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d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance du mercredi 29
novembre 1843
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre, notamment pétition relative à la pension
d’anciens officiers ayant servi aux Indes orientales (de
Garcia, Manilius, Rodenbach,
de Garcia)
2)
Conventions diverses conclues avec des Etats étrangers, en rapport notamment
avec le traité du 5 novembre 1842
3) Projet
de loi sur les eaux-de-vie étrangères
4)
Rapports sur des demandes en naturalisation
5)
Projet de loi sur la police de la voirie, amendé par le sénat. Plans
d’alignement. Sanctions pénales (Savart-Martel (+juge de
paix), Fallon, Savart-Martel, d’Anethan, Fallon,
Savart-Martel, de Garcia, Nothomb, d’Anethan,
Thyrion, de
Garcia, d’Elhoungne, Fallon,
de Garcia, Savart-Martel, Thyrion, Fallon,
d’Anethan, Orts,
de Naeyer, Nothomb, de Naeyer,
Nothomb, de Garcia, de Villegas, de Garcia, Fallon, Nothomb), plans
d’alignement (Nothomb, de Garcia,
Fallon, Nothomb)
6)
Projet de loi relatif à l’organisation de l’armée
7)
Fixation de l’ordre du jour
(Moniteur
belge n°334, du 30 novembre 1843)
(Présidence de M. Liedts)
M. de Renesse fait l’appel nominal à 2 heures.
M. Scheyven lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est
adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre :
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le sieur Jean-Louis Huart,
directeur de l’ardoisière de Ste.-Barbe, à Cul-Dessarts
né à Rimogne (France), demande la
naturalisation. »
- Renvoi au ministre de la justice.
_________________________
« Plusieurs entrepreneurs de
diligences et messageries présentent des observations relativement à la poste
aux chevaux et au projet de loi sur les moyens publics de transport par terre
et par eau. »
- Renvoi à la section centrale
chargée de l’examen du projet de loi sur la poste aux chevaux.
_________________________
« Plusieurs fabricants d’huiles,
marchands poudriers et autres, de Destelberghen,
prient la chambre de ne pas donner suite à la pétition tendant à obtenir une
augmentation de droits d’entrée sur les tourteaux de lin. »
« Même demande des fabricants d’huile
de Lochristy. »
- Renvoi a la commission d’industrie.
« Le sieur Huybrechts
et le comte de Ficquelmont, officiers pensionnés,
rentrés en Belgique depuis 1830, demandent la pension supplémentaire accordée
aux officiers qui ont fait comme eux, partie de l’armée des Pays-Bas, aux Indes
orientales. »
M. de
Garcia. - Messieurs, les pétitionnaires
dont il vient d’être parlé sont d’anciens militaires qui se trouvaient au
service des Pays-Bas, au moment de notre révolution, et faisaient partie de
l’armée des Indes. Ces braves, lorsque la patrie a été en danger, se sont
rendus à sa voix et ont quitté le service des Pays-Bas pour venir prêter leur
bras à leur pays.
Ils ont perdu ainsi les droits que
leur assuraient les lois en Hollande, et je crois que
Je demanderai donc qu’il soit fait un
prompt rapport sur cette pétition, afin que, lorsque nous discuterons le budget
des finances, nous puissions nous en occuper et voir si l’on peut faire droit à
la réclamation de ces braves, qui, à mes yeux, ne peut être refusée sans
injustice et sans une ingratitude manifeste.
M. Manilius. - J’appuie cette demande.
- Le renvoi à la commission des
pétitions avec demande d’un prompt rapport est adopté.
« Les sieurs De Meyer et Sedot, anciens officiers de l’armée des Pays-Bas aux Indes
orientales, pensionnés avant 1830, demandent la restitution avec les arriérés
de ce qui leur a été provisoirement retenu par le gouvernement des Pays-Bas sur
le supplément de la pension de l’Inde. »
M. Rodenbach. -
Cette pétition a le même but que la précédente, et je demanderai également
qu’elle soit renvoyée à la commission des pétitions avec demande d’un prompt
rapport.
Les pétitionnaires sont aussi des
officiers qui ont été aux Indes. Il y en a un qui a eu le malheur de perdre la
vue et qui, malgré cela, a payé de sa personne à Louvain, et y a établi des
barricades contre l’ennemi d’alors.
M. de Garcia. - Je voulais faire les mêmes observations.
- Le renvoi à la commission des
pétitions avec demande d’un prompt rapport, est adopté.
CONVENTIONS
AVEC DES ETATS ÉTRANGERS
M. le ministre des affaires
étrangères (M. Goblet d’Alviella) transmet à la chambre :
1° La convention postale conclue avec
l’Espagne portant la date du 27 décembre 1842 ;
2° La convention relative à la
navigation de l’Escaut et des canaux intermédiaires entre l’Escaut et le Rhin,
signée à Anvers le 20 mai 1843 ;
3° La convention pour régler
l’écoulement des eaux des Flandres, signée à Gand le 20 mai 1843 ;
4° La convention relative aux travaux
de la commission mixte d’Utrecht, signée le 19 juillet 1843 ;
5° La convention des limites entre
6° La convention des limites entre
7° La convention d’extradition avec
le grand-duché de Luxembourg, signée, à
8° La convention conclue avec les
Pays-Bas, pour le remboursement réciproque des frais d’entretien d’indigents
dans les deux pays, signée, à
9° La convention conclue avec le
grand-duché du Luxembourg, pour le même objet, signée, à
- Dépôt au bureau des renseignements.
PROJET DE LOI SUR LES EAUX-DE-VIE ÉTRANGÈRES
M. Zoude. - J’ai l’honneur de présenter à la chambre un rapport de la section
centrale, qui a été chargée de l’examen du projet de loi sur les eaux-de-vie
étrangères.
