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Chambres des représentants de Belgique
Séance du mercredi 22 mai 1844

(Moniteur belge n°144, du 23 mai 1844)

(Présidence de M. Liedts)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et un quart.

M. Scheyven lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

M. de Renesse rend compte des pièces de la correspondance.

Pièces adressées à la chambre

« Plusieurs médecins et chirurgiens-accoucheurs, des environs de Courtray, demandent l’abolition de l’impôt patente auquel sont assujettis ceux qui exercent l’une des branches de l’art de guérir. »

« Même demande des médecins, chirurgiens et accoucheurs établis à Lierre. »

- Renvoi à la section centrale chargée de l’examen du projet de loi sur les patentes.


« Le sieur Verstraeten, ancien militaire, demande une pension. »

- Renvoi à la commission des pétitions.


« Le sieur Righing de Lambertini, ancien militaire, congédié pour infirmité contractée au service, demande une pension. »

- Même renvoi.


« Le sieur Dulens, fabricant à Bruxelles, demande qu’on lui accorde en location ou à forfait la main-d’œuvre des détenus du dépôt de mendicité à la Cambre. »

- Même renvoi.


« Les fabricants et débitants de tabac établis à Wavre demandent le rejet du projet de loi sur les tabacs. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet.


« Plusieurs cultivateurs et préparateurs de lin à Opprebais et dans les environs demandent un droit d’entrée sur les lins. »

- Dépôt sur le bureau pendant la discussion des conclusions de la commission d’enquête parlementaire.

Commission d'enquête parlementaire sur la situation du commerce extérieur

Discussion des questions de principe

Deuxième question : Adoptera-t-on, pour établir le régime des droits différentiels, la double base du pavillon et de la provenance ?

M. le président. - Il s’agit de décider d’abord quelle question on mettra en délibération.

La deuxième question posée par M. le ministre de l’intérieur, est conçue en ces termes :

« Adoptera-t-on, pour établir le régime des droits différentiels, la double base du pavillon et de la provenance ? »

La deuxième question, posée par M. Dumortier, est celle-ci :

« En principe, les droits différentiels seront-ils établis en faveur du pavillon et du lieu de production ? »

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) (sur la position de la question). - Je pense que cette question fait double emploi avec la première question qui a été votée avant hier, et qui est ainsi conçue :

« Etendra-t-on et complétera-t-on le régime des droits différentiels de pavillon et de provenance existant en Belgique ? »

Il est donc reconnu qu’on conserve la double base du pavillon et de la provenance. La deuxième question est donc superflue.

M. Dumortier. - Mais il y a une très grande différence entre la deuxième des questions que j’ai posées, et celle qui a été votée. La question posée par M. le ministre de l’intérieur n’était que relative aux lieux de provenance ; moi, je demande qu’on s’explique sur les lieux de production. C’est sur ce point que je demande qu’on délibère ; je demande que la chambre décide si elle accordera des faveurs aux personnes qui vont chercher des articles chez les nations qui les produisent.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je comprends maintenant la distinction : Elle est fondée. Il entre dans nos intentions de donner le plus de faveur aux provenances des lieux de production. Nous pouvons donc répondre affirmativement à la deuxième question posée par l’honorable M. Dumortier.

M. de La Coste. - Je ne sais, d’après l’explication de l’honorable M. Dumortier, si j’ai entendu la deuxième question absolument dans le même sens qu’il l’entend maintenant. Je pensais que l’intention de l’honorable M. Dumortier était d’établir, en principe général, et sauf les exceptions, que la faveur ne serait que pour le pavillon national que, par conséquent, les faveurs de provenance ne seraient pas accordées au pavillon étranger, excepté dans certains cas spéciaux. Si l’intention de l’honorable M. Dumortier est telle, alors je demanderai la parole, pour appuyer cette proposition, qui rentre dans l’idée que j’ai déjà énoncée. Si son intention n’est pas telle, je demanderai que, soit à présent, soit plus tard, en examine cette question-ci :

« Admettra-t-on les droits différentiels de provenance directe en faveur de la navigation étrangère, indépendamment de toute réciprocité, obligation, ou engagement spécial ? »

Dans le projet de M. le ministre de l’intérieur, on réduit la faveur de provenance directe pour le pavillon étranger, alors même que les puissances auxquelles appartiennent le pavillon ne nous accordent aucune faveur et que l’armateur n’est soumis à aucune obligation quelconque.

M. le président. - Permettez, M. de La Coste ; je dois d’abord consulter la chambre sur la question à mettre en discussion.

M. Dumortier. - Je dois faire remarquer encore une fois que la seconde question de M. le ministre de l’intérieur rentre tout à fait dans celle qui a déjà été votée ; mais que la seconde question que j’ai posée est tout à fait différente ; en effet, il ne s’agit pas dans cette question du lieu de provenance, mais du lieu de production. C’est dans ce sens qu’il faut mettre la deuxième question aux voix.

Pour répondre maintenant à l’honorable M. de La Coste, je lui dirai que ma deuxième question s’applique, en principe général, au pavillon national ; on verra s’il y a lieu à faire les exceptions.

M. le président. - Je mettrai donc en délibération la deuxième question posée par M. Dumortier.

M. de La Coste. - Je demanderai à M. le ministre de l’intérieur si c’est maintenant que je dois traiter la question que j’ai annoncée tout à l’heure.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je prierai l’honorable membre de déposer sa question, et de laisser résoudre la deuxième question de l’honorable M. Dumortier avec la déclaration que je fais, que toutes les autres questions restent sauves.

- La deuxième question, posée par M. Dumortier, est mise aux voix ; elle est résolue affirmativement.

M. Delfosse (pour une motion d’ordre). - Messieurs, vous vous souvenez que M. le ministre de l’intérieur a dit hier que les membres de la commission d’enquête ne s’entendaient plus. J’ai lu ce matin le discours M. le ministre de l’intérieur, au Moniteur, et je n’y ai pas trouvé cette phrase ; M. le ministre l’aura probablement supprimée en revoyant son discours ; je tiens à ce que l’on sache que cela a été réellement dit, pour qu’on ne puisse pas m’accuser d’inexactitude dans la réponse que j’ai faite à M. le ministre de l’intérieur.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - En effet, j’ai reconnu qu’il y avait désaccord sur beaucoup de points entre les membres de la commission d’enquête. Je maintiens cette assertion... Si cela ne se trouve pas dans le Moniteur de ce matin, cela se trouvera dans le numéro de demain.

« Admettra-t-on des droits différentiels de provenance directe en faveur de la navigation étrangère, indépendamment de toute réciprocité, obligation ou engagement spécial ? »

M. le président. - M. de La Coste a proposé la question suivante :

« Admettra-t-on des droits différentiels de provenance directe en faveur de la navigation étrangère, indépendamment de toute réciprocité, obligation ou engagement spécial ? »

M. de La Coste. - Messieurs, lorsque, dans la séance d’hier, j’ai appuyé la proposition du renvoi aux sections du projet présenté par l’honorable M. de Haerne, qui est la reproduction du système de l’honorable sénateur Cassiers, mon intention n’a été nullement de retarder la discussion, je me serais mis en contradiction avec moi-même. Mais tout en admettant, en grande partie, les objections qui ont été développées par M. le ministre de l’intérieur contre ce système, je pense cependant qu’il y a au fond de ce système une idée juste et patriotique, à laquelle M. le ministre de l’intérieur ne s’est pas arrêté.

La pensée principale du système de l’honorable M. de Haerne est celle-ci : « Protection à la marine nationale, réciprocité : point de guerre d’entrepôt à entrepôt. » Je crois que ceci est sage sous tous les rapports.

C’est dans cette guerre contre les entrepôts d’Europe qu’il peut y avoir péril pour notre industrie ; c’est là qu’est le nœud de la difficulté sous le rapport de la politique extérieure. D’autre part, si nous nous heurtons à cette difficulté, ce n’est pas dans l’intérêt de notre industrie, car nous pouvons étendre beaucoup nos relations utiles dans les contrées transatlantiques par la seule extension de la navigation nationale.

Je comprends bien comment est venue l’idée que je combats : c’est-à-dire l’idée d’accorder une faveur de provenance au pavillon étranger. Anvers redoutait surtout, et avec raison, qu’on n’outrât la protection en faveur du pavillon étranger. Voilà pourquoi Anvers s’est longtemps opposé au principe auquel maintenant la chambre de commerce et MM. les députes d’Anvers se sont ralliés.

Alors, on leur a offert une transaction, on leur a dit : vous craignez que nous n’ayons pas assez de vaisseau ; si nous faisions de la marine sans vaisseaux ? Pour cela, accordons la faveur de provenance au pavillon de quelque puissance que ce soit.

Anvers a vu là dedans une transaction, un adoucissement de ce qu’elle redoutait, et elle a accepté cette transaction. Les députes d’Anvers ayant accepté cette position, la défendent avec la constance et le talent qu’ils ont toujours mis dans des occasions semblables.

Mais, quant à moi, je ne puis pas admettre cette transaction ; je ne la crois pas utile au pays. Voila le seul motif pour lequel je la combats ; car sous tous les autres rapports, je n’ai aucune raison pour m’y opposer.

Il est très douteux pour moi que cette protection contre les entrepôts d’Europe soit un avantage réel pour Anvers ; c’est douteux, ou du moins ce l’a été longtemps pour les Anversois eux-mêmes. Mais enfin supposez que ce soit un avantage pour Anvers ; ce serait un avantage uniquement acquis pour Anvers aux dépens des étrangers, auquel cas j’y applaudirais plus que personne ; ce serait un avantage acquis par Anvers aux dépens des autres parties du royaume, aux dépens des riverains de la Meuse qui réclament aux risques et périls de l’industrie, et, je le crois, au détriment des armateurs.

En effet, que vous propose-t-on ? La protection qu’on veut accorder aux provenances directes, on la sépare en deux, pour le café par exemple (on me pardonnera de négliger quelques fractions), pour le café, on accorde à la provenance directe une protection de deux livres sterling. Ces deux livres sterling, on en fait deux parts égales, on donne une livre pour l’armateur belge seul, et une livre sterling pour tout pavillon quelconque, pourvu qu’il arrive du lieu de production.

Dans tout cela, il n’y a que la livre sterling pour l’armateur belge qui tourne à son profit, ou du moins ce n’est qu’à défaut de la concurrence étrangère qu’il pourrait réaliser les deux livres sterling, et alors la protection irait au-delà de ce que l’on a en vue. Mais dans le cas contraire, en cas de concurrence réelle, la seconde livre sterling offerte indistinctement à l’armateur belge et à l’armateur étranger, ne constitue nullement une protection pour la marine nationale ; bien loin de là ! Comme l’armateur étranger peut aussi réclamer cette livre sterling de réduction, il peut sur cette livre sterling faire des sacrifices et rendre par là la concurrence de nos amateurs plus difficile, Si donc, au lieu d’une protection de cinquante francs ainsi partagée, vous en accordiez seulement une de trente, mais à notre navigation seule, vous auriez un système à la fois plus énergique et plus modéré, et surtout plus conséquent.

La pensée primitive de l’auteur même de tout le système était d’accorder une faveur à la navigation nationale, il voulait aussi favoriser les relations directes, mais toujours sous pavillon national. Il mettait de l’exagération dans cette faveur. Il fallait corriger l’exagération, mais ce n’est pas de la modération que d’établir des droits élevés pour les partager entre nous et les étrangers.

Je ne voudrais pas tomber dans l’excès que craignait Anvers, de trop protéger le pavillon national. Mais je voudrais lui réserver la protection quelconque que l’on jugerait nécessaire et ne pas l’énerver en la partageant avec tous les pavillons ; je ne voudrais pas accorder au pavillon des puissances qui nous repoussent une faveur gratuite, une faveur qui ne serait payée par aucune réciprocité, par aucune compensation ; car, messieurs, j’excepte formellement les cas de réciprocité, d’engagement contracté, d’obligation imposée, comme par exemple de la manière qu’ont proposée MM. Eloy de Burdinne et de Haerne, question cependant que je ne toucherai pas, parce qu’elle a été suspendue.

Tout notre débat est venu confirmer l’idée que j’avais déjà énoncée sur l’objet de la présente discussion. M. le ministre de l’intérieur vous a démontré avec force que l’avantage qu’il y a, selon lui, pour notre industrie, dans les provenances directes, existe uniquement lorsqu’elles ont lieu par l’entremise de la navigation nationale. M. le ministre des travaux publics est allé plus loin, il a dit que, quand un navire étranger arrivait directement des lieux de provenance, rien n’empêchait qu’il allât chercher des produits anglais, que ce n’étaient pas la des relations directes.

L’honorable M. de Haerne a dit avec M. Cassiers qu’on ne pouvait pas voir là des provenances directes, que ce n’étaient que des entrepôts flottants. Je n’entends pas ici peser cette expression ; il me suffit que des personnes qui ont profondément étudié la question attestent qu’il n’y a pas plus d’avantage dans ce cas pour notre industrie que dans les relations avec les entrepôts d’Europe. Mais quand nous y allons y chercher des produits sous pavillon national, tout n’est pas perdu pour le travail national : nos chantiers et nos équipages en profitent, tandis que lorsque l’étranger nous apporte des produits coloniaux des Antilles ou d’autres contrées transatlantiques, il n’en résulte pour nous ni avantage maritime, ni avantage industriel.

Aussi, messieurs, je m’appuie encore sur l’opinion de M. le comte Meeus, qui vous a dit qu’accorder des avantages à notre pavillon, c’était en accorder à la construction des navires et à nos équipages, que c’était protéger le travail national.

L’honorable M. Donny est venu, à son tour, confirmer mon opinion ; il a signalé des cas où l’armateur belge aurait pu faire des spéculations avantageuses pour lui et profitables pour l’industrie du pays s’il avait été assuré de la préférence pour le fret en retour ; or assurément la livre sterling donnée à la fois à lui et à son concurrent, ne contribuera aucunement à cette préférence pour les retours.

L’honorable M. Eloy de Burdinne ne veut pas non plus accorder de faveurs gratuites.

L’honorable M. Dumortier insiste sur la nécessité d’accorder des avantages à la navigation nationale afin de développer l’esprit d’entreprise et d’établir des relations lointaines. Peut-on espérer ces résultats des arrivages par pavillon anglais ou suédois ?

L’honorable M. Devaux a fait valoir l’intérêt des armateurs, la diminution toujours croissante du fret. C’est en venant au secours des armateurs et non en prodiguant l’argent des contribuables aux Anglais et aux Espagnols, qu’on établira ces relations lointaines qu’on désire dans l’intérêt de notre industrie. On trouvera peut-être un peu exagéré de dire qu’on prodigue l’argent des contribuables. Cependant de deux choses l’une : ou l’armateur étranger à qui vous accordez cette faveur y renoncera pour faite concurrence à l’armateur belge et alors nous aurons fourni des armes contre nous-mêmes, ou il réalisera la prime sur notre marché, et aux dépens de qui ? C’est un impôt aux dépens des Belges au profit de l’étranger.

Cette observation que je présente dans sa généralité n’est pas applicable à tous les articles du tarif. Il en est auxquels elle n’est pas applicable du tout, il en est d’autres auxquels elle s’applique dans une faible mesure, de sorte que, dans les deux systèmes, on peut ne point s’arrêter à ces articles, le point du litige était, par rapport à eux, de peu d’importance.

Les articles à l’égard desquels la question me paraît mériter le plus d’attention, sont le bois d’ébénisterie, le cacao, le café, l’étain, le gingembre, le miel et le poivre.

La prime qui est réservée à notre navigation apportant directement ces articles est de 19 à 30 francs par tonneau, excepté pour le gingembre, à l’égard duquel elle est de 50 fr. La protection accordée à tout pavillon quelconque arrivant directement, contre les arrivages par terre, canaux et rivières, va de 20 fr. à 50 fr., et, voyez comme on est généreux sous ce rapport : pour le gingembre confit, cette prime va jusqu’à 100 fr. Vis-à-vis de notre navigation européenne, la protection du pavillon étranger arrivant directement est de 16 à 50 francs.

Voyons maintenant comment ces articles nous arrivent. Ils nous arrivent en partie des Pays-Bas par le batelage des deux nations ; je me sers du mot batelage, pour faire une différence entre le cabotage par les eaux intérieures et le cabotage par mer. Ces articles, dis-je, arrivent en partie des Pays-Bas par le batelage des deux pays, il n’y a pas là de distinction de pavillon, les pavillons sont assimilés, nos embarcations en profitent avec les embarcations étrangères.

Nous en recevons, en second lieu, d’Angleterre, et des Pays-Bas par mer, sous pavillon belge. En troisième lieu, nous en recevons des contrées transatlantiques sous pavillon belge ; eu quatrième lieu, nous en recevons sous pavillon étranger, et cela en très grande quantité. C’est sur cette dernière catégorie, sur ce qui nous arrive par pavillon étranger que nous devrions chercher à faire des conquêtes successives, et non, quant à présent du moins, sur ce que nous apporte notre propre navigation. Il sera temps d’en venir là quand nous aurons conquis toute la navigation transatlantique, ce qui n’est pas prochain.

(Erratum au Moniteur belge n°145 du 24 mai 1844 :) Il me semble donc qu’il aurait fallu, au lieu de tant compliquer le système, se borner à faire une chose bien simple.

Puisque l’on jugeait nécessaire d’accorder une protection plus forte à notre marine marchande, pour la navigation au long cours, il fallait accorder cette protection, et voilà tout. Cette nécessité d’accorder une protection plus forte, je l’admets en présence de l’extension qu’a prise notre système protecteur ; (erratum au Moniteur belge n°145 du 24 mai 1844 :) il n’a plus de commun, en effet, avec celui de la loi de principe, sous l’empire de laquelle la prime de 40 p.c. a été accordée, puisqu’à cette époque la protection industrielle avait pour maximum 6 p. c., sauf quelques exceptions. Qu’on accorde donc à notre navigation au long cours la faveur qui lui est nécessaire, que ce soit 15 francs, 25 francs, 30 francs, si l’on veut, davantage s’il le faut ; mais je demande que cette protection soit réservée tout entière à notre pavillon et ne soit pas partagée avec le pavillon étranger, excepté dans les cas d’exception spéciale.

Messieurs les députés d’Anvers m’assurent qu’Anvers n’avait pas varié à désirer une protection contre les entrepôts d’Europe. Mais Anvers n’aurait pas tout ce que cette importante cité désire, qu’elle obtiendrait néanmoins beaucoup encore ; car enfin la prime accordée ici à notre navigation nationale, amenant de plus en plus les arrivages directs, sous pavillon national, produirait l’effet que désire Anvers.

Cette ville d’ailleurs profiterait des avantages offerts à ses armateurs et de la prospérité de ses chantiers.

Mais nous ferions disparaître du projet tout ce qui pourrait soulever les jalousies mercantiles, tout ce qui pourrait être, je ne dirai pas une juste cause, car je n’admets pas qu’il y en eût, mais un prétexte à des représailles. (Erratum au Moniteur belge n°145 du 24 mai 1844 :) Il n’y aurait plus de prétexte possible aux représailles. En effet, comment nous imaginerions-nous que parce que nous accorderions une faveur à notre navigation au long cours, on userait envers nous de représailles ? Si du moins notre législation portant, dans mon système, un caractère de protection purement maritime, donnait lieu à des représailles, ce ne pourraient être que des représailles maritimes ; or nous les avons très peu à craindre, puisque la plupart des autres puissances vont beaucoup au-delà de ce que nous nous proposons de faire. De telles représailles d’ailleurs ne présenteraient jamais une question compliquée. L’industrie n’y serait pour rien. Ce ne serait que de marine à marine, de pavillon à pavillon.

Mais si l’on partait du principe que je propose, il n’y aurait plus de représailles industrielles possibles. Craindre des représailles industrielles dans une telle position, ce serait ressembler à cet homme qui s’était figuré (erratum au Moniteur belge n°145 du 24 mai 1844 :) qu’il avait des pieds de verre, et qui, pour cela, n’osait pas faire un pas.

Il resterait néanmoins matière à des concessions, parce que, sur la faveur accordée à notre pavillon, nous pouvons faire des concessions en échange d’avantages équivalents.

Il ne faut pas néanmoins se faire, sous ce rapport, de nouvelles illusions. (Erratum au Moniteur belge n°145 du 24 mai 1844 :) Il serait juste de la part de la Hollande, par exemple, et si elle se souvient de son histoire, si elle se souvient de la politique de Frédéric-Henri, elle doit trouver qu’il serait dans son intérêt de nous accorder des termes raisonnables, de nous mettre sur la même ligne que la France et l’Angleterre. Mais je crains que si l’on se flatte d’obtenir beaucoup davantage, on ne vienne se heurter contre l’impossible.

Cette opinion, je ne la fonde pas uniquement sur des traités écrits. Il y a des traités écrits sur la carte géographique, que nous devons savoir y lire.

En résumé, je vois qu’en adoptant la modification que je propose nous faisons pour Anvers tout ce que nous pouvons faire sans compromettre de graves intérêts ; que nous faisons pour la navigation autant ou plus qu’on ne propose et tout ce qui peut être utile à l’industrie, puisqu’il n’y a que les provenances directes, sous pavillon national. Que l’on considère comme favorable à l’industrie.

Je fais disparaître, dans mon opinion du moins, un danger que plusieurs orateurs ont signale ; ce danger, au surplus, il ne m’appartient pas de le mesurer ; c’est là une tâche qui appartient tout entière au gouvernement.

La question de la Meuse deviendra extrêmement simple ; car il n’y aura de surcharge qu’en faveur du pavillon national. S’il y a une protection de 25 fr. en faveur du pavillon national, ce sera une surcharge de 25 fr., et non pas de 50, comme on le propose.

Je crois que le secours que j’apporte ainsi au littoral de la Meuse, qui a des droits à notre sollicitude comme le littoral de la mer y a droit, sera plus efficace que la proposition d’assimilation de la navigation de Liège à celle venant des entrepôts transatlantiques ; car que ferions-nous par là ? D’une main nous détruirions ce que nous aurions élevé de l’autre.

Je n’appliquerai pas cette observation à la proposition de l’honorable M. Dumortier. Je réserve, à cet égard, mon opinion ; je suis prêt à faire pour le littoral de la Meuse toute ce qu’il sera juste et possible de faire ; mais il faut être conséquent, et dès lors de semblables propositions doivent occasionner beaucoup d’hésitation.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - L’honorable préopinant, si je l’ai bien compris, irait plus loin qu’on n’a été dans aucun système de droits différentiels ; la question qu’il propose est celle-ci :

« Admettra-t-on des droits différentiels de provenance directe en faveur de la navigation étrangère, indépendamment de toute réciprocité, obligation ou engagement spécial ? »

Il répond négativement à cette question ; ou du moins son intention pour le moment et sauf discussion ultérieure serait de résoudre cette question négativement. (Interruption.) Je sais que l’honorable préopinant n’est jamais tellement absolu dans ses opinions qu’il ne les subordonne pas aux éclaircissements qui peuvent résulter des discussions ; c’est pour cela qu’on discute et qu’il provoque des discussions.

En répondant négativement à cette question, voici quelles seront les catégories d’importation pour les cafés, en citant l’exemple que lui-même a invoqué. Le café importé par pavillon belge, venant des lieux de production payera un droit de 9 fr. ; et il n’y aura plus qu’une deuxième catégorie générale pour toutes les importations quelconques de café, qu’elles soient faites par pavillon étranger des lieux de production ou qu’elles soient faites par pavillon quelconque des entrepôts européens ou transatlantiques (Dénégations de la part de M. de La Coste.)

Il n’y a évidemment que deux catégories dans le système de l’honorable membre. Première catégorie : importation par pavillon belge de café des lieux de production, 9 fr. Comment traitez-vous maintenant toutes les autres importations quelconques ? Vous les rangez dans une seule catégorie qui formera la deuxième.

M. de La Coste. - Qu’il me soit permis de faire observer que, pour le pays de production, s’il y a assimilation, c’est le cas de réciprocité que j accepte formellement. Il n’est donc point exact de supposer que je ne fais qu’une seule catégorie. Du moment que le pavillon étranger est assimilé au nôtre, ou qu’il est dans quelque cas de faveur spéciale, c’est une autre question que je réserve expressément.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - De sorte que l’honorable préopinant admet qu’il n’y aura que deux catégories, sauf le cas d’assimilation par réciprocité. Toujours est-il que j’avais bien expliqué sa pensée. Ainsi vous auriez deux genres d’importation. Tout votre système se réduit à deux catégories : importation du lieu de production, par pavillon belge, et importation d’ailleurs et autrement. C’est-à-dire qu’en faisant abstraction des cas d’assimilation, le système de l’honorable préopinant est le plus absolu.

M. de La Coste. - Je ne touche pas la question des entrepôts transatlantiques.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je me permettrai de répondre à cette interruption que si l’honorable préopinant n’accorde pas une faveur au pavillon étranger qui importe du lieu de production, à plus forte raison doit-il refuser toute faveur au pavillon étranger qui importe des entrepôts transatlantiques.

Le système de 1822 était celui-ci : avantager le pavillon belge seulement d’une remise de 10 p. c., quel que soit le caractère de la provenance, que la provenance soit directe ou indirecte, du lieu de production ou d’un entrepôt. Nous nous bornons à augmenter cette remise de 10 p.c. ; mais nous y mettons la condition que l’importation sera du lieu de production.

Je dis que vous arrivez aux conséquences les plus exagérées, si réellement vous voulez dans ce système accorder une faveur au pavillon belge.

Je me tiens à l’exemple déjà cité, le café.

Le café, importé des lieux de production, par pavillon belge, payera 9 fr. Comment traiterez-vous toutes les autres importations que vous confondez dans la même catégorie ? Si vous accordez un droit très élevé, il y aura réellement protection pour le pavillon belge. Mais comme notre marine est très restreinte, il y aura par là exclusion des navires étrangers, et renchérissement de toutes les denrées transatlantiques dont vous avez besoin.

Si au contraire, vous n’accordez pas une faveur très élevée, si vous n’accordez qu’une faveur minime, une faveur de 1 fr. 50 c ajoutés au chiffre de 9 fr., vous admettrez encore la concurrence dans tous les cas de la marine étrangère, mais à un tel point qu’il n’y aura pas d’encouragement réel pour la marine belge. Pourquoi ? Parce que vous mettez sur la même ligne les importations par pavillon étranger du lieu de production, des entrepôts transatlantiques et des entrepôts européens.

Depuis quelques jours, on cherche à réhabiliter les entrepôts européens, à préconiser le cabotage. Sans doute, mon intention n’est pas de nier certains avantages que présente le cabotage. Mais je ne suis pas admirateur des relations maritimes entre la Belgique et les entrepôts européens au même point que quelques membres de cette chambre. Cette question sera traitée avec plus de soin, je pense, dans le cours de cette discussion, mais pour le moment je ne citerai qu’un fait. Aujourd’hui vous accordez 10 p. c. de remise au navire belge qui arrive d’un port européen, par exemple, au navire belge qui arrive d’un port de l’Angleterre, après y avoir transporté, non pas des produits manufacturés de Belgique qui sont repoussé de ce pays, mais certaines matière premières, certaines denrées ; des écorces, par exemple, et des œufs. Que vous rapporte ce navire belge ? Ouvrez, messieurs le tableau général de la statistique commerciale, vous verrez, messieurs ce que vous rapportent les navires belges faisant le cabotage et qui ne parviennent à exporter en Angleterre aucun de vos produits manufacturés. Ils en rapportent (je laisse l’article sel de côté pour le moment), des objets manufacturés et notamment des tissus ; et je m’étonne, qu’il me soit permis de le dire, que les industriels de Gand, de Verviers et de Tournay n’aient pas depuis longtemps élevé une réclamation contre le privilège accordé à la marine belge pour l’importation des tissus étrangers.

M. Delehaye. - Ils ont réclamé depuis longtemps.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Vous recevez de l’Angleterre des tissus pour plus de 12 millions, et plus des quatre cinquièmes de ces importations sont faites par navires belges.

Ces navires belges, ont joui d’une remise de 10 p. c. Le droit en principal est de près de 1 million de francs. Au lieu de payer 800,000 fr. seulement, les navires belges auraient dû payer 880,000 francs, et de fait vous avez accordé à la marine belge une prime de 80,000 fr. pour vous importer des tissus étrangers ! Le même fait se reproduit pour toutes les manufactures arrivant par mer. Je n’ai donné qu’un aperçu établi grosso modo ; des chiffres plus complets seront mis à cet égard sous les yeux de la chambre.

De sorte, messieurs, qu’il y a peut-être certaines faveurs à retirer au cabotage et que, par exemple, la proposition d’abolir la remise de 10 p. c. pour toutes les importations de tissus mériterait une très sérieuse considération.

Je m’étonne aussi, messieurs, qu’un gouvernement étranger n’ait pas même réclamé. Car il se trouve que pour les tissus, par exemple les tissus de laine, la France qui importe et qui doit naturellement importer par terre sans jouir de la remise de 10 p.c., est dans une position moins avantageuse que l’Angleterre qui importe toujours par mer.

Je fais, messieurs, ces réflexions, parce qu’il m’a semble que l’honorable préopinant était trop disposé à étendre les faveurs accordées à la navigation du cabotage. Bornons-nous à le favoriser dans le commerce qui lui est propre, c’est-à-dire dans le transport de pays à pays des articles et surtout des articles de commerce maritime qui sont les produits des pays d’Europe. Restituons par contre au commerce de long cours le transport des denrées exotiques ou coloniales.

En parlant de ce qu’on veut bien appeler les entrepôts flottants, il vous a dit ; mais que fait le navire étranger qui importe directement à Anvers des pays transatlantiques des denrées coloniales ? Quel avantage y a-t-il pour vous dans ces importations directes ? L’avantage est nul, dit-il. Moi, j’y vois un très grand avantage : c’est qu’Anvers par ces importations directes même par pavillon étranger, devient un marche de première main, c’est encore que les matières premières que notre industrie demande à ces contrées, nous sont apportées à d’autant meilleur marché, qu’elles nous arrivent en droiture ; et c’est là ce que l’honorable membre a totalement perdu de vue.

Il a dit que nous sommes en présence de deux intérêts : favoriser la marine belge, et en ne voyant ici que la marine marchande belge, je conçois qu’on accorde la plus grande faveur au cabotage ; et en second lieu : amener l’exportation de produits manufacturés de la Belgique. Mais il y a un troisième intérêt extrêmement important pour l’industrie elle-même, et par conséquent aussi pour l’exportation, intérêt que l’honorable membre a totalement perdu de vue, et sur lequel j’ai pourtant, à plusieurs reprises, appelé l’attention de la chambre : c’est de créer un marché de première main à Anvers ; c’est de faire en sorte que l’industrie elle-même puisse avoir ses matières premières sous la main, et que l’Allemagne, au lieu d’aller s’approvisionner dans les entrepôts hollandais, français et anglais, par exemple, trouve les mêmes avantages à s’approvisionner a Anvers même ; et pour que l’Allemagne et notre industrie elle-même trouvent ces avantages, il ne faut pas qu’Anvers soit pour un grand nombre d’objets une succursale seulement des entrepôts étrangers.

L’honorable membre admet cependant la sensibilité d’assimilation, c’est-à-dire qu’en cas de réciprocité, le pavillon national du lieu de production serait assimilé au pavillon belge venant du lieu de production. Il y aura donc toujours, si le droit protecteur établi en faveur du pavillon belge est réellement élevé, exclusion de tous les pavillons autres que le pavillon belge et le pavillon national du lieu de production. Mais cette exclusion sera absolue dans un grand nombre de cas. Elle sera absolue pour tous les parages de l’Amérique méridionale, où il n’y a pas de marine nationale. Elle sera absolue pour le Brésil, par exemple ; c’est-à-dire que vous en recevrez le café et les sucres ou uniquement par pavillon belge au droit le plus favorable, ou par un navire quelconque qui sera frappé du droit le plus élevé ; et comme votre marine est en ce moment très restreinte, que vous n’aurez pas pour y suppléer, le concours du pavillon brésilien, puisqu’on peut dire qu’il n’y a pas de marine brésilienne, il se trouvera que presque toutes vos importations du Brésil en café et en matières premières, resteront forcément frappées du droit le plus élevé.

Je dois dire, messieurs, qu’en étudiant cette question si vaste des droits différentiels, il y a eu un moment où je me suis aussi arrêté à l’idée de n’admettre que la faculté d’assimilation du pavillon national du lieu de production au pavillon belge, comme dans le système anglais, ou bien, en admettant même deux catégories, de restreindre la deuxième catégorie au pavillon national du lieu de production. Je m’explique, messieurs, en vous priant de jeter les yeux sur le projet de tarif :

Il y est dit : « Café, pavillon national, 9 fr.,

« Café, pavillon étranger, 11 fr. 50. »

Au lieu de mettre pavillon étranger, on aurait mis : « pavillon national du lieu de production, 11 fr. 50. »

Mais, c’est ici que j’ai été arrêté par la remarque qu’il y a un grand nombre de contrées transatlantiques où il n’y a pas, à vrai dire, de pavillon national du lieu de production, de sorte que toutes les autres marines se seraient trouvées dans le cas de la surtaxe extrême, et comme votre marine est maintenant insuffisante (il faut toujours en revenir là), la majeure partie de vos importations aurait dû se faire par pavillon étranger, au lieu de production avec tout le poids de la surtaxe.

J’ai dit, messieurs, que l’honorable préopinant allait plus loin que l’on n’a été dans aucun système. En effet, la commission d’enquête, à qui on reproche d’être un peu trop rigoureuse, n’est pas allée jusque-là. Elle reconnaît l’avantage des arrivages directs, même par pavillon étranger, par pavillon autre que par pavillon belge ; elle reconnaît cet avantage que perd de vue l’honorable préopinant, je suis forcé de le répéter ; elle vous propose un système où se trouve les deux catégories, c’est-à-dire : importations des lieux de production par pavillon belge , importations des lieux de productions par pavillon étranger quel qu’il soit, et ce deuxième cas on ne le place pas sur la même ligne que les importations des entrepôts européens

Quelle est donc, dira-t-on, la faveur dont jouira le pavillon belge ? Le pavillon belge jouira, messieurs, d’une très grande faveur. Il jouira entre autres pour le café d’une réduction de 25 fr. par tonneau sur toutes les importations qui peuvent se faire, même dans les cas les plus favorables, c’est-à-dire qu’il jouira de 25 fr. de bénéfice sur l’imputation qui se ferait des lieux de production directement en Belgique par pavillon étranger. Je dis que c’est là un très grand profit.

Une loi, messieurs, n’est pas une théorie ; il faut mettre cette loi en rapport avec la situation. Nous avons une marine marchande de 130 à 150 navires. Cette marine marchande, je puis l’appeler le moyen d’exécution de la loi que nous faisons. Si nous nous bornions à compter sur notre marine marchande, notre loi aurait les résultats les plus désastreux. Il y aurait suspension en quelque sorte des relations avec certains pays ; à moins que la surtaxe ne soit pas assez forte ; mais alors elle ne serait plus protectrice pour la marine belge.

Il faut donc nous associer la marine étrangère, et nous borner à rendre la concurrence de cette marine plus onéreuse qu’elle ne l’a été jusqu’à présent.

J’insiste sur cette considération ; c’est qu’il y aurait erreur à croire que les arrivages directs même par pavillons étrangers, ne présentent pas d’avantage pour la Belgique. Ils présentent au point de vue de la formation d’un marché de première main, les plus grands avantages pour Anvers et pour l’industrie elle-même, et je voudrais qu’on pût en venir à ce double résultat qu’il n’y eût à Anvers que des denrées coloniales venues directement des lieux de production, qu’elles fussent importées par pavillon belge, et encore par pavillon étranger, mais dans une proportion moindre que maintenant. Ce serait un très beau résultat, et la position d’Anvers serait magnifique. Sans doute, il serait encore plus beau que l’immense majeure partie de ces arrivages directs se fît par nos propres navires ; mais nous ne pouvons espérer cela que dans un avenir plus ou moins éloigné, et, en attendant, je le répète, ce serait un beau résultat.

M. Cogels. - Messieurs, si j’ai bien compris l’honorable M. de La Coste, il voudrait, tout en adoptant une proposition beaucoup plus modérée, rapprocher notre système du système français. Pour rendre la chose plus saisissable, je ne m’attacherai non plus qu’à l’article café.

Voici le tarif français pour le café :

De l’Inde et des établissements français par navires français, 78 fr.

D’ailleurs, hors d’Europe, 95 francs ; et des entrepôts d’Europe, 100 francs.

Voilà pour le pavillon français.

Pour le pavillon étranger, le chiffre est invariable. Il est de 105 fr. pour les trois catégories mentionnées ci-dessus.

L’honorable M. de La Coste ne se bornerait pas, je crois, ainsi que l’a supposé M. le ministre de l’intérieur à deux catégories seulement ; il y aurait plusieurs catégories pour le pavillon belge, et il pourrait y avoir deux catégories même pour le pavillon étranger. Ainsi, en supposant que le tarif proposé fût maintenu pour le pavillon belge, c’est-à-dire que le café, par pavillon belge, paierait 9 francs venu directement du lieu de production, 11 fr. 50 des entrepôts transatlantiques et 14 francs des entrepôts d’Europe ; en admettant la réduction de 10 p. c., l’honorable M. de La Coste soumettrait le pavillon étranger, dans ce cas, à 14 francs, venant du Brésil, à 14 fr. venant des entrepôts transatlantiques, et il élèverait ce droit à 15 fr. 50 et au-delà lorsqu’il viendrait des entrepôts étrangers.

Maintenant quelle serait la conséquence de ce système ? M. le ministre de l’intérieur vous a déjà fait voir que dans le cas où le chiffre différentiel serait très modique, vous feriez disparaître tous les résultats que vous espérez de votre système récent ; que dans le cas où vous élèveriez la protection au maximum de la protection qui existe en vertu du système proposé, vous restreindriez votre navigation nationale aux besoins de votre consommation donc vous excluriez complètement le pavillon étranger ; le pavillon étranger étant complètement exclu des besoins de votre consommation, vous concevez qu’il ne viendrait pas non plus sur vos marchés, lorsqu’il n’y aurait d’autre ressource pour lui que le transit absolu. La conséquence en serait que les puissances dont vous faites maintenant les affaires et dont votre position géographique vous appelle à faire les affaires, vous passeraient par-dessus la tête ; elles iraient faire des achats dans les entrepôts européens contre lesquels vous voulez encore lutter plus ou moins.

On a fait ressortir les avantages des entrepôts européens, et on a voulu nous effrayer considérablement de ce qu’on a appelé les entrepôts flottants. Permettez-moi de dire que les entrepôts flottants, tels qu’on vous les a dépeints, sont un peu les bâtons flottants de la fable. Nous ne devons pas redouter ces entrepôts ; ils peuvent seuls constituer un marché ; nous ne devons pas les exclure. L’énorme différence qu’il y a entre ce qu’on appelle un entrepôt flottant et un entrepôt européen, c’est que l’entrepôt flottant vous arrive tout entier, tandis que vous allez faire votre choix dans les entrepôts européens !

Eh bien messieurs, c’est en cela que la chambre de commerce d’Anvers et le commerce d’Anvers n’ont jamais varié. La chambre de commerce d’Anvers a vu le danger qu’il y aurait de maintenir un système qui exposerait la Belgique à retomber, pour ses relations commerciales, à la position que lui avait faite le traité de Munster. Voilà ce à quoi on veut obvier avec le système actuel.

M. le ministre de l’intérieur a signalé les anomalies de notre système actuel pour la protection qu’il accorde. Je l’avais déjà fait ; c’est surtout pour les manufactures étrangères que j’avais signalé la protection énorme que nous accordons ; je n’avais pas alors sons les yeux les chiffres de nos tarifs ; je vais vous dire maintenant l’importance de cette protection.

Pour les tissus de cotons imprimés, le droit actuel est 212 francs par 100 kil. ; la protection est donc de 212 fr. par tonneau. Pour les tissus de laine, le droit actuel est de 190 francs ; la protection par tonneau est donc de 190 fr. et le fret est de 7 schellings. Ainsi, là où vous avez un fret de 9 francs, vous accordez à votre marine de petit cabotage une protection de 212 fr. par tonneau pour importer ce que messieurs les industriels de Gand et de Verviers désirent voir exclu du pays. Sous ce rapport, il faut reformer notre système, et lorsque nous en serons venus aux articles, je serai le premier à demander qu’on retire au pavillon national la faveur dont il jouit pour l’importation de certains objets manufacturés

M. de La Coste. - Messieurs, je dirai d’abord que la question des tissus, qui est venue tomber dans la discussion, y est tout à fait étrangère. Si l’on juge que, sous ce rapport, le cabotage est favorisé d’une manière qui nuise à notre industrie, qu’on fasse une proposition, et, pour ma part, je l’examinerai sans aucune préoccupation. Je suis si loin de vouloir accorder des faveurs exorbitantes au cabotage que, dans mon système, on pourrait réduire le chiffre de la protection proposée, et cela pour une raison très simple : c’est qu’ayant protégé le pavillon étranger contre notre propre cabotage, on a voulu atténuer ce tort qu’on lui faisait par une faveur plus forte vis-à-vis du cabotage étranger. M. le ministre de l’intérieur a dit lui-même qu’il y avait compensation par l’augmentation du chiffre de la protection ; tandis que, dans mon système, on aurait dû la maintenir comme elle était.

Je dois aussi désavouer complètement une grande partie des interprétations qu’on a données à ma pensée, que je crois comprendre mieux que je n’ai eu le bonheur de l’expliquer.

Ce qui a embrouillé la question, c’est qu’on y a mêlé d’autres questions qui sont encore entières, entre autres la question des entrepôts transatlantiques. Je n’ai rien à dire à cet égard, parce qu’il n’est pas décidé que des faveurs seraient accordées aux entrepôts transatlantiques.

Laissant donc pour le moment cette question de côté, voici comment le principe que je recommande opérerait :

Pour le café, on propose un minimum de 9 fr. ; on veut, pour le pavillon national, une faveur de 2 fr. 50 c. les 100 kilog. Eh bien, soit ; partons de là ; alors le café arrivant directement sous pavillon national paiera 9 fr., et, sous pavillon étranger, 11 fr. 50, comme dans le tarif ministériel ; mais celui qui arrivera d’Europe sous pavillon national ne payera que 11 fr. 50 également ; arrivant d’Europe sous pavillon étranger, ou par terre, canaux et rivières, il payera 12 fr. 50.

Veut-on favoriser davantage encore le pavillon national, sans augmenter la surcharge pour le consommateur, il suffit pour cela d’assimiler tous les arrivages sous pavillon étranger non assimilé, ni spécialement favorisé, aux arrivages par terre, canaux et rivières.

Si donc vous voulez mettre le pavillon étranger dans la situation la plus défavorable, alors on arriverait à maintenir 9 francs par provenances directes sous pavillon national, et 12 fr. 50 c. par pavillon étranger. Il suffirait, dans ce système, d’accorder une faveur d’un franc comme à présent au cabotage national, de sorte que le cabotage sous le pavillon national paierait 11 fr. 50 c. De quelque façon donc qu’on opère, au lieu d’arriver à 15 fr. 50 c., j’arrive au maximum de 12 fr. 50 c. ; voilà l’exagération de mon système et la modération du système contraire.

