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Chambre des représentants de Belgique
Séance du jeudi 26 février 1846
Sommaire
1) Pièces adressées à la
chambre, notamment pétitions relatives aux monts-de-piété (Rodenbach),
au canal de dérivation de la Lys (Rodenbach, d’Elhoungne, d’Hoffschmidt,
Devaux, d’Hoffschmidt, Rodenbach, Mast de Vries), et règlement
des comptes des exercices 1830, 1831 et 1832
2) Projet de loi relatif au
chemin de fer de Louvain à la Sambre (Vanden Eynde,
d’Hoffschmidt)
3) Projet de loi relatif à
la publication d’un nouveau tarif de douanes (Osy, Malou)
4) Rapports sur les
pétitions relatives à l’industrie sucrière exotique et indigène (Zoude, de La Coste)
5) Projet de loi accordant
un crédit supplémentaire au budget du département de la justice, pour dépenses
arriérées
6) Projet de loi sur la
comptabilité publique.
a) Discussion générale. Cour
des comptes (Malou, Osy, de Bonne, Malou)
b) Discussion des articles.
Attributions du ministre des finances et recettes du chemin de fer (Malou, de Bonne, de
Man d’Attenrode, de Bonne), restriction de la durée
de l’exercice budgétaire de 3 à 2 ans et/ou présentation anticipée du projet de
budget de l’Etat (Malou, de Man
d’Attenrode, Malou, de La Coste,
Malou, Devaux, Rogier,
Malou, Osy, de
Mérode, Rogier, de Man d’Attenrode,
Malou, Devaux, Osy,
Lebeau, Malou, Delfosse, Malou, Osy,
Delfosse)
(Annales
parlementaires de Belgique, session 1845-1846)
(Présidence de M.
Dumont.)
(page 780) M. Huveners procède à l'appel nominal à 2 1/4
heures.
Il donne lecture du
procès-verbal de la séance d'hier. La rédaction en est adoptée.
Il communique ensuite
l'analyse des pièces adressées à la chambre.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le sieur
François-Philippe-Ed.-Natalie le Boucq de Beaudignies, propriétaire à
Saint-Josse-ten-Noode, né à Prague, demande la naturalisation ordinaire. »
________________
« Même demande du
sieur Pierre-Joseph-François-Emile Lagrange, capitaine-adjudant-major au 2ème
régiment de chasseurs à pied. »
- Renvoi au ministre
de la justice.
________________
« Le sieur Piron,
ancien garde du corps du prince-évêque de Liège, demande une augmentation de
pension. »
- Renvoi à la commission
de pétitions.
________________
« Le sieur
Mennard, propriétaire cultivateur, à Gouy-lez-Piéron, demande que l'Etat,
propriétaire du canal de Bruxelles à Charleroy, prenne des mesures pour que les
contre-fossés de ce canal puissent toujours opérer l'écoulement des eaux
pluviales. »
- Renvoi à la section
centrale du budget des travaux publics.
________________
« Plusieurs marchands de bois de la ville de
Liège, demandent que les ventes de bois sciés faites à l'encan, aient lieu sur
des marchés ou sur les ports, et par lots d'une valeur d'au moins trois cents
francs. »
- Dépôt sur le
bureau, pendant la discussion du projet de loi sur les ventes à l'encan.
________________
« La chambre de
commerce et des fabriques de Verviers présente des observations contre la
convention de commerce conclue entre la Belgique et la France le 13 décembre
1845. »
- Renvoi à la section
centrale chargée d'examiner cette convention.
« L'administration
du mont-de-piétè de Bruxelles prie la chambre de réserver aux monts de-piété la
faculté de vendre les marchandises neuves que ces établissements seront dans le
cas d'engager. »
M. Rodenbach. - Messieurs, la
pétition dont on vient de faire l'analyse nous a été adressée par l'administration
du mont-de-piété de Bruxelles. Il paraît que cette administration demande à
être autorisée à vendre les marchandises neuves, alors que dans le projet on
veut en défendre la vente en détail ; de sorte que cette administration de
mont-de-piété demande une faveur spéciale. Pour couper court à de pareilles
prétentions, M. le ministre devrait présenter promptement le projet de loi
qu'il nous a promis sur les monts-de-piété. Du reste, je ne m'oppose pas à ce
que la pétition soit déposée sur le bureau pendant la discussion du projet de
loi.
- Le dépôt de cette
pétition sur le bureau, pendant la discussion dû projet, est ordonné.
« Le conseil communal de Bruges présente des
observations contre le projet de loi sur la dérivation des eaux de la Lys. »
M. Rodenbach. - La requête qui vient d'être analysée vous a
été adressée par le conseil de régence de Bruges ; il prétend que le projet de
loi relatif à la création d'un nouveau canal entre Deynze et le canal de Gand à
Bruges, serait très préjudiciable à la Flandre occidentale, ainsi qu'à la ville
de Bruges, que ce canal nuirait à l'agriculture du nord de cette province. Dans
un mémoire très longuement développé, elle fait comprendre que tous les
avantages de cette construction sont pour la ville de Gand, au détriment de la
Flandre occidentale.
Je demande le renvoi
de cette requête à la section centrale, avec invitation de faire un rapport sur
cette pétition, avant de déposer son rapport sur le projet de loi ; quand
une province est froissée par une mesure qui (page 781) en favorise une autre, le projet doit être examiné avec
le plus grand soin et on doit préalablement discuter la réclamation de la
province lésée.
Je demande donc le renvoi
de cette pétition à la section centrale, avec invitation de faire un prompt
rapport.
M. d’Elhoungne. - Je ne m'oppose pas à la motion de
l'honorable M. Rodenbach, en ce qui concerne le renvoi de la pétition à la
section centrale chargée d'examiner le projet de loi relatif au canal de
dérivation de la Lys ; mais je m'oppose à la partie de cette motion qui demande
un rapport spécial sur cette pétition avant le dépôt du rapport sur le projet
de loi lui-même. La chambre doit comprendre que la réclamation de la ville de
Bruges rentre dans l'examen dont la section centrale est chargée. On ne peut
donc demander à la section centrale de scinder son travail et de présenter son
rapport en deux volumes.
M. le
ministre des travaux publics (M. d’Hoffschmidt). - J'appuie les
observations de l'honorable M. d'Elhoungne. Je ne m'oppose pas au renvoi de la
pétition à la section centrale chargée de l'examen du projet de loi relatif au
canal de dérivation de la Lys ; ce renvoi me semble tout naturel ; mais je
crois que l'objet dont il est question aura été soigneusement examiné par la
section centrale et que son rapport s'occupera de cette question spéciale ; le
gouvernement lui-même n'a pas négligé d'examiner ce côté de la question ; une
commission d'ingénieurs dont faisait partie l'ingénieur en chef chargé dans ce
moment du service de la Flandre occidentale a examiné ce point, et les
conclusions de son rapport sont contraires aux craintes exprimées par les
pétitionnaires. Du reste, la section centrale est saisie de ce rapport, elle
pourra en apprécier toutes les considérations, et dans le rapport qu'elle vous
présentera, cette question spéciale sera examinée en même temps que le projet
lui-même.
M. Devaux. - Je ne connais pas
la pétition dont il s'agit, elle ne m'a pas encore été communiquée. Il m'est
assez indifférent que le rapport soit fait sous telle forme ou telle autre par
la section centrale chargée de l'examen du projet de loi relatif au canal de
Schipdonck ; ce que je désire, c'est que cette pétition soit connue de la
chambre. Il y a, dans le projet de loi, deux intérêts en lutte, celui de la
province ou des provinces qu'on veut décharger de leurs eaux et celui de la
province qui se croit menacée par les mesures qu'on propose au profit des
premières.
La section centrale
chargée d'examiner le projet de loi est, je crois, composée exclusivement de
membres appartenant aux provinces qu'on veut décharger de leurs eaux et ne
comprend aucun membre appartenant à la province dont on veut faire un fonds
servant pour l'écoulement des eaux. C'est pourquoi j'attache assez peu de prix
à la forme que doit revêtir le rapport sur la pétition du conseil de régence de
Bruges.
M. le ministre des travaux publics vient de parler
d'une instruction qui a eu lieu dans la Flandre occidentale sur la question
soulevée par la pétition. Je lui demanderai quand cette instruction a eu lieu,
si c’est avant ou après la présentation du projet de loi. Autre chose est de
faire une enquête préalable, autre chose de demander, après la présentation
d'un projet de loi, à un subordonné du ministre s'il n'a pas eu tort de le lui
présenter.
Il n'y a pas
d'exemple dans le pays que l'on fasse des travaux d'écoulement au travers d'une
province, sans faire d'enquête dans cette province même ; ni les conseils
communaux, ni les ingénieurs de la province, ni la députation permanente n'ont
été consultés.
Je le répète, il n'y
a pas d'exemple de la manière dont cette affaire a été instruite. On a traité
la Flandre occidentale comme si c'était un terrain vague.
Quand le projet de
loi sera en discussion, nous aurons d'autres observations à présenter sur la
manière dont cette question a été mûrie avant d'être résolue par le
gouvernement.
M. le
ministre des travaux publics (M. d’Hoffschmidt). - Messieurs, il
n'est pas de question qui ait été plus mûrement examinée que celle du canal de
dérivation des eaux de la Lys ; car la chambre sait, en effet, que depuis
plusieurs années, elle était l'objet des études d'une commission spéciale
composée d'un grand nombre de membres auxquels on avait adjoint les ingénieurs
les plus capables de l'éclairer ; non seulement l'ingénieur en chef de la Flandre orientale, mais aussi un inspecteur divisionnaire
chargé du service des deux provinces. Après un examen approfondi, la commission
a rédigé un rapport très étendu ; je ne sais si l'honorable membre a pris connaissance
de ce travail ; mais je ne pense pas qu'en présence d'un rapport aussi complet,
on soit fondé à dire que la question n'a point été étudiée. Le conseil des
ponts et chaussées a également donné son avis. Le gouvernement ne s'est point
borné à cet avis. La question spéciale à la ville de Bruges et à la Flandre
occidentale a fait l'objet d'un rapport particulier du conseil des ponts et
chaussées, que le gouvernement a demandé par suite des craintes qui avaient été
exprimées. Ce rapport est postérieur à la présentation du projet de loi ; mais
antérieurement cette question avait déjà été mûrement examinée. Voilà la
réponse que je crois devoir faire quant à présent ; quand le projet sera en
discussion, nous pourrons entrer dans d'autres développements.
M. Rodenbach. - J'ai demandé le
renvoi à la section centrale avec invitation de nous faire un rapport préalable
au dépôt de son rapport sur le projet de loi ; mais je crois que les
observations de l'honorable député de Gand sont assez justes. Je me bornerai
donc à demander un simple rapport de cette section centrale, comme cela se fait
ordinairement, mais je demanderai, en outre, l’impression au Moniteur. Cette
pétition est très remarquable ; j’y ai jeté un coup d’œil rapide, je la
crois digne d’occuper l'attention de la chambre. Je crois qu'il est question de
commencer les travaux de Deynze jusqu'au canal ; si l'ensemble des travaux ne
s'exécute pas tout à la fois, il est prouvé que le nord de Bruges pourrait être
inondé, qu'on empêcherait la navigation entre Bruges et Ostende. Comme un
conseil de régence vient de manifester cette crainte, on doit examiner la chose
avec la plus grande attention.
Je demande donc
l'impression au Moniteur et le renvoi à la section centrale.
M. Mast de Vries. - Avant que le
projet de loi relatif au canal de dérivation de la Lys fût présenté, vous avez
renvoyé à la section centrale du budget des travaux publics, des pétitions qui
vous avaient été adressées relativement aux inondations du bas Escaut et de la
Lys ; je demanderai le renvoi de ces pétitions à la section centrale chargée de
l'examen du projet de loi relatif au canal de dérivation de la Lys ; elles
rentrent plutôt dans le travail dont elle est chargée que dans celui de la
section centrale du budget des travaux publics.
- Le renvoi de la
pétition de la régence de Bruges à la section centrale chargée d'examiner le
projet de loi relatif du canal de dérivation de la Lys est ordonné.
L'impression de cette
pétition au Moniteur est ordonnée.
La chambre renvoie
également à cette section centrale les pétitions indiquées par M. Mast de
Vries.
________________
Par divers messages
en date des 16, 20, 24 et 25 février, le sénat informe la chambre qu'il a
adopté :
le projet de loi sur
les entrepôts de commerce ;
le projet de loi qui
ouvre au département de la guerre un crédit destiné à l'exécution de travaux
militaires et autorise l'aliénation de certaines propriétés ;
le projet de loi
contenant les budgets des non-valeurs, des remboursements et péages et des
dépenses pour ordre pour l'exrcice 1846 ;
le projet de loi
approuvant la vente des terrains et bâtiments de l’hôtel du gouvernement
provincial à Liège.
- Pris pour
notification.
________________
Par messages en date
des 16 et 21 février, le sénat renvoie à la chambre les projets de loi amendés
suivants :
le projet de loi
portant règlement de l'exercice 1830 ;
le projet de loi
portant règlement de l'exercice 1831 ;
le projet de loi
portant règlement de l'exercice 1832 ;
et le projet de loi
interprétatif de l'article 442 du code de commerce.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Il me semble qu'on pourrait renvoyer à la commission des finances les trois
projets ds règlement de compte. Je crois que l'impression en retarderait
inutilement l'examen ; Il ne s'agit que de substituer 1846 à 1845. Je propose
donc le renvoi à la commission des finances, sans faire imprimer les projets.
- Cette proposition
est adoptée.
La chambré renvoie
ensuite à une commission spéciale le projet amendé par le sénat.
________________
M. Duvivier informe la chambre qu'il est
retenu chez lui par une indisposition.
- Pris pour
information.
________________
Il est fait hommage à
la chambre, par M. Quetelet, de 100 exemplaires de l'Annuaire de l'Académie
royale de Belgique pour 1846.
- Dépôt à la
bibliothèque et distribution à MM. les membres de la chambre.
________________
Il est fait nommage à
la chambre, par M. Ph. Vandermaelen, d'un exemplaire de la carte générale des chemins de fer exécutés, concédés et
projetés en Belgique. »
- Dépôt à la
bibliothèque.
________________
M. le ministre de la
justice, chargé par interim du département de la guerre, adresse à la chambre
deux exemplaires de l’Annuaire militaire officiel pour 1846.
- Dépôt à la
bibliothèque.
________________
II est fait hommage à
la chambre, par M. Becart, d’un exemplaire de son ouvrage, intitulé : Exposé
des facultés des lois et des opérations de l’âme, de l'esprit et de la pensée,
etc, et d'un exemplaire de l’OEdipe-roi de Sophocle.
- Dépôt à la
bibliothèque.
COMPOSITION DES BUREAUX DES SECTIONS DE FEVRIER
Première section
Président : M.
Delfosse
Vice-président :
M. Delehaye
Secrétaire : M.
Henot
Rapporteur de
pétitions : M. Biebuyck
Deuxième section
Président : M.
de Theux
Vice-président :
M. Lange
Secrétaire : M.
Loos
Rapporteur de
pétitions : M. Zoude
Troisième section
Président : M.
de Man d’Attenrode
Vice-président :
M. Verwilghen
Secrétaire : M.
de Corswarem
Rapporteur de
pétitions : M. de Naeyer
Quatrième section
Président : M.
de Garcia
Vice-président :
M. Osy
Secrétaire : M.
Sigart
Rapporteur de
pétitions : M. Maertens
Cinquième section
Président : M.
Desmet
Vice-président :
M. Desmaisières
Secrétaire : M.
A. Dubus
Rapporteur de
pétitions : M. Orban
Sixième section
Président : M.
Duvivier
Vice-président :
M. Fallon
Secrétaire : M.
Van Cutsem
Rapporteur de
pétitions : M. de Sécus
PROJET DE LOI RELATIF AU CHEMIN DE FER DE
LOUVAIN A LA SAMBRE
M. Vanden Eynde., au nom de la
commission qui a examiné le projet de loi tendant à modifier le tracé du chemin
de fer projeté de Louvain à la Sambre, dépose le rapport sur ce projet de loi.
- La chambre ordonne
l'impression et la distribution de ce rapport, et, sur la proposition de M.
le ministre des travaux publics (M. d’Hoffschmidt)., met ce projet de
loi a l'ordre du jour après la discussion du projet de loi sur la comptabilité
de l'Etat.
PROJET DE LOI RELATIF A LA PUBLICATION D’UN
NOUVEAU TARIF DE DOUANES
M. Osy, au nom de la
commission qui a examiné le projet de loi relatif à la publication d'un nouveau
tarif officiel de douanes, dépose le rapport sur ce projet de loi.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- L’intention de la chambre n'est sans doute pas, à l'occasion du rapport qui
vient d'être présenté, de discuter la question des sucres.
Le gouvernement vous ayant
soumis un projet de loi, il me semble plus naturel de renvoyer les pétitions à
la section centrale ; j'en fais la proposition.
M. Osy. - Avec impression
du rapport.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Sans doute, comme faisant partie du compte rendu de la séance.
Je saisirai cette
occasion pour faire connaître combien il est urgent de s'occuper de ce projet
de loi. Tous les intérêts sont en souffrance ; l'intérêt de la production
indigène, si l'état actuel des choses se prolongeait, pourrait surtout être
fortement lésé.
- La chambre ordonne
l'impression et la distribution de ce rapport.
RAPPORTS SUR DES PETITIONS
M. Zoude, rapporteur. -Vous avez demandé
un prompt rapport sur les pétitions relatives à l'industrie sucrière, et votre
commission se serait empressée de satisfaire à vos désirs, si, pour ménager vos
loisirs, elle n'avait cru, messieurs, qu'il était convenable d'entendre un plus
grand nombre de défenseurs des deux industries rivales, pour ne vous présenter
qu'un seul rapport.
C'est l'analyse
succincte et surtout fidèle de toutes ces pétitions, dont je vais avoir
l'honneur d'entretenir la chambre.
Pétitions n°1184 et
1723. - Par ces deux pétitions, l'une du conseil provincial du Hainaut, et
l'autre de la députation permanente agissant en vertu d'un mandat du même
conseil, les pétitionnaires disent à la chambre que le véritable intérêt du
trésor, ainsi que les principes de justice et d'équité exigent que la loi de
1843 soit révisée en faveur de la sucrerie indigène, puisqu'elle emploie une
nombreuse classe ouvrière, qu'elle est précieuse à l'agriculture ainsi qu'à la
fabrication des machines, et en un mot, parce qu'elle contribue puissamment à
développer les sources principales de la richesse publique.
Il est évident,
disent-ils, que la fixation du rendement détruit entièrement la fabrication du
sucre indigène. En effet, le rendement réel étant de 85 p. c, réduit par la loi
à 55, il en résulte qu'une quantité de 30 p. c. est livrée à la consommation,
indemne de tout droit, tandis que la même quantité de sucre indigène doit payer
6 francs, le droit actuel étant de 20 fr. les 100 kil.
Les principaux
habitants, le bureau de bienfaisance et le conseil communal de Boussu demandent
que, dans la révision de la loi, la chambre veuille écarter tout ce qu'il y a
d'injuste dans la prétention des raffineurs de sucre exotique, et qu'elle
accorde des conditions de vitalité et de fixité au sucre indigène qui est une
industrie nationale et une source de prospérité pour les localités où les
fabriques sont établies.
L'administrateur de
la Société charbonnière de Bernissart a exposé que cette production indigène ne
s'opère qu'au moyen d'une grande consommation de charbon ; il cite en preuve
qu'une usine de moyenne importance en emploie de 12 à 15 mille kil.
Cette industrie est
d'ailleurs bien précieuse par les ressources qu'elle présente à la classe
ouvrière dont elle emploie un grand nombre dans la saison d'hiver ; enfin c'est
une juste place au soleil qu'il demande pour cette industrie comprimée par les
prétentions exagérées de l'industrie rivale.
L'administration
communale, le bureau de bienfaisance et les principaux habitants de Quiévrain
font valoir les mêmes arguments ; ils ajoutent que depuis l'établissement d'une
sucrerie dans leur commune, l'agriculture y a fait un immense progrès.
La chambre de
commerce de Tournay tient un langage plus sévère. Ce que veulent, disent-ils, leurs
adversaires, c'est de ruiner tout d'un coup une industrie précieuse acquise
désormais à la Belgique ; c'est de réduire à l'inaction une multitude
d'ouvriers, de nous forcer enfin à acheter à l'étranger, pour plusieurs
millions, une denrée que la Belgique peut produire elle-même.
Demander l'égalité de
droits, serait trancher une question vitale de la manière la plus dérisoire.
Deux produits sont en
présence : l'un fabriqué dans la Belgique, l'autre au dehors. La règle
universelle exige de protéger la première contre la concurrence de la seconde.
Il est à remarquer,
dit cette chambre, qu'il existe à peine une différence entre les prix du sucre
brut dans les entrepôts et le sucre raffiné, après l'exportation à Hambourg.
De cette remarque, il
s'ensuit que l'égalité de droits serait non seulement une injustice, mais une
faveur toute spéciale pour le sucre étranger. En effet, notre pays ne produit
du sucre que sous toutes les charges qui pèsent sur nos terres et sur nos
travailleurs ; égaliser les droits serait donc un véritable privilège envers
l'étranger ; ce serait provoquer la ruine d'un genre de travail intérieur qui
produit le plus grand bien dans le pays et qui offre du pain à une classe
nombreuse d'ouvriers.
L'administration
communale, la commission des hospices et des bureaux de bienfaisance de
Saint-Trond viennent, au nom d'une classe nombreuse d'ouvriers, réclamer toute
la sollitude de la chambre envers la fabrication du sucre indigène. C'est la
cause des malheureux qu'elles viennent défendre : huit ou neuf cents ouvriers
de leur localité y sont occupés l'hiver, et un égal nombre de tout âge et de
tout sexe, y trouve également de l'ouvrage l'été.
Les trois fabriques
qui sont autour de Saint-Trond y répandent annuellement, pour salaires
journaliers seulement, une somme de 130 mille francs.
Le bureau de
bienfaisance et le conseil communal de Bauffe adressent la même prière à la
chambre.
Le conseil communal
de Tirlemont déclare que l'égalité de droits sur les deux sucres anéantirait la
fabrication du sucre indigène et tarirait ainsi la source du travail de
plusieurs centaines d'ouvriers attachés aux deux fabriques de Tirlemont.
Il est d'ailleurs
connu, dit-il, que la culture de la betterave améliore les terres, rend les
récoltes des céréales plus abondantes. ;
Enfin, il réclame pour le sucre la même protection qui est accordée à
l'industrie linière avec laquelle il y a similitude parfaite : la matière
première de l'une et de l'autre est le produit du sol qui procure à toutes deux
une main-d'œuvre considérable.
Le conseil provincial
du Limbourg vous dit que peu d'industries réunissent plus d'avantages que la
fabrication du sucre de betterave, et que peu ont plus de titres et de droits à
une sage protection.
Jusqu'à présent, les
nations qui parviennent à se procurer chez elles ce qu'à grands frais elles
devraient chercher ailleurs, n'ont pas hésité à décerner des récompenses à ceux
qui les affranchissaient du tribut qu'elles payaient à l'étranger.
Si un système contraire devait prévaloir, au
dire des partisans du sucre exotique, la ruine des hommes qui ont engagé leur
fortune dans une entreprise nationale serait consommée.
On demande ce que
deviendraient les filateurs à la main, qui ne font usage que de matières
premières produites dans le pays, si on exigeait le sacrifice de leur industrie
en faveur des filatures à la mécanique, parce que celles-ci tirent leur lin de
l'Ecosse ou de Riga ?
On a dit que la
Belgique ne produisait pas assez de céréales, qu'elle devrait employer toutes
ses terres à leur culture ; mais qu'on augmente la valeur de celles qui sont en
exploitation, et l'on rendra bientôt productifs les milliers d’hectares qui
sont en friche ; et puis si nous devons acheter du grain à l'étranger, n'est-ce
pas aussi à l'étranger que nous achetons la canne à sucre ?
Ce conseil entre
ensuite dans des considérations d'un ordre plus élevé. La Belgique, dit-il,
possède en elle-même assez d’éléments de prospérité, ainsi que des avantages
solides et durables ; mais en présence de l'incertitude du maintien de la paix
entre les puissances maritimes, il faut de la prudence et de la circonspection,
et c'est aux grands pouvoirs de l'Etat qu’il appartient de répartir, pour le
bien commun, tout ce que le pays renferme de forces vitales ; c'est à eux qu'il
appartient de défendre les intérêts du trésor et des consommateurs contre les
exigences outrées d'un étroit égoïsme.
Il termine en vous
recommandant, messieurs, la défense d'une industrie qui se rattache à tous les
grands intérêts de la patrie, et qui, pour le Limbourg en particulier, est une
source féconde de prospérité.
Nous abordons
maintenant les pétitions en faveur du sucre exotique. Des raffineurs de Gand
exposent que leur industrie est une des plus anciennes du pays, et qu'ils ont
lieu d'espérer que leurs droits ne seront pas plus longtemps méconnus.
En France, en
Angleterre, en Hollande, où une législation à peu près similaire à la nôtre est
en vigueur, on a adopté le principe de l'égalité de l'impôt pour les deux
sucres, égalité, disent-ils, qui est en harmonie avec les intérêts de
l'industrie, du commerce et celui du trésor.
D'ailleurs, cet impôt
est un droit d'accise et non pas un droit protecteur, et cette égalité est même
une faveur pour la betterave dont un quart échappe à l'action du fisc, à quoi
ajoutant le droit de douane, on trouve une protection de 20 p. c. en faveur des
sucres indigènes ; et puis l'exemple de la France prouve que la sucrerie
indigène sait se maintenir en présence de l'égalité de droit.
Des raffineurs
d'Anvers déclarent s'associer aux vœux exprimés par les raffineurs de Gand, et
demandent la prompte discussion de la loi.
Vous parler des
raffineries de sucre, dit le président de l'association commerciale et
industrielle d'Anvers, c'est attirer vos regards sur la plus grande, la plus
rapide décadence qu'ait subie une des branches les plus importantes de la
richesse nationale.
Il provoque
l'attention de la chambre sur la situation actuelle du raffinage du sucre
exotique en Belgique, et celle qu'une autre législation a faite dans un pays
voisin.
En 1845, ou a mis en
fabrication en Belgique 10 millions de sucre brut, dont 4 millions ont été
exportés ; ce qui a donné lieu en tout à un mouvement commercial de 14
millions.
En Hollande, on en a raffiné
69 millions, dont 42 ont été exportés. Ainsi, pour le sucre seulement, il y a
eu un mouvement de 111 millions, ou huit fois autant qu'en Belgique.
Tels sont, dit ce
président, les effets de la loi de 1843, qui a enrichi la Hollande de nos
dépouilles.
Il provoque avec
instance la présentation d'une loi nouvelle, qui sera (page 783) peut-être encore trop tardive pour réparer les désastres
occasionnés par elle qui est encore en vigueur.
La chambre de
commerce et les fabriques de Gand s'empresse de joindre ses vœux à ceux des
raffineurs du sucre exotique, dans l'espoir qu'ils n'auront pas présenté en
vain leurs doléances à la chambre.
Le conseil communal
de Gand, témoin des désastres dont la loi de 1843 a été féconde pour les
établissements de cette ville, appuie de tout son pouvoir la demande des
raffineurs.
Cette demande,
dit-il, d'un corps institué pour veiller aux intérêts de toutes les industries,
est un sûr garant de la réalité des souffrances que l'on éprouve et de la
nécessité d'y porter remède.
Le conseil provincial
d'Anvers, ému de la situation déplorable dans laquelle se trouvent l'industrie
et le commerce du sucre exotique, vient réclamer de la chambre des
modifications à la loi de 1843 qui, au lieu de ménager les deux industries, n'a
produit que des mécomptes et des désastres.
De
nombreuses industries joignent leur témoignage à celui du conseil, pour prouver
l'importance du commerce du sucre exotique auquel leur fortune a été
constamment liée, prospérant et souffrant avec lui.
Les chiffres inexorables
que présentera la commission d'enquête instituée par le gouvernement,
prouveront à toute évidence que les intérêts vitaux du pays ont été sacrifiés
par la loi actuelle, qu'il est urgent de réviser, dans l'intérêt du commerce,
de la navigation et de l'industrie.
Enfin, le sieur
Bricous, vérificateur des contributions, présente un projet tout entier, que
votre commission n'a pas eu le loisir d'analyser.
Elle a l'honneur de
vous proposer le renvoi de toutes les pétitions à M. le ministre des finances.
M. de La Coste.
- Je voulais demander le renvoi à la section centrale, qui vient d'être
proposé. Ainsi que l'a dit M. le ministre des finances, ce n'est pas le moment de
discuter la question ; mais puisqu'on propose l'impression du rapport, ce à
quoi je ne m'oppose pas, je crois devoir rectifier un fait qui s'y trouve
indiqué, d'autant plus qu'il est également énoncé dans l'exposé des motifs du
projet de loi.
On suppose qu'en
France existe le régime de l'égalité des droits. C'est une erreur. En France,
il y a trois sucres : le sucre indigène, le sucre colonial (celui des colonies
françaises) et le sucre exotique.
Il y a égalité entre
le sucre indigène et le sucre colonial. Mais il n'y a pas égalité entre le
sucre français et le sucre étranger.
- La chambre
consultée renvoie les pétitions à la section centrale.
PROJET DE LOI ACCORDANT UN CREDIT SUPPLEMENTAIRE
AU BUDGET DU DEPARTEMENT LA JUSTICE, POUR DEPENSES ARRIEREES
M. le ministre des finances (M.
Malou).
présente un projet de loi de crédit supplémentaire de 56,420 fr. pour payement
de dépenses arriérées concernant les exercices 1844 et 1845, concernant le
département de la justice.
