
que nous subissons malheureusement déjà depuis deux ans environ, et dont la
tannerie belge a éprouvé tant de pertes.
Je ferai observer à M. le ministre des finances
qu’une seule petite ville du royaume, Stavelot qui ne compte que deux mille
habitants, a été, par suite de la loi des droits différentiels, soumise à une
contribution extraordinaire de plus de 50,000 fr. pendant les deux années et plus qui nous séparent déjà de la
promulgation de cette loi. On pourra peut-être contester ce chiffre ; lorsque
la discussion sera arrivée sur ce point, je me fais fort de signaler les sources auxquelles j’ai puisé mes
renseignements que je garantis d’avance exacts.
Messieurs, la tannerie belge doit savoir gré à
l’honorable M. Osy d’avoir soulevé la discussion par laquelle la séance a
commencé. Quant à moi, je lui en exprime mes sincères remerciements au nom d’un
immense intérêt. Les observations qu’a présentées l’honorable M. Osy, sont.
fondées, et la chambre pourra surtout puiser des renseignements bien certains,
bien vrais dans une lettre qui a été reproduite à la fois par le Journal du Commerce d’Anvers et par
le journal l’Emancipation, lettre
qui provient le M. Emile Grisar d’Anvers, qui fait connaître à peu près tout ce
qu’il y a de plus essentiel à dire sur l’important article dont nous aurons à
nous occuper, lorsque M. le ministre des finances nous saisira de la loi qu’il
se propose de nous soumettre.
Messieurs, je viens donc appuyer la réclamation
de l’honorable M. Osy ; je me joins à lui pour demander que l’on nous présente
cet important projet de loi dans le plus bref délai possible. L’article « cuirs » a
été trop légèrement traité dans la loi générale sur les droits différentiels,
pour qu’on ne s’efforce de parer aux griefs des tanneurs par une loi spéciale
et réparatrice. Déjà, lors des débats qui ont eu lieu à l’occasion du traité
avec la Hollande, j’ai mis tous mes efforts à faire ressortir combien la
position des tanneurs belges était mauvaise ; mes paroles n’ont pas été,
jusqu’à présent, prises en considération, et si elles devaient continuer à
avoir le même sort, je demanderais à l’honorable M. Osy, et à mes honorables
collègues qui ont ici le plus grand intérêt à s’occuper, en même temps que moi,
de l’industrie de la tannerie, je leur demanderais de vouloir bien se joindre à
moi, pour présenter ce projet de loi, à défaut de l’initiative du ministère des
finances. (Interruption de M. le
ministre des finances.) Vous l’avez promis ; mais j’ai tant entendu de
promesses qui n’ont pas eu d’exécution, que je me permettrai de vous
recommander, d’une manière toute spéciale, l’objet dont il s’agit. (Interruption.)
Je dirai cependant qu’à la manière dont M. le
ministre des finances me promet cette fois son concours, je commence à croire
que nous pourrons enfin nous passer de nouvelles protestations.
Bien qu’on dise que la discussion est
prématurée, je ferai encore (page 129)
observer dès à présent que la loi des droits différentiels, l’ouverture
simultanée du bureau de Francorchamps à la sortie des écorces à tan est une loi
qui paraît avoir été faite en réalité plutôt pour la Prusse que pour les
Belges. (Interruption.) Il est fort
facile de démontrer que la loi des droits différentiels, en ce qui concerne
l’article « Cuirs », est
tout à fait dans l’intérêt de la Prusse, je ne dirai pas par la volonté
expresse du législateur... (interruption),
mais au moins involontairement.
Soit que nous exportions les cuirs fabriqués en
Belgique vers la Prusse, avec acquittement des droits du Zollverein ; soit que
nous le expédiions vers les parties qui sont restées libres pour la Prusse
comme pour nous, comme le Danemark, le Hanovre, la Suède, les villes
hanséatiques, etc., nous avons un désavantage de 4 à 5 pour cent vis-à-vis de
nos voisins ; et nos voisins, messieurs, se servent de nos ports et de nos
chemins de fer pour nous exploiter par-dessus le marché. Comment serait-il
possible de nous retenir enchaînés plus longtemps dans ce cercle fatal ? Ce
serait une révoltante injustice, injustice dont n’a à se plaindre aucune autre
industrie du pays.
M. le président. - Un
projet de loi étant positivement annoncé, ne vaudrait-il pas mieux, M. David, ne pas traiter maintenant
cette question, afin d’éviter que d’autres orateurs ne demandent la parole sur
cet objet et ne fassent dévier la discussion du budget des finances ?
M. David. – Si
je n’avais pas eu l’intention de soulever la discussion, je n’aurais pas pris la
parole ; du reste je n’ai plus que très peu de chose à dire, et je vais nie
restreindre dans le cadre le plus étroit possible.
M. le président. -
Continuez !