M. le président. - Ce rapport sera imprimé et distribué. A quel jour la chambre
veut-elle en fixer la discussion ?
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Ce projet de loi pourrait être mis à l’ordre du jour immédiatement
après celui sur la police de la voirie vicinale. Nous n’avons rien d’autre à
discuter dans ce moment.
M. Delfosse. - Il est bien entendu qu’on ne s’en occupera pas aujourd’hui ?
M. le président. - Evidemment, puisque le rapport doit être imprimé et distribué.
- La discussion est fixée après celle
du projet de loi sur la voirie.
RAPPORTS
SUR DES DEMANDES EN NATURALISATION
M. Henot dépose vingt-deux rapports sur les demandes en naturalisation.
- Ces rapports seront imprimés et
distribués.
PROJET
DE LOI RELATIF À
TITRE PREMIER. DE
§ 4. - De la poursuite du
jugement et de l’exécution
M. le président. - Nous en étions arrivés au second paragraphe de l’art. 11.
M. Savart a proposé par amendement de
terminer ce paragraphe par ces mots :
« L’état sera visé et rendu
exécutoire par ordonnance du juge de paix. »
- Cet amendement est appuyé.
M. Fallon. - Messieurs, l’exécution parée ne peut avoir lieu qu’en vertu d’un
acte déclaré exécutoire par la loi suivant sa nature.
C’est là une règle d’ordre public à
laquelle la section centrale n’a eu nullement intention de faire opposition. Je
dois à cet égard quelques explications à la chambre.
Si le jugement qui statue sur la
contravention, s’était borné à prononcer l’amende et à ordonner la suppression
des constructions illégalement faites, la commune eût été exposée à intenter
une action en justice pour se faire autoriser à procéder elle-même à la
démolition, dans le cas où le contrevenant resterait en défaut de se conformer
à la condamnation. Si nous n’eussions même pas été plus loin, si, nous n’avions
pas dit en outre que, par le même jugement, il serait déclaré que le
remboursement des dépenses faites par l’administration serait recouvré sur
simple état, la commune eût été exposée de nouveau à une action régulière en
justice pour se faire rembourser ces dépenses.
A cet égard, nous ne vous avons rien
proposé de nouveau. Nous n’avons fait que reproduire dans le projet qui est
actuellement en discussion la disposition textuelle qui se trouve dans la loi
que nous avons adoptée sur les chemins vicinaux ; et alors, messieurs, cet
article n’a rencontré aucune espèce d’opposition. Nous avons pensé alors comme
aujourd’hui que l’on se conformerait à cet égard aux règles ordinaires de la
procédure.
Le jugement en matière sommaire qui
prononce la condamnation aux dépens, contient le montant de ces dépens, parce
qu’en matière sommaire, il est facile de procéder à leur liquidation
sur-le-champ et sans retard. Il n’en est pas de même en matière ordinaire ; le
jugement qui condamne aux dépens n’en contient pas la liquidation. L’avoué
remet son état au président du tribunal qui le liquide et délivre un
exécutoire.
Nous avons pensé que telle serait la
marche qui serait naturellement suivie dans les cas ordinaires ; que si, sur la
présentation de l’état des dépenses, le contrevenant ne voulait pas en faire le
remboursement, alors l’administration remettrait cet état au président du
tribunal qui a connu de la contestation, et qui délivrerait l’exécutoire.
Si l’on pense qu’il est utile que la
loi indique cette marche (et quant à moi, je crois que cela est inutile,
moyennant les explications que je viens de donner sur les intentions de la
section centrale), mais si l’on croit utile de porter quelque chose à cet égard
dans la loi, alors j’aurai quelques observations à faire sur l’amendement de M.
Savart.
Je crois qu’il serait plus
convenable, dans le cas qu’il prévoit, de faire délivrer l’exécutoire par le
président du tribunal qui a connu de la contestation, que de charger de ce soin
le juge de paix qui y est tout à fait étranger.
Ce qui prouve, au surplus,
que, dans l’intention de la section centrale, un exécutoire devait être rendu
par le président du tribunal qui a connu de la contestation, c’est l’article
qui suit immédiatement celui en discussion. Nous avons pensé que, dans le cas
où le contrevenant supposerait qu’il existe dans les états de dépense quelque
erreur ou quelque exagération, il pourrait en faire opérer le redressement, et
nous avons dit : Les parties intéressées pourront en référer devant le
président du tribunal.
Vous voyez donc que, dans les
dispositions de cette loi, tout se lie naturellement, et que les règles
ordinaires de la procédure y sont scrupuleusement suivies.
M. Savart-Martel. -
L’honorable préopinant a évidemment raison à son point de vue ; il part de la
supposition qu’il y aura nécessairement un jugement, et dès lors il ne se
trompe point en disant que le jugement condamnera aux dépens, que s’il s’agit
d’une matière sommaire, les dépens seront compris dans le jugement, et que,
s’il s’agit d’une cause ordinaire, il pourra être délivre un exécutoire par le
président du tribunal qui a connu de l’affaire. Mais je vous prie de remarquer
que c’est moins des dépens que je parle que du remboursement des dépenses
faites pour certains travaux, et qui seraient en dehors des dépens judiciaires.
Car, dans le sens donné hier à la loi, il arrivera de temps à autre, et ce sera
même le cas le plus fréquent, qu’il n’y aura pas de poursuites judiciaires et
que le propriétaire sera mis dans la position de devoir rembourser ce que j
appelle non pas des dépens, mais des frais. Ainsi, un propriétaire déclare vouloir
renoncer à sa demande moyennant payement des frais. Il n’y a pas eu jugement ;
je demande comment, dans ce cas, un exécutoire pourrait être délivré par le
président du tribunal ?
