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d’intention
Chambre
des représentants de Belgique
Séance du lundi 14 février 1842
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre, notamment pétition
relative à la reconnaissance d’un diplôme acquis en France pour la profession
d’avocat (Rodenbach)
2) Convention de navigation entre
3) Communication du gouvernement relative à la
nomination d’un nouveau ministre de la guerre (Buzen, de Liem)
4) Projet de loi tendant a ouvrir un
crédit au département de l'intérieur pour l’acquisition et l'exploitation du
steamer le British Queen (navigation transatlantique), pour les exercices 1841
et 1842 ((+ comptabilité de l’Etat) Osy, (+politique
commerciale du gouvernement) Liedts, Osy,
Nothomb)
(Moniteur
belge n°46, du 15 février 1842)
(Présidence de M. Fallon)
M. de Renesse procède à l'appel nominal à 2 heures.
M.
Scheyven donne
lecture du procès-verbal de la dernière séance ; la rédaction en est adoptée.
M. de Renesse communique les pièces de la correspondance :
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Pierre-Gaspard Vandenende, fabricant de chandelles â Tongres, né à Breda,
habitant
« Le
sieur Maximilien Gérard, né le 10 décembre 1766, à Antweiler,
duché d'Arenberg, habitant
« Le
sieur Pierre-Charles Duthil, instituteur à Bruxelles,
né à Rouen, demande la naturalisation. »
« Le
sieur Antoine-Jean-Joseph Fain, pharmacien à Huy, né
a Lyon et habitant
« Le
sieur Jacques-François-Jules-Louis Fain, médecin à
Huy, né à Lyon et habitant
« Le
sieur Nicolas Joseph-Désiré Marchai, milicien de 1836, au régiment des guides,
né à Givet (France), demande la naturalisation. »
-
Ces pétitions sont renvoyées à M. le ministre de la justice.
______________________
« Le
conseil communal de Lommel, province de Luxembourg, demande que cette commune
ne soit pas distraite du canton de Peer. »
« Le
conseil communal de Petit-Rechain, arrondissement de
Verviers, ressortissant au canton de Limbourg, demande que cette commune soit
réunie à celui de Verviers. »
« Les
administrations communales de Meeuwen et Ellicom,
faisant partie du canton de Bree, adressent des observations en faveur de la
réunion projetée de ces communes au canton de Peer. »
« Le
conseil communal de Duffel demande le maintien de la justice de paix de ce
nom. »
« Les
bourgmestre et échevins de Merbes-le-Château
demandent le maintien de la justice de paix de ce nom. »
« Les
administrations communales de Villers-le-Gambon et de
Vadecée demandent que ces communes ne soient pas
distraites du canton de Florennes. »
« Les
conseils communaux de Châtelineau, Bouffioulx, Gerpinnes, Presles, Gougnies,
Villers-Potterie, Aiseau,
Pont-de-Loup, Joncret, Acoz
et Farciennes demandent que la justice de paix de Châtelet soit rétablie par la
nouvelle loi de circonscription cantonale. »
« Les
administrations communales de Thy-le-Château, Berzée, Fraire et des notables de
ces communes, ainsi que ceux de Chastres demandent le
maintien de la justice de paix de Walcourt. »
« Même
pétition du conseil communal de Thy-le-Bauduin et des
conseils communaux et notables d'Hemptinne, d'Hancinelle et de Castillon-Mertenne. »
-
Ces pétitions sont renvoyées à la commission chargée de l'examen du projet de
loi sur la circonscription cantonale.
________________________
« Des
négociants et marchands de la ville de Mons et de la commune de Saint-Ghislain
demandent une loi répressive des abus du colportage.
-
Renvoi à la commission chargée de l'examen du projet de loi sur la matière.
________________________
« Le
conseil communal de la ville de Verviers réclame contre le projet de loi qui tend
à attribuer au Roi la nomination des bourgmestres hors du conseil
communal. »
-
Renvoi à la section centrale chargée de l'examen du projet.
________________________
« Le
conseil communal de la ville de Turnhout renouvelle les observations qu'il a
adressées à la chambre le 12 janvier 1840, contre le projet relatif à la
répression de la fraude en matière de douanes. »
-
Renvoi aux deux sections centrales réunies chargées de l'examen du projet.
________________________
« Les
administrateurs de la fabrique royale de tapis de Tournay adressent des
observations sur le mode vicieux d'après lequel sont fixés les droits en
Belgique sur les tapis étrangers. »
« Le
sieur Ch. Deschietere, à Caprycke,
adresse des observations sur les dispositions vicieuses de la loi relative à la
chasse et propose un nouveau projet de loi sur cette matière. »
« Le sieur Aimé-Jacques-Frédéric-Joseph Roelands, Belge, domicilié à Paris et résidant actuellement
à Bruxelles, licencié en droit, demande à pouvoir exercer en Belgique comme avocat
avec le diplôme qui lui a été accordé en France. »
-
Ces dernières requêtes sont renvoyées à la commission des pétitions.