M. David. - Je
voudrais que dans la loi qu’on va nous proposer, le principe de la franchise de
droit, autant que faire se peut, sur les matières premières nécessaires à
l’industrie des tanneries belges, soit un principe consacré pour l’industrie
que je viens de nommer comme il l’est pour toutes les autres industries en
général. Voilà dans quel sens et sur quelles bases je voudrais que le projet
qu’on vous annonce fût conçu, car si on se bornait à changer quelques chiffres
du tarif de la loi des droits différentiels à l’endroit du cuir des îles, le
mal dont on se plaint avec tant de raison subsistera, ne sera pas déraciné ; il
est plus que temps que les tanneries soient mises dans une position normale.
Messieurs, on ignore généralement la position de
la tannerie belge qui compte dans cette enceinte si peu d’échos. Voulant
rétrécir, d’après les observations de M. le président, les observations que
j’ai à présenter, je ne vous exposerai pas le triste tableau de la décadence de cette grande
industrie, à laquelle poussent nos propres lois, sans que la Prusse elle-même
sache que nous travaillons pour elle. A coup sûr, on ne voudra pas mettre au
rang des industries dont la prospérité est croissante, cette de la tannerie
belge. Je renouvelle l’invitation que j’ai adressée à M. le ministre des
finances, de nous présenter le plus tôt possible le projet de loi qu’il nous a
solennellement annoncé.
M. Osy. - Dans la discussion en sections du budget des
voies et moyens, j’ai parlé des observations que j’avais à présenter sur
l’arrêté, que je qualifie d’illégal, concernant les patentes. Dans la section
centrale du budget des voies et moyens, on en a parlé, et si mes renseignements sont exacts, la section centrale
a décidé qu’elle ne s’en occuperait pas ; c’est ce qui m’a déterminé à en
entretenir la chambre ; je ne me
refuse pas à me rendre au désir manifesté par M. le ministre des finances, je
consens à reproduire ma motion lors de la discussion du budget des voies et
moyens, mais je le prierai de publier par la voie du Moniteur son arrêté du 31
décembre 1845, pour que les membres de la chambre puissent tous étudier
la question d’ici à l’époque de la discussion du budget des voies et moyens.
Cet arrêté se trouve entre les mains de tous les directeurs de contributions.
Je demanderai s’il ne conviendrait pas que la section centrale du budget des
voies et moyens s’occupât de cet arrêté relatif à la loi de 1823, et fît un
rapport, ce qui faciliterait la discussion. Nous aurions un avis préalable de la section centrale, la discussion
serait plus courte.
Je fais la proposition de lui renvoyer la
question et de lui demander un rapport.
M. Orban. - J’ai demandé la parole pour faire
connaitre ce qui s’est passé à la section centrale du budget des voies et moyens,
à propos de la question qui vient d’être soulevée. Mon but est de faire écarter
la proposition de l’honorable M. Osy, de renvoyer cette question à la section
centrale. La section centrale a jugé que cette affaire étant soumise aux
tribunaux, il n’y avait pas pour elle lieu d’examiner la question de droit.
Mais elle a soulevé une question de compétence
qui lui a paru d’une nature plus grave et plus intéressante c’est celle de
savoir si un ministre peut annuler la décision d’une députation en matière de
patente. Cette question est soumise à la
section centrale, la chambre aura à l’examiner
lors de la discussion du budget des voies et moyens.
M. le ministre des finances (M. Malou). – Je
prends volontiers l’engagement de faire
insérer au Moniteur la
circulaire du 31 décembre 1845. Si je puis insérer d’autres actes et exposer
dans son entier l’opinion contraire, je
le ferai. J’appelle
moi-même la plus libre discussion de la chambre sur cette question ; cette
publication suffira peut-être pour rendre inutile la proposition de l’honorable
M. Osy. D’un autre côté, M. le rapporteur de la section centrale m’a demandé
des renseignements. Je craindrais,
si la proposition de M. Osy était adoptée, qu’il n’en résultât un ajournement
du vote du budget des voies et moyens. Je demande qu’on se borne, quant à présent, à cette publication. Si,
lors de la discussion, on croit qu’une
autre proposition doive être faite, on la soumettra à la chambre.
M. Osy. – la
section centrale pourrait faire un rapport séparé sur la question que j’ai
soulevée ; de cette manière le vote du budget des voies et moyens n’éprouverait
pas de retard.
M. le ministre des finances (M. Malou). - La question
est soumise aux tribunaux, d’un autre côté il n’est pas conforme aux précédents
de la chambre de renvoyer une question à une commission ou à une section
centrale. Le budget des voies et moyens a été renvoyé à l’examen d’une section
centrale ; cette section centrale remplit son mandat ; s’il y a à propos de ce
budget des questions à soulever, qu’on les
soulève ; mais il est insolite de renvoyer une question à une section centrale
pour avoir un rapport supplémentaire. On renvoie une proposition ou un projet,
mais jamais une question, à une section centrale.
M. Lejeune. - La
question dont l’honorable préopinant a entretenu la chambre, a été soulevée à
la section centrale du budget des voies et moyens ; elle s’est présentée naturellement
; la section centrale était obligée par son mandat de s’en occuper ; il faudra
bien que vous en voyiez quelque chose dans son rapport. Il faut attendre ce
rapport ; si alors on croit devoir faire une proposition à la chambre, on verra
s’il y a lieu de la renvoyer à la section centrale ; on verra s’il y a lieu de
discuter et d’approfondir immédiatement la question, ou de renvoyer à la
section centrale, en présence de cette circonstance que les tribunaux sont
saisis de l’affaire.
M. Verhaegen. -
Pour ne pas abuser des moments de la chambre, je ne prolongerai pas la
discussion que j’ai soulevée, quant aux arrêtés du 21 novembre ; je me réserve
de revenir sur ce point ; je pense que la chambre ne laissera pas passer inaperçues
des dispositions aussi importantes que celles que j’ai signalées, notamment
celle qui interdit d’accepter un
mandat électif sans le consentement du gouvernement. Je n’ai qu’un seul mot à
dire à M. le ministre des finances relativement aux observations qu’il a
faites, c’est que son collègue le ministre de la guerre nous a expliqué, il y a
quelques jours, comment il entend le dévouement et l’acceptation du mandat
électif par les fonctionnaires. Je rends hommage à la franchise de ce membre du
cabinet.
II nous a dit en termes explicites que si le
gouvernement avait donné naguère à M. le
colonel Eenens son assentiment pour qu’il se portât candidat à la chambre, il
lui donnerait encore la même autorisation, s’il voulait agir dans l’intérêt du
ministère et le défendre.
M. le ministre des
finances (M. Malou). – Il n’a pas dit cela.
M. Verhaegen. -
Voilà donc un fait expliqué pour tous. Quand le gouvernement permettra à un
fonctionnaire public de se porter candidat pour un mandat électif, il faudra
que ce fonctionnaire public prenne l’engagement de défendre MM. les ministres !
- La discussion générale est close.
La chambre passe à l’examen des articles.
Discussion des articles
Chapitre premier. –
Administration centrale
Article
premier
« Art. 1er. Traitement du
ministre : fr. 21,000. »
- Adopté.
« Art, 2. Traitement des fonctionnaires et
employés : fr. 458,000. »
M. le président. - Il y
a un amendement dclii. le ministre. Voici en quoi il consiste :
Il faut se reporter aux développements du
budget, page 130 ; l’article 2 du budget des finances s’y trouve développé.
M. le ministre propose au paragraphe 2 de
l’article 2, Secrétariat général, une augmentation de 2,200 f r., ce qui porte le chiffre à 47,200 fr.
Au paragraphe 3, Trésor public, une augmentation
de 4,400 fr., ce qui porte le chiffre à 114,000 fr.
Au paragraphe 4, Contributions, une augmentation
dc 16,770 fr., ce qui porte le chiffre à 156,770 fr.
Au paragraphe 5, Enregistrement, une
augmentation de 1,700 fr., ce qui porte le chiffre à 85,700 fr.
De sorte que le chiffre de l’article 2 serait
augmenté de 24,670 fr., ce qui le porte à 483,070 fr.
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Messieurs, le nouveau règlement organique du
ministère des finances contient une disposition dont je demanderai à la chambre
la permission de donner lecture :
« Art. 68. Le personnel de l’administration
ne peut en aucun cas et sous aucun motif être rétribué sur des fonds qui ne
sont pas spécialement alloués pour cette destination par la loi du budget. »
Pour donner à cet article une exécution
complète, je crois devoir demander à la chambre d’autoriser le transfert de
certaines sommes, d’autres articles à l’article 2 du chapitre premier.
Ainsi, messieurs, pour ce qui concerne d’abord
le chiffre le plus élevé, il existe, la chambre le sait, une administration de
la masse d’habillement d’équipement de la douane. Comme le service des douanes
se trouve province, la masse d’habillement, depuis 1830, a toujours été payée
sur le crédit de l’administration des douanes.
Dans l’arrêté organique j’ai transféré cette
administration du service des provinces à l’administration centrale. Je propose
en conséquence de déduire des articles 1 et 4 du chapitre VII une somme de
16,770 fr. et de l’ajouter au crédit affecté à l’administration centrale des
contributions directes. Il ne résulte de là aucune augmentation de budget ;
c’est un simple transfert d’attributions en même temps que de traitements.
Quant au secrétariat général, jusqu’à présent
une somme de 2,200 fr. a été prélevée sur le crédit de la statistique pour le
payement du travail extraordinaire, travail incessant, qu’exigent les publications
statistiques et les nombreux renseignements qui sont demandés, le propose
également à la chambre d’ajouter cette somme au paragraphe 2 de l’article 2 et
de le retrancher du chiffre de la statistique. Il n’y a là encore aucune
augmentation (page 130) de dépenses.
Seulement le gouvernement maintiendra le principe de l’article 68 que je viens
de lire.
La même observation s’applique l’administration
de l’enregistrement. L’inspecteur forestier des provinces de Brabant et
d’Anvers a un service à faire à
l’administration centrale. Jusqu’à présent il était payé sur le service des
provinces. Je propose à la chambre de reporter au budget de l’administration
centrale la somme qui excède le minimum de son traitement comme agent en
province, soit une somme de 900 fr.
Il y a
aussi un brigadier des forêts qui se trouve attaché à l’administration centrale
et dont la position doit être régularisée en vertu de la même disposition.
Enfin, messieurs, à l’administration du trésor
publie, on a constamment payé, sur le crédit affecté pour la dette flottante,
une somme de 4,000 fr.
Cette imputation, admise par la cour des
comptes, a toujours été portée à la connaissance de la chambre, lorsque le
compte de négociation et d’émission des bons du trésor lui a été soumis.
Désormais, messieurs, le chiffre de
l’administration centrale sera véritablement sa liste civile, et il sera
impossible, en présence de l’article 68 du règlement organique, qu’aucune autre imputation, soit sur
des crédits de l’administration centrale non affectés au personnel, soit sur
les crédits des provinces, soit affecté partiellement au traitement de
fonctionnaires et employés. C’est là, si j’ai bon souvenir, une des garanties
les plus importantes que les chambres ont toujours demandées.
M. Lys. - N‘y a-t-il aucune augmentation ?
M. le ministre des
finances (M. Malou). - On me demandé s’il y a une augmentation à
raison des 4,00 fr. de la dette flottante. J’ai obtenu avant-hier le chiffre de
600.000 fr. pour la dette flottante ; je n’ai pas cru devoir le réduire de
4,000 fr. pour ce transfert.
M. le président. -
Pour bien faire comprendre les amendements de M. le ministre des finances,
j’aurais bien fait de dire qu’à côté de ces augmentations se trouvent des
réductions de même somme aux articles suivants, sauf pour les 4,000 fr. dont
vient de parler M. le ministre ; de manière qu’il ne s’agit que d’un transfert.
M.
Orban. - Messieurs, comme M. le
ministre des finances vient de vous le faire connaître, vous voyez que par le
passé on prélevait, sur les différentes allocations du budget, des sommes
destinées aux traitements des employés. C’était là une marche irrégulière et
qui était évidemment eu opposition avec la loi, qui ne permet pas dc transférer
une dépense d’un article du budget à un autre.
Le même fait nous été signalé, il y a un
instant, à la section centrale qui examine le budget de l’intérieur, par le
chef de ce département. Lui aussi demande que cet état de choses soit
régularisé, c’est-à-dire qu’on reporte les différentes sommes qui étaient
prélevées pour le personnel sur les allocations spéciales du budget, à
l’article relatif aux traitements des employés de l’administration centrale.
Nous avons trouvé, messieurs que la proposition
était bonne et qu’il fallait l’adopter Mais en même temps, nous nous sommes
demandé comment un pareil abus avait pu
se produire par le passé en
présence des dispositions formelles de la loi, et si l’arrêté relatif à
l’organisation de l’administration
centrale du département de l’intérieur qui contient une disposition sur ce
point, sera mieux observé à l’avenir que les dispositions de la loi, si en
d’autres termes ou ne pourrait pas violer des dispositions réglementaires tout
aussi bien qu’une disposition formelle de la loi.
Dans la crainte que pareil
abus ne se reproduise, nous ayons proposé une nouvelle rédaction de l’article
relatif aux employés, qui consisterait à ajouter au libellé du projet ces mots
« et sans qu’à l’avenir aucune somme puisse être prélevée sur les
allocations spéciales du budget, polir augmenter le chiffre relatif aux
employés. »
Voilà, messieurs, la détermination qui a été
prise par la section centrale chargée de l’examen du budget de l’intérieur.
Comme la proposition que vient de faire M. le ministre des finances est
absolument identique, je crois que la même disposition doit trouver place dans
le budget de son département. J’aurai en conséquence l’honneur de proposer de
libeller l’article relatif aux employés de la manière que je viens d’indiquer.
Ce sera un avertissement pour la cour des
comptes. Ce sera en même temps pour elle un moyen de résister aux tentatives
qui pourraient être faites pour rentrer dans les anciens errements.
M. le ministre des finances (M. Malou). -
Messieurs, je me rallie pleinement au principe énoncé par l’honorable M. Orban,
mais nous devons nous entendre sur la rédaction. Si ce principe est admis,
l’article 68 de l’arrêté organique aura la sanction de la loi, et c’est le vœu
que je forme.
Quant à la rédaction il me semble que l’on ne
peut pas s’exprimer en termes trop généraux et de manière à comprendre, par
exemple, les frais de route et de séjour. Je propose de dire : « Sans que
le personnel de l’administration centrale puisse être rétribué sur d’autres
fonds alloués par la loi du budget.
M. de Brouckere. - Je
demanderai à faire une observation. D’après les développements que M. le
ministre des finances vient de nous donner, je vois qui est des employés de
l’administration centrale qui seront payés en partie sur les fonds alloués pour
les services des provinces et en
partie sur les fonds alloués pour l’administration centrale. A mon avis c’est encore là une confusion
qu’il faut éviter.
Je citerai un des
cas que M. le ministre nous a
indiqués lui-même.
Il y a
au ministère de finances un inspecteur des eaux et forêts qui, comme
inspecteur, a dans son ressort deux provinces. Il touche un traitement en cette
qualité d’inspecteur des eaux et forêts, et en outre on lui donne un autre
traitement comme remplissant certaines fonctions à l’administration centrale.
C’est là, selon moi, une fâcheuse complication. Qu’on donne à cet employé le
maximum du traitement affecté à son grade, mais qu’il ne reçoive aucun autre
traitement imputable sur le fonds de l’administration centrale.
Il peut convenir à M. le ministre des finances
que le titulaire actuel remplisse deux fonctions. Mais peut-être ce cumul ne
conviendra pas à son successeur, ou même, si l’inspecteur était changé et si un
autre titulaire le remplaçait, il ne conviendrait peut-être pas encore à M. le
ministre des finances de lui conférer les deux fonctions.
Je n’aime pas ces sortes de complication. Je
demande donc à M. le ministre des finances quelle difficulté il trouve à
laisser pour ces sortes d’employés les choses comme elles sont, c’est-à-dire à
laisser, par exemple, l’inspecteur des eaux et forêts porté au maximum de son
traitement dans le service des provinces, sans faire de transfert à cet égard.
M. le ministre des finances (M. Malou). -
Messieurs, la position du fonctionnaire dont vient de vous entretenir
l’honorable membre, est tout à fait exceptionnelle. Les attributions qu’il a à
l’administration centrale sont moindres,
beaucoup moindres que ses attributions en province. Cette position anormale
existe par suite de raisons d’économie ; si j’attachais ce fonctionnaire à
l’administration centrale, je devrais créer immédiatement un inspecteur en
province, et ses attributions à l’administration ne sont pas assez étendues
pour justifier l’allocation d’un pareil traitement.
Je
pense, messieurs, que sans violer le principe porté à l’article 68 du règlement
organique, sans contrevenir au vote que la chambre émettra probablement sur la
proposition de l’honorable M. Orban,
cette position exceptionnelle peut être maintenue, dans l’intérêt de
l’économie, en reportant au budget la part afférente à l’administration
centrale et en laissant subsister le traitement minimum du service des
provinces.
Si l’on veut aller plus loin, il faudrait porter
au budget de l’administration centrale le traitement entier, parce qu’autrement
on supprimerait le concours utile que me donne, à l’administration centrale, le
fonctionnaire dont il s’agit.
- Le chiffre de 483,070 fr. est mis aux voix et
adopté.
M. le président. - M.
Orban se rallie-t-il au libellé proposé par M. le ministre des finances ?
M.
Orban. -
Oui, M. le président.
Article 3
« Art. 3.
Frais de tournées : fr. 8,000. »
- Adopté.
« Art. 4.
Matériel : fr. 47,000. »
M. le président. - La
section centrale propose une réduction de 4,000 fr.
M. le ministre se rallie-t-il à la réduction
proposée par la section centrale ?
M. le ministre des finances (M. Malou). - M.
le président, je. ne voudrais pas soulever une longue discussion sur ce chiffre
de 4,000 fr. D’après la note qui m’a été remise, les adjudications faites pour
les fournitures de bois ont dépassé les prévisions que l’on avait données. D’un
autre côté, l’excellente récolte de colza dont vous a parlé la section
centrale, n’a pas notablement influé sur le prix des huiles.
Je crains donc que, si l’on réduit le chiffre,
le crédit ne pourra pas suffire.
Pour produire dans l’avenir une économie sur ce
crédit, j’ai l’intention de faire dans une partie des locaux occupés par le
département des finances l’essai d’un autre système de chauffage, qui présente
beaucoup moins de danger et promet aussi dans l’avenir une notable réduction de
dépenses. Si ce système réussit, j’aurai l’honneur de proposer à la chambre
soit une demande supplémentaire pour l’introduire partout, soit une demande de
crédit au budget de 1848.
M. Zoude. -
Messieurs, la section centrale a proposé une réduction de 4,000 fr., parce qu’à
la suite d’un hiver aussi remarquable par la douceur de la température, que l’a
été l’hiver dernier, il a dû se faire dans les bureaux du département des
finances la même économie que partout ailleurs.