M. Fallon. - L’article en discussion n’est applicable qu’au cas où il y a
jugement.
M. Savart-Martel. - Mais quand il y a pas jugement, que ferez-vous ?
M. Fallon. - On opérera suivant le droit commun.
M. Savart-Martel.
Mais suivant le droit commun, que fait-on ordinairement ? On procède comme en
matière d’enregistrement et de greffe, il y a un exécutoire rendu par le juge
de paix, on procède conformément à la loi de vendémiaire an VII, et c’est ce
que je propose.
M le ministre de la
justice (M. d’Anethan) - Il me paraît, messieurs, que l’amendement de M. Savart doit être
adopté. Il serait, en effet, impossible à la commune d’obtenir autrement le
remboursement des dépenses qu’elle aurait faites à moins de forcer la commune à
intenter un procès. M. Fallon pense que le tribunal qui aura condamné le
contrevenant, le condamnera en même temps aux dépens ; mais, comme l’a fait
observer M. Savart, cette condamnation ne pourra concerner que les frais de
justice, car il est évident qu’elle ne pourra porter sur des dépenses qui ne
seront faites qu’après que le jugement aura été rendu, qui ne seront faites
qu’en vertu de ce jugement même. Ces dépenses devront être liquidées sur un
état ultérieur qui sera dressé après l’exécution des
travaux. C’est cet état ultérieur que M. Savart propose de faire rendre
exécutoire par le juge de paix, et l’honorable membre rentre ainsi dans les
dispositions générales, d’après lesquelles les contraintes sont, en général,
déclarées exécutoires par le juge de paix. Lorsqu’il y a opposition à la
contrainte, alors cette opposition est portée devant le tribunal civil qui juge
comme en matière sommaire. C’est cette marche qui sera suivie si la chambre
adopte l’amendement présente par M. le ministre de l’intérieur et celui de M.
Savart. Nous pensons donc que ces amendements doivent être accueillis.
Il me paraît, du reste, assez
indifférent que l’exécutoire soit délivré par le juge de paix ou par le
président du tribunal de première instance ; seulement je dois faire remarquer
à la chambre qu’à l’exception d’un cas très rare, les exécutoires sont toujours
délivrés par le juge de paix, quoi qu’en définitive les affaires doivent être
décidées par le tribunal de première instance.
M. Fallon. - En réponse à ce que vient de dire M. le ministre de la justice, je
ferai observer que les différents cas où l’on se contente d’un exécutoire
délivré par le juge de paix ne ressemblent pas à celui dont il est question en
ce moment : il s’agit ici de dépenses faites en exécution d’un jugement. Or,
quelle autorité peut mieux apprécier la nature de ces dépenses, que le juge qui
a prononcé la condamnation ? Il me semble donc que l’exécutoire doit être
délivré par ce juge, et je dois persister dans mon sous-amendement.
M. Savart-Martel insiste sur la remarque que, même sans qu’il y ait procès, la commune
pourra avoir à recouvrer des dépenses qui par elle auront été faites de bonne
foi, qu’il faut prévoir qui délivrera le mandat exécutoire en ce cas ; et qu’il lui semble que jusqu’ici cette position est
perdue de vue.
M. de Garcia,
rapporteur. - Je dirai quelques mois,
messieurs, peur appuyer l’amendement de M. Fallon, seulement je crois qu’il
faudrait remplacer les mots : qui a connu
de la contravention, par ceux-ci : qui
a été saisi de la contestation. On rendrait ainsi d’une manière plus nette la
pensée de M. Fallon. Par une simple action intentée, le tribunal est saisi,
sans qu’il ait même pris aucune connaissance de
l’affaire ; dès lors l’expression saisi
est plus exacte que le mot connu.
Messieurs, j’appuie l’amendement sous
un point de vue très important, c’est que ces états de dépenses présenteront
souvent des lacunes fort considérables et c’est par cette considération que,
renversant tous les principes, nous avons saisi les tribunaux de première
instance de contestations qui jusqu’à présent étaient décidées par les juges de
paix. Je dis que j’appuie l’amendement parce que les dépenses dont il s’agit
s’élevèrent souvent à une somme considérable ; il y aurait en effet quelque
chose de singulier à faire statuer par le juge de paix alors qu’il s’agirait,
par exemple d’une somme de 8 à 10,000 francs ; il peut arriver qu’on fasse
démolir une maison de 50,000 francs, et vous permettrez au juge de paix de
prononcer sur un objet de cette importance, alors que vous n’avez pas voulu
qu’il statue sur la contestation. En agir de la sorte, serait renverser tout ce
que vous avez eu l’intention de prévenir, laisser à la magistrature inférieure
le soin de statuer sur des intérêts les plus importants.
- La première partie de l’art. 11 est
mise aux voix et adoptée.
L’amendement de M. Savart,
sous-amendé par M. Fallon, est également mis aux voix et adopté.
L’article est ensuite adopté dans son
ensemble.
« Art. 12. S’il parvient des
difficultés relatives aux états de dépenses, il y a lieu au pourvoi en référé.
»
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) a proposé de remplacer cet
article par la disposition suivante :
« S’il est formé opposition à la
contrainte, l’affaire sera jugée comme en matière sommaire. »
M le ministre de la
justice (M. d’Anethan) - Messieurs, nous pensons qu’il y a lieu de supprimer l’art. 12 du
projet de la commission. Cet article porte :
« S’il survient des difficultés
relatives à l’état des dépenses, il y a lieu au pourvoi en référé. »
Messieurs, d’après les principes qui
règlent les référés, cet article ne serait d’aucune utilité, et il serait même
dangereux si l’on pouvait en induire qu’il n’y a d’autre opposition à faire que
celle admise en référé. En effet, messieurs, on se pourvoit en référé dans le
cas d’urgence et uniquement sur les difficultés d’exécution que peut présenter
un jugement ou tout autre titre exécutoire ; le juge du référé ne peut jamais
connaître du fond et il juge sans préjudice du principal ; de manière que si
l’article 12 devait écarter la voie d’opposition devant le juge ordinaire, il
en résulterait que l’opposition de celui qui a des motifs de penser que l’état
des dépenses n’est pas bien dressé, devrait néanmoins être bornée à discuter
l’exécution même de la contrainte ou plutôt les vices qui pourraient entacher
cette exécution ; or, il est évident que la personne contre laquelle la
contrainte est décernée, peut avoir des moyens de fond à faire vouloir, elle
peut avoir à contester la hauteur même de la dépense faite par la commune, elle
peut avoir intérêt à soutenir que la dépense est exagérée. Il me paraît donc
que ce n’est point devant le juge de référé que ce débat doit être porté, car
s’il devait en être ainsi, il faudrait modifier les articles du code de
procédure civile qui établissent la compétence du juge de référé.
Nous croyons donc qu’il faut
supprimer l’art. 12 du projet de la commission. La faculté consacrée par cet
article est de droit, elle est écrite dans le code de procédure civile, et il
est par conséquent inutile de la consigner ici. Cela pourrait d’ailleurs être
dangereux, parce que l’on pourrait en induire que la personne contre laquelle
la contrainte est décernée n’a d’autres moyens à opposer que ceux qu’elle
pourrait faire valoir en référé.
Or, cela n’est pas ; il est évident,
en effet, que le contrevenant doit pouvoir faire prévaloir tous ses moyens de
fond devant le juge compétent, et ce juge n’est pas le juge de référé qui ne
peut statuer que provisoirement, et uniquement sur des moyens d’exécution, en
réservant le principal ; il faut donc, malgré la procédure en référé,
reconnaître au contrevenant le pouvoir d’intenter une action devant le juge
ordinaire, et c’est cette action que nous voulons lui réserver, pour la
disposition que nous proposons de substituer à l’art. 12.
M Thyrion. - J’avais demandé la parole
pour présenter un article qui serait venu entre l’art. 11 et l’art. 12.
M. le président. - Il serait convenable de le présenter tout de suite pour qu’il fût
discute avant l’art. 12.
M Thyrion. - Messieurs, le but
principal du projet qui avait été proposé par le gouvernement était de donner
au juge chargé de réprimer les contraventions, en matière de simple voirie, le
droit de prononcer la réparation de la contravention. Ainsi, d’après le projet,
les tribunaux, chacun dans l’ordre de sa compétence, auraient dû condamner
d’office les contrevenants à démolir les constructions illégalement faites ou à
enlever des matériaux illégalement déposés sur la voie publique.
Je suppose que l’intention de la
chambre est d’atteindre le but qu’on s’est proposé ; cependant la chambre, dans
la séance d’hier, a ordonné la suppression des mots : matériaux illégalement déposés, que renfermait l’art. 10 du projet
actuellement en discussion.
Cette suppression a été parfaitement
motivée. On ne pouvait punir d’une amende de 16 à 200 francs, une simple
contravention qui, d’après la législation actuelle, n’est punie que d’une
amende d’un franc à cinq francs.
Maintenant les mots de dépôt illégal des matériaux ayant été supprimés
dans l’art. 10, il en résulte une lacune que je propose de combler par la
disposition dont je vais vous donner lecture :
« Les tribunaux de simple police, en
faisant application de la pénalité comminée par l’art. 471 du code pénal,
pourront ordonner d’office l’enlèvement des matériaux et autres objets
illégalement déposés ou délaissés sur la voie publique.
« A défaut d’exécution du
jugement dans le délai qu’il aura fixé, l’enlèvement sera effectué, et les
frais seront recouvrés conformément au second paragraphe de l’article
précédent. »
M. de Garcia,
rapporteur. - J’appuie l’article proposé par M.
Thyrion. Cet article tend à combler une lacune qui
résulte de la suppression qui a été opérée hier dans l’art. 10, suppression qui
a eu lieu par suite de la peine exorbitante qui a été introduite dans l’article
9.
M. d’Elhoungne. - Messieurs, il me semble que l’article qui vient d’être proposé par
l’honorable M. Thyrion, tend à investir le juge de
simple police du droit de faire enlever de la voie publique les matériaux ou
objets qui y auraient été déposés ou délaissés. Or, je comprends très bien que,
lorsqu’il s’agit de faire ordonner par un juge l’enlèvement de constructions
que quelqu’un fait sur un fonds qui lui appartient, il faille une disposition
législative pour l’autoriser, mais il me paraît qu’une pareille disposition
n’est pas nécessaire alors que le dépôt des matériaux aurait eu lieu sur la
voie publique. L’amendement proposé par l’honorable M. Thyrion
me paraît tout à fait inutile, et je voterai contre.
M. Fallon. - Messieurs, le principal objet de la loi que nous discutons, a été de
faire cesser une controverse ; nous voulons faire en sorte que les communes ne
soient plus obligées d’intervenir comme parties civiles, dans les procès de
contraventions de toute espèce, afin qu’elles n’aient pas a supporter les frais
de ces procès. Or, dans le cas que suppose l’honorable M. Thyrion,
la commune ne doit jamais intervenir.
M. de
Garcia, rapporteur. - L’article nouveau, proposé
par M. Thyrion, n’est pas sans portée. Si le juge de
paix qui doit prononcer l’obligation d’enlever, n’est pas investi du droit qui
tend à lui conférer l’amendement de l’honorable membre, ii devra faire opérer
cet enlèvement à ses frais. Je tiens d’employés de ponts et chaussées, qu’alors
même qu’ils avaient des condamnations, ils devaient procéder à cet enlèvement à
leurs frais, en sorte que de ce chef la condamnation du contrevenant était une
charge pour l’administration. Je ne sais pas si dans l’état de nos dispositions
législatives, le juge de paix, en prononçant l’obligation d’enlever les
matériaux, peut les faire enlever aux frais des contrevenants. S’il n’en est
pas ainsi, c’est un grave inconvénient ; et l’amendement de M. Thyrion aurait l’avantage de le prévenir.
M. Savart-Martel. - Ce que propose M. Thyrion est excellent en
soi, mais cette disposition ne doit pas trouver sa place dans la loi en
discussion. Nous ne faisons pas une loi de police générale, mais uniquement une
loi pour une spécialité, lorsqu’il s’agit de bâtir et de reculer.
- La discussion sur l’article nouveau
est close.
Une première épreuve est douteuse.
M Thyrion déclare retirer sa
proposition.
M. le président. - Nous revenons à l’art. 12, que M. le ministre de la justice propose
de remplacer par un article nouveau dont j’ai donné lecture.
M. Fallon. - Messieurs, maintenant que nous avons réglé la marche qui devra être
suivie pour le recouvrement des dépenses faites par la commune, en exécution du
jugement prononcé sur la contravention, je pense que nous devons nécessairement
maintenir l’art. 12 tel qu’il a été proposé par la commission.
Messieurs, pour peu qu’on ait suivi
les matières de référé, il faut reconnaître que ce mode de procédure offre des
avantages que nous avons voulu réserver aux communes ; nous avons voulu éviter
que les communes ne fussent exposées à une nouvelle action en justice pour le
recouvrement des dépenses faites en exécution d’un jugement.
La commission s’est dit :
« Il est assez d’usage que le juge de référé remplit l’office de juge de
paix ; il est fort rare que le président du tribunal en référé ne parvienne pas
à aplanir les difficultés qui lui sont présentées. »
D’un autre côté, il est aussi d’usage
que lorsque le juge de référé se trouve saisi d’une difficulté un peu sérieuse
ou qui touche le fonds, et s’il ne peut parvenir à concilier les parties, il
renvoie les parties sur-le-champ devant le tribunal : ce qui les dispense d’une
action ordinaire. Voilà ce qui se fait à Namur ; je suppose que cela se
pratique encore ailleurs. Rien n’empêche, puisque c’est avantageux aux communes,
puisque cela tend à leur éviter des frais, rien n’empêche que la loi
n’introduise ce mode. J’insiste donc pour qu’on maintienne la disposition
proposée par la section centrale, qui se concilie parfaitement avec le mode de
procéder que nous venons d’adopter en renvoyant devant le président du tribunal
pour obtenir le mandant exécutoire.
M le ministre de la
justice (M. d’Anethan) - D’après l’article 806 du code de procédure civile, voici comment les
choses se passent en référé :
« Dans tous les cas d’urgence,
ou lorsqu’il s’agira de statuer provisoirement sur les difficultés relatives à
l’exécution d’un titre exécutoire ou d’un jugement, il sera procédé ainsi qu’il
va être réglé ci-après. »
Ainsi le juge de référé ne peut statuer
que provisoirement et sur les difficultés relatives à l’exécution d’un titre
exécutoire ou d’un jugement : il ne peut jamais connaître du fond.
L’honorable M. Fallon dit que le juge
en référé est, en quelque sorte, un juge de paix, un juge conciliateur. Cela
peut être vrai dans quelques cas, mais telle n’est pas sa mission légale. Quand
les parties sont devant le juge de référé, il est naturel que le magistrat
tâche de les amener à une conciliation, mais son effet, je le répète, n’est pas
de concilier les parties, mais de prononcer sur les difficultés d’exécution.
Nous pensons que, relativement à
l’exécutoire donné par le président, il ne s’élèvera guère de difficultés
d’exécution, car cet exécutoire sera une chose fort simple et exemple de
formalités, dès lors il n’y aura pas de motifs de saisir un juge de référé. Les
seules difficultés qui pourront s’élever porteront sur le fond, sur le quantum,
la validité, la nature des dépenses, sur la question de savoir si les dépenses
sont ou ne sont pas exagérées. L’honorable M. Fallon reconnaît que, quand il
s’agira de difficultés sur le fond, le juge de référé sera incompétent, et
devra alors renvoyer devant le tribunal. Nous voulons éviter ce circuit, nous
voulons qu’on aille directement devant le tribunal et que cette faculté soit
écrite dans la loi.
D’après l’art. 12, proposé par la
commission, on n’a que le droit d’élever des difficultés relativement à
l’exécution, mais non de s’occuper des difficultés qui surgiraient quant au
fond de la question, quant à la hauteur de la dépense. C’est ce droit que nous
croyons nécessaire de constater. Celui d’aller en référé existe en vertu de
l’article 806 du code de procédure civile. Il est inutile de le dire, il est
même dangereux, puisque cette mention tendrait à faire croire que l’autre
droit, celui de contester le fond, n’existe pas. Nous pensons qu’il est
nécessaire d’adopter l’amendement propose par M. le ministre de l'intérieur.
L’honorable M. Fallon croit
que la marche qu’il trace sera plus rapide, qu’elle évitera des frais. Je pense
qu’il est dans l’erreur, car il fait faire un circuit ; il renvoie devant le
juge de référé pour aller ensuite devant le tribunal, ce qui arrivera toujours,
parce que, comme je l’ai dit tout à l’heure, les difficultés qui s’élèveront
porteront sur le fond ; d’après notre amendement, au contraire, on ira
directement devant le tribunal où l’affaire devra être jugée comme en matière
sommaire et urgente. La marche que nous proposons est donc préférable.
Enfin le but que se propose
l’honorable M. Fallon par l’art. 12 sera atteint par l’art. 806 du code de
procédure civile, sans qu’il puisse en résulter aucun des inconvénients que
j’ai signalés
M. Orts. - J’appuie les observations que vient de présenter M. le ministre de
la justice. La disposition proposée par la commission fait faire un circuit
inutile. J’ajouterai une considération sous le rapport de la perte de temps.
Non seulement les jugements de référé nécessitent le renvoi au tribunal pour
juger le principal, mais d’après l’art. 809 du code de procédure civile, les
ordonnances de référé sont susceptibles d’appel. On ira en appel ; cet appel
fera perdre encore un certain temps et ce sera seulement après que l’appel aura
été jugé qu’on abordera le fond.
M. de Naeyer. - Messieurs, je crois que
nous allons retomber dans les inconvénients que nous avons voulu éviter. Le but
qu’on s’est proposé est d’assurer l’exécution des lois et règlements en matière
de voirie, sans que les communes fussent tenues d’entamer des procès, nous
avons voulu accorder au juge le droit de prononcer d’office des réparations
civiles et dispenser les communes de se porter partie civile. Eh bien, toutes
les fois qu’il y aura contravention, il y aura procès pour
la commune. La contravention sera le plus souvent commise par des personnes
plus ou moins endettées ; on aura beau, dans ce cas, obtenir un jugement
ordonnant la réparation, la commune devra agir en vertu du jugement, le faire
exécuter pour recouvrer les frais ; il y aura procès. La commune devra assigner
le propriétaire pour obtenir le remboursement des frais ; de sorte que, au lieu
d’éviter des procès aux communes, on leur en occasionnera, à moins qu’on
n’insère dans la loi une disposition portant que le juge, en prononçant la
condamnation et fixant le délai d’exécution, déterminera une somme pour chaque
jour de retard. De cette manière, la commune pourrait obtenir l’exécution du
jugement sans avoir besoin d’intenter un procès.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Cela change toute
l’économie des articles précédents.
M. le président. - M. de Naeyer propose d’ajouter à l’art. 11
la disposition suivante : « Il déterminera pour chaque jour de retard dans
l’exécution la somme qui devra être payée à la commune à titre
d’indemnité. »
Je dois faire observer que cet
amendement ne peut venir qu’au second vote.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - J’allais faire la même
observation que M. le président. Cet amendement est tardif. Comme l’art.
M. de Naeyer. - Je retire ma proposition
en me réservant de la reproduire au second vote.
- Le nouvel article 12 proposé par M.
le ministre est mis aux voix et adopté.
Article 13
« Art. 13. Dans le cas de renvoi
à fins civiles, sur la question préjudicielle, la partie qui aura proposé l’exception
devra se pourvoir devant le juge compétent, et justifier de ses diligences dans
le mois, sinon il sera passé outre à l’instruction et au jugement sur la
contravention.
« Les affaires renvoyées à fins
civiles seront instruites et jugées comme affaires sommaires et
urgentes. »
- Adopté.
TITRE II. - DE LA GRANDE
VOIRIE
Article 14
« Art. 14. Les dispositions des
articles 10, 11, 12 et 13 de la présente loi, sont communes aux contraventions
en matière de grande voirie.
« Les dispositions de ces mêmes
articles sont spécialement applicables aux contraventions prévues par l’arrêté
du 29 février 1836 (Bulletin officiel, n°38). Et néanmoins, lorsqu’une partie
de la propriété riveraine devra, par suite des nouveaux alignements adoptés,
être incorporée à la voie publique, les nouveaux alignements ne pourront être
prescrits ni exécutés avant le payement, ou, s’il y a lieu, la consignation de
l’indemnité due au propriétaire. »
- Adopté.
M. le président. - L’art. 15, qui forme le titre III, a été supprimé par la commission
; mais comme il se trouve dans le projet que nous a renvoyé le sénat, je crois
de mon devoir de le mettre aux voix.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - La commission a proposé une
loi spéciale. La chambre peut en rester saisie ; mais je demande qu’elle en
ajourne la discussion.
M. de Garcia. - Il ne s’agit pas maintenant de cette loi spéciale.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Soit.
M. de Garcia,
rapporteur. - Je crois qu’il ne s’agit
maintenant que de savoir si l’on mettra aux voix l’art. 15 adopté par le sénat
et dont la commission propose la suppression,
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - J’en demande la
suppression.
- La chambre consultée prononce la
suppression de l’art. 15.
TITRE PREMIER. DE
§ 2. Des constructions lorsqu’il
y a lieu de réunir un terrain particulier à la voie publique
Sur la proposition de M. de Villegas, la
chambre passe à la discussion de l’art. 3 précédemment ajourné. Cet article est
ainsi conçu :
« Art. 3. Le contrevenant sera
condamné à exécuter ces travaux dans le délai qui sera fixé par le jugement.
Passé ce délai, il sera procédé ainsi qu’il sera dit ci-après, sans préjudice
de l’amende encourue, dont il lui sera fait application. »
M. de Garcia,
rapporteur. - Cet article ne comporte en
quelque sorte pas de discussion ; en effet, la chambre ayant adopté
l’amendement de M. le ministre de l’intérieur à l’art. 9, elle ne peut se
dispenser d’adopter son amendement à l’art. 3.
Ce dernier article est en quelque
sorte le corollaire nécessaire de l’autre, et c’est même par ce motif que la
discussion en a été postposée.
Comme cet article est un des derniers
que nous ayons à voter, j’adresserai à M. le ministre quelques observations sur
l’exécution de la loi. Je crois pouvoir le faire à propos de cet article,
puisqu’il se rapporte à la peine.
Les grandes difficultés qu’a
présentées la discussion de cette loi résultent du passage de la législation
ancienne à la législation nouvelle établie par la constitution belge. Depuis la
loi du 29 floréal an X (1802) jusqu’à la constitution belge, Les contestations
dont nous nous sommes occupés dans ce projet de loi étaient soumises à
l’appréciation de la juridiction administrative.
Ce changement dans nos institutions
politiques est la source des principales difficultés dans l’application des
lois actuelles sur la matière, qui ne sont pas mises en harmonie avec le nouvel
ordre de choses. En vertu des lois anciennes, la juridiction administrative
prononçait non seulement la peine, mais encore la réparation civile. Les
tribunaux auxquels on a déféré la connaissance de ces matières n’ont pas cru,
et avec raison, selon moi, que le pouvoir et les attributions dont les avait
investis la loi, leur donnassent en l’absence d’une partie civile, le droit de
prononcer des démolitions et des réparations civiles. Voilà, je le répète, le
véritable point, le siège des difficultés qui nous occupent. La juridiction
administrative ne donnait lieu à aucune espèce de frais. Devant les tribunaux,
au contraire, il y a toujours des frais. D’autre part, la juridiction
administrative avait dans l’application des lois et règlements, ordonnant la
démolition, une latitude que les tribunaux n’ont pas. Le tribunal, saisi d’une
contestation, n’a qu’une chose à faire, appliquer la loi ; il n’en était pas de
même pour la juridiction administrative qui pouvait toujours tempérer la
rigueur de la loi.
D’après ces considérations, on
conçoit que l’application de la loi présentera des difficultés bien plus graves
pour les tribunaux que pour la juridiction administrative. Aussi, ai-je été
peiné d’entendre M. le ministre de l intérieur déclarer qu’on ne s’occuperait
ni actuellement, ni dans un temps très éloigné, de la révision des lois et
règlements sur la matière. Les considérations que je viens de présenter et qui
ne peuvent avoir échappé au gouvernement, sont de nature à provoquer la
révision la plus prochaine des lois sur la matière. Il est d’autres
considérations qui réclament encore cette révision. Ces considérations, je les
réduirai à des demandes que je vais adresser à M. le
ministre sur la manière dont il entend qu’on appliquera la loi actuelle dans
les cas que je vais supposer.
D’abord je lui demanderai s’il ne
serait pas utile d’admettre ici la responsabilité civile, comme pour les
contraventions aux lois sur la police du roulage. Ceci est un point à examiner
; car il arrivera souvent que les faits de construction seront posés par des
ouvriers ; l’amende ne pourra être prononcée contre le maître ; car c’est un
principe en droit que le maître n est jamais
responsable de l’amende. D’après la loi sur la police du roulage, les
propriétaires de messageries sont responsables des dommages et même des
amendes. C’est une disposition exorbitante du droit commun. Mais le législateur
a voulu qu’il y eût pour les amendes une responsabilité réelle vis-à-vis du
trésor. Je demanderai à M. le ministre s’il ne conviendrait pas d’admettre
cette responsabilité.
Une autre question que j’adresserai à
M. le ministre est celle-ci. Lorsqu’une personne fera plusieurs contraventions,
encourra-t-il plusieurs amendes ? Je m’explique. Je suppose un propriétaire qui
construit sans autorisation, qui ne suit pas le plan général d’alignement et
qui ne donne pas à sa maison la hauteur indiquée. Voila trois contraventions.
Faudra-t-il prononcer une seule amende, ou trois amendes ? je
ne sais quelle sera la réponse de M. le ministre. Mais lorsque j’aurai, comme
juge, à appliquer la loi, je ne sais en vérité ce que devrai faire.
Je sais bien que le code pénal
a une disposition portant que lorsqu’il y a concours de plusieurs délits, on ne
doit infliger que la peine la plus forte. Mais cette disposition est-elle
applicable à une loi spéciale ? C’est une question, et le législateur doit la
résoudre quand il le peut.
Je demande donc à M. le ministre
comment la loi devra être appliquée dans ce cas, et s’il ne convient pas
d’admettre la responsabilité civile dans la matière qui nous occupe
actuellement.
M. Fallon. - Je ferai observer que, si l’on adopte l’amendement de M. le
ministre, on laisse une lacune dans la loi ; voici pourquoi : le titre premier
a pour objet les rues, ruelles passages et impasses établis sur des propriétés
particulières. Il s’agissait de savoir quel mode on suivrait pour le cas où un
particulier ouvrirait une rue sur sa propriété sans autorisation ; il sera
condamné à l’amende ; mais cela ne suffirait pas ; le propriétaire est obligé à
fermer cette communication. Dans le cas suivant il y a lieu à recul, la loi
prescrit la démolition et l’alignement. Pour que l’art. 3 fût complet, il
faudrait y ajouter : « sans préjudice de l’amende comminée à l’art.
9 ».
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je retire mon amendement.
- L’art. 3 est adopté avec
l’amendement présenté par M. Fallon.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je voudrais faire une
question à l’honorable rapporteur de la section centrale sur le sens de l’art.
2. Il y est dit que les voies de communication dont il s’agit à l’article
premier, quelle qu’en soit la destination, ne peuvent être ouvertes qu’après avoir obtenu l’autorisation de
l’administration communale. Je suppose qu’il n’y a pas ici de dérogation à
la loi communale, c’est-à-dire, que l’autorisation de l’administration
communale seule ne suffit pas, qu’il faudra que cette autorisation soit soumise
à toutes les formalités indiquées par la loi communale.