M. Rodenbach. - Je demanderai, messieurs, que la commission soit
invitée à faire un prompt rapport sur la pétition du sieur Roelands
; plusieurs jeunes gens se trouvent dans le même cas que ce pétitionnaire. Je
ferai remarquer que souvent, lorsqu'on demande un prompt rapport sur une
pétition, le rapport se fait cependant attendre pendant plusieurs mois. Je
demande qu'il n'en soit pas de même cette fois et que la commission veuille
bien s'occuper immédiatement de cette pétition.
La
proposition de M. Rodenbach est adoptée.
______________________
« Des
propriétaires et exploitants de moulins à eau, habitant pour la plupart des
communes du Limbourg, demandent à être indemnisés du chômage de leurs moulins
pendant les années 1831 à 1838, occasionné par des circonstances politiques.
-
Dépôt sur le bureau pendant la discussion du projet de loi sur les indemnités.
CONVENTION DE NAVIGATION ENTRE
Par
dépêche en date du 5 février, M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Briey) annonce à la chambre qu'il dépose sur le bureau une expédition de la
convention de navigation conclue entre
Pris
pour information.
Par
dépêche en date du 14 février, M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Briey) transmet à la chambre une copie authentique de l'arrêté royal du 6 de ce
mois, qui nomme M. le général-major de Liem ministre de la guerre, en remplacement
de M. le général Buzen.
-
Pris pour notification.
________________________
M.
Dolez écrit à
la chambre pour l'informer qu'une indisposition l'empêche de se rendre à la
séance.
PROJET DE LOI TENDANT A
OUVRIR UN CREDIT AU DÉPARTEMENT DE L'INTERIEUR POUR L'ACQUISITION
ET L’EXPLOITATION DU STEAMER LE BRITISH QUEEN, POUR
LES EXERCICES 1841 ET 1842
Discussion générale
M.
Osy. -
Messieurs, nous allons nous occuper aujourd'hui d'une affaire très grave, tant
pour l'objet lui-même que par les conséquences qu'il peut amener et surtout
d'un antécédent très fâcheux et qui doit donner des inquiétudes aux chambres et
à la nation, si le gouvernement peut ainsi violer et éluder les lois votés, et
je vous avoue que, d'après cela, je ne vois plus aucune garantie.
Il
ne doit rester du doute : personne, après avoir lu le rapport de la section
centrale sur la loi du 29 juin 1840, des déclarations faites au sein de la
section centrale par le ministre de l'intérieur, par les discussions que cette
loi a amenées à cette chambre et même par l'avis inséré dans le Moniteur des
5 et 7 juillet 1840, pour faire un appel aux négociants armateurs et
capitalistes, qu'il était bien entendu que le gouvernement était autorisé de
donner annuellement le subside de 400 mille francs pour favoriser un
établissement d'un service de bateaux à vapeur, mais que jamais le gouvernement
aurait pu acheter des bateaux et devenir l'armateur et exploitant, et je suis
persuadé qu'aucun ministre passé ou actuel pourra démontré qu'on n'a pas
entièrement éludé la loi et même je puis dire violé et agi comme s'il n'y avait
pas de loi.
Ensuite
le paiement fait de 1800 mille francs pour l'achat du British Queen sans
contrôle de la cour des comptes et en puisant tout bonnement dans le trésor et
contre toutes les règles de la comptabilité, prouve que nous sommes dans un
système vicieux et doit donner à la nation les plus grandes inquiétudes ; car,
de cette manière, un ministre a droit de disposer d'une grande partie de
l'encaisse et trouver moyen de cacher cette dépense pendant plusieurs années,
puisqu'il n'y a aucun contrôle et jusqu'enfin de l'un ou l'autre jour, on
puisse trouver que nos caisses ont un grand déficit.
Loin
de moi d'avoir des inquiétudes sur les ministres actuels ; mais nous devons
travailler pour l'avenir et faire des lois et des règlements qui ne donnent pas
des inquiétudes et ce qui vient de se passer prouve que nous devons sans retard
forcer le gouvernement de nous présenter une bonne loi de comptabilité ; car,
sans cela, si jamais il arrive malheur, la nation pourra à juste raison nous
rendre moralement responsable, et pour ma part, je ne veux pas la partager et à
toute occasion je ferai tous mes efforts pour engager mes honorables collègues
à se joindre à moi pour sortir de ces craintes continuelles : ce qui vient de
se passer doit ouvrir les yeux, aux plus incrédules.
Absent
de cette chambre depuis huit ans, je me disais toujours, quand je craignais que
le gouvernement allait faire des dépenses hors du budget : Il n'y a pas
d'inquiétudes, la cour des comptes est là et c'est la garantie qu'on ne pourra
pas dépasser les allocations du budget ; aujourd'hui je suis malheureusement
éclairé par une dépense faite pour un achat bien malheureux et je vous avoue
que maintenant je suis très craintif et méfiant ; et tout ce que nous faisons
ici, lois, budgets, n'est qu'un travail inutile, et messieurs les ministres ont
trouvé moyen de tout éluder, et la nation, si nous n'y mettons ordre, peut non
seulement nous taxer de légèreté, mais dire que nous sommes sans énergie et
sans volonté et ne plus avoir confiance dans la représentation nationale et
dire que toutes nos réunions ne sