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d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 24
novembre 1843
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre
2)
Rapport sur des pétitions relatives notamment à la pension d’un blessé de
guerre (Stas), à la loi sur la milice (Simons,
de Muelenaere), à une demande d’emploi (Delfosse, Fallon), à la loi sur la
milice (Delfosse, Fallon, Lejeune, Angillis), à une demande
de secours et à l’extension du droit de vote aux ouvriers (Delehaye,
Rodenbach, de Garcia, Castiau, Delehaye, de Garcia, Rodenbach, Nothomb, Delehaye), à
l’application de la chose jugée au gouvernement (Verhaegen),
au mode de scrutin législatif (Nothomb, Delfosse)
3)
Projet de loi relatif à l’organisation de la poste aux chevaux. Motion d’ordre
(Dechamps)
(Moniteur
belge n°329, du 25 novembre 1843)
(Présidence de M. Liedts)
M. de Renesse fait l’appel nominal à 3 heures et 1/4. La séance est ouverte.
M. Dedecker lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est
adoptée.
M. de Renesse présente l’analyse des pièces adressées à la chambre :
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
« Le sieur Gaspard-Louis de Klerck, facteur des postes à Malines, né à Boulogne-sur-Mer
(France), le 15 janvier 1806, et le sieur Vincent, comte Syszkiewiez,
demandent la naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la
justice.
_________________________
« Le sieur Straus,
horloger à Bastogne, demande des mesures de protection pour l’horlogerie belge.
»
- Renvoi à la commission d’industrie.
_________________________
« Plusieurs aubergistes de Langdorp demandent l’abrogation de la loi du 18 mars 1838,
établissant un droit de consommation sur les boissons distillées. »
- Dépôt sur le bureau pendant la discussion
du projet de loi tendant à modifier la loi du 18 mars 1838.
RAPPORTS SUR DES DEMANDES DE NATURALISATION
M. Lejeune, au nom de la commission des naturalisations, dépose plusieurs projets
de loi, concernant des demandes de naturalisation, prises en considération par
les deux chambres.
- La chambre ordonne l’impression et
la distribution de ces projets de loi.
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Le sieur Stas, blessé de septembre, réclame l’intervention de
la chambre pour obtenir une pension. »
Blessé mortellement pendant les
journées de septembre, blessures constatées par huit certificats ci-joints. Le
pétitionnaire n’a reçu qu’un secours de 100 francs, puis cette somme lui fut
retirée à cause qu’il obtint la décoration de
Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
- Adopté.
______________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Le sieur Kokelenberg, tailleur de
pierres, se plaint de ce que son second fils est appelé sous les drapeaux parce
que son troisième fils se trouve exempté ou service par la voie du sort. »
Le pétitionnaire soumet à la chambre
qu’ayant trois fils, que l’aîné se trouvé encore présent sous les armes ; le
deuxième, milicien de 1840, en a été exempté en vertu de la loi ; le troisième,
milicien de
Renvoi à M. le ministre de la guerre.
M. Angillis. - Mais c’est impossible. Si le pétitionnaire n’a que trois fils, il ne
peut en avoir sous les drapeaux.
M. Simons. - Je demanderai à
l’honorable rapporteur de combien de personnes se compose cette famille.
M. Morel-Danheel, rapporteur. - Le pétitionnaire a trois enfants.
M. Simons. -
Très bien ; car s’il avait quatre enfants, il y en a deux qui devraient
marcher.
Mais j’ai une observation à faire sur
les conclusions de la commission ; elle propose le renvoi à M. le ministre de
la guerre. Pour que la chambre prononçât ce renvoi, il faudrait que le ministre
pût faire droit à la réclamation du pétitionnaire ; or, cette réclamation est
de la compétence des conseils de milice et des députations provinciales ; je ne
vois donc pas, quand il y aurait erreur, ce que le ministre de la guerre
pourrait y faire. Il s’agit d’un jugement en dernier ressort contre lequel on
ne peut se pourvoir.
M. de Muelenaere. - J’appuie le renvoi à M. le ministre de la guerre ; car les faits ne
me semblent pas nettement exposés. Si le pétitionnaire n’a que trois fils il me
semble impossible que l’on en ait appelé deux sous les drapeaux. Le ministre de
la guerre doit être à même d’apprécier les faits.
- Les conclusions de la commission
sont adoptées.
_________________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - Le sieur Moureau, cabaretier à Verviers,
réclame l’intervention de la chambre pour être indemnisé des pertes que lui a
fait subir l’administration du chemin de fer par suite de l’abaissement de la
route de
Le pétitionnaire expose qu’il a
acquis à Verviers, au lieu dit Chic-Chac, un terrain
pour bâtir, bordé par la route de
Renvoi à M. le ministre des travaux
publics.
- Adopté.
_________________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Le conseil communal de Sichen, Sussen et Bolré demande que le
hameau de Sussen soit séparé de cette commune et
érigé en une commune distincte. »
Déjà ce hameau est séparé pour le
spirituel. II s’agit aujourd’hui de la construction d’une nouvelle église, et
pour éviter toute animosité, que les dépenses à faire ne manqueront pas de
soulever, le conseil communal demande cette séparation. Par là toute discorde
sera enlevée, la paix se rétablira. En conséquence votre commission vous
propose le renvoi à M. le ministre de l’intérieur.
- Adopté.
_________________________
M.
Morel-Danheel, rapporteur. - « Le sieur Hebbelynck, ancien greffier de la justice de paix du canton
de Nazareth, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir une place de
greffier de justice de paix ou bien sa pension. Natif de la ville de Gand, âgé
de 54 ans, le pétitionnaire expose qu’ayant été nommé greffier du juge de paix
de Nazareth, le 21 mars 1819, il en a été révoqué pendant les troubles du 19
janvier 1833 sans en connaître les motifs. Depuis lors il a demandé en vain sa
réhabilitation ou une autre place de greffier ; depuis lors il est en
souffrance.
La commission conclut au renvoi à M.
le ministre de la justice.
M. Delfosse. - Je demande l’ordre du jour ; il ne convient pas à la chambre de
jouer le rôle d’agent-solliciteur auprès de MM. les ministres, que ceux qui
veulent des places s’adressent directement à eux.
M. Fallon. - J’appuie la proposition d’ordre du jour ; car il n’entre pas dans
les attributions de la chambre de procurer une place de greffier de justice de
paix.
- L’ordre du jour est prononcé.
________________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Le sieur Naviaux ex-garde forestier
pensionné, réclame l’intervention de la chambre pour obtenir une augmentation
de pension. »
Ordre du jour.
- Adopté.
_________________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « La veuve Pierman demande que son
fils Nicolas soit exempté du service militaire. »
La pétitionnaire expose que son fils
Nicolas Pierman a été incorporé au dépôt général ;
que depuis elle a reconnu qu’il avait droit à l’exemption mentionnée à
l’article 91 litt. KK de la loi de 1817, comme étant
devenu le seul soutien de sa vieille mère devenue veuve. Votre commission
propose le dépôt au bureau des renseignements.
M. Delfosse. - Le dépôt au bureau des renseignements ne doit être prononcé que
lorsqu’une pétition contient des observations qui peuvent éclairer la chambre
sur les vices ou sur les lacunes de de la
législation. Il ne paraît pas que la pétition de la veuve Pierman
se trouve dans ce cas ; cette veuve se borne à demander que l’on revienne, en
faveur de son fils, sur une décision prise par un conseil de milice ou par une
députation permanente ; je crois qu’il faut prononcer l’ordre du jour, parce
que le ministre de la guerre ne peut rien contre une
telle décision. Le renvoi de la pétition à M. le ministre de la guerre n’aurait
aucun résultat.
- L’ordre du jour est prononcé.
_______________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Les fermiers des barrières sur la route d’Anvers à Malines
réclament l’intervention de la chambre pour être indemnisés des pertes qu’ils
éprouvent par suite de 1’abaissement du tarif des marchandises transportées par
le chemin de fer. »
Les pertes que les soussignés
essuient mensuellement s’élèvent à 50 p. c. du montant de l’adjudication. En
conséquence ils demandent 1° une indemnité équivalente à la perte qu’ils ont
subie depuis la mise en vigueur du tarif du 10 avril 1841.
Conclusions : renvoi à M. le ministre
des finances.
- Ces conclusions sont adoptées.
______________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Le sieur Heindryckx, conducteur des
ponts et chaussées demande une récompense honorifique pour les services qu’il
dit avoir rendus au pays. »
Il expose, qu’en 1815, il a sauvé de
l’inondation d’eau de mer, des terres d’une superficie de dix mille hectares,
de Breedene à Blanckenberg,
et qu’en 1832, il a, au péril de sa vie, arrêté la coalition des bateliers sur
les canaux de Mons et d’Antoing.
Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
- Adopté.
____________________
M. Morel-Danheel, rapporteur. - « Le sieur Maertens se plaint de ce qu’on veut appeler son fils Pierre
au service militaire, s’il ne remplace le substituant qu’il a fourni. »
Il expose que son fils Pierre
Maertens, milicien de 1838, et substitué par le sieur P. Koopman,
vient de recevoir, de la régence de Menin, l’ordre de laisser incorporer son
fils en personne au 2ème régiment de chasseurs à pied ou de fournir un nouveau
substituant à la place de Koopman, rayé du matricule
dudit régiment. Il croit qu’il y a à son préjudice un abus de pouvoir en
assimilant la substitution au remplacement, et de faire peser sur le substitué
la responsabilité que la loi n’impose qu’aux remplacés.
M. Fallon. - Je demanderai à M. le rapporteur si le pétitionnaire s’est d’abord
pourvu auprès de M. le ministre de la guerre, et si c’est parce qu’il l’a fait
sans succès qu’il s’adressé à la chambre.
M. Morel-Danheel, rapporteur. - La pétition n’en dit rien.
M. Fallon. - Dans ce cas, je demanderai l’ordre du jour. Il faut qu’un
pétitionnaire s’adresse avant tout à l’autorité qui peut faire droit à sa
requête ; sinon, la chambre ne fera plus que l’office d’un bureau de poste pour
transmettre les pétitions aux différents ministères.
M. Lejeune. - M. le rapporteur pourrait-il nous dire si la substitution a eu lieu
devant le conseil de milice ou par une autorisation de M. le ministre de la
guerre ? Si la substitution a eu lieu devant le conseil de milice, il y aurait
injustice à l’égard du pétitionnaire ; mais si la substitution n’a eu lieu que
par une permission spéciale, on a pu lui imposer la condition de répondre de
son substituant.
M. Angillis. - Il faut savoir, comme le dit l’honorable M. Lejeune, si cette
substitution a été admise par le conseil de milice, ou postérieurement par M.
le ministre de la guerre. Dans le premier cas ; la substitution est parfaite,
et l’on n’est plus responsable de son substitué.
Je voudrais savoir ce que dit sur ce
point la pétition ; d’après les renseignements qu’elle doit nous donner, je me
déciderai pour l’ordre du jour, ou j’appuierai le renvoi à M. le ministre de la
guerre, et même avec demande d’explications.
M. Morel-Danheel. -
La pétition ne dit pas comment la substitution a eu lieu.
- L’ordre du jour est adopté.
_________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Le sieur Vervloes, garde-forestier, à Assche,
demande qu’il soit fait une enquête sur la conduite des autorités appelées à se
prononcer au sujet des plaintes qu’il a adressées au gouvernement. »
Conclusions : Ordre du jour.
- Ces conclusions sont adoptées.
« Plusieurs ouvriers des
Flandres demandent qu’on vienne à leur secours en leur accordant les moyens de
pourvoir à leur existence ; qu’on les décharge de toute imposition quelconque,
et qu’on donne aux ouvriers le droit de voter dans les élections aux chambres
et aux conseils provinciaux et communaux. »
- La commission conclut à l’ordre du
jour.
M. Delehaye. - Messieurs, vous avez déclaré dans la constitution que le droit de
pétition est un droit sacré. On ne vous dit pas que la pétition sur laquelle il
vient de vous être fait rapport renferme quelque expression offensante, dès
lors je ne comprends pas pourquoi on la repousserait par des conclusions aussi
sévères que l’ordre du jour.
Si l’on ne veut pas la renvoyer à M.
le ministre de l’intérieur, j’en demanderai le dépôt au bureau des
renseignements. Il me paraît que l’on pourrait tout au moins en détacher la
première partie, celle où il est question de la demande de travail faite par
les ouvriers, et la renvoyer à M. le ministre de l’intérieur, sauf à prononcer
l’ordre du jour sur le reste.
M. Rodenbach. -
Messieurs, il paraît que les ouvriers qui vous ont adressé cette requête, se
disent pauvres et demandent des secours. Mais en même temps ils demandent le droit
électoral, et tout le monde sait que le droit électoral ne s’acquiert que par
le cens.
Je sais qu’il y a réellement de la
misère dans les Flandres ; si donc il s’agissait d’ouvriers qui demandassent du
travail, je concevrais leur requête à la chambre. Mais la pétition dont il est
question ne peut être que le résultat des instigations de quelque personne qui
n’est pas animée d’un bon esprit, et c’est ce qui me fera appuyer l’ordre du
jour. On ne comprend pas comment de pauvres ouvriers viennent demander des
droits électoraux ; une pareille demande n’est pas rationnelle
M. de
Garcia, rapporteur. - Messieurs, vous venez
d’entendre le but de la pétition. Elle a pour objet : d’abord de vous demander
la charité, de vous demander l’exemption de l’impôt et puis le cens universel.
Votre commission a cru qu’elle ne
pouvait pas par un accueil favorable encourager de semblables requêtes ; il lui
a paru que suivre une autre voie ce serait bouleverser l’ordre existant et
tendre à établir le cens universel, ce qu’elle ne voulait pas.
Voilà les motifs qui l’ont décidée à
vous proposer l’ordre du jour.
M. Castiau. - Messieurs, cette pétition soulève plusieurs questions graves et
difficiles, qui sont dignes de toute la sollicitude de la chambre.
Et d’abord je crois devoir relever
l’expression dont vient de se servir M. le rapporteur. Il vous dit que des
ouvriers s’adressent à vous pour demander la charité. Je ne puis croire que la
pétition, que je n’ai pas lue, du reste, et dont je ne connais l’existence que
par le rapport qui vient de vous être fait, soit rédigée dans de tels termes.
Ces ouvriers doivent se plaindre de leur misère, de l’état d’abandon dans lequel
ils se trouvent ; mais je pense qu’ils conservent encore assez de sentiments de
dignité pour ne pas tendre la main et demander la charité, comme le suppose M.
le rapporteur.
D’après les termes du feuilleton de
pétition, les pétitionnaires vous demandent les moyens de pourvoir à leur
existence ; et ces moyens ce ne sont pas ceux que l’on doit à la charité, que
l’on doit à l’oisiveté et à l’aumône ; ce sont les moyens que l’on doit, avant
tout, à un travail honorable et libre. Je ne comprends donc pas, encore une
fois, les expressions dont s’est servi M. le rapporteur.
Messieurs, on reconnaît que la misère
est grande et se développe chaque jour. La question du paupérisme est à l’ordre
du jour ; le gouvernement s’en occupe, il vous en a signalé lui-même l’importance.
Dans de telles circonstances, ce serait afficher une sorte d’insensibilité de
cœur que de venir repousser par l’ordre du jour un appel qui est fait non pas
seulement à votre humanité, mais encore à votre justice. Car vous devez étendre
votre patronage sur toutes ces classes de la société.
Je demande donc le renvoi de cette
première partie de la pétition à M. le ministre de l’intérieur, que cet objet
important concerne.
Vient ensuite une autre question qui
a été passé jusqu’ici sous silence, c’est celle relative aux impositions, aux
charges qui grèvent la classe ouvrière. Je comprends que vous ne puissiez
admettre en ce moment la demande des pétitionnaires dans toute sa latitude ; on
y dit, en effet, suivant les termes qui sont arrivés jusqu’à moi, que ces
ouvriers demandent d’être dégrèves de toutes les charges qui pèsent sur eux.