Je vais, messieurs, m’exprimer
encore plus clairement. Par l’art.76, n°7, de la loi communale, on place entre
autres dans les attributions du conseil communal : « la fixation de la grande
voirie et les plans généraux d’alignement des villes et des parties agglomérées
des communes rurales ; l’ouverture des rues nouvelles, et l’élargissement des
anciennes, ainsi que leur suppression. » Mais il est dit en tête de cet article
que les délibérations du conseil communal sur ces objets seront soumis à l’avis de la députation permanente et à l’approbation
du Roi.
Je suppose que le choix commun est
maintenu.
M. de
Garcia. - Messieurs, je pourrais imiter M.
le ministre de l’intérieur, je lui avais adressé quelques interpellations et il
n’a pas daigné me répondre mais je n’en agirai pas ainsi.
Messieurs, la commission qui a été
chargée de l’examen de la loi n’a jamais en l’intention de porter aucune
atteinte aux prérogatives de la commune, ni à celles de l’autorité supérieure
qui doit approuver certains actes des administrations communales, et notamment
la formation des plans d’alignement. M. le ministre de l’intérieur peut être
bien convaincu que, par l’art.2, la commission n’a nullement entendu déroger à
aucune des dispositions de la loi, qui règle et détermine les attributions de
la commune.. Dans la pensée de la commission, l’on n’a
voulu ni circonscrire, ni élargir le cercle du pouvoir communal, qui, par
l’acceptation de cette loi, doit rester ce qu’il était auparavant.
M. Fallon. - Je dois confirmer ce que vient de vous dire l’honorable rapporteur.
Déjà hier, sur une interpellation qui m’avait été faite relativement à l’action
en expropriation que la commune devra intenter, j’avais fait observer que la
loi ne dispensait pas celle-ci de réclamer de l’autorité supérieure les
pouvoirs nécessaires avant d’intenter l’action.
Il n’est aucunement entré dans les
intentions de la commission de changer quoi que ce soit aux rapports de la
commune avec l’autorité supérieure.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Je remercie l’honorable
rapporteur et l’honorable membre de la section centrale des explications qu’ils
viennent de donner et qui lèvent tous les doutes.
L’honorable rapporteur m’a reproché
mon silence sur différentes questions qu’il m’a adressées. Il a renouvelé ses
regrets de ce que le gouvernement ne fût pas en mesure de présenter la révision
générale de la législation sur la voirie. Messieurs, j’ai déjà dit hier quelles
difficultés présentaient une révision de ce genre.
On l’a essayée en France, et
savez-vous ce qui est arrivé ? Il y a un projet de loi qui fait la navette,
passez-moi le mot, entre les deux chambres depuis quinze ans. Et cependant, en
France, l’important changement que vous a signalé l’honorable préopinant,
n’existe pas ; la juridiction administrative y existe encore.
Le gouvernement français a saisi les
chambres d’une loi générale sur la voirie et le roulage, et, je le répète,
cette loi générale, qui a été faite et refaite, remaniée je ne sais combien de
fois, à laquelle de grands jurisconsultes, de grands administrateurs ont
attaché leur nom, cette loi n’est pas encore votée.
Le mieux, messieurs, est l’ennemi du
bien, et c’est ici le cas d’appliquer cet adage.
L’honorable préopinant vous a dit
lui-même pourquoi il fallait faire une loi : c’est que la juridiction
administrative n’existe plus chez nous. Il y a une lacune importante qu’il faut
combler ; nous verrons si les travaux législatifs et administratifs nous permettront
de faire davantage.
Quant aux questions d’application que
m’a présentées l’honorable préopinant, elles pourraient être résolues dans une
loi générale. Nous n’avons pas pensé que ces questions dussent se présenter si
souvent, qu’il y eut lieu de s’en occuper maintenant-.
Ainsi il a posé la question où il y
aurait lieu à plusieurs contraventions. C’est là un cas qui se présentera très
rarement ; il est peu probable qu’un propriétaire commette un grand nombre de
contraventions. Je répondrai cependant à l’honorable préopinant que si ces
contraventions sont commises dans une même rue pour le même alignement, pour
deux ou trois maisons contiguës, par exemple, il est probable que le tribunal
décidera qu’il n’y a qu’une contravention.
L’important, et c’est ce qu’on perd
de vue, c’est la réparation des travaux, c’est leur démolition. Ce but est
atteint. Que le tribunal déclare qu’il y a une ou trois contraventions, dès
qu’on peut rétablir les lieux dans leur premier état, c’est tout ce qu’il faut.
M. le président. - Le second vote du projet qui vient d’être discuté est renvoyé à
après-demain.
PROJET
DE LOI RELATIF À L’ORGANISATION DE L’ARMÉE
M. le ministre de la guerre
(M. Du Pont) présente
à la chambre un projet de loi sur l’organisation de l’armée.
Il est donné acte à M. le ministre de
la présentation de ce projet de loi. Il sera imprimé et distribué.
La chambre en renvoie l’examen en
sections.
FIXATION
DE L’ORDRE DU JOUR
M. le président. - Avant de fixer l’ordre dia jour, je dois annoncer à la chambre que
le bureau a nommé la commission qui sera chargée d’examiner le projet de loi
interprétatif de l’art. 334 du code pénal. Cette commission se compose de MM.
Scheyven, Van Cutsem, Vanden Eynde, Fleussu, de Garcia, Maertens et Savart.
Nous avons à l’ordre du jour de
demain un feuilleton de pétitions.
Nous ferons notre possible pour que
le rapport supplémentaire sur le projet de loi relatif aux eaux-de-vie
étrangères soit distribué ce soir. La chambre veut-elle fixer à demain la
discussion de ce projet ?
M. Fallon. - Je propose à la chambre de le fixer éventuellement à l’ordre du jour
de demain.
- Cette proposition est adoptée.
La séance est levée à 4 heures.