- La chambre donne
acte à M. le ministre des finances de la présentation de ce projet de loi et en
ordonne l'impression, la distribution et le renvoi à la section centrale qui a
examiné le budget du département de la justice.
PROJET DE LOI SUR LA COMPTABILITE DE L’ETAT
Discussion générale
M. le président - M. le ministre des
finances se rallie-t-il au projet de la section centrale ?
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Je pense que la discussion qui s'ouvre pourra s'établir utilement sur le
projet de la section centrale.
J'expliquerai
successivement les dispositions en très grand nombre auxquelles je crois
pouvoir me rallier. Il en est quelques autres sur lesquelles j'aurai des
amendements à proposer ou des observations à faire. Mais pour une loi si
étendue et si importante, je crois qu'il serait difficile d'expliquer dès à
présent quelles sont les dispositions sur lesquelles il y a dissentiment entre
le gouvernement et la section centrale.
M.
Osy.
- Si M. le ministre des finances avait des amendements à proposer, je crois
qu'il ferait très bien de les faire imprimer et distribuer ; cela faciliterait
la discussion.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Je ferai imprimer les amendements que je me propose de soumettre à la
chambre. Mais il doit être entendu que la discussion continuera. (Adhésion.)
M. le président. - La discussion est
ouverte sur l'ensemble du projet de la section centrale.
M. de Bonne. - Réglementer la
comptabilité de l'Etat est une des mesures les plus importantes de tout
gouvernement. C'est le seul moyen de s'assurer le bon emploi des deniers
publics, et d'assurer leur application aux dépenses que vous avez votées.
C'est encore le moyen
de connaître la vraie situation des finances de l'Etat et la nécessité des
réformes que cette situation pourrait demander.
Quoique je
méconnaisse fort peu, pour ne pas dire du tout, en finance et en comptabilité,
le projet de loi soumis à votre examen me semble, je ne dirai pas imparfait
mais incomplet ; la discussion pourra rectifier mes idées et m'éclairer.
Je n'ai pas la
prétention d'examiner le projet en détail : je me propose seulement de signaler
quelques points sur lesquels j'appelle votre attention et celle du gouvernement
; les voici :
La section centrale
propose la suppression de l'article premier.
Je crois que cet article
doit être maintenu tout en le modifiant ; mes motifs sont : qu'un ministre des
finances doit avoir l'administration et la direction générale de tous les
revenus de l'Etat et de tout ce qui concerne les finances tant ordinaires
qu'extraordinaires. Il en est ainsi dans tous les pays, et quand cela ne serait
pas cela devrait être. Simplifier l'administration est un moyen de régulariser
la comptabilité et de faciliter la vérification que vous êtes appelés à faire.
Je ne cache pas mon
but, c'est de faire ressortir la recette des chemins de fer au département des
finances.
Il est tout à fait
irrégulier de laisser au département des travaux publics la gestion financière
d'un revenu de ce département.
Dans ce système, on
devrait donner à chique ministre la comptabilité des produits ressortissant à
son département : à celui de la justice, l'administration des droits de greffe,
timbre, enregistrement, hypothèques, etc. ; à celui de l'intérieur, les droits
de barrières, douanes, etc. ; en un mot le ministère des finances pourrait être
supprimé.
Le ministre des
finances doit justifier son titre, c'est le trésorier : il faut que tout ce que
l'on paye à l'Etat soit dans ses attributions.
J'ajouterai que je
crois utile d'insérer dans la loi la disposition formelle que tout agent du
gouvernement est constitué comptable par le seul fait de la recette des fonds
de l'Etat et justiciable de la cour des comptes.
Une disposition à peu
près semblable se trouve dans l'ordonnance française de 1838, article 67.
Le principe me paraît
bon, et je propose de le consacrer dans notre loi.
Quoique cela ne soit
pas clairement exprimé dans le projet de loi, il résulte de quelques-unes de
ses dispositions, que l'apurement de la comptabilité de tous les agents du
trésor est soumis à la cour des comptes.
Mais pourquoi ne pas
le dire positivement et s'exposer à des interprétations plus ou moins
difficiles ? Soyons clairs s'il est possible.
Je propose donc
d'ajouter une disposition ainsi conçue : « La cour des comptes est chargée
de juger tous les comptes de recettes et dépenses des agents comptables de
l'Etat, ou réputés tels. »
Cette addition me
paraît d'autant plus nécessaire que les cas prévus par les articles 8, 9, 10 et
11 du projet ne désignent pas à quel juge sera soumise l'appréciation du cas de
vol, de force majeure, de diligences faites pour le recouvrement, de
l'impossibilité du recouvrement, etc. Indubitablement ce sera à la cour des
comptes à décider de ces faits et circonstances ; mais encore faut-il le dire
et ne pas le laisser deviner.
La conséquence
naturelle de ce que je viens de dire est la suppression de l'article 11 du
projet. La cour des comptes rendra ses arrêts, et je ne crois pas que vous
puissiez admettre que la responsabilité des surveillants des deniers de l'Etat,
en défaut d'avoir rempli leur devoir, puisse jamais être réglée par un arrêté
royal.
Un autre point à
examiner est celui des difficultés qui peuvent s'élever entre le gouvernement
et les particuliers sur des matières spéciales qui se rattachent à
l'administration publique.
Les articles 16, 17
et 18 permettent de faire des marchés pour travaux, livraisons, fournitures,
les uns par adjudication publique, les autres de gré à gré.
Ces actes ont pour
objet un service public. S'il faut recourir à la justice ordinaire, que de
longueurs et de frais ! Le service public peut même en souffrir.
Ces sortes d'affaires
sont simples, faciles à décider : bonne ou mauvaise livraison, bons ou mauvais
travaux, la cour des comptes pourrait donc en décider.
Et pourquoi ne le
pourrait-elle pas ? L'article 8 le la Constitution n'est pas un obstacle ;
« nul ne peut être distrait contre son gré du juge que la loi lui
assigne », dit cet article, mais chacun peut « de son gré »
prendre un autre juge.
En faisant un marché,
en se rendant adjudicataire, le particulier sait d'avance qu'il se donne un
autre juge ; en cas de difficulté, il ne peut se plaindre, c'est une condition
du contrat.
Pourquoi l'Etat ne
pourrait-il faire ce qui est permis à tout citoyen, qui peut dans un acte
stipuler que tout différend serait décidé soit par des arbitres soit par tel ou
tel tribunal.
On ne plaiderait que
sur mémoires et sans être tenu à d'autres formalités qu'a leur signification
réciproque comme pour les causes domaniales. Cette juridiction exceptionnelle existe
en Prusse, et, je crois, en Angleterre et en France. Dans tous les cas, je
trouve la disposition bonne à prendre.
En France le ministre
décide d'abord en premier degré de juridiction, mais il y a appel au conseil
d'Etat. Si l'on voulait maintenir le ministre comme premier juge, comme chez
nous il n'y a pas de conseil d'Etat on pourrait en degré d'appel renvoyer
devant la cour des comptes et même devant la cour de cassation.
Les articles 35 et 36
prononcent une prescription de 5 ans pour les saisies-arrêts, oppositions et
délégations, à moins de significations régulières à l'administration des
traite,. jugements ou actes intervenus entre les parties. Ces dispositions
donnent lieu à une comptabilité particulière, compliquée, et il en résulte que
la remise des comptes définitifs serait retardée.
Pour simplifier
l'administration des finances, ne serait-il pas préférable d'ordonner qu'à la
fin de l’année qui suit l'exercice écoulé, le ministre fût tenu de verser dans
la caisse des consignations tous les fonds saisis arrêtés à la charge de toutes
les saisies-arrêts et oppositions, comme aussi des siennes propres ? Les droits
de toutes les parties seraient conservés, et le ministre des finances débarrassé
d'une complication d'écritures étrangères à son département.
Cette proposition
doit, je pense, lui convenir ; la caisse des consignations (page 784) serait dans ses attributions
; un projet de loi sur cette matière-a été présenté et se trouve soumis à votre
examen.
Une proposition que
je crois devoir faire en terminant, c'est de réunir la loi sur la comptabilité
des finances de l'Etat à celle sur l'organisation de la cour des comptes.
Ces deux projets sont
connexes, c'est une même matière à régler ; l'un concerne les principes,
l'autre leur application.
Il suffirait de
diviser la loi en deux titres, comme on l'a fait en France pour la loi du 31
mai 1838. Cette réunion est même nécessaire psur obtenir une exécution prompte
de la loi en discussion ; car sans la loi sur l'organisation de la cour des
comptes, il sera impossible d'exécuter celle sur la comptabilité. Résumant mes
observations, j'ai l'honneur de proposer le maintien de l'article premier avec
une modification et de dire :
« L'administration
des recettes et dépenses de l'Etat appartient au département des finances.
Je proposerai en
outre à l'article 6 une disposition additionnelle ainsi conçue :
« Tout
agent du gouvernement est constitué comptable par le seul fait de la recette
des fonds de l'Etat et justiciable de la cour des comptes.
« La cour des
comptes est chargée de juger tous les comptes de recettes et dépenses des
agents comptables de l'Etat ou réputés tels.
« Les
contestations relatives à des marchés, adjudications, fournitures, trtavaux,
transports, et autres conventions, rappelés dans les articles 19, 20 et 21 de
la présente loi seront jugées par la cour des comptes. »
Ma dernière
proposition a pour objet de faire réunir la loi sur la comptabilité de l'Etat à
celle sur l'organisation de la cour des comptes, et de diviser cette loi en
deux titres pour que l'exécution soit effectuée en même temps.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- L’honorable préopinant, indépendamment de plusieurs observations qui se
rattachent à des articles et auxquelles je répondra plus tard, a proposé à la
chambre de réunir en une seule loi les deux projets qui vous ont été présentés
par le gouvernement. Je pense que cette proposition ne doit pas être adoptée
par la chambre.