Quant au prix des huiles, M. le ministre des
finances dit que la baisse est de peu d’importance. Cependant, messieurs, il
est connu que la baisse est d’au moins 20 p. c.
D’ailleurs, il y a une autre observation à faire
valoir ; c’est que vous ne trouverez dans aucun autre budget une demande de
crédit aussi considérable pour le chauffage et l’éclairage.
Je demande
donc que la chambre veuille maintenir la réduction de 4,000 fr.
Quant au chiffre de 3,000 fr., la section centrale insiste pour qu’il figure dans la
colonne des dépenses extraordinaires, et je ferai remarquer à cet égard ce que
porte une note insérée au budget des travaux publics. Nous lisons dans cette
note :
« On demande pour 1847 la somme accordée en
1845. An moyen dc cette allocation, il sera pourvu à l’entretien, pendant une
année, de tous les palais, hôtels et monuments de l’Etat, au nombre de 23. »
D’après cette observation, messieurs, il y aurait lieu de demander la
suppression du chiffre de 3,000 fr.
Je ne ferai pas cependant cette demande, mais j’insiste pour que la chambre adopte
la réduction de 4,000 fr.
- Le chiffre de 47,000 fr. est mis aux voix ; il n’est pas adopté.
Le chiffre proposé par la section centrale est
ensuite adopté.
Article 5
à 8
« Art. 5. Service
de la monnaie : fr. 7,200. »
- Adopté.
________________
« Art. 6. Multiplication des coins et
coussinets pour la fabrication des diverses monnaies et frais de
comptage : fr. 10,000. »
- Adopté.
________________
« Art. 7. Achat de matières et frais de
fabrication de pièces de cuivre : fr. 400,000. »
- Adopté.
________________
« Art. 8. Magasin général des
papiers : fr. 135,000. »
- Adopté.
Article 9
« Art. 9. Frais
de rédaction et de publication de documents statistiques : fr.
23,000. »
M. le ministre des finances propose de réduire
ce chiffre de 2,200 fr., qui ont été ajoutés à l’article 2.
- Le chiffre ainsi réduit est adopté.
Chapitre II. –
Administration du trésor dans les provinces
Articles 1
et 2
« Art. 1er. Traitement
des directeurs : fr. 86,550. »
- Adopté.
_________________
« Art. 2. Caissier général de l’Etat :
fr. 250,000. »
- Adopté.
Chapitre III. –
Administration des contributions directes, cadastre, douanes et accises, de la
garanti des matières d’or et d’argent, etc.
Articles 1
à 8
« Art. 1er.
Traitement des employés du service sédentaire : fr. 872,500.
« (Les suppléments de traitement pour
pertes résultant de la suppression de leges ne pourront être imputés sur
l’article premier que jusqu’à concurrence d’une somme totale de 22,000
fr.) »
M. le ministre des finances propose de
retrancher de ce chiffre une somme de 4,000 fr, qui a été transférée à
l’article 2 du chapitre premier.
- L’article est adopté avec cette réduction.
__________________
« Art. 2. Remises et indemnités des
comptables : fr. 4,710,000.
« (L’excédant de dépense résultant de la
balance des maxima et des minima de remises et indemnités,
ainsi que des suppléments de traitement accordés à des receveurs rétribués au
moyen de remises proportionnelles, ne pourra dépasser la somme de 23,000 fr.)
- Adopté.
__________________
« Art. 3. Traitement des employés du
service actif (contributions directes,
cadastre et comptabilité) : fr. 501,200. »
- Adopté.
__________________
« Art. 4. Traitement des employés de la
douane et recherche maritime : fr. 3,950,200. »
M. le ministre des finances propose de
retrancher de cet article une somme de 12,000 fr., transférée à l’article 2 du
chapitre premier.
- L’article est adopté avec cette réduction.
__________________
« Art 5. Traitement des employés des
accises : fr. 759,900. »
- Adopté.
_________________
« Art. 6. Traitement des employés de la
garantie : fr 43,860. »
- Adopté.
_________________
« Art. 7. Traitement des vérificateurs des
poids et mesures : fr. 52,100. »
- Adopté.
_________________
« Art. 8. Honoraires fixes des avocats de
l’administration : fr. 35,670. »
- Adopté.
« Art. 9. Frais de bureau et de tournées : fr.
189,850. »
« (Les crédits portés aux articles 1 à 9 inclusivement
du présent chapitre pourront être réunis et transférés indistinctement de l’un
de ces articles sur les autres, selon les besoins qui résulteront de la
nouvelle organisation.)