Veut-on maintenant un échelon de plus pour les provenances des entrepôts transatlantiques ? Je pense qu’il faudrait être, à cet égard, très modéré, car, ce que nous ferons sera pour le pavillon américain. Peut-on donc faire une réduction d’un franc en faveur du pavillon américain, outre celle de dix pour cent dont il ne jouit pas aujourd’hui ? on n’arriverait pas encore à la hauteur qu’on voudrait établir, mais seulement à 13 fr. 50. La question, du reste, est indépendante du taux de la protection ; il s’agit seulement de réserver la faveur quelconque de provenance au pavillon national et à tous les pavillons qui y seront assimilés ; ce qui n’empêcherait pas, si on venait à conclure des traités à des conditions intermédiaire entre l’assimilation et la position du pavillon étranger, d’en tenir compte. Cela répond à l’objection qu’on m’a faite, que je mettais tous les pavillons étrangers dans la même catégorie, puisque j’excepte très formellement les pavillons qui se trouveraient dans des cas de faveur spéciale. Je ne puis pas davantage admettre dans l’objection qu’on me fait que j’exclus le pavillon étranger. En effet, je n’accorde au pavillon national que ce que vous voulez lui accorder. C’est un principe mathématique que, quand de deux quantités différentes on retranche des quantités égales, la différence reste la même. Or, je retranche seulement la faveur qu’on veut accorder à l’un et à l’autre concurrent également ; je ne change donc pas les conditions de la concurrence ; je n’exclus en aucune façon, et pas plus que le projet ministériel, le pavillon étranger ; mais aussi, je ne donne pas de faveur au pavillon étranger, aux dépens du consommateur belge. Je vois dans cette faveur une charge bien grande, une perte bien plus forte pour le trésor que celles dont on a accusé le cabotage national.

L’étranger, en effet, pouvant vendre son café avec une livre sterling de faveur, comparativement au café qui viendrait des entrepôts d’Europe, aurait, jusqu’à concurrence de cette livre sterling, le même avantage que l’armateur belge. Il peut sacrifier cette livre sterling pour faire une concurrence plus forte à l’armateur belge, ou la réaliser sur le consommateur belge. Voyez maintenant, dans les états que nous avons sous les yeux, combien de café nous arrive directement sous pavillon étranger.

Supposez, si l’on veut, ce qui n’est guère probable, qu’en dix années notre pavillon remplace le pavillon étranger, et qu’ainsi sa part décroisse annuellement ; supposez que l’armateur étranger ne perçoive qu’une partie de la prime, la moitie par exemple, il aura néanmoins réalisé des sommes bien autrement considérables que celles qu’a citées M. Cogels.

M. le ministre de l’intérieur, et je comprends sa réserve, n’a pas touché une question à l’égard de laquelle mon système présente, je le pense, de grands avantages. Le comité secret nous a fourni très peu de lumières sur cette question délicate.

M. le ministre des travaux publics a exposé son opinion à cet égard ; mais en nous prévenant que ce n’était là qu’une opinion particulière qui n’avait rien d’officiel. Sous ce rapport, mes observations restent debout ; mais, je me hâte de le répéter, c’est un point qui appartient essentiellement à la responsabilité du ministère, que je veux lui laisser tout entière.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - L’honorable préopinant trouve que je lui ai attribué une opinion beaucoup trop absolue en supposant qu’il n’y aurait que deux catégories d’importation : les importations du lieu de production par pavillon belge, et en second lieu toutes les autres espèces d’importations. C’est cependant là le système dans sa véritable application. L’honorable membre n’exclut pas l’assimilation ; j’ai tenu compte de cette observation : il va plus loin, il n’exclut pas les catégories intermédiaires qu’on introduirait à certaines conditions pour lesquelles on demande des compensations.

Je lui soumettrai une première observation, je lui demanderai que deviendrez-vous dans l’intervalle ? Car, dans la première application du système présenté, vous n’avez que les deux catégories d’importations ; toutes les autres sont exclues. Il y aura, au moins momentanément une perturbation dans vos relations extérieures, un renchérissement de toutes les denrées transatlantiques dont nous avons besoin. En second lieu, pensez-vous que tous les pays viennent demander cette assimilation ? Les pays qui n’ont pas de marine, notamment les pays de l’Amérique du Sud, ne vous demanderont pas l’assimilation, ne vous offriront pas une compensation pour une assimilation qui n’est d’aucun profit pour eux.

L’honorable préopinant a posé des chiffres pour le café ; on l’avait engagea le faire. Il a supposé le chiffre de 9 fr. pour le pavillon national venant du lieu de production, et de 12 fr. 50 pour toute autre importation quelconque. Il y a donc faveur de 3 fr. 50. Voyons les choses dans leur réalité :

Nous recevons du café principalement du Brésil, de Haïti et des colonies hollandaises. Il y a d’autres genres de cafés, mais qui forment une minime quantité. Pour le café brésilien, comme il n’y pas de marine au Brésil, il se trouve que le pavillon belge sera seul chargé d’aller y chercher le café de notre consommation. Il aura 3 fr. 50 de protection. Si vous ne lui donnez pas une protection suffisante, il n’ira pas ; il lui faut une forte protection pour déterminer l’armateur belge à faire ce voyage. Ainsi, si la protection est assez forte, le navire belge ira au Brésil prendre le café dont vous avez besoin. Qui se chargera de vous procurer le café Java ? Celui-là, le navire belge ne peut pas aller le prendre.

La protection de 3 fr. 50 à 4 fr., et même plus, ne sera pas assez forte pour lui permettre d’aller le prendre dans les colonies hollandaises ; vous le prendrez donc dans les entrepôts hollandais. Voilà à quoi se réduira votre loi. Je vais plus loin, je dis que vous n’aurez plus en majeure partie que du café des entrepôts européens ; vous aurez consacré la prépondérance des entrepôts européens.

L’honorable membre a cité d’autres cas où il a trouvé exorbitante la faveur faite au pavillon étranger qui importe du lieu de production. Il a cité l’étain. C’est une matière première qui vient d’au-delà du cap Horn et du cap de Bonne-Espérance ; c’est un des éléments de la navigation la plus lointaine, qui serait chargé d’aller chercher cette matière première là où n’ira que très tard la marine belge ; c’est un de ces objets pour lesquels nous demandons l’assimilation au lieu de production, du moment qu’il y a importation d’au-delà du cap Horn et du cap de Bonne Espérance ; le cacao, le gingembre, le poivre sont dans le même cas. Loin de vouloir restreindre la faveur accordée aux denrées venant du lieu de production, nous allons jusqu’à dire que telle provenance au-delà du cap de Bonne-Espérance et du cap Horn sera toujours assimilée au lieu de production.

Vous voyez à quelle distance nous sommes de la proposition de l’honorable préopinant. Nous recevons l’étain du Chili, de Valparaiso ; le cacao vient également ou du moins devrait venir également de Valparaiso ou de la côte occidentale de l’Amérique. Je demande si le pavillon belge ira immédiatement chercher les quantités de ces denrées qui vous sont indispensables. L’honorable membre a formé un vœu qui peut se réaliser dans un temps plus ou moins éloigné ; je m’y associe ; mais nous n’en sommes pas là : nous espérons qu’il arrivera un moment où nous pourrons accorder, sans inconvénient, à notre pavillon les faveurs trop marquées que nous sommes obligés de lui refuser dans le moment actuel.

M. Cogels. - L’honorable préopinant ne m’a pas bien compris, s’il croit que j’ai taxé son système d’exagération. Il m’était impossible de le taxer d’exagération, avant d’en avoir vu l’application. Il n’y avait qu’un principe posé. J’ai dit que si on l’appliquait au tarif actuel, il aurait exagération, et que, dans le cas où l’on modérerait beaucoup la prohibition des droits différentiels, le système deviendrait illusoire, parce qu’il n’y aurait plus de protection suffisante contre les entrepôts d’Europe.

M. de La Coste. - Je me suis aperçu, pendant que M. le ministre de l’intérieur me répondait, que j’avais négligé une partie de ses observations. Il m’a reproché de ne pas faire attention au but qu’on se propose en faveur d’Anvers. Mais j’ai déjà fait remarquer qu’il y aurait toujours avantage pour Anvers, malgré la modification proposée, parce que les provenances directes seraient favorisées par la faveur accordée au pavillon national. Cela répond en même temps à ce que vient de dire M. le ministre de l’intérieur, que ma proposition tend à faire affluer les cafés hollandais. Je ne comprends pas, en vérité, comment cette observation s’appliquerait à ce que j’ai eu l’honneur de vous dire car nous ne changerions rien à ce qui existe que d’y ajouter la faveur à accorder aux provenances directes par pavillon national.

Au lieu donc de favoriser l’arrivage des cafés de Hollande, nous favoriserions davantage les cafés arrivant directement. Par ce moyen, nous tendons encore vers le but de faire d’Anvers un marché de première main. Il ne faut pourtant pas s’exagérer cette idée, puisqu’on voit l’industrie gantoise montrer si peu d’empressement pour les mesures qui doivent, dit-on, servir à créer à Anvers un grand marché de coton.

- La discussion est close.

La question posée par M. de La Coste est mise aux voix ; elle est résolue affirmativement.

Les droits différentiels seront-ils fixes ou progressifs ?

La chambre passe à l’art. 2 nouveau, présenté par M. le ministre de l’intérieur, ainsi conçu :

« Celles des matières premières, indiquées au tableau annexé à la présente loi, à l’égard desquelles les droits actuels seront augmentés, ne seront passibles de ces augmentations que pour moitié pendant la première année » et à la question suivante, posée par M. Dumortier : « Les droits différentiels seront-ils fixes ou progressifs ? »

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je crois qu’il faut tenir compte d’une distinction qui est fondamentale ; c’est la distinction entre les matières premières et les objets fabriqués ou de consommation en nature.

Vous vous rappelez qu’en comité général il a été question, entre autres, du tarif nouveau sur les cotons.

Les cotons sont de deux espèces : Le coton des indes orientales ; le coton des Indes occidentales.

Voici le tarif : (suit le tableau du tarif, non repris dans cette version numérisée)

Le droit actuel est uniformément de 1,69 ; disons 1,70.

Ce droit sera augmenté dans un seul cas, pour le coton des Indes occidentales importé des entrepôts européens. Pour le coton des Indes orientales le droit le plus élevé sera de 1 fr. 70 c. ; c’est-à-dire que les importations mêmes des entrepôts européens ne seront soumises qu’à un droit de 1 fr. 70 c., qui est le droit dont nous frappons les importations par pavillon étranger du lieu de production,

Le coton des Indes orientales, qui ne forme pas la sixième partie du coton dont nous avons besoin, ne sera, dans aucun cas, soumis à des droits plus élevés que le droit actuel. Pourquoi ? Parce que nous ne pouvons compter ici ni sur le pavillon national ni sur l’assimilation du pavillon étranger. Ce coton viendra en majeure partie soit par pavillon étranger du lieu de production, soit par importation des entrepôts anglais. (Interruption.)

Je souhaite que le pavillon belge aille chercher dans ces parages lointains, au-delà du cap de Bonne-Espérance, moyennant un droit de 1 c., le coton des Indes orientales dont nous avons besoin. Mais nous ne devons guère espérer de voir arriver de cette manière à ces produits des colonies britanniques.

Il n’en est pas de même pour le coton des Indes occidentales, il est tarifé de la manière suivante :

« Directement des pays de production ou d’un port au-delà du détroit de Gibraltar.

« Par pavillon national, fr. 01 c.

« Etranger, fr. 1 70 c.

« D’ailleurs, fr. 2 25 c. »

Nous ne reproduisons pas le chiffre de 1 fr. 70 c. ; nous élevons un peu le droit, parce qu’ici il y aura assimilation du pavillon des Etats-Unis au pavillon belge, le jour même où la loi sera publiée, et parce que des importations directes sont très possibles et seront même les cas les plus ordinaires. Le pavillon des Etats-Unis, qui ne vous importe aujourd’hui le coton qu’en payant 1 fr. 70 c., vous l’importera en payant un centime. (Interruption.)

On demande pourquoi le droit est de 1 fr. 70 c. dans le premier cas d’importation des entrepôts européens et de 2 fr. 25 c. dans le second cas. C’est que dans le premier cas il n’y a pas de probabilité d’assimilation, ni d’importation directe par pavillon belge des lieux de provenance.

Dans le deuxième cas, il y a 1° probabilité d’importation par pavillon belge du lieu de production, les Etats-Unis, bien plus que pour les importations des parages au-delà du cap de Bonne-Espérance, les Indes anglaises ; 2° probabilité, je puis dire certitude d’assimilation du pavillon des Etats-Unis au pavillon belge, dès le lendemain de la promulgation de la loi.

Ainsi, pour le coton de la deuxième catégorie, celui qui est le plus nécessaire à notre industrie ; l’importation en est assurée, soit par pavillon belge allant le prendre au lieu de production, soit par pavillon du lieu de production assimilé au pavillon belge.

Vous voyez que l’importation des entrepôts européens devient l’accessoire. Néanmoins, comme nous voulons ménager tous les intérêts, nous croyons que l’augmentation de 55 centimes doit être graduée, que la première année elle ne doit être établie que pour moitié quelque minime que soit l’augmentation

Je crois que l’on pourrait même, d’une manière générale, admettre ce système pour les matières premières ; c’est-à-dire que là où il y a augmentation elle serait réduite de moitié pour la première année. C’est une précaution surabondante peut-être eu égard à la modicité des augmentations et à ce que pour les importations directes sous pavillon belge et sous pavillon du lieu de production, les droits sont annihilés. Mais cette précaution prouve que nous avons à cœur d’éviter tout ce qui pourrait grever, même indirectement, les approvisionnements de l’industrie.

Nous allons plus loin : si pour un article spécial de denrée de consommation naturelle, où nous démontrons que l’augmentation doit être graduée, rien ne serait préjugé à cet égard.

Ainsi la question de la progression du droit sur les denrées consommées en nature et sur les objets fabriqués ne serait pas préjugée. C’est une question qu’il faudrait examiner pour chaque cas spécial. Cela dépendra de la chambre. Si des chiffres paraissent élevés, vous pourrez donc admettre une progression. Si les chiffres étaient minimes, il n’y aurait pas de progression.

Je pense que l’honorable auteur de la question peut adopter ce terme moyen, surtout à raison de la réserve que j’ai faite en faveur de son opinion.

M. Dumortier. - Je vois que je suis à peu près d’accord avec M. le ministre de l’intérieur, c’est beaucoup. Cependant je ne puis partager complètement l’opinion qu’il vient d’émettre, et qu’il avait émise précédemment, relativement à la question d’assimilation. Je sais que cela ne touche pas à la question en discussion. Mais puisqu’il en est question, je désire présenter quelques observations à cet égard.

La question d’assimilation du pavillon étranger au pavillon belge est extrêmement délicate.

Faut-il exclure l’assimilation ? je ne le pense pas. Faut-il admettre l’assimilation intégralement ? je ne le pense pas encore.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Qu’appelez vous intégralement ?

M. Dumortier. - J’appelle ainsi mettre les navires étrangers absolument sur la même ligne que les navires belges. Je pense qu’il y a lieu ici à examen.

Ainsi, je prends l’article coton. Aujourd’hui, tous les navires des Etats-Unis doivent payer sur le coton un droit de 1 fr. 70. Si vous admettez le système qui vous est proposé, c’est-à-dire l’assimilation complète, qu’arrivera-t-il ? C’est que le navire américain, arrivant directement des Etats-Unis aux ports d’Anvers, de Gand ou d’Ostende avec un chargement de coton, ne payera plus, au lieu de 1 fr 70, qu’un centime, comme le pavillon belge.

Faut-il admettre un pareil système ? C’est là une question très délicate, et je prendrai la confiance de rappeler ici à M. le ministre de l’intérieur les observations qu’il nous a faites dernièrement relativement à un traité de navigation avec la Prusse. Il vous a dit qu’il ne pouvait pas y avoir assimilation entre le pavillon belge et le pavillon prussien, parce que la Prusse envoie chaque année en Belgique beaucoup de navires, tandis que la Belgique n’en envoie que quatre ou cinq en Prusse. Mais avec les Etats-Unis la différence est bien plus immense ; ce pays a dix mille navires, et nous n’en avons que 130. Ainsi l’assimilation ne serait plus une similitude.

Lors donc que nous traiterons la question d’assimilation, il y aura lieu à voir s’il ne serait pas nécessaire d’établir un chiffre intermédiaire en cas d’assimilation. Quant à moi, je penche pour cette idée ; je pense qu’en tout état de choses, lors même que vous accordez les plus grands avantages au pavillon étranger, il faut maintenir un privilège en faveur de la marine nationale. Et, sous ce rapport, je ne suis pas éloigné d’admettre un chiffre un peu plus élevé que celui que propose le gouvernement, pour pouvoir arriver à des transactions avec les pays étrangers et conserver un privilège pour notre marine.

Je crois qu’agir autrement, ce serait détruire le principe que nous voulons voter. En effet, si après avoir voté des droits différentiels, nous accordons une assimilation complète à la Hollande, à la France, à l’Angleterre, nous arriverons à n’avoir rien produit.

Du reste, nous discuterons cette question. J’ai fait ces observations parce qu’on a beaucoup parlé dans cette séance d’assimilation.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je demanderai qu’on aborde cette question après celle-ci.

M. Dumortier. - J’en reviens à l’objet en discussion. Il y a deux espèces de matières : les matières premières et les denrées ou objets fabriqués.

Quant aux matières premières, nous sommes d’accord avec M. le ministre de l’intérieur.

Faut-il étendre la tarification progressive aux denrées de consommation ? Je crois, messieurs, que c’est une nécessité absolue pour le pays, et je vais avoir l’honneur de vous en dire les motifs en peu de mots.

Messieurs, ce que nous devons avant tout éviter, c’est la réaction chez les puissances étrangères ; c’est surtout que le commerce des nations voisines n’excite leurs gouvernements à prendre des mesures de représailles contre la Belgique. C’est principalement à ce point de vue qu’il est nécessaire d’établir une progression dans la loi ; parce qu’une mesure progressive, qui ne s’établit qu’en plusieurs années, est toujours moins brusque, moins violente, choque moins les nations voisines qu’une mesure absolue qui établit dès l’abord des droits différentiels considérables. Pour moi, j’ai le désir formel, et je l’ai exprimé chaque fois que j’ai pris la parole dans cette discussion, de ne poser en aucune manière les mesures hostiles aux nations environnantes, et spécialement à la Hollande, avec laquelle j’appelle un rapprochement commercial qui fait l’objet de mes vœux les plus sincères.

Je pense qu’il ne faut pas froisser cette puissance, qui nous importe beaucoup de café, en établissant des droits différentiels absolus, Si nous admettons un système progressif, nous éviterons les récriminations de sa part, parce que les droits ne s’élevant que lentement d’année en année, des relations commerciales pourront, dans l’intervalle, s’établir ; il ne serait pas impossible qu’avant d’arriver au dernier échelon des droits, nous ne fissions un traité favorable à l’une et l’autre nation ; et c’est ce que je désire voir arriver.

Mais j’ajouterai qu’un pareil traité ne peut avoir lieu qu’autant que nous ayons quelque chose à offrir à la Hollande. Aujourd’hui nous n’avons rien à lui offrir, et nous ne pouvons conclure de traité ; tandis que, lorsque nous aurons des concessions à lui faire, je ne doute pas que nous arrivions très vite à un traité. Pourquoi messieurs ? parce que la Belgique est pour la Hollande un marché magnifique. La Hollande importe chaque année en Belgique pour 38 millions de denrées coloniales, et un marche de 38 millions est un marché considérable, tandis que la Belgique n’exporte en Hollande que pour 18 millions.

M. Rodenbach. - C’est diminué.

M. Dumortier. - Je crois que nos exportations sont réduites à 16 millions. Du reste, il importe peu que ce soit 18 ou 16 millions. Ce qui est certain, c’est que nos relations avec la Hollande le sont tout dans son intérêt, et que par conséquent, cette puissance ne doit pas vouloir établir pas vouloir établir des mesures de réaction contre la Belgique. Car, s’il ne s’agissait pour la Belgique et la Hollande de se faire une guerre de tarit, certes, cette dernière aurait beaucoup plus à perdre que nous.

Quant à moi, je ne désire pas cette guerre de tarif, et c’est pour l’éviter que je forme le vœu que les droits différentiels ne soient établis que progressivement, aussi bien sur les denrées de consommation que sur les matières premières.

On me fera sans doute cette objection qui devient plus sérieuse : Qu’arrivera-t-il quant au trésor ? Votre système ne lui causera-t-il pas une grande perte ? Je répondrai messieurs, que cette portée ne sera pas considérable, parce que nous avons des augmentations sur d’autres articles, augmentations qui établiront une compensation et maintiendront le revenu du trésor sur le pied actuel. Mais, dût-il résulter de la loi une perte quelconque pour le trésor, je déclare que je préférerais cette perte à une guerre de tarif. Nous devons chercher à faire chez nous ce que la France, la Hollande, la Prusse ont fait ; mais nous devons procéder avec une telle prudence, que nous évitions toute guerre de tarif.

D’ailleurs, messieurs, quant au trésor public, remarquez qu’il n’est pas dans une situation déplorable. Il n’est personne qui ignore les produits considérables que le chemin de fer a rapportés dans les quatre premiers mois de cette année. Chacun sait qu’il a rapporté 900,000 fr. de plus que dans les quatre mois correspondants de l’année dernière ; de manière que nous avons tout lien d’espérer que notre chemin de fer rapportera en 1845, deux millions de plus qu’en 1844. C’est là une observation qui ne laisse pas que d’avoir une grande importance. Car si nous subissons quelques réductions sur le tarif des droits différentiels du chef d’une tarification progressive, nous trouverons, et bien amplement, de quoi les compenser dans les excédants considérables que le chemin de fer nous donnera cette année sur les recettes de l’an dernier.

Ainsi, nous ne devons pas nous arrêter à cette considération. Et quant au principe en lui-même, je répète qu’il faut éviter par tous les moyens ce qui peut donner lieu, ce qui peut même donner prétexte à une collision avec nos voisins. Restons dans notre droit ; marchons dans le droit national avec prudence, mais aussi avec fermeté, et alors si l’on veut lutter contre la Belgique, elle sera dans son droit et saura à son tour lutter.

Je pense donc qu’à ce point de vue nous devons admettre des droits progressifs sur les denrées de consommation comme sur les matières premières. Au reste si M. le ministre persistait à demander qu’on ne votât dans ce moment sur une question que, quant aux matières premières, j’y consentirais. Le but que je m’étais proposé, était de trancher tellement les questions de principe qu’il ne nous restât plus à voter que des questions de chiffres. Si nous n’en agissons pas ainsi, la discussion se renouvellera sur les 56 articles que comprend le projet et c’est ce qu’il faut éviter si nous voulons en finir dans cette session.

M. le président. - M. Dumortier se rallie-t-il à la proposition de M. le ministre ?

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Avec la réserve que j’ai faite. J’ai proposé de ne frapper la première année que la moitié de l’augmentation du droit sur les matières premières, sauf à examiner cependant s’il n’y a pas lieu de faire plus en faveur de certaines industries.

Quant à la proposition d’établir un tarif progressif pour les denrées de consommation et les objets travaillés, je demande que rien ne soit préjugé à cet égard.

M. Dumortier. - Il ne s’agit pas d’objets travaillés.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Les cuirs ouvrés, les cigares sont des objets travaillés ; voyez à la page 2 du tableau à annexer à la loi ; ce tableau est nécessaire. Lorsqu’on parle de matières premières, d’objets travaillés, il faut savoir de quelles matières premières, de quels objets travaillés il s’agit.

Il y a 31 matières premières composées dans le tarif différentiel. Si le tarif sur ces 31 matières premières est augmenté, l’augmentation sera réduit de moitié pendant la première année ; si même on nous démontre qu’il ne faut pas d’augmentation du tout dans certains cas spéciaux, on pourra aller jusque-là.

Restent les objets de consommation et les objets travaillés. Ils sont au nombre de dix-neuf. Nous verrons ce qu’il y a faire à l’égard de ces objets, s’il faut, dans tous les cas où il y a augmentation, l’introduire dès la première année, ou procéder progressivement.

M. Dumortier. - S’il s’agissait d’objets travaillés, je ne viendrais pas demander que l’on établît des droits progressifs ; car j’ai toujours été d’avis qu’il fallait frapper les objets travaillés à l’entrée. Mais remarquez-le bien, il ne s’agit pas d’établir des droits différentiels sur les objets fabriqués. Les objets fabriqués n’existent réellement pas dans votre tarif ; c’est une chimère ; ils n’y existent pas pour le millième, pour la dix millième partie.

Il ne s’agit en réalité que de matières premières. C’est le café, ce sont les fruits, le riz, les tabacs ; ce sont, en un mot, des denrées coloniales, des denrées de consommation.

Je vois avec peine que M. le ministre de l’intérieur cherche à donner le change sur ma motion. Ma motion est relative aux denrées coloniales, et je dis que toute la tarification que vous allez voter, n’est pas une tarification d’objets travaillés. Cela est tellement vrai, que vous ne recevez pas d’objets travaillés de l’étranger. Il est évident que l’objet du tarif différentiel n’est relatif qu’aux matières premières.

L’objet de ma motion est bien plus sérieux qu’on ne se l’imagine, elle tend à empêcher que nous ne donnions prétexte à des mesures réactionnaires. Le meilleur moyen d’atteindre ce but est d’établir le système progressif dans nos impôts. Il y a d’autant plus de motif d’adopter ce système, que nous n’avons pas une marine suffisante ; pense-t-on, par hasard, qu’avec nos 134 navires, nous allons faire tout le commerce de la Belgique ?

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je dirai à l’honorable préopinant que je l’ai entendu avec peine supposer que je veuille donner le change à cette assemblée.

Messieurs, je n’ai pas insisté sur les objets travaillés, j’ai insisté sur les matières premières et les denrées de consommation ; je sais que les objets travaillés sont en très petit nombre. Si on les a introduits dans le tarif, c’est la force des choses qui l’exige en quelque sorte. Les denrées de consommation forment la partie la plus importante de la deuxième catégorie. Je ne repousse pas d’une manière absolue le système progressif, mais je désire que ce système soit examiné au fur et à mesure qu’on discutera les articles. Nous verrons si pour les fruits, les cafés, les bois, le riz, les thés, il faut admettre un tarif progressif. Je dis que la progression ici dépend principalement du chiffre. Si le chiffre est très élevé, on pourra admettre une progression ; et peut être ne pense-t-il pas en admettre, si le chiffre n’est pas élevé.

M. Rogier. - Messieurs, je pense qu’on doit discuter la question de principe de l’honorable M. Dumortier, comme les autres questions de principe, sauf à introduire plus tard des exceptions, si quelques articles du tarif les comportent.

Je serais disposé à appuyer ce système, par le motif qu’il est présenté par son auteur comme un système de modération ; mais je ne comprends pas comment on puisse arriver au but qu’on se propose, au moyen d’un pareil système. L’honorable auteur de l’amendement veut sans doute une protection efficace. Pour que cette protection soit efficace, il faut qu’elle ait toute sa portée dès la première année. Je concevrais un système de progression décroissant ; c’est un système qui a été admis par plusieurs nations commerçantes. Ici, l’on propose de suivre une marche inverse ; l’on voudrait que la protection augmentât à mesure que l’objet protégé aurait fait en quelque sorte des progrès.

L/honorable membre a eu en vue de ne pas trop offenser d’abord les puissances qui auraient à se plaindre de l’augmentation du droit. Je ne puis partager sa manière de voir à cet égard. Si nous devons offenser les puissances, nous devons les offenser tout d’un coup, et non progressivement ; il ne faut pas qu’à chaque augmentation de tarif, nous leur donnions de nouveaux motifs de récriminer et d’agir contre nous.

J’ajouterai que ce qui importe au commerce, ce ne sont pas les droits exagérés, c’est la fixité ; il ne faut pas que d’année en année les conditions du commerce viennent à changer.

Sous ce rapport, M. le ministre de l’intérieur aura à justifier plus amplement l’amendement qu’il a proposé, et aux termes duquel les matières premières ne seraient assujetties, pour la première année, qu’à la moitié du droit.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, je désire répondre un mot.

Si j’ai adopté l’opinion de ne rendre les matières premières, là où il y a augmentation, de ne les rendre passibles de l’augmentation que pour la moitié, la première année, c’est que je suis guidé par un intérêt industriel qui est évident. Les relations ne s’établiront pas la première année ; il faut au moins un temps d’attente ; c’est pour cela que pour les cas très rares où il y aura augmentation, quant aux matières premières, et comme il ne s’agit pas de donner, même en apparence, un caractère anti-industriel à la loi, je crois que nous agirons prudemment en n’exigeant que la moitié de l’augmentation la première année.

M. Rodenbach. - Je ne crains pas de la part de la Hollande les mesures de représailles que paraît redouter l’honorable M. Dumortier. Je crois que si le chiffre ministériel, qui n’est réellement que de 2 fr. 50 c. de plus par 100 kilog., était accepté, cela n’empêcherait pas les Hollandais qui jouissent d’immenses avantages dans leurs colonies pour nous importer le café, de continuer à nous fournir pour 42 millions de cette denrée par an. Savez-vous, en effet, ce que les Hollandais payeront de plus que nos navires nationaux ? Ils payeront un centime et un quart de centime par livre de café.

M. Eloy de Burdinne. - Messieurs, je viens d’apprendre que la commission d’enquête s’est réunie, pour examiner la proposition de l’honorable M. de Haerne. Si ma mémoire est fidèle, il a été convenu que mon amendement serait également renvoyé à la commission. Je prie la commission de se souvenir que j’ai fait une proposition. J’ai besoin de donner des éclaircissements.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je m’associe au désir exprimé par l’honorable préopinant, et je compte également entrer en rapport avec la commission, avant qu’elle présente son travail.

M. Desmaisières. - La commission d’enquête a appelé aujourd’hui dans son sein l’honorable M. de Haerne ; la commission entendra demain l’honorable M. Eloy de Burdinne. Elle n’avait pas compris hier que l’amendement de l’honorable député de Waremme lui avait été renvoyé, en même temps que la proposition de l’honorable député de Courtray.

Loi portant interprétation de l'article 334 du code pénal

Motion d'ordre

M. de Garcia. - Je demande la parole pour une motion d’ordre ; je regrette de devoir interrompre un moment la discussion, mais comme M. le ministre de la justice n’était pas présent au commencement de la séance, je n’ai pu lui adresser mon interpellation à laquelle je tiens beaucoup,

Messieurs, il y a peu de temps, nous avons voté une loi interprétative de l’art. 334 du code pénal. Une lacune existait déjà dans le code pénal, nous l’avons élargie par l’interprétation que nous avons donnée à l’article 334. M. le ministre de la justice a pris alors l’engagement de présenter un projet de loi pour combler cette lacune. Je lui demanderai à quoi en est ce travail.

Plusieurs voix. - N’interrompons pas la discussion ! L’ordre du jour !

M. le ministre de la justice (M. d’Anethan) - Je demande la parole.

M. le président. - Je vais consulter la chambre sur la question de savoir si elle entend interrompre la discussion.

M. de Garcia. - Je crois que, d’après le règlement, on peut dans toute circonstance, dans toute position faire des motions d’ordre.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Pas du tout !

M. de Brouckere. - Il faut qu’elles aient rapport à la question en discussion,

M. de Garcia. - Je vous défie de me montrer un seul article du règlement qui établisse cela.

M. de Brouckere. - Pour vous le démontrer, il me faudrait prolonger la discussion de votre motion d’ordre et je n’en ai nulle envie.

M. de Garcia. - Je n’accepte pas une réponse semblable, il me faut une démonstration.

M. de Brouckere. - Vous ne l’aurez pas.

- La chambre consultée, passe à l’ordre du jour.

Commission d'enquête parlementaire sur la situation du commerce extérieur

Discussion des questions de principe

Les droits différentiels seront-ils fixes ou progressifs ?

M. Desmet. - Nous venons d’entendre que la commission d’enquête vient de s’occuper de l’objet en question, d’après cela je ne comprends pas qu’on puisse continuer la discussion. Quand on laisse en arrière la question la plus importante, celle de l’exportation. La discussion à laquelle nous pourrons nous livrer maintenant sur l’article bois par exemple, sera en pure perte, puisque nous devrons y revenir pour faire un avantage à l’exportation. Je pense qu’on devrait suspendre la discussion jusqu’à ce que la commission d’enquête ait fait son rapport sur la question d’exportation qui lui a été renvoyée.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - On a décidé que le travail de la commission d’enquête n’arrêterait pas la discussion, il a été démontré que si la condition d’exportation était réalisable, elle s’appliquerait à tous les systèmes. Je prie l’honorable membre de ne pas amener de nouveau retard dans la discussion.

M. Delfosse. - La chambre, il est vrai, a décidé que la discussion ne serait pas suspendue, mais si la chambre croit qu’elle a eu tort, elle peut revenir sur sa décision. C’est ce qu’elle a fait mercredi dernier. J’avais demandé qu’on renvoyât la discussion à lundi, la chambre a décidé que la discussion continuerait ; une minute après elle a décidé le contraire ; elle a renvoyé la discussion comme je l’avais demandé. Voilà un précédent. La chambre doit examiner si elle a eu tort ou raison de décider que l’examen de la commission d’enquête ne suspendrait pas la discussion. Il paraît qu’il y a un rapport direct entre la proposition de M. de Haerne et les autres propositions, l’examen de la commission d’enquête pourrait peut-être fournir des éclaircissements à la chambre.

- La chambre consultée continue la discussion.

M. Cogels. - Je n’approuve pas la proposition de M. le ministre quant aux denrées, c’est-à-dire, sauf peut-être quelques exceptions, enfin je ne veux pas généraliser le système de M. Dumortier. Je pense aussi que nous ne devons pas mettre aux voix maintenant cette question de principe, ni même la discuter. Ce serait du temps perdu, car la discussion se reproduirait à chacun des articles. Je rattache la question de principe à l’amendement qu’il avait déjà proposé et qui consistait à établir des réductions progressives, de telle manière que, sur la première année, la protection aurait été moindre qu’elle n’est maintenant.

M. Dumortier. - Lisez mon amendement, vous verrez le contraire.

M. Cogels. - Ah ! dans aucun cas la protection ne pourra être moindre qu’elle n’est aujourd’hui. Alors, il n’y aurait plus d’uniformité sur quelques articles, il y aurait une protection égale à celle d’aujourd’hui, sur d’autres il y aurait une protection supérieure ; il n’y aurait alors plus de proportion.

Ainsi alors même que le principe proposé par M. Dumortier serait admis, il faudrait encore en discuter l’application, distincte à chacun des articles.

M. Dumortier. - Je crois pouvoir me rallier à la proposition de M. le ministre, sous réserve. J’ai dit qu’il fallait éviter la discussion à chacun des articles. Nous sommes d’accord sur les matières premières. Je présenterai à la fin de la loi une disposition générale. De cette manière nous éviterons de discuter sur chaque article.

M. Rogier. - Nous nous écartons pas de la marche ordinaire.

M. Dumortier. - Ma proposition reste pour les matières premières, elle est retirée, quant à présent, pour les denrées de consommation ; mais je me réserve de la représenter, quand je croirai le moment venu.

M. Delfosse. - On retire la proposition pour la reproduire plus tard ; on ne gagnera pas de temps à cela. Au contraire ; on l’a déjà discutée, l’attention de la chambre a été fixée sur cette question, il vaudrait mieux en continuer la discussion et la résoudre. M. Mast de Vries avait, je crois, présenté un amendement sur la même question.

M. Mast de Vries. - Mon amendement contient une disposition qui est transitoire et une autre qui concerne la Meuse, qui sera discutée plus tard.

M. Delfosse. - Je parle de la première partie de l’amendement de M. Mast de Vries par laquelle il proposait d’élever la protection par cinquième d’année en année. Cette progression a un rapport direct avec la question qui nous occupe, est-ce que M. Mast de Vries n’a rien à dire à l’appui de sa proposition ? Nous perdrons du temps je le répète au lieu d’en gagner à remettre une discussion déjà commencée. Le mieux est d’en finir.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - J’ai déjà fait remarquer que la progression se liait aux chiffres. Il faut d’abord se prononcer sur les chiffres. On me dit : il eu est de même des matières premières. Je n’hésite pas à répondre non, parce qu’il y a un intérêt industriel qui dit que pour ne pas alarmer les industries, il faut une augmentation progressive. Le même intérêt ne se présente pas pour les objets de consommation générale. Tout est subordonné aux chiffres ; je désire qu’on attende la fixation des chiffres.

M. Osy. - Je partage l’opinion de l’honorable M. Rogier ; on ne peut pas admettre l’article de M. le ministre, les droits sur les matières premières que nous allons tarifer, seront diminués. Je n’ai aucune crainte de faire du tort à notre industrie. Il y a des objets qu’il faut aller chercher très loin. Il sera impossible de faire un voyage pour aller chercher du cacao, par exemple. J’ai reçu une lettre par laquelle on me dit qu’on ne pourrait pas faire une opération de ce genre, parce que, quand on reviendrait dans un an, on paierait le droit entier, et trouverait le marché tellement encombré des marchandises venant des entrepôts, qu’on ne pourrait se défaire de celles qu’on importerait. Je crois que l’article de la loi doit être mis à exécution immédiatement d’abord, parce que les matières premières ne pourront que diminuer, et parce que le commerce a besoin de stabilité et ne peut prospérer au milieu des changements continuels.

M. Rogier. - Je demanderais à l’honorable membre s’il retire son amendement ou s’il l’ajourne. Je crois qu’il s’est occupé beaucoup trop de la question des droits différentiels pour retirer une proposition sur l’observation de M. le ministre de l’intérieur.

Je pense comme l’honorable M. Delfosse, qu’il y aurait avantage à continuer la discussion qui est commencée. Le principe dont il s’agit est applicable à tous les articles, sauf les exceptions, aussi bien que tous les autres que nous discutons. S’il se propose de faire de ce principe une discussion spéciale, la discussion faite aujourd’hui aura eu lieu en pure perte, il faudra la recommencer. C’est un des principes les plus nettement posés, les plus clairs. Le droit sera-t-il fixe ou progressif ? Je désirerais que tous les principes posés dans la loi fussent aussi clairs que celui-là.

Je demande que la discussion continue.

D’après la proposition de M. le ministre de l’intérieur, les marchandises arrivant des pays éloignés seraient frappées du droit entier, tandis que celles arrivées des entrepôts ne paieraient que la moitié. Les arrivages d’entrepôt seraient favorisés sur les arrivages des lieux de production.

Ainsi cet amendement de M. le ministre n’a pas été suffisamment mûri.

Si M. le ministre cependant n’était pas disposé à continuer la discussion des principes, il faudrait bien ajourner cette discussion. Je m’en rapporte sous ce rapport à M. le ministre de l’intérieur.

Tout ce que je demande, c’est que nous arrivions à faire quelque chose. La chambre est fatiguée d’une discussion si longue, relativement au résultat obtenu. Je désire surtout que nous arrivions à un résultat quelconque le plutôt possible.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je forme le même vœu que l’honorable préopinant. Il ne dépendra pas de moi que nous n’arrivions promptement au dénouement de cette discussion.

Ceux qui ont pris part à la discussion beaucoup moins importante du tarif, en 1836 et 1837, doivent se rappeler quelle a été la longueur du débat. Cependant la question était plus simple et moins neuve que celle qui nous occupe.

Au fond, il n’y a pas une si grande divergence qu’on pourrait le croire, même sur l’idée de progression. Si l’on vous posait cette question : « le droit sera-t-il fixe sauf des exceptions dans certains cas ? » je crois que la majorité, et notamment l’honorable M. Rogier répondrait oui ; il ne refuserait par une réduction de droits sur le coton, la première année, en supposant même l’industrie cotonnière alarmée mal à propos.

Si l’on pose au contraire la question ainsi : « Le droit sera-t-il progressif sauf des exceptions dans certains cas ? », on répondrait encore oui, parce que ni dans l’un, ni dans l’autre cas on ne serait complètement engagé. Tant il est vrai qu’il y a impossibilité de résoudre d’une manière absolue et abstraite la question posée ; elle est subordonnée aux chiffres et aux objets.

Il est possible, quand nous arriverons à l’art. cacao, qu’on démontre qu’il y a lieu de faire une exception pour cette matière première, et qu’on la biffe du tableau de réduction progressive.

Je demande donc que le principe ne soit décidé dans tous les cas que sauf exception.

M. Dumortier. - Je répondrai à l’honorable M. Rogier que M. le ministre de l’intérieur et moi sommes d’accord qu’il faut un droit progressif sur les matières premières, sauf les exceptions dans certains cas. Remarquez que les matières premières constituent la majeure partie des articles du tarif.

Restent les objets de consommation. Quant à ceux-là, on a exprimé le désir d’attendre que les chiffres soient votés. J’y ai consenti.

Quand les chiffres seront votés, je présenterai mes observations..

Ici je dois répondre à l’honorable M. Rogier et à tous les députés d’Anvers. Les honorables députés d’Anvers, pour combattre la progression du système protecteur, disent qu’il faut de la fixité dans le commerce. Nous sommes d’accord là-dessus, mais qu’est-ce que la fixité, la certitude que les droits seront établis de telle et telle manière, et ne seront pas modifiés, subitement et sans qu’on en soit prévenu. Or, quand on aura prévenu que tous les ans au premier janvier il y aura une progression du tarif différentiel, le commerce sera parfaitement informé.

Mais, dit-on, un navire qui aura été à Syngapore, et qui, retardé de quelques jours, arrivera après le 1er janvier, devra payer des droits plus élevés. C’est l’inverse ; car alors il trouvera des conditions plus favorables. Le tarif est tout à fait favorable à la navigation de long cours. Vous voyez donc que l’argument présenté contre ce système manque de fondement.

Je conçois que les honorables députés d’Anvers, qui songent surtout au port d’Anvers, désirent des droits à un taux plus élevé. Mais nous avons à ménager les intérêts des autres provinces, de Liége, du. Hainaut, qui ne veulent pas des droits différentiels. C’est afin de concilier ces divers intérêts, que j’ai présenté ma proposition. J’ai consulté sur ce point les députés des diverses localités ; ils ont trouvé ma proposition favorable à leurs réclamations, dans l’hypothèse de l’adoption des droits différentiels.

Ainsi cette proposition a une portée sérieuse.

Quand nous arriverons aux dispositions finales, nous discuterons la proposition quant aux objets de consommation.

Quant aux matières premières, je crois que l’on peut adopter l’article présenté par M. le ministre de l’intérieur.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il faudrait ajouter, au commencement de l’article, ces mots : « Sans préjudice des exceptions. »

- L’art. 2 nouveau est adopté avec cette addition.

Y aura-til des clauses de réciprocité pour les importations lointaines ?

M. le président. - La chambre passe à la troisième question de principe ainsi conçue :

« 3° Les productions de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique, arrivant directement en Belgique, des lieux de production, sous pavillon des pays dont elles sont importées, pourront-elles être admises sur le pied du pavillon belge, lorsque ce dernier sera, dans ces cas, traité dans ce pays comme le pavillon national ?

« Cette réciprocité existera-t-elle de plein droit ?

« Cette réciprocité ne pourra-t-elle exister qu’en vertu d’un traité ou d’un arrêté royal ? »

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il est d’abord nécessaire de bien vous fixer sur la rédaction que vous avez sons les yeux, et sur sa portée.

D’abord il ne s’agit que des productions propres de l’Asie, de l’Afrique cl de l’Amérique ; il faut que ces productions soient importées sous le pavillon des pays dont elles sont originaires et d’où elles viennent. En d’autres termes, il s’agit des produits du sol et de l’industrie des pays transatlantiques.

Je fais cette première observation, parce que je trouve qu’il convient de séparer de cette question la question des entrepôts. Nous traiterons isolément cette question extrêmement importante. Nous examinerons quelle position il faut prendre par rapport aux entrepôts transatlantiques et européens.

Il ne s’agit donc que des objets du sol et l’industrie des contrées transatlantiques. Faut-il admettre la réciprocité par pavillon des deux pays, c’est-à-dire de la Belgique et de la contrée transatlantique, qui nous ferait ces offres d’assimilations ? Je crois que oui ; je pense que nous pouvons admettre cette assimilation sans aucun danger pour nous.

Cependant, je ne suis pas d’avis que la réciprocité existe de plein droit.

Il y a trois opinions :

Les uns veulent que l’assimilation opère de plein droit ; (je crois que cette assimilation de plein droit peut offrir des dangers) ; les autres exigent qu’il intervienne un arrangement qui fasse l’objet d’un traité formel. Les autres enfin pensent qu’il suffit d’une déclaration des deux gouvernements. Je crois qu’il faut admettre cette dernière opinion.

Cette déclaration est subordonnée aux circonstances. Il se pourrait que la réciprocité de droit ne fût pas une réciprocité de fait. Alors le gouvernement engagerait sa responsabilité, s’il admettait la réciprocité. C’est une question de responsabilité pour le gouvernement.

Occupons-nous d’abord de l’Amérique. Voyons quels sont les dangers qu’offre pour nous la réciprocité par rapport aux pavillons américains.

J’ai déjà eu l’honneur de vous faire remarquer qu’on peut dire que de fait il n’y a pas de marine dans l’Amérique méridionale qui nous offre les conditions d’une véritable concurrence. Ainsi pour l’Amérique, il ne s’agit que de la marine des Etats-Unis.

Prenez-y garde, vous a dit l’honorable M. Dumortier, si vous donnez ces pouvoirs au gouvernement, vous détruisez votre œuvre ; on aura la réciprocité avec la France, avec l’Angleterre, avec la Hollande.

Je prie l’honorable membre d’être parfaitement tranquille sur ce point. Le gouvernement anglais ne vous offrira pas la réciprocité.

L’Angleterre ne détruira pas pour vous tout son système colonial et différentiel. La France n’en fera rien non plus, et même, chose très regrettable, le royaume des Pays-Bas, je le crains, ne vous fera pas non plus cette offre.

Au fond, donc, messieurs, quand on veut s’attacher aux réalités, il ne s’agit de fait que des Etats-Unis d’Amérique.

Mais pourquoi, dira-t-on, ne vous bornez-vous pas à faire spécialement mention des Etats-Unis d’Amérique ? Il me semble, messieurs, qu’il faut d’abord conserver à la loi son caractère de généralité. En second lieu je dis qu’il est d’une bonne politique de conserver à la loi ce caractère de généralité ; qu’il est d’une bonne politique de faire l’offre de réciprocité à la Hollande, par exemple. Si vous faisiez une mention spéciale des Etats-Unis, on dirait que vous avez fait une faveur à ce pays, et ceux-là même qui sont dans l’impossibilité de vous accorder la réciprocité, viendraient vous dire peut-être qu’ils étaient tout disposés à vous l’offrir.

L’honorable M. Dumortier a invoqué les considérations que j’ai présentées il y a quelques jours par rapport à la Prusse. Je crois, messieurs, que la position n’est pas la même. Nous demandons aux Etats-Unis d’Amérique des matières premières pour une quantité très considérable, et, nous désirons envoyer aux Etats-Unis, non pas des matières premières, mais des objets manufacturés.

Voici donc, messieurs, la position que vous prenez par rapport aux Etats-Unis d’Amérique ; affranchissement pour les matières premières qui sont dans le cas d’être importées en Belgique, mais ainsi affranchissement de toute surtaxe pour les produits manufactures que vous désirez importer aux Etats-Unis.

Ce que nous demandons pour la couronne en Belgique, messieurs, ce sont les mêmes pouvoirs qui sont accordés au président des Etats-Unis d’Amérique. Je me suis procuré le texte des pièces officielles et je vais avoir l’honneur de vous donner lecture des traductions.

Le président des Etats-Unis d’Amérique est autorisé à affranchir de toute surtaxe les produits du sol et de l’industrie de tout pays de la part duquel il lui est constaté qu’il y a également remise de toute surtaxe pour les produits du sol et de l’industrie des Etats-Unis. Ces pouvoirs, messieurs, ont été accordés au président des Etats-Unis par un acte du 3 mars 1815, acte qui a été confirmé par un décret du 7 janvier 1824.

Voici, messieurs, le texte du premier acte du 3 mars 1815 :

« Acte du 3 mars 1815.

« Acte pour abroger ceux desdits actes imposant des droits sur le tonnage des bâtiments et vaisseaux et sur les effets et marchandises importés dans les Etats-Unis, qui imposent des droits différentiels sur le tonnage entre navires étrangers et navires des Etats-Unis, et entre effets importés dans les Etats-Unis par navires étrangers et navires des Etats-Unis.

« SECTION PREMIERE. Qu’il soit établi par le sénat et la chambre des représentants des Etats-Unis d’Amérique, réunis en congrès, que ceux des divers actes imposant des droits sur le tonnage de bâtiments et vaisseaux, et sur effets, biens et marchandises, importés dans les Etats-Unis, qui imposent des droits différentiels de tonnage entre vaisseaux étrangers et vaisseaux des Etats-Unis, et entre effets importés dans les Etats-Unis par navires étrangers et navires des Etats-Unis, soient et par les présentes sont révoqués, en tant qu’ils regardent les objets du sol ou de l’industrie de la nation à laquelle ces bâtiments et vaisseaux étrangers peuvent appartenir. Cette révocation devant opérer en faveur de toute nation étrangère, chaque fois que le président des Etats-Unis sera convaincu que les droits différentiels ou compensatoires de cette nation étrangère, en tant qu’ils agissent au désavantage des Etats Unis, ont été abolis. »

Ainsi, du moment qu’il est prouvé au président des Etats-Unis que les produits du sol et de l’industrie de l’Amérique ne sont pas, dans un état Européen soumis à des surtaxes de douane ni de navigation, il peut également accorder à cet Etat remise de toute surtaxe pour les produits de son sol et de son industrie.

Il ne faut donc pas de traité, messieurs ; il faut une simple proclamation, et c’est le mot qui se trouve dans le second décret, celui du 7 janvier 1824.

« SECTION 4. - Décret du 7 janvier 1824.

« Et qu’il soit en outre décrété que, preuve satisfaisante étant donnée au président des Etats-Unis, par le gouvernement de toute nation étrangère que nuls droits différentiels de tonnage ou d’impôt ne sont imposés ou levés dans les ports de ladite nation, sur des navires appartenant entièrement à des citoyens des Etats-Unis, ou sur des marchandises, produits ou manufacturés de ces Etats, y importés par lesdits vaisseaux, le président, par les présentes, est autorisé à publier une proclamation qui déclare que les droits différentiels de tonnage et d’impôt dans les Etats-Unis sont et seront suspendus et interrompus pour ce qui regarde les bâtiments de ladite nation, et les marchandises de son sol ou industrie, importées dans les Etats-Unis par lesdits bâtiments. Ladite suspension devant sortir son effet à partir du temps où cette notification sera donnée au président des Etats-Unis, et durer aussi longtemps et pas plus que durera l’exemption réciproque de navires appartenant à des citoyens des Etats-Unis, et de marchandises y importées par ces navires, comme il a été dit plus haut. »

Je suppose, messieurs, que les pouvoirs que nous demandons ne nous soient pas accordés. La loi est rendue ; et certes, la promulgation de la loi est un fait qui ne restera pas inconnu au gouvernement des Etats-Unis. Eh bien, vous pourriez être à l’instant même frappés des surtaxes de navigation et de douane ; vous le seriez doublement ; vous le seriez même pour l’importation de vos produits industriels aux Etats-Unis, et vous le seriez également pour l’exportation que vous voudriez faire par vous-même des matières premières que vous demandez à ce pays. Il en résulterait une seule chose : c’est que les Etats-Unis seraient encore davantage en position de vous fournir par eux-mêmes les matières premières dont vous avez besoin, affranchie que serait la marine de ce pays de toute surtaxe, sauf celle, il est vrai, que vous auriez introduite dans vos propres ports, mais qui, par le fait, pour les matières premières, est entièrement insignifiante.

On a supposé, messieurs, que cette position du président des Etats-Unis d’Amérique avait été changée. C’est une erreur,

Je suis forcé, messieurs, de dire un mot des entrepôts, mais c’est pour rectifier quelques allégations

Les Etats-Unis d’Amérique ont conclu avec quelques Etats européens des traités de réciprocité, c’est-à-dire d’abolition de toute surtaxe, non seulement pour les objets du sol et de l’industrie, objets pour lesquels il n’eût pas même fallu de traité, mais une simple proclamation, mais aussi, en troisième lieu, pour les entrepôts réciproques.

Il paraît, messieurs, qu’une opinion se forme aux Etats-Unis d’après laquelle il ne faudrait plus de traité, au moins avec tous les Etats indistinctement, pour les importations des entrepôts, c’est-à-dire qu’on ne ferait plus de traité du tout, puisque le président peut, par proclamation, admettre la réciprocité pour les produits du sol et de l’industrie. Voici donc, messieurs, la proposition qui a été faite au congrès des Etats-Unis :

« Projet de résolution concernant le terme de certains traités de commerce, pièce annexée au rapport du traité de commerce déposé sur le bureau du congrès le 28 mai 1842.

« Soit arrêté par le Sénat et la Chambre des représentants des Etats-Unis d’Amérique, réunis en congrès ; que le président des Etats-Unis soit requis, comme il l’est par la présente, d’informer, dès qu’il le trouvera compatible avec l’intérêt public, les gouvernements de Danemarck, de la Suède, des républiques anséatiques, de la Prusse, de l’Autriche et de la Russie, en conformité des stipulations du transit de commerce existant entre lesdits gouvernements et les Etats-Unis ; qu’il est dans le vœu et les intentions de ce gouvernement, de laisser expirer les traités de commerce encore en vigueur entre lesdits gouvernements et les Etats-Unis, traités dans lesquels il est stipulé que chaque partie contractante peut importer dans les ports de l’autre, sur un pied d’égalité, quant aux droits de douanes et de tonnage, des articles et marchandises autres que ceux qui sont les produits du sol ou de l’industrie de la nation dans les navires de laquelle ces marchandises sont importées.

« Section 2. Qu’il soit en outre établi, que dans toute négociation qui pourrait être entamée, à l’avenir, avec les gouvernements précités ou avec tout autre gouvernement, il est dans la politique des Etats-Unis de limiter la faveur de l’importation réciproque sur un pied de parfaite égalité, quant aux marchandises et au navires, aux marchandises et aux articles qui sont les produits du pays de provenance, et qui sont importés par navires de ce même pays, ou qui sont les produits de nations limitrophes empruntant habituellement l’intermédiaire des ports de ce même pays. »

Ce projet de résolution n’a pas été converti en loi jusqu’à présent. Vous voyez que l’on pose en principe le maintien des pouvoirs donnés au président quant à la réciprocité pour les produits du sol et de l’industrie, et l’exclusion en principe de la réciprocité, quant aux produits des entrepôts, l’exclusion en principe avec une réserve. Cette réserve est extrêmement importante, en ce qui nous concerne, par exemple.

Nous pouvons soutenir que les produits de l’Allemagne, et même les produits de la Suisse, par exemple, empruntent habituellement l’intermédiaire des ports de notre pays, et dès lors nous pourrions prétendre que nous nous trouvons dans le cas de la réserve faite en faveur des ports qui sont les intermédiaires naturels de pays limitrophes.

Qu’arriverait-il, messieurs, si, à la suite de la promulgation de cette loi, il n’intervenait pas un arrêté royal, ou une proclamation portant qu’il n’y aura pas de surtaxe pour les produits du sel et de l’industrie américaine ? Il arriverait que nous manquerions aux engagements que nous prenons en quelque sorte envers l’industrie du pays. Nous avons dit bien des fois que le coton nous arriverait par pavillon américain assimilé au nôtre, à raison d’un centime, au lieu d’un franc 70 c. Notre loi étant rendue, sans la proclamation, que la surtaxe n’est pas applicable aux produits du sol et de l’industrie des Etats-Unis d’Amérique, le président pourrait se croire fondé à retirer immédiatement sa propre déclaration, et dès lors, jusqu’à des arrangements nouveaux, le coton serait, de fait, frappe de charges plus élevées.

Le gouvernement examinera s’il y a lieu, à part cette déclaration, sans assigner de terme et sans réserve ; il pourrait faire la déclaration en assignant un terme, et exposer au gouvernement des Etats-Unis d’Amérique que la réciprocité est de fait plus avantageuse, dans l’état actuel des choses, pour les Etats-Unis que pour la Belgique.

Il y a un autre fait que nous invoquerions, c’est la restitution du péage de l’Escaut aux navires si nombreux des Etats-Unis d’Amérique, et dès lors en prenant cette position, nous pourrions espérer certains avantages et dans tous les cas, nous serions fondés à compter sur une position favorable, nonobstant la réserve qu’on semble vouloir faire pour l’avenir, en Amérique, quant aux entrepôts, réserve d’après laquelle les produits de la Suisse, de l’Allemagne, qui empruntent habituellement nos ports, sont admis à des conditions favorables. C’est la position que le gouvernement prendra.

Je pense que le gouvernement américain attache beaucoup d’importance à maintenir avec la Belgique des relations qui lui sont avantageuses, et à conserver la restitution du péage de l’Escaut. Ce qui est arrivé il y a dix-huit mois, en est une preuve frappante.