La loi sur la comptabilité
de l'Etat et la loi relative à l'organisation de la cour des comptes ont entre
elles, il est vrai, quelques points de connexité ; elle ont cependant un objet
entièrement distinct.
Les propositions
faites par le gouvernement me paraissent, d'après tous les précédents de la
chambre, devoir être discutées comme elles ont été faites.
Je ne puis d'ailleurs
comprendre l'avantage qu'il y aurait à réunir les deux projets. D'une part, il
s'agit de déterminer en quelque sorte les principes généraux de notre
comptabilité publique. D'autre part, il s’agit de déterminer les attributions
un peu plus variables (qu'il me soit permis de le dire) d'une de nos
institutions.
Dans l’intérêt du
travail de la chambre, laissons séparées ces deux questions réellement distinctes.
L'honorable
préopinant, si j'ai bien saisi les motifs de cette proposition, la fonde
uniquement sur ce qu'une loi ne serait pas exécutable sans l'autre ; mais je
crois que c'est une erreur. Le projet relatif à la cour des comptes est, à
certains égards, la reproduction du décret de 1830 ; il lève quelques doutes
qui ont surgi depuis la mise en vigueur de ce décret. Mais la loi relative à la
cour des comptes peut parfaitement être séparée du projet relatif à la
comptabilité générale.
En effet, depuis plusieurs
années, la chambre est saisie d'un projet de loi sur la cour des comptes, qui
est dû à l'initiative d'un de nos honorables collègues. Jamais il n'a été
question de le joindre au projet relatif à la comptabilité.
- La proposition de
M. de Bonne est mise aux voix ; elle n'est pas adoptée.
La discussion
générale est close.
Discussion des articles
Article premier
(du projet du gouvernement)
La discussion est
ouverte sur l'article premier du projet du gouvernement, dont la section centrale
propose la suppression ; il est ainsi conçu :
« Art. 1er. la haute
direction de la trésorerie nationale appartient au département des finances, de
même que l'administration des recettes et des dépenses de l'Etat. »
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Je me rallie à la suppression proposée par la section centrale. l'article
premier est une définition d'attributions ministérielles. Il existe dans
certains pays un ministère de la trésorerie. Bien que la création d'un ministère
semblable ne soit pas probable en Belgique, je pense qu'il ne faut pas définir
par une loi organique des attributions ministérielles.
M.
de Bonne. - J'ai proposé de remplacer l'article supprimé par la
section centrale, par le suivant :
« L'administration
des recettes et des dépenses de l'Etat appartient au département des finances.
»
De celle manière tout
ce qui concerne les revenus tant ordinaires qu'extraordinaires, devra ressortir
au département des finances ; c'est ce qui n'est pas dit dans le projet.
Je vous ai expliqué
mon intention, c'est qu'à l'avenir l'administration des recettes du chemin de
fer rentre dans le département des finances.
M. de Man d'Attenrode, rapporteur. - Il me semble,
d'après ce que vient de dire l'honorable M. de Bonne, que son intention, en
présentant son amendement, est de mettre obstacle à ce qu'à l'avenir les
recettes du chemin de fer continuent à se faire par les agents du département
des travaux publics. Si l'honorable membre avait lu attentivement l'article 7,
qui a été introduit par la section centrale, ainsi que les développements qui
sont consignés au rapport, il aurait vu que son amendement était tout à fait
inutile.
Que dit en effet cet
article. 7 ? Il exprime qu'aucune manutention de deniers ne peut être
exercée, qu'aucune caisse publique ne peut être gérée, que par un agent placé
sous les ordres du ministre des finances, nommé par lui ou sur sa présentation,
responsable envers lui de sa gestion, et justiciable de la cour des comptes.
Si l'honorable M. de
Bonne désire que les recettes du chemin de fer se fassent par des agents de
l'administration de finances, il votera l'article 7 et il atteindra ainsi son
but. Il me paraît donc qu'il peut retirer son amendement.
M. de Bonne. - Je retirerai
volontiers mon amendement jusqu'à la discussion de l'article 7. Mais comme
l'état de choses que je propose n'existe pas actuellement, on aurait pu
entendre que l'administration des travaux publics aurait conservé la direction
des finances du chemin de fer, et c'est ce que je voulais prévenir par la
disposition générale que je vous avais présentée.
- La suppression de l'article
premier du projet du gouvernement est mise aux voix et adoptée.
Chapitre premier. - Budget général de l’Etat
Article premier (du projet de la section centrale)
« Art. 1er (du projet
de la section centrale). Les recettes et les dépenses publiques à effectuer
pour le service de chaque exercice sont autorisées par les lois annuelles de
finances et forment le budget général de l'Etat. »
- Adopté.
« Art. 2.
L'exercice commence le 1er janvier et finit le 31 décembre de la même année ;
toutefois les recettes et dépenses qui s'y rattachent seront imputés sur le
même exercice jusqu'à l'expiration de l'année suivante.
« Sont seuls
considérés comme appartenant à un exercice, les services faits et les droits
acquis à l’Etat et à ses créanciers pendant l'année qui donne sa dénomination à
l'exercice. »
M. le ministre des finances
(M. Malou). - Messieurs, je me rallie au principe de l'article 2
du projet de la section centrale. Mais je pense que le dernier paragraphe
serait mieux rédigé en ces termes :
« Toutefois, pour
compléter les opérations relatives au recouvrement des produits, à la
liquidation et à l'ordonnancement des dépenses, la durée de l'exercice se
prolonge jusqu'au 31 octobre de l'année suivante. »
Le paragraphe ainsi
formulé me paraît plus clair et on comprend mieux quel est le but de l'article.
M. de Man
d'Attenrode, rapporteur. - Messieurs, il me semble difficile d'admettre l'amendement
que vient de proposer l’honorable ministre des finances ; il en résulterait que
l'exercice serait prolongé de dix mois. D'après l'intention de la section
centrale, et même d'après l'article rédigé par le gouvernement, l'exercice
n'est que d'un an, et les dix mois qui sont accordés en plus, ne le sont que
pour réaliser les droits créés pour parfaire les actes posés pendant l'année
qui donne son nom à l'exercice.
Je ne pense pas qu'il
puisse entrer dans l'intention de la chambre de prolonger l'exercice de dix
mois. En France, l'exercice n'est que le service fait pendant une année et dix
mois sont accordés pour parfaire les actes posés pendant l'exercice.
Il y a donc une
distinction à faire entre les douze mois qui constituent l'exercice et la période
de dix mois accordée pour compléter les opérations. Cette distinction est
essentielle pour mettre de l'ordre dans la comptabilité. Cette règle tend à
accélérer la marche des services, l'acquittement des dépenses ; on s'en est
fort bien trouvé en France.
M.
le ministre des finances (M. Malou). - Nous sommes réellement d'accord. Je propose
de dire : « la durée de l'exercice se prolonge jusqu'au 31 octobre de l'année
suivante, » au lieu de : « la durée de la période se prolonge jusqu'au 1er
octobre de la deuxième année. » Je ne sais ce qu'on entend par la période et
quelle est la première année.
M. de La Coste. - Je pense que M. le ministre des finances et M.
le rapporteur sont parfaitement d'accord. Mais je ferai une observation sur le
mot « exercice ». L'exercice est d'une année, et M. le ministre des
finances propose de dire que l'exercice se prolonge au-delà de cette année,
jusqu'à la fin de la suivante. Je ne sais si cette rédaction est bien correcte.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- J'ai cru, par la rédaction que je propose, rendre mieux la pensée contenue
dans le dernier paragraphe de l'article de la section centrale. Cependant si
l'on croit la rédaction de celui-ci préférable, je ne m'opposerai pas à son
adoption.
M. Devaux. - Je proposerai la
rédaction suivante :
« Toutefois les
opérations relatives au recouvrement des produits, à là liquidation et à
l'ordonnancement des dépenses, pourront se prolonger jusqu'au 31 octobre de
l'année suivante. »
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Je me rallie à cette rédactions
M. Rogier. - Messieurs, M. le
ministre des finances se rallie à la proposition de la section centrale qui
modifie celle du gouvernement.
Le gouvernement
demandait de pouvoir continuer les dépenses d'un exercice pendant l'année tout
entière qui suit cet exercice. La section centrale restreint ce pouvoir à dix
mois.
Dans l'état actuel
des choses, la durée d'un exercice se prolonge pendant trois ans. Substituer
deux années à trois, c'était déjà s'imposer à soi-même des restrictions.
Aujourd'hui M. le ministre des finances se rallie encore à (page 785) une restriction nouvelle. Je
demande s'il ne craint pas que l’action du gouvernement se trouve parfois
paralysée par cette substitution de 22 mois à la durée de 24 mois.
Cette restriction
apportée à la durée de l'exercice n'est pas dans nos habitudes administratives.
Sous le gouvernement des Pays-Bas, l'exercice se prolongeait pendant trois
années. Voilà trente ans que nous vivrons sous ce régime. Il me paraît qu'il
eût été sage de conserver au moins une durée de deux années.
Je ferai une autre
observation sur l'article 2. Vous savez que chaque année la chambre se trouve
dans la pénible nécessité de voter des crédits provisoires. Depuis très
longtemps il ne nous est pas arrivé de pouvoir voter les budgets avant
l'ouverture de l'exercice auquel ils se rapportent.
Cette année encore,
les budgets les plus importants ne sont pas votés, les ministres ont été forcés
de demander des crédits provisoires. Il est possible même que les crédits
provisoires ne suffisent pas, qu'on soit obligé d'en voter de nouveaux. Cet
état de choses présente de graves inconvénients. On a cherché les moyens d'y
porter remède ; mais les propositions qui ont été faites ont été ajournées
jusqu'au moment où l'on discuterait la loi sur la comptabilité.
Le moment me semble venu
de prendre une mesure qui fasse sortir la chambre de ces inconvénients qui se
représentent annuellement. Je demanderai à M. le ministre des finances s'il
aurait des objections à faire à l'adoption d'une proposition d'après laquelle
les budgets des recettes et des dépenses devraient être présentés six mois au
moins avant l'ouverture de l'exercice auquel ils se rapportent.
En France, le budget
est voté près d'un an avant l'ouverture de l'exercice. En ce moment ce n'est
pas le budget de 1846 que l'on discute, il est voté depuis près d'une année
déjà ; aujourd'hui, on s'occupe en France du budget de 1847.
Il y aurait avantage
à ce que le budget de 1847 fût présenté avant le mois de juillet, et il
faudrait que la chambre fût animée de bien peu de zèle pour ne pas le voter
avant le 31 décembre 1846.
Les travaux de la
chambre, en ce qui concerne la comptabilité, sont, il faut bien le reconnaître,
peu honorables pour elle. Nous donnons, sous ce rapport, depuis longtemps le
plus fâcheux exemple. Une commune qui n'aurait pas arrêté en temps opportun son
budget, son compte annuel, serait réprimandée par le gouverneur et par la
députation, s'ils remplissaient leurs devoirs. Il n'est pas à ma connaissance
qu'aucun conseil provincial, depuis que les conseils provinciaux existent, ait
manqué de voter chaque année ses comptes et son budget. La chambre, au
contraire, qui doit donner aù pays les bons exemples en toutes choses, ne
parvient jamais à voter son budget en temps opportun.
Pour les comptes,
c'est bien pis. Quoique la Constitution nous impose l'obligation formelle
d'arrêter les comptes chaque année, nous sommes de dix ans en arrière. En
principe nous devrions arrêter les comptes avant le budget ; la première base
d'un budget, c'est, en effet, le compte des l'exercice écoulé. Voilà par où
nous devrions commencer. C'est ce que nous sommes bien loin de faire. Cela est
déplorable. Il m'est arrivé à vingt reprises de signaler ce fait à la chambre ;
malgré mes efforts et ceux de plusieurs de mes honorables collègues, on n'est
pas parvenu à plus de régularité.
Au
moyen de la disposition que j'indique, si la loi passe cette année, nous
aurions l'assurance que le budget de 1847 serait présenté avant la fin de la
session. Nous aurions fait cesser ainsi une grande irrégularité, nous aurions
mis un terme à ces crédits provisoires que nous sommes obligés de voter d'année
en année, comme si nous étions à l'état permanent de révolution. Cet état de
choses donne au pays, aux chambres, au gouvernement, une attitude que nous
devons avoir à cœur de faire cesser. Il faut de la stabilité dans
l'administration, de la régularité dans les travaux de la chambre. A moins donc
que M. le ministre des finances ne présente des objections qui. me fassent
changer d'avis, je déposerai une disposition additionnelle qui serait ainsi
conçue :
« Les budgets
des recettes et des dépenses seront présentés aux chambres, six mois au moins
avant l'ouverture de l'exercice auquel ils se rapportent. »
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- L'honorable préopinant a soulevé trois questions : La première consiste à
savoir s'il convient de restreindre la durée de l'exercice, ainsi que le
propose la section centrale d'accord avec le gouvernement.
L'exercice a
aujourd'hui une durée de trois années. Il s'agit de restreindre ce terme à
vingt-deux mois, c'est une des innovations les plus heureuses du projet.
Il est une autre
disposition sur laquelle j'appelle l'attention de l'honorable membre. L'article
26-29 du projet de loi est ainsi conçu :
« Lorsque, à la
clôture d'un exercice, certaines allocations du budget sont grevées de droits
en faveur de créanciers de l'Etat, pour travaux adjugés et en cours
d'exécution, la partie d'allocation encore nécessaire pour solder la créance,
est transférée à l'exercice suivant, après décompte vérifié préalablement par
la cour des comptes. »
Cette disposition et
le délai qui reste après la clôture légale de l'exercice suffisent pour assurer
la marche du gouvernement.
La deuxième question,
relative à l'époque de la présentation des budgets, a très souvent occupé la
chambre. Cette année, tous les inconvénients de la marche suivie depuis quinze
ans se sont révélés avec plus d'intensité que jamais.
Au sénat, on a
insisté très vivement pour que cette assemblée reçût les budgets assez à temps
pour pouvoir les examiner. Si je n'ai pas pris alors un engagement formel, j'ai
du moins promis de faire tous les efforts pour que les chambres pussent voler
doux budgets dans le cours de cette session,, de manière à gagner une année.
Si la marche des
travaux de la chambre le permet, mon intention est de lui soumettre les budgets
à l'exercice prochain. Alors la disposition que réclame M. Rogier aura reçu son
exécution en fait ; mais je ne pense pas, qu'il convienne d'imposer au
gouvernement, par la loi, l'obligation indiquée par l'honorable M. Rogier.
Le gouvernement
s'associe aux vœux plusieurs fois énoncés au sein de la chambre ; il désire
qu'il soit voté deux budgets en une session et qu'on ne soit plus dans la
nécessité de présenter le budget pour ainsi dire à la veille de l'exercice.
Quant aux comptes, il
est très vrai que nous sommes encore fort loin de les avoir réglés tous. Au
commencement de la séance, le sénat nous a renvoyé les comptes des exercices 1830.
1831 et 1832. Récemment il a été fait rapport sur les trois exercices suivants.
J'espère que, dans le courant de cette session, ces lois de comptes pourront
être votées. Les circonstances ont eu une grande part dans ce retard que je
regrette autant que personne. Les chambres, dans les premières années de la
révolution, ont été absorbées par d'autres soins. Les difficultés qui se
rattachent à cette époque ont aussi retardé les travaux de la commission,
quelque zèle qu'elle ait apporté dans ce travail.
M. Osy. - Je désirerais
appuyer la proposition de l'honorable M. Rogier, mais je pense qu'il serait
dangereux d'imposer par la loi au gouvernement l'obligation de présenter les
budgets neuf mois au moins à l'avance. Si nous étions certains de présenter
dans cette session le budget de 1847, il n'y aurait aucune difficulté. A chaque
session nous voterions, comme en France, le budget de l'exercice suivant.
Je
désire que nous puissions voter cette année par anticipation le budget de 1847.
mais nous sommes tellement en retard que je crains que nous ne le fassions pas.
Il faudrait que le gouvernement prît l'engagement formel, de présenter les
budgets dans un bref délai ; peut-être alors pourrions-nous les avoir votés
pour le mois d'août. (Réclamations.)
Plus tôt me paraît impossible. En effet nous avons à nous occuper de trois lois
importantes, qui certes ne seront pas votées d'ici à Pâques.
Pour les comptes,
comme l'a dit M. le ministre des finances, ce sont les grandes occupations
qu'on a eues depuis 1830 qui n'ont pas permis de les régler. Mais nous avons un
rapporteur qui y met tant de zèle qu'avant peu, j'en suis persuadé, nous aurons
les comptes réglés jusqu'en l841.
J'engage donc M. le
minisire des finances à présenter sans retard les, règlements de comptes dont
nous ne sommes pas encore saisis.
M. de Mérode. - Je ne suis pas
favorable aux crédits provisoires tels que vous êtes obliges de les voter tous
les ans. Mais d'un autre côté, si l'on vote un budget aussi longtemps à
l'avance, on ne saura pas quelles dépenses il faudra faire ; on votera sans
connaissance de cause suffisante.
Ainsi, cette année
nous avons été obligés de voter un crédit particulier, par suite de la maladie
des pommes de terre. Mais cette calamité n'est arrivée qu'à une époque très
rapprochée de la présentation du budget de l'année 1846 ; on n'a pas pu la
prévoir ; c'est une circonstance tout à fait spéciale ; or, souvent, lorsqu'une
année entière s'écoulera entre le vote d'un budget et l'application de ce
budget, il surviendra bien d'autres événements qui dérouteront toutes les
prévisions.
Un
de nos anciens collègues, M. Cogels, a plusieurs fois proposé d'établir l'année
financière à dater du 1er juillet. Si cela pouvait se faire, on obvierait à
tous les inconvénients qui ont été signalés. Le vote du budget ne serait pas
aussi éloigné de l'exercice auquel il s'applique, que si l'on adoptait le
système qui est suivi en France.
Je prie M. le ministre
des finances de vouloir bien nous dire s'il trouverait un inconvénient grave à
fixer le commencement de l'année financière au premier du mois de juillet, au
lieu du 1er janvier. Je reconnais que les habitudes sont contraires à ce mode
de procéder, que les comptes des particuliers ne se règlent pas ainsi. Mais
pour l'Etat, il y a une position spéciale résultant de nécessités
parlementaires qui entraîne plus d'avantage dans l'adoption de ce mode que dans
le système communément suivi,
M. Rogier. - Messieurs, M. le
ministre des finances en répondant à ma première observation, relative à la
restriction apportée par la section centrale à la durée de l'exercice,
restriction à laquelle M. le ministre s'est rallié, a déclaré qu'il trouvait un
remède à l'inconvénient qui pouvait résulter de cette restriction nouvelle,
dans l'article 26 du projet du gouvernement.
Je ferai remarquer à
M. le ministre des finances que, dans l'opinion première du gouvernement,
l'article 26 n'apportait pas un remède suffisant à cet inconvénient, puisque,
malgré cet article, le gouvernement avait demandé d'abord une durée de 2 ans.
Du reste, si M. le
ministre pense que la marche de l'administration ne se ressentira pas d'une
manière fâcheuse, de cette restriction nouvelle, je ne puis pas être plus
administratif que lui dans cette circonstance, et M. le ministre, je
n'insisterai pas.
J'ai demandé à M. le
ministre des finances s'il verrait de l'inconvénient à ce que la loi fixât une
époque pour la présentation des budgets ; M. le ministre n'a pas dit qu'il y
trouvait de l'inconvénient ; il s'est seulement engagé à faire présenter les
budgets assez à temps, pour qu'ils pussent être votés avant le 1er' janvier
1847. C'est une assurance personnelle que nous donne M. le ministre des
finances ; je préférerais une prescription égale à une assurance personnelle
qui ne lierait pas les successeurs de l’actuel.