Si leur position est aussi fâcheuse
qu’ils le prétendent, certes, ce serait un acte de justice d’accorder cette
deuxième partie de leur réclamation. Cependant, dans l’état actuel des choses,
on ne pourrait prendre sur ce point des conclusions définitives et absolues ;
cette réforme ne peut s’opérer en un jour ; mais puisque les chambres sont
appelées à s’occuper des moyens de faire face aux besoins du trésor, et que dans
la pensée du gouvernement il est question d’augmenter encore ces impôts de
consommation qui déjà pèsent si lourdement sur la classe ouvrière, je pense que
dès lors il y aurait lieu de détacher cette seconde partie de la pétition, et
de la renvoyer à l’examen attentif de M. le ministre des finances, non pas sans
doute pour arriver aux conclusions, peut-être extrêmes des pétitionnaires, mais
pour arriver au moins à ce que le gouvernement prenne cette réclamation en
considération lorsqu’il préparera les lois destinées à rétablir l’équilibre
entre les recettes et les dépenses de l’Etat. Si les besoins du trésor sont
grands, la misère publique est grande aussi et je désire que ce ne soit pas
encore une fois par des impôts de consommation, tombant presque toujours sur
les classes ouvrières, que l’on cherche à améliorer la situation financière du
pays.
Par toutes ces considérations,
messieurs, je conclus au renvoi à M. le ministre de l’intérieur de la première
partie de la pétition, et au renvoi de la seconde partie à M. le ministre des
finances. C’est en faisant droit aux réclamations les plus justes des classes
ouvrières, c’est en les couvrant d’un véritable patronage, qu’on parviendrait
peut-être à rendre, en ce moment, sans objet la troisième partie de leur demande,
leur admission à l’exercice des droits politiques.
M. Delehaye. - Je me range à l’avis de l’honorable M. Castiau. La dernière partie
de la pétition demandant le suffrage électoral pour ceux qui ne paient aucune
contribution et la constitution exigeant le paiement d’un cens, il me semble
que nous ne pouvons pas admettre cette dernière partie de la requête.
J’appuierai donc les conclusions de
la commission pour la troisième demande des pétitionnaires.
M. de Garcia,
rapporteur. - Je dois relever un reproche que
m’a adressé l’honorable M. Castiau. Pour m’adresser ce reproche, cet honorable
membre me semble n’avoir joué que sur les mots, Tout en convenant que la
pétition, qui est en flamand, ne portât que le mot secours, selon moi cette expression aurait dans ses effets la même
portée que le mot charité. Au fond c’est la même chose. Un homme bien élevé qui
se trouvera dans le besoin, viendra vous demander un secours ; un homme
entièrement pauvre et aussi digne de votre commisération vous demandera la
charité ; entre ces deux expressions, il n’y a qu’une différence grammaticale,
ou plutôt sociale.
Quant à la partie de la pétition où
l’on réclame le vote électoral universel, l’honorable M. Delehaye vient d’y
répondre ; cette demande est inconstitutionnelle je n’ajouterai rien à ce qu’il
a dit à cet égard.
On a dit que nous avons passé sous
silence une autre partie de la pétition, celle par laquelle les pétitionnaires
demandent que les ouvriers soient déchargés de toute espèce de contributions.
Messieurs, nous avons également
proposé l’ordre du jour sur cette demande, parce qu’elle tend à renverser tout
notre système financier. La commission a pensé que si nous recevions des
pétitions de cette espèce, il nous en arriverait de toutes parts ; les pauvres
sont nombreux dans toutes les provinces, et si nous les encouragions à nous
envoyer des requêtes pour nous demander des secours, nous aurions une foule de
pétitions à renvoyer au ministre qui, se trouvant dans l’impossibilité d’y
donner la moindre suite, ne pourrait que les enfouir dans ses cartons, d’où
elles ne sortiraient jamais.
Voilà, messieurs, les motifs qui ont déterminé la commission à vous
proposer l’ordre du jour.
M. Rodenbach. -
Je demande qu’on donne lecture de la pétition.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Il importe que la chambre
sache que ces pétitions sont imprimées, c’est un mouvement qui a été organisé
(pour me servir de cette expression) par une personne très connue, partie de
Bruxelles. Par cette pétition on demande trois choses : des moyens d’existence,
d’abord ; en second lieu l’exemption de tout impôt de consommation pour la
classe ouvrière, et, en troisième lieu, l’admission à l’exercice des droits
électoraux sans payement de cens. Ce sont la, messieurs, les doctrines
radicales les plus absolues. Sans doute si l’on s’adressait à vous pour vous
signaler la détresse où se trouvent, par le manque de travail, certaines
parties de la population, il serait de votre devoir d’accueillir des pétitions
de ce genre avec empressement et de les renvoyer au gouvernement ; mais ce
n’est pas dans cette attitude qu’on se présente devant vous.
Par ces pétitions imprimées on préconise
le radicalisme le plus absolu ; on le fait même dans des termes que je puis
appeler menaçants. On dit, par exemple, que dans
notre petit royaume il se trouve un demi-million d’habitants poussés par la
pauvreté au désespoir et prêts à se livrer aux plus terribles dévastations.
(« Reeds zyn er in ons kleyne ryk meer dan een half milloen menschen door de armoede
tot wanhoop gedreven en bereyd om tot de verschrikkelykste verwoestingen uyt
te barsten, indien zy geene
spoedige hulp bekomen.)
Voila, messieurs, les termes dans
lesquels on s’adresse à vous, ce sont ces doctrines que l’on a formulées dans
des pétitions, non pas manuscrites, mais imprimées, je le répète, et répandues
dans la plupart des communes des Flandres. Eh bien, il ne faut pas encourager des
menées de ce genre.
Dans un grand nombre des
communes des deux Flandres… (Réclamations.)
Mais, messieurs, je les ai vues, j’ai reçu des rapports très détaillés, entre
autres de M. le général commandant la gendarmerie nationale, qui a fait une
tournée et qui m’a envoyé des renseignements dont il résulte que l’on a fait
partout des tentatives pour faire signer des pétitions de ce genre. On n’a pas
réussi partout, mais on a réussi dans quelques communes. Je le répète, il ne
faut pas encourager un mouvement de cette nature ; je le dis de nouveau, afin
qu’on ne donne pas à mes paroles une portée qu’elles n’ont pas ; si la pétition
se bornait à la première partie et si elle était conçue en termes convenables,
1e renvoi au gouvernement ne souffrirait aucun doute, mais, dans l’état actuel
des choses, je crois qu’il y aurait danger à admettre même la division proposée
par quelques honorables préopinants. Il faut passer à l’ordre du jour sur
l’ensemble, sauf aux pétitionnaires à renouveler leur demande en d’autres termes
et en se renfermant dans les limites que je viens d’indiquer.
M. Delehaye. - Messieurs, je dois dire que, quoique j’habite la campagne pendant
tout l’été, je n’ai pas eu la moindre connaissance de la pétition, je n’en ai
appris l’existence que par l’inspection du feuilleton. La partie dont M. le
ministre vient de vous donner lecture, m’engage à retirer la proposition que
j’avais faite.
- L’ordre du jour est mis aux voix et
prononcé.
_________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Le sieur Richin prie la chambre d’annuler la délibération prise par
le conseil communal de Charleroy, sur sa requête relative à l’élargissement
d’un sentier. »
Ordre du jour.
- Adopté.
_______________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Le sieur Stevens,
secrétaire communal d’Herffelingen, demande que des
mesures soient prises pour la conservation des anciens registres de
l’état-civil tenus par le clergé. »
Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
- Adopté.
_______________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Le sieur Brenier demande qu’une disposition législative ordonne la
publicité des archives de l’Etat, des provinces et des communes. »
Dépôt au bureau des renseignements.
- Adopté.
________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les sieurs Plasmans
et Fremy, héritiers de la dame Dewael,
réclament l’intervention de la chambre pour que le testament fait en leur
faveur reçoive son exécution. »
Ordre du jour.
- Adopté.
_______________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les bourgmestres des cantons de
St-Hubert et de Wellin demandent que les
administrations communales soient autorisées à procéder gratuitement aux ventes
de biens meubles qui appartiennent à la commune. »
Renvoi à MM. les ministres de
l’intérieur et des finances.