Pour le moment il importe de prévenir une véritable perturbation, et il y aurait perturbation, si le gouvernement américain retirait la déclaration par laquelle nous ne sommes pas soumis aux surtaxes de douane et de navigation. Nous insistons donc pour que le statu quo soit maintenu.

- Personne ne demandant plus la parole, le 1er § de la 3ème question de principe, proposée par M. le ministre de l’intérieur est mis aux voix et adopté en ces termes :

« Les productions de l’Asie, de l’Afrique et de l’Amérique arrivant directement en Belgique, des lieux de production, sous pavillon des pays dont elles sont originaires et d’où elles sont importées, pourront-elles être admises sur le pied du pavillon belge, lorsque ce dernier sera, dans ces cas, traité dans ce pays comme le pavillon national ?»

M. le président. - Je mets en discussion le § 2 de la 3ème question.

« 2° Cette réciprocité existera-t-elle de plein droit, ou bien faudra-t-il, pour qu’elle existe, qu’il intervienne, soit un traité, suit un arrêté royal ?

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Je demande qu’on dise simplement : Faudra-t-il, pour que cette réciprocité existe, qu’il intervienne seulement un arrêté royal ?

M. Osy. - Je crois qu’il est bon, de conserver les mots, soit un traité, soit un arrêté royal. Si je suis bien informé, le Zollverein a fait un arrangement avec les Etats-Unis, et comme le traité avec l’Angleterre est échu ou va échoir, il est possible que vous parveniez à obtenir les mêmes avantages que le Zollverein.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, voyons quelle est la situation actuelle. Le président des Etats-Unis d’Amérique, usant des pouvoirs que je vous ai fait connaître, a fait remise de toutes les surtaxes de douane et de navigation aux produits du sol et de l’industrie belges. Il faut qu’à la suite de la loi, le gouvernement belge puisse, par un acte du pouvoir exécutif, par une proclamation, déclarer qu’il n’y aura pas de surtaxe de douane pour les produits du sol et de l’industrie américaine.

Si vous ne le faites pas, il y aura altération du statu quo ; il ne faut pas une altération du statu quo par rapport aux Etats-Unis. Il ne le faut pas surtout, si vous avez l’intention de négocier ultérieurement.

Rappelez-vous comment nous avons déjà négocié avec les Etats-Unis d’Amérique.

Je demande donc que la question soit ainsi posée :

« Faudra-t-il, pour qu’elle (cette réciprocité) existe, qu’il intervienne seulement un acte du gouvernement ? J’entends par là un acte que peut poser spontanément le gouvernement belge, sans en référer aux chambres d’une part, et sans entrer en négociation avec le président des Etats-Unis, d’autre part. »

M. Osy. - Je n’insiste pas.

- Le § 2 de la 3ème question, avec la modification proposée par M. le ministre de l’intérieur, est mis aux voix. La question que ce § renferme, est résolue affirmativement par la chambre.

Pour les provenances transatlantiques, admettra-t-on pour certains produits et seulement en faveur du pavillon du pays d’entrepôt, une catégorie intermédiaire entre les lieux de production et les entrepôts européens ?

M. le président. - Nous passons à la 4ème question, ainsi conçue :

« 4° Pour les provenances transatlantiques, admettra-t-on pour certains produits et seulement en faveur du pavillon du pays d’entrepôt, une catégorie intermédiaire entre les lieux de production et les entrepôts européens ? »

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, nous venons de résoudre des questions qui se rattachent aux provenances des lieux de production, nous allons maintenant aborder un autre ordre de questions ; ce sont celles qui se rattachent aux entrepôts. Ces questions, on ne les résoudra pas aujourd’hui, mais je tiens à les poser. Je pense que la chambre me saura gré de lui faire connaitre les faits. (Parlez ! parlez !)

Comment traitera-t-on les exportations des entrepôts ? J’ai déjà eu, messieurs, l’honneur d’appeler votre attention sur une distinction essentielle : on ne peut confondre la question des entrepôts européens et celle des entrepôts transatlantiques. Je ne m’occuperai que des entrepôts transatlantiques ; il faut réserver pour une discussion spéciale la question des entrepôts européens, et toutes les exceptions qui s’y rattachent ; j’entends parler principalement des assimilations prévues dans le tarif, pour les provenances de la Méditerranée, de la Baltique et de la mer Noire.

J’ajourne donc la question des entrepôts européens. J’engage beaucoup les honorables membres qui s’associeront à cette discussion de ne s’occuper que des entrepôts transatlantiques. Le projet de loi a placé dans deux positions différentes les entrepôts transatlantiques, d’après une distinction que voici : entrepôts transatlantiques en-deçà du cap Horn et du cap de Bonne-Espérance, entrepôts transatlantiques au-delà du cap Horn et du cap de Bonne-Espérance. Ces deux genres d’entrepôts sont traités de deux manières différentes. Il faut d’abord bien se fixer sur les objets auxquels s’appliquent les dispositions dominant les entrepôts transatlantiques.

Nous vous proposons de créer une catégorie intermédiaire entre les provenances des lieux de production et les entrepôts européens, en faveur des importations des entrepôts transatlantiques autres que ceux d’au-delà du cap Horn et du cap de Bonne- Espérance.

Il s’agit surtout, il faut en convenir, des entrepôts des Etats-Unis d’Amérique, nous en faisons une catégorie intermédiaire ; nous les traitons moins bien que les importations des lieux de production, mais moins mal que les entrepôts européens. Ces importations portent sur six objets : les bois d’ébénisterie, le cacao, le café, la cannelle, le poivre et le piment, le sucre brut de canne, six articles auxquels s’applique la catégorie intermédiaire.

Une voix. - Et le thé.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Le thé, dit-on ? c’est une autre question ; cette denrée vient d’au-delà du cap de Bonne-Espérance, de la Chine, nous nous occupons des entrepôts transatlantiques en-deçà du cap Horn et du cap de Bonne-Espérance ; nous viendrons au thé.

Ce serait une erreur de croire que nous accordons cette position intermédiaire à tous les genres de produits et même à un grand nombre de produits nous n’admettons, en les plaçant dans une catégorie particulière, que les six objets que je viens d’énumérer. Nous disons que les navires qui se chargent d’importer, par exemple, des entrepôts des Etats-Unis d’Amérique l’un de ces six objets, méritent d’être traités plus favorablement que s’ils étaient allés chercher cet objet dans un port européen.

Nous ne faisons la faveur de la catégorie intermédiaire qu’au pavillon belge et au pavillon du lieu d’entrepôt transatlantique, par exemple par les entrepôts des Etats-Unis ; nous ne faisons cette faveur qu’au pavillon national et au pavillon des Etats-Unis. Tout autre navire qui ira dans ces entrepôts prendre ces articles, se trouvera en dehors de cette disposition. Ici je suis en opposition avec la chambre de commerce d’Anvers, qui ne fait aucune distinction entre les pavillons étrangers ; elle établit la catégorie intermédiaire en faveur de tous les pavillons étrangers quelconques. Je crois que c’est aller trop loin.

Je passe aux entrepôts qui sont au-delà du cap Horn. Ici, il ne s’agit que de trois objets, le cacao, l’étain brut et le salpêtre. Il y a plus, il ne s’agit de fait que d’un entrepôt, de l’entrepôt de Valparaiso. Valparaiso est le point central d’approvisionnement et d’écoulement sur la côte occidentale de l’Amérique. Les produits qu’offre cette côte, on les trouve réunis à Valparaiso.

Nous demandons ici non pas la création d’une catégorie intermédiaire, mais l’assimilation de ces entrepôts aux lieux même de production ; c’est-à-dire que quiconque importerait du cacao entreposé à Valparaiso sera traité comme s’il avait été chercher ce produit aux lieux mêmes de production sur la côte occidentale de l’Amérique. (Interruption.) Je sais que la côte occidentale d’Amérique à d’autres ports, mais ces ports sont négligés. On me dit qu’on trouverait le cacao à Guyaquil ; mais celui qui voudrait aller chercher le cacao à Guyaquil même ferait une assez mauvaise opération ; je pense qu’il fera beaucoup mieux de le prendre à Valparaiso. Nous demandons l’assimilation au lieu de production ; nous la demandons pour tous les pavillons étrangers, nous ne la demandons pas seulement pour le pavillon belge, et celui du lien d’entrepôt ; par une raison simple, c’est que si nous ne la demandions que pour le pavillon belge et celui d’entrepôt, elle n’existerait que pour nous, attendu que cette côte n’a pas de marine de long cours. Nous ne sommes pas dans la même position vis-à-vis des entrepôts transatlantiques en-deçà du cap Horn et du cap de Bonne-Espérance. Ainsi l’exception pour l’entrepôt de Valparaiso ne s’applique qu’au cacao ; quant à l’étain brut et au salpêtre brut, le Chili ou Valparaiso est lieu de production. Cette disposition consiste donc en réalité dans une assimilation pour un seul article, le cacao, au lieu de production, et cette assimilation s’applique tant au pavillon belge qu’à tous les pavillons quelconques. Il existe toujours des droits différentiels en ce sens que le pavillon belge payera moins que le pavillon étranger. Il y a assimilation en ce sens que l’importation est assimilée à celle des lieux de production, mais toujours avec la faveur des pavillons,

Une voix. - Il y a les 10 p.c.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - On me dit, il y a toujours les 10 p. c. Non. Je prends le cacao. Eh bien, le cacao par pavillon belge paiera 5 fr. et par pavillon étranger 7 fr. 50 c. S’il n’y avait pas assimilation au lieu de production le pavillon étranger devrait payer 12 fr. 50 c

Je passe, messieurs, aux entrepôts au-delà du cap de Bonn-Espérance. C’est la navigation la plus lointaine, ici nous demandons également pour toutes les importations au-delà du cap de Bonne-Espérance, l’assimilation aux importations de lieux de production ; et nous demandons cette discussion spéciale tant pour le pavillon belge que pour les pavillons étrangers, indistinctement ; le pavillon hollandais en jouira pour les Indes orientales, non pour six articles comme le pavillon des Etats-Unis, quant aux entrepôts américains, mais pour un bien plus grand nombre. En effet, cette disposition s’applique à seize articles. Je vais les énumérer : Bois d’ébénisterie, de buis, de cèdre et de Gayac ; rhum et arack, en cercles ; café ; cannelle ; cachou ; coton des Indes orientales ; épiceries ; étain brut ; gingembre ; indigo ; poivre et piment ; riz des Indes orientales ; rotins ; salpêtre brut ; sucres brut, de canne ; thés.

Ces seize objets, n’importe par quel pavillon ils seront importés, seront considérés comme importés du lieu de production, toujours sauf la différence en faveur du pavillon belge.

Ici, nous n’avons pas non plus en vue un grand nombre d’entrepôts, mais de fait seulement ou surtout l’entrepôt de Syngapore.

Une voix. - Et Manille !

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Manille aussi, mais principalement Syngapore. Manille est surtout un lieu de production pour beaucoup de choses, le café, le sucre, etc. ; je n’aurais pas besoin de demander l’assimilation pour ces objets.

Il s’agit principalement de l’entrepôt de Syngapore. Syngapore est, comme Valparaiso, un lieu central d’écoulement et d’approvisionnement, et d’une bien plus grande importance que Valparaiso. Syngapore devient d’une importance extrême pour tout le commerce des Indes orientales, Il faut donc que toutes les importations de Syngapore pour les provenances des Indes orientales soient considérées comme importées des lieux même de production. Si vous agissiez autrement, vous amèneriez un surenchérissement de toutes ces matières dont vous avez besoin.

Ainsi, en résumé, nous faisons, pour les entrepôts transatlantiques un tarif spécial, non pas d’une manière générale, mais pour certains produits dont nous avons besoin. Nous traitons d’une manière spéciale ce qui vient d’au-delà du cap de Bonne Espérance. Nous favorisons le pavillon national et le pavillon des lieux de production.

Quant aux entrepôts au-delà du cap de Bonne-Espérance, nous vous avons indiqué les objets pour lesquels nous vous demandons l’assimilation.

Je ne voulais que citer ces faits ; la discussion continuera demain.

M. David. - Je lis dans un journal du matin :

« Dans la séance du 17 une discussion fort intéressante sur les droits différentiels s’est engagée entre plusieurs orateurs influents du parlement. La chambre des communes a entamé la discussion du bill sur les droits de douane. Dans cette discussion M. Ewart a attaqué le principe des droits différentiels et en a recommandé l’abrogation. A l’article relatif aux droits sur les cafés, M. Ewart propose d’assimiler les droits sur les cafés étrangers à ceux dont sont frappés les cafés provenant des colonies anglaises. »

Il serait important pour les chambres belges de connaitre cette discussion : c’est une heureuse coïncidence. Nous y trouverions sans doute des révélations qui nous seraient fort utiles. M. le ministre de l’intérieur pourrait en ordonner la traduction.

A cette occasion, je rappellerai que nous avons demandé à la questure un abonnement au Constitutionnel et au Times qui donne un compte-rendu complet des sessions parlementaires.

M. de Sécus, questeur. - Mon collègue M. Dubus, s’est chargé de satisfaire à cette demande qui a été faite en effet par plusieurs honorables membres. Je suis persuadé que ces deux abonnements ont été demandés à Paris et à Londres. Du reste je rappellerai tout à l’heure ces abonnements à mon collègue.

M. David. - Si l’on n’a pas encore reçu le Times, on pourrait se le procurer à un cabinet de lecture, et en faire faire la traduction.

M. Cogels. - Je saisis cette occasion de proposer qu’on s’abonne à un journal anglais.

M. de Sécus, questeur. - L’abonnement est fait.

M. Rogier. - Le il qui donne le compte-rendu des séances des chambres françaises pourrait donner le compte-rendu des séances des chambres anglaises.

M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Cette discussion sera surtout importante, si la motion est adoptée. Mais si elle est rejetée, l’honorable M. David ne pourra en tirer aucune conséquence.

M. David. - On pourra examiner les opinions émises pour et contre.

Projets de loi accordant des crédits supplémentaires au budget du ministère des finances, pour remboursement d'avance sà la Société générale

Rapports de la section centrale

M. Pirmez, au nom de la section centrale qui a examiné deux projets de loi de crédit supplémentaire, le premier de 4,465,000 francs pour remboursement d’avance à la Société générale ; le deuxième, de 75,684 fr., pour intérêts de cette somme, dépose le rapport sur ces projets de loi.

- La chambre ordonne l’impression et la distribution du rapport.

La séance est levée à 4 heures et demie.