Un honorable
préopinant a demandé que l'année financière commençât (page 786) du 1er juillet : tout en faisant cette demande, il a
trouvé des inconvénients à ce que le budget fût voté trop longtemps à l'avance,
parce que, dit-il, les dépenses ne pourraient pas être prévues six mois avant
les besoins.
Eh bien, en proposant
de fixer au mois de juillet l'ouverture de l'année financière, l'honorable
préopinant va plus loin que je ne vais. En effet, les budgets sont
ordinairement déposés à l'ouverture des sessions ; nos sessions s'ouvrent au
mois de novembre ; du mois de novembre au mois de juillet, il y a huit mois ;
je ne demande que six mois entre la présentation du budget et le commencement
de l'exercice auquel il s'applique.
Je n'ai pas trouvé
dans les observations présentées par M. le ministre des finances, un motif pour
renoncer à la proposition que je voulais faire. A voir ce qui se passe, je
crois que M. le ministre des finances sera charmé lui-même, et que tous ses
successeurs ne pourraient que s'applaudir d'avoir en quelque sorte la main
forcée par la loi.
Nous
porterons ainsi un remède à un mal qui est reconnu par tout le monde. Il est
fort à craindre que ce mal ne se renouvelle encore pendant plusieurs années,
si, pour y obvier, nous n'insérons pas une prescription dans la loi.
L'ouverture de la
session est trop rapprochée du commencement de l'exercice financier, pour que
les chambres aient jamais le temps nécessaire afin de discuter convenablement
les budgets. Il est impossible que nous votions dans ce court intervalle les
budgets, alors que, dans les premiers jours de notre réunion, nous avons à
discuter l'adresse, et quelquefois d'autres projets urgents.
Comme, du reste, M.
le ministre des finances n'a pas vu d'inconvénient à la proposition que j'avais
annoncée, j'ai l'honneur de la déposer ; elle est ainsi conçue :
« Le budget des recettes
et celui des dépenses seront présentés aux chambres six mois au moins avant
l'ouverture de l'exercice auquel ils se rapportent. »
M. de Man
d'Attenrode, rapporteur. - Messieurs, je n'ai pas parfaitement saisi la
portée de l'amendement de l'honorable M. Rogier. L'honorable membre, je pense,
désire surtout que le vote du budget ait lieu avant le 1er janvier. D'après son
amendement, le gouvernement serait tenu de déposer le budget au moins six mois
avant cette date ; la présentation aurait donc lieu vers le 1er juillet. Or, la
chambre, dans les circonstances ordinaires, ne siège plus à cette époque. A
quoi donc aboutirait le dépôt du budget ? Nous en serions saisis plus tôt.
J'avoue qu'il nous serait fort utile de pouvoir consacrer une partie de nos
vacances à l'examen des budgets. Maintes fois, je me suis plaint de ce qu'on ne
les déposait qu'à l'ouverture des sessions ; mais je crois pouvoir être moins
exigeant que l'honorable M. Rogier, et si les budgets nous étaient remis deux
mois avant notre réunion, cet intervalle serait suffisant.
Si nous sommes si
arriérés cette année, c'est d'abord parce que les budgets ont été présentés
trop tard, comme ils l'ont été les années précédentes. Ensuite nous avons
débuté par une longue discussion politique sur l'adresse ; Il nous a été alors
en quelque sorte impossible de partager notre attention, et de nous occuper des
affaires matérielles de l'Etat.
Au reste, voici une
circonstance que j'ai observée tous les ans, c'est qu'à l'époque de l'examen
des budgets dans les sections, la chambre met toujours à l'ordre du jour
quelques projets de loi, pour être discutes en séance publique, et cela pour
obliger certains membres à rester à leur poste. Il résulte de là que les hommes
laborieux de la chambre sont forcés à la fois de faire face aux travaux
pénibles des sections, de se préparer à la discussion publique des projets de
loi mis à l'ordre du jour, et d'assister à cette discussion. Il n'est possible
de faire face à des travaux aussi multipliés, qu'en y consacrant ses nuits, et
je vous avoue que je ne suis pas de force à mener une vie semblable.
C'est là la véritable
raison pour laquelle les budgets sont si arriérés. Je pense, d'ailleurs, que
quand nous discuterons les comptes à l'époque prescrite, cette discussion
abrégera beaucoup celle des budgets.
L'honorable M. Rogier
avait demandé à M. le ministre des finances s'il pourrait consentir à réduire à
dix mois, au lieu de douze, le terme destiné à parfaire un exercice. J'ai été
heureux de voir. M. le ministre des finances se rallier à la proposition de la
section centrale. Si l'honorable M. Rogier avait persisté dans son opinion, je
lui aurais dit que si on avait continué à accorder douze mois, cette
disposition aurait apporté un grand obstacle au dépôt des comptes en temps
opportun.
En
n'accordant que dix mois, le gouvernement peut, dès le commencement de
novembre, s'occuper à réunir les éléments du compte, et la cour des comptes
peut en être saisie plus tôt. Du reste, puisque ce point n'est pas contesté je
n'en dirai pas davantage à cet égard.
Quant à la rédaction
nouvelle, proposée par M. le ministre des finances, je ne vois pas un grand
inconvénient à l'adopter ; puisque pour le fond nous sommes d'accord. Je
préfère cependant la rédaction de la section centrale, rédaction qui est
adoptée dans la législation françaises; et je crois qu'en général les lois
françaises sont parfaitement rédigées. Je désirerais donc que le paragraphe 3
de l'article 2 du projet de la section centrale fût maintenu.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- Messieurs, dans les observations que j'ai eu l'honneur de présenter tout à
l'heure, je crois avoir indiqué qu'il était impossible de dire dès à présent
par la loi que les budgets seraient présentés à une époque déterminée, par
exemple six mois au moins avant l'exercice auquel ils s'appliquent.
L'honorable
M. Rogier désire que les budgets soient discutés vers la fin de la session pour
l'année suivante. Il est évident, en effet, que s'il était possible de
distribuer les budgets un mois avant l'ouverture de la session, on n'aurait pas
atteint le résultat qu'on a en vue, et que les budgets ne seraient, pas plus
qu'aujourd'hui, votés avant le 1er janvier. Ordinairement la présentation des budgets
a lieu dans la première huitaine après l'ouverture de la session ; et nous
voici cependant arrivés à la fin de février, et nous avons encore à discuter
plusieurs budgets. Pour atteindre le résultat qu'on désire, il faut que nous
parvenions à voter deux budgets de dépenses dans le cours d'une session.
Déjà, pénétré de
cette nécessité, désirant dans l'intérêt des travaux de la chambre, que nous
puissions arriver à voter deux budgets dans le cours d'une session, j'ai prié
mes collègues de préparer leur budget pour l'exercice prochain. Mais la chambre
appréciera les motifs qui m'empêchent de prendre un engagement formel ; cela
dépendra de la marche des travaux de la session, mais si mon projet peut se
réaliser cette disposition qu'on propose deviendra inutile et le résultat qu'on
a en vue se trouvera atteint.
M. Devaux. - L'important est
d'arriver à voter une fois deux budgets dans une session. Mais voici bien
longtemps que nous avons cette intention et que le gouvernement l'a comme nous,
et cependant elle ne s'est pas réalisée. Je ne fais à cet égard aucun reproche
au ministère actuel, car tous les ministères ont agi de même. Si nous voulons
arriver à ce que ce désir se réalise, il faut en faire l'objet d'une
disposition de loi. Je n'insisterai pas pour que la mesure soit exécutée cette
année, je reconnais que ce serait difficile ; mais puisque nous nous occupons
de la comptabilité de l'Etat et que nous en sommes au chapitre relatif au
budget, je pense que nous devons y insérer une disposition pour l'avenir, sauf
à faire cette année pour le transitoire ce qui sera possible. Sans cela il n'y
a pas de raison pour qu'à l'avenir les choses se passent autrement que par le
passé.
Je sais que M. le
ministre des finances a déjà prié ses collègues de rédiger leur budget pour
l'exercice de 1847 ; mais déjà plusieurs fois, la même prière a été faite sans
résultat ; pour arriver à un état normal, il faut donc nécessairement inscrire
l'obligation dans la loi comme règle pour l'avenir.
Je pense que pour
arriver à un état de choses normal, il ne suffit pas que le budget soit
présenté au mois de juin. Ce n'est pas pour le voir pendant les vacances que
nous les demandons ; sans doute nous aurions le loisir de l'examiner, mais cela
ne dispenserait pas de devoir voter des crédits provisoires, car cela ne ferait
pas non plus que le sénat aurait plus le temps de discuter les budgets avant la
fin de l'année, quand par hasard nous pouvons le faire. C'est au mois de mars
qu'il faudrait que les budgets fussent présentés, pour pouvoir être discutés et
votés avant la fin de la session.
Voici, selon moi,
comment les choses devraient se passer. Le budget des dépenses serait présenté
et voté avant la fin des sessions.
Quant au budget des
voies et moyens, il doit être présenté en même temps que celui des dépenses,
car pour régler les dépenses, il est désirable qu'on ait les ressources en
regard. Mais je comprendrais qu'on en retardât le vote jusque vers la fin de
l'année. et si à cette époque la nécessité de dépenses, non prévues au budget
des dépenses, se faisait sentir, on présentera une loi supplémentaire au budget
des dépenses, qui serait votée en même temps que le budget des voies et moyens.
On arriverait ainsi à un mode de procéder régulier, sans rencontrer les difficultés
signalées par l'honorable M. de Mérode.
Je pense donc qu'il
faut écrire dans la loi que le budget des dépenses doit, à l'avenir, être
présenté 10 mois avant l'ouverture de l'exercice, sauf une disposition
transitoire.
M. Osy. - Je partage
l'opinion de l'honorable M. Devaux, mais je crois qu'il serait dangereux de
l'écrire dans la loi ; cette année, l'honorable membre reconnaît que cela ne
pourra pas se faire ; l'année prochaine, nous avons le renouvellement de la
moitié de la chambre et du sénat ; la session ne sera pas longue ; au mois de
mai nous ne serons plus ici, comment voter deux budgets dans une si courte
session ?