M. le ministre propose d’ajouter à la note qui
se trouve à la suite de l’article 9, le paragraphe suivant : « La
même faculté est accordée en ce qui concerne l’article 10, mais seulement
jusqu’à concurrence dc 62,000 fr. »
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Messieurs, j’expliquerai en peu de mots, quel
est le but de cet amendement. Afin de pouvoir réorganiser l’administration des
contributions directes, je demande la faculté de transférer momentanément de
l’un de ces articles sur l’autre. Je n’avais d’abord fait cette demande que
pour les articles 1 à 9, mais des observations m’ont été faites sur la
nécessité d’étendre la faculté dont il s’agit, à l’article 10, jusqu’à
concurrence d’une somme de 62,000 fr., afin de pouvoir régulariser aussi les
traitements des géomètres du cadastre, qui doivent être compris dans cette
administration.
Je n’en dirai pas davantage ; l’accueil si
favorable fait au projet d’organisation dans les sections de la chambre, me
dispense de donner d’autres explications.
- L’article 9 est adopté, avec l’addition
proposée par M. le ministre des finances.
Articles
10 à 13
« Art. 10.
Indemnités : fr. 291,200. »
- Adopté.
_________________
« Art. 11. Matériel : fr.
140,000. »
- Adopté.
__________________
« Art. 12. Indemnités pour les
transcriptions de mutations, etc., dans les bureaux de conservation du
cadastre : fr. 32,000. »
- Adopté.
__________________
« Art. 13. Frais généraux d’administration
de l’entrepôt d’Anvers, entretien des bâtiments, etc. : fr. 31,000. »
Chapitre IV. –
Administration de l’enregistrement, des domaines et des forêts
Articles 1
et 2
« Art. 1er. Traitement
du personnel de l’enregistrement : fr. 356,290. »
- Adopté.
________________
« Art. 2. Traitement du personnel du
timbre : fr. 54,700. »
- Adopté.
Article 3
« Art. 3. Traitement
du personnel du domaine : fr. 77,200. »
M. le ministre des finances propose une
augmentation de 3,300 fr., ce qui porte le chiffre à 82,500 fr.
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Messieurs, cette augmentation comprend 4,000
francs pour l’organisation du service nouveau des canaux de la Campine, sur une
étendue de plus de 18 lieues, ce qui prouve que je me suis renfermé dans les
limites de la plus rigoureuse nécessité ; elle comprend en outre 1,200 francs
pour la surveillance de l’exploitation du minerai dans les bois domaniaux.
Cette exploitation s’est étendue, grâce à la prospérité de l’industrie
métallurgique, et il en est résulté la nécessité de rétribuer de nouveaux
surveillants.
- L’article est adopté avec l’augmentation
proposée par M. le ministre.
Articles 4
et 5
« Art. 4.
Traitement du personnel forestier : fr. 243,600. »
M. le ministre propose une réduction de 1,700
fr.
- L’article est adopté avec cette réduction.
________________
« Art. 5. Remises des receveurs. Frais de
perception : fr. 849,000. »
- Adopté.
Article 6
« Art. Remises
des greffiers : fr. 41,000. »
M. le
ministre demande une augmentation de 5,000 fr.
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Messieurs, les émoluments fixés par la loi du
21 ventôse an VII, et les remises suivent les fluctuations du produit des
droits du greffe. Or, depuis quelques années, la moyenne a été de 44,457 fr. 38
c. ; je propose à la chambre d’accorder cette augmentation de 5,000 fr., pour
éviter de nouvelles demandes de crédits et de transferts.
- Le chiffre de 46,000 fr. est mis aux voix et
adopté.
Article 7
à 11
« Art. 7.
Frais de bureau des directeurs : fr. 20,000. »
- Adopté.
__________________
« Art. 8. Matériel : fr.
32,000. »
- Adopté.
__________________
« Art. 9. Frais de poursuites et
d’instances : fr. 55,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 10. Dépenses du domaine : fr.
78,300. »
- Adopté.
__________________
« Art. 11. Palais de Bruxelles et de Tervueren :
fr. 23,800. »
M. le ministre des
finances (M. Malou). - La retraite du régisseur du palais de
Tervueren m’a permis de réaliser une petite économie de 2,800 fr. qui réduit le
montant de cet article à 21,000, et que je propose à la chambre de sanctionner.
- Le chiffre de 21,000 fr. est adopté.
Chapitre V. – Pensions
et secours
Article
premier
« Art. 1er. – Pensions :
fr. 1,275,000. »
M. le ministre des
finances (M. Malou). propose de diviser cet article ainsi qu’il
suit :
« Pensions civiles : fr. 1,270,000.
« Arriéré de pensions : fr.
5,000. »
- L’article ainsi amendé est adopté.
« Art. Secours :
fr. 5,000. »
M. de Brouckere. -
Messieurs, dans les développements du budget, cet article est libellé ainsi
qu’il suit :
« Secours à des employés ou à des veuves et
enfants d’employés qui, n’ayant point droit à la pension, etc. »
Je demanderai à M. le ministre des finances s’il
entend employer tout ou partie de ce chiffre en subsides à donner aux employés
en service actif. Je pense que telle n’est pas son intention. Je pense que cet
article s’applique uniquement aux anciens
employés, aux veuves, etc., et que dès lors on devrait faire précéder
dans le libellé le mot « employés »
du mot « anciens ».