- Adopté.
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les sieurs Van Daehne et Cie, banquiers à
Renvoi à M. le ministre des finances
avec demande d’explications.
M. Verhaegen. - Messieurs, déjà plusieurs propositions ont été faites relativement à
l’objet de cette pétition, et il est de l’honneur de
- Les conclusions de la commission
sont mises aux voix et adoptées.
M. de Garcia,
rapporteur. - « Plusieurs électeurs du
canton de Frasnes demandent que le vote pour les
élections aux chambres ait lieu par canton. »
La commission propose le renvoi à M.
le ministre de l’intérieur.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, le ministère ne
peut pas accepter ce renvoi ; il y a même contradiction entre ces conclusions
et celles qui ont été prises, ou au moins proposées, dans une autre session
relativement à des pétitions de même nature.
M. Delfosse. - Je ferai remarquer à la chambre qu’elle est saisie depuis longtemps
d’un rapport de M. Dechamps, sur diverses pétitions relatives à la réforme
électorale. Ce rapport conclut à l’ordre du jour. Si mes souvenirs sont
fidèles, quelques-unes de ces pétitions sont en tout point
semblables à celle dont M. de Garcia vient de nous entretenir, et
cependant on demande pour celle-ci le renvoi au ministre de l’intérieur. Il
convient de joindre les deux rapports et de les discuter en même temps. La
décision de la chambre doit être uniforme pour toutes ces pétitions. Si la
chambre pense que la loi électorale est un palladium auquel il n’est pas permis
de toucher, elle doit les repousser toutes par l’ordre du jour ; si elle croit,
au contraire, qu’il y a lieu de modifier cette loi, elle doit les renvoyer
toutes à M. le ministre de l’intérieur.
Mon opinion sur la loi électorale est
bien connue, je suis de ceux qui pensent que rien ne justifie l’inégalité de
cens qu’elle établit entre diverses classes de citoyens, mais je dois attendre,
pour développer cette opinion, qu’il plaise à la chambre de mettre la question
à l’ordre du jour ; toute discussion serait aujourd’hui prématurée.
M. le président. - Faites-vous une proposition ?
M. Delfosse. - Oui, M. le président, je propose d’ajourner la discussion du rapport
de M. de Garcia jusqu’au moment où l’on s’occupera de celui de M. Dechamps.
- La chambre consultée décide que les
pièces resteront déposées au bureau des renseignements jusqu’au moment où il
sera statué sur les conclusions de la commission qui a été chargée de l’examen
des pétitions demandant des changements à la loi électorale.
_________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les marchands ambulants et
colporteurs de la ville d’Ath réclament contre les dispositions du dernier
arrêté sur le droit de patente. »
La commission propose le renvoi à M.
le ministre des finances.
- Adopté.
_________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les chefs de bureau des
commissariats d’arrondissement de Namur, Dinant et
Philippeville, demandent d’être considérés comme employés de l’Etat, salariés
directement par le trésor public, et admis à la pension de retraite. »
- La commission propose le renvoi à
M. le M. le ministre de l’intérieur.
Adopté.
________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les bourgmestre et échevins de
la ville d’Anvers réclament contre l’interprétation donnée par le département
de l’intérieur au dernier paragraphe de l’art. 56 de la loi du 8 janvier 1817,
concernant l’inscription, pour la milice nationale, des enfants alimentés et de
ceux qui se trouvent dans les établissements de bienfaisance. »
Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
- Adopté.
________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Les habitants de Ceroux-Mousty demandent qu’un
notaire soit nommé dans cette commune. »
Renvoi à M. le ministre de la
justice.
M. le ministre des finances (M. Mercier) - Il a été fait droit à cette demande.
- La chambre passe à l’ordre du jour.
________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Plusieurs habitants de
Bruxelles prient la chambre d’aviser au moyen de faire contribuer aux charges
publiques, la fortune de chaque propriétaire. »
Renvoi à M. le ministre des finances.
- Adopté.
_________________________
M. de Garcia,
rapporteur. - « Le sieur Van Baerlem réclame l’intervention de la chambre pour obtenir
une décision sur sa demande qui, par résolution de l’assemblée, a été renvoyée
au ministre de l’intérieur. »
Renvoi à MM. les ministres de
l’intérieur et des finances.
- Adopté.
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M. de Garcia,
rapporteur. - « Plusieurs habitants des
hameaux de Palings-Huyzen
et Kerkestraete, faubourg de la ville de Gand, se
plaignent de devoir payer des contributions foncières, personnelles et
mobilières aussi élevées que les habitants de cette ville. »
Dépôt au bureau des renseignements.
- Adopté.
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M. de Garcia,
rapporteur. - « Plusieurs habitants de Chefneux prient la chambre de rejeter la demande de
séparation faite par quelques habitants du hameau de Xavée.
»
Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
- Adopté.
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« Le sieur François Grenier, docteur
en droit, à Brugelette, propose des mesures
préventives, concernant le cens électoral. »
Renvoi à M. le ministre de
l’intérieur.
- Cette pétition étant devenue sans
objet par suite de la loi du 1er avril 1843, la chambre passe à l’ordre du
jour.
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M. Huveners, rapporteur. -
« Le sieur J.-B. Dubois réclame les arriérés de sa pension militaire. »
Renvoi à M. le ministre de la guerre.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
« La veuve Desterbecq, née Duquesne, réclame
l’intervention de la chambre, pour que M. le ministre des finances statue sur
sa demande de pension. »
Ordre du jour.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
« Le sieur Abas, ancien commis aux écritures du corps des ambulances,
demande une indemnité du chef de suppression d’emploi, par suite du traite de
paix. »
Renvoi à M. le ministre de la guerre.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
Le sieur Gérard Tobbeck, de Bruxelles, réclame
l’intervention de la chambre pour obtenir une place. »
Ordre du jour.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
« Plusieurs bateliers de Liége présentent des observations à l’appui de divers
travaux qu’on propose d’exécuter à
Renvoi à M. le ministre des travaux
publics.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
« Le sieur Broglia, ex-capitaine, demande qu’on
lui accorde la demi-solde ou une pension. »
Renvoi à M. le ministre de la guerre.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
« Le conseil communal de Wonck et les autorités
des communes environnantes, demandent que la route de Liège à Maeseyck passe
par Wonck au lieu de Bassenge. »
Renvoi à M. le ministre des travaux
publics.
- Adopté.
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M. Huveners, rapporteur. -
« Le sieur Paquay, desservant de la paroisse de Sanzelle, demande un subside pour la reconstruction de la
tour de l’église de cette commune. »
Renvoi à M. le ministre de la
justice.
- Adopté.
Motion d’ordre
M. le ministre des travaux publics (M. Dechamps) - Messieurs, j’étais absent, lorsque la chambre a mis à l’ordre du jour
de mardi prochain le projet de loi sur les relais. Mais vous savez que la
section centrale a apporté au projet primitif du gouvernement une modification
à une des bases du projet. Depuis mon arrivée au ministère, j’ai fait prendre
par les directeurs provinciaux des renseignements importants et détaillés sur
cet objet, afin de pouvoir éclairer mon jugement et celui de la chambre.
Messieurs, ces renseignements me sont parvenus en partie et je pense que dans
un bref délai je pourrai les compléter. Je demande donc à la chambre de revenir
sur sa décision première et de ne pas fixer actuellement d’ordre du jour pour
ce projet de loi.
Du reste, je m’empresse de déclarer
que je n’entends pas proposer un ajournement indéfini ; je prends l’engagement
vis-à-vis de la chambre de lui présenter ces renseignements dans un temps très
rapproché. C’est donc un ajournement à courte date que je lui propose.
- La proposition de M. le ministre
des travaux publics est mise aux voix et adoptée. En conséquence la chambre ne
fixe pas, quant à présent, d’ordre du jour pour le projet de loi dont il
s’agit.
M. le ministre des finances (M. Mercier) annonce qu’il aura à présenter plusieurs projets de loi dans la séance
de demain.
- La chambre décide qu’elle se réunira
demain en séance publique à midi et qu’elle s’occupera de demandes en
naturalisation.
La séance est levée à 4 heures et
3/4.