Si le budget de 1847
nous est présenté dans le courant de cette session, ce sera assez, car je crois
que, sans nous engager formellement, nous pourrions prendre l'engagement tacite
de le voter cette année si c'est possible ; sans cela nous ne pourrons pas
exécuter notre projet avant 1849.
M. Lebeau. - La bonne volonté ne
manque à personne ; il y a cinq ou six ans que chaque ministère témoigne le
désir, cela se conçoit, car un grand intérêt administratif trouverait sa
satisfaction, chaque ministère, dis-je, témoigne le ferme désir de faire voter
deux budgets dans une session. Mais si nous ne nous mettons pas en présence
d'une contrainte légale, nous en serons pour nos protestations.
L'honorable M. Osy
nous a parlé de la brièveté de la session prochaine qui ne nous permettrait pas
de voter deux budgets. Je ferai remarquer qu'il n'y aurait pas obligation de
les discuter et de les voter. Ce serait déjà un grand bienfait de pouvoir
emporter le budget avec soi pour l'étudier à loisir pendant les vacances. Quant
à l'obligation de discuter le budget pendant la session qui précède l'ouverture
de l'exercice, ce n'est pas celle-là qu'il s'agit d'inscrire dans la loi, et
c'est à celle-là que l'honorable membre faisait allusion. Si la nécessité
reconnue de voter le budget avant le commencement de l'année fait des progrès,
la brièveté de la session prochaine ne serait pas un obstacle, vous n'auriez
qu'à amener le gouvernement à devancer l'époque ordinaire de l'ouverture de la
session, car cette époque est une espèce de délai fatal. Il dépend du
gouvernement si le bien de l'administration l'exige, dans le cas où la clôture
de la session précédente aurait été avancée, de convoquer les chambres pour les
premiers jours d'octobre.
Un
membre.
- Et les chasseurs ?
M. Lebeau. - Quant aux
chasseurs, ils arriveraient un mois plus tard.
(page 787) Je crois que si nous ne nous lions pas par une
disposition légale, nous en serons pour nos protestations ; l'année prochaine
nous les renouvellerons et nous ne voterons pas plus que cette année deux
budgets dans une session.
M.
le ministre des finances (M. Malou). - Je partage à certains égards l'opinion de
l'honorable M. Osy ; seulement, je ne désespère pas comme lui de réaliser,
cette année, ce qu'on a tenté inutilement jusqu'à présent. Si l'examen des
budgets marche plus rapidement, la fin de la session n'étant pas limitée par le
renouvellement partiel de la chambre, l'on pourra discuter les budgets de 1847
; alors vous n'auriez pas les budgets six mois ou dix mois avant l'ouverture de
l'exercice, mais dès le commencement de l'exercice.
Si
le gouvernement présente les budgets aux derniers jours d'une session, c'est
comme s'il les présentait à l'ouverture de la session suivante, car l'examen
des sections et celui de la section centrale sont les causes bien connues du
retard qu'éprouve le vote des budgets. Cette année, ils ont été présentés dans
la première huitaine de la session ; ils étaient imprimés et ce nonobstant, le
travail préparatoire des sections a absorbé plusieurs mois. Pour entrer dans la
voie normale, ce que je désire, il faut s'efforcer de voter deux budgets dans
la session actuelle, parce que l'année prochaine il sera impossible de discuter
deux budgets à cause de la brièveté forcée de la session ordinaire.
M. Delfosse. - D'après le projet
du gouvernement, les opérations relatives au recouvrement des produits, à la
liquidation et à l'ordonnancement des dépenses d'un exercice auraient pu se
prolonger jusqu'au 31 décembre de l'année suivante.
En France ces opérations
ne peuvent se prolonger que jusqu'au 31 octobre. La section centrale nous
propose d'adopter sur ce point la disposition de la loi française, probablement
afin que les résultats définitifs de l'exercice clos puissent être communiqués
aux chambres dans les premiers jours de l'ouverture de la session.
Mais
en France la session ne s'ouvre qu'à la fin du mois de décembre, il y a donc un
intervalle d'environ deux mois entre l'époque fixée pour la clôture des
opérations d'un exercice et l'ouverture des chambres. Chez nous où la session
des chambres s'ouvre au plus tard le deuxième mardi de novembre, cette
intervalle ne serait que de quelques jours.
Il me semble qu'on
devrait tenir compte de cette différence et fixer la clôture des opérations
d'un exercice au 30 septembre au lieu du 31 octobre ; ce changement, qui serait
avantageux en ce que le gouvernement aurait plus de temps pour se mettre en
mesure de communiquer aux chambres les résultats définitifs de l'exercice clos,
ne peut présenter aucune espèce d'inconvénient, puisque, comme M. le ministre
des finances l'a dit tantôt, les allocations qui n'auront pas été dépensées au
30 septembre devront, aux termes de l'article 26, être transférées à l'exercice
suivant.
M. le ministre des
finances s'étant rallié à l'amendement de la section centrale, je le prie de
vouloir bien s'expliquer sur les changements que je propose.
M. le ministre des finances (M.
Malou).
- L'honorable membre suppose l'intervention de la législature dans ces reports.
Rapprochons les diverses dispositions du projet, nous verrons qu'il n'y a pas
de difficulté. L'exercice n'est chargé que des dépenses qui s'y rapportent et
des engagements pris par le gouvernement pendant le cours de cet exercice.
L'exception prévue dans le paragraphe 3 n'est relative qu'aux engagements pris
et aux services faits pendant l'exercice. L'article 26 suppose encore des
payements à faire à raison de ces engagements antérieurs.
Et alors il s'établit
un décompte vérifié préalablement par la cour des comptes ; mais ce transport
ne doit pas être soumis à la législature.
L'article 26 lui-même
se lie à d'autres dispositions du projet. Ainsi l'exercice étant clos le 31
octobre, le ministre des finances doit arrêter l'exercice à cette date et
soumettre le compte général des finances à la cour des comptes dans le délai
fixé par l'article 41. Tous les délais sont échelonnés de manière que les
chambres puissent voter les lois de compte avant le budget. Ces délais peuvent
donc être maintenus sans qu'il résulte aucun inconvénient de l'époque
habituelle de la réunion des chambres.
M.
Osy.
- Le gouvernement avait proposé de clôturer au 31 décembre l'exercice
précédent. La section centrale a proposé la date du 31 octobre, parce que nous
avons prévu le cas où les budgets seraient votés d'avance, comme nous en avons
l’espoir.
Ainsi, le
gouvernement pourra, dès les premiers mois de la session, remettre les comptes
de l'année pénultième pour qu'ils soient vérifiés avant le budget.
Je crois qu'il est
désirable que les budgets soient votés d'avance ; nous devons, sous ce rapport,
faire appel au zèle du ministère et au zèle de la chambre. Mais il me paraît
impossible d'établir cette obligation par la loi. Je ne puis donc appuyer ici
l'amendement de l'honorable M. Rogier, ni celui de l'honorable M. Devaux.
M. Delfosse. - Les observations
que M. le ministre des finances vient de présenter ne m'ont pas fait changer d'avis,
je persiste à croire qu'il serait utile de fixer la clôture des opérations d'un
exercice au 30 septembre au lieu du 31 octobre.
Nous devons désirer
tous qu'au moment de l'ouverture des chambres, le gouvernement puisse être en
mesure de nous faire connaître, autant que possible, la situation financière du
pays.
Si la clôture des
opérations d'un exercice est trop rapprochée de l'époque de l'ouverture de la
session, il ne sera guère possible au gouvernement de nous communiquer les
résultats définitifs de cet exercice, il ne pourra nous communiquer que des
résultats provisoires ; il y aura, au moment de la présentation des budgets,
deux exercices dont les résultats seront encore douteux, l'exercice en cours
d'exécution et l'exercice clos.
Ainsi, pour citer un
exemple, lorsque le gouvernement nous présentera au mois de novembre 1847 le
budget de 1848, nous ne connaîtrons qu'imparfaitement la situation de
l'exercice 1846 et plus imparfaitement encore celle de l'exercice 1847.
Si l'exercice 1846,
au lieu d'être clos le 31 octobre 1847, l'était le 30 septembre, le
gouvernement aurait assez de temps pour nous communiquer les résultats
définitifs de cet exercice, dès l'ouverture de la session, notre situation
financières serait mieux connue.
Il y a des administrations
provinciales qui ont, pour terminer les opérations relatives à un exercice,
bien moins de temps que l'Etat n'en aurait d'après ma proposition. Dans la
province de Liège la clôture des opérations est fixée au mois d'avril. Je sais
bien que les affaires de l'Etat sont plus compliquées que celles d'une
province, mais il y a loin du mois de septembre au mois d'avril ; l'Etat aurait
neuf mois alors que l'administration provinciale de Liège n'en a que trois, et
il me semble que c'est bien assez.
Tantôt, lorsque
l'honorable M. Rogier demandait à M. le ministre des finances si le terme de
dix mois proposé par la section centrale ne serait pas insuffisant. M. le
ministre des finances a répondu par l'article 26 qui ordonne le report à
l'exercice suivant des sommes dues mais non payées. Si M. le ministre des
finances m'objectait que le terme de neuf mois ne suffit pas, je lui ferais la
réponse qu'il a faite à l'honorable M. Rogier ; je lui dirais : L'article 26
lève toute difficulté ; si le terme est de neuf mois au lieu de dix, il y aura
quelques reports de plus, mais c'est là un faible inconvénient qui sera bien
compensé par les avantages de la mesure que je propose. D'ailleurs, moins le
terme accordé pour la clôture des opérations sera prolongé, plus le gouvernement
sentira la nécessité de mettre de la diligence dans ses actes, et cela sera
encore un bien.
M. Devaux. - Je propose
l'amendement suivant :
« Les budgets des
dépenses et des voies et moyens seront présentés six mois au moins avant
l'ouverture de l'exercice.
« La présente
disposition ne sera pas applicable aux budgets de 1847 et de 1848.»
- La discussion est
continuée à demain.
La séance est levée à
quatre heures trois quarts.