M. le ministre des
finances (M. Malou). - C’est toujours dans ce sens que l’article a été entendu ; je ne
m’oppose pas à ce changement de libellé.
M.
Orban. - Je
propose de dire : « Secours à d’anciens fonctionnaires ou employés, à
leurs veuves ou enfants, etc. »
- L’article ainsi libellé est mis aux voix et
adopté.
Chapitre VI. –
Dépenses imprévues et extraordinaires
Article 1
et 2
« Art. 1er. Dépenses
imprévues : fr. 14,000.
- Adopté.
_________________
« Art. 2. Travail extraordinaire : fr.
4,000. »
M. de Brouckere. -
Messieurs, ce chiffre est probablement applicable aux employés de
l’administration centrale ; s’il en est
ainsi, je crois qu’on ferait mieux de reporter ce chiffre au chapitre de
l’administration centrale, avec un littera
spécial « B, travail
extraordinaire : fr. 4,000 fr. »
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Je ne
m’oppose pas à ce transfert.
- Ce transfert ainsi libellé est mis aux voix et
adopté.
_________________
(page 132)
Le budget des finances est terminé ; comme il y a eu des amendements, le second
vote est remis à après-demain.
M. le ministre des
finances (M. Malou). - Il n’y a eu qu’un amendement ; c’est celui
relatif à la réduction des 4,000 fr. pour le matériel ; je déclare me rallier û
cet amendement.
- La chambre décide qu’elle votera, séance
tenante, sur l’ensemble du budget des finances, après avoir discuté le tableau
du budget des non-valeurs et remboursements.
La chambre passe à cette discussion.
Budget des non-valeurs et des remboursements
Chapitre premier –
Non-valeurs
Article 1
à 5
« Art. 1er. - Non-valeurs
sur le foncier : fr. 300,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 2. Non-valeurs sur l’impôt
personnel : fr. 370,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 3. Non-valeurs sur les
patentes : fr. 80,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 4. Décharge ou remise aux
bateliers en non-activité : fr. 30,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 5. Non-valeurs sur les redevances
des mines : fr. 16,000. »
- Adopté.
(Les crédits portés au présent chapitre ne sont
point limitatifs.)
Chapitre II. –
Remboursements
Article 1
à 5
« Art. 1er.
Restitution de droits et amendes et intérêts y relatifs, de frais
d’adjudication et de façon d’ouvrages brisés : fr. 30,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 2. Restitution d’impôts, péages,
capitaux, revenus, remboursements, amendes et payement d’intérêts ; frais
d’adjudication et charges des successions vacantes ou en déshérence,
etc. : fr. 250,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 3. Remboursement de postes aux
offices étrangers : fr. 150,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 4. Remboursement du péage sur l’Escaut : fr. 800,000. »
- Adopté.
_________________
« Art. 5. Déficit de comptables anciens
et nouveaux (pour mémoire).
(Les crédits portés au présent chapitre ne sont
point limitatifs.)
- Adopté.
Vote sur les dispositions légales et sur l’ensemble
du projet
La chambre passe au texte de la loi du budget.
« Le budget du ministère des finances est
fixé, pour l’exercice 1847, à la somme de douze millions huit cent
quatre-vingt-douze mille vingt francs (12,892,020 fr.), et celui des
non-valeurs et remboursements à la somme de deux millions vingt-six mille
francs (2,026,000 fr.)
- Adopté.
_________________
Il est procédé à l’appel nominal sur l’ensemble
du projet.
En voici le résultat :
55 membres répondent à l’appel ;
51 membres
répondent oui ;
4 membres répondent non.
En conséquence la chambre adopte.
Le projet sera transmis au sénat.
Ont répondu non : MM. Delfosse, Verhaegen,
Castiau et de Bonne.
Ont répondu oui : MM. Dedecker, de Foere, de
Lannoy, de Meer de Moorsel, de Meester, de Renesse, de Saegher, Desmet, de
Terbecq, de Tornaco, de Villegas, Donny, Dubus aîné, Dubus (Albéric), Dubus
(Bernard), Dumont, Dumortier, Eloy de Burdinne, Fallon, Fleussu, Goblet, Henot,
Huveners, Jouet, Lange, Lejeune, Lesoinne, Loos, Lys, Malou, Mast de Vries,
Mercier, Orban, Orts, Osy, Pirmez, Pirson, Rodenbach, Rogier, Scheyven, Sigart,
Simons, Thyrion, Van Cutsem, Vanden Eynde, Vandensteen, Verwilghen, Veydt,
Vilain XIIII, Wallaert, Zoude, Anspach, Biebuyck, Brabant, Cans, Clep,
d’Anethan, David, de Baillet, de Brouckere, de Corswarem et Liedts.
- La séance est levée à 4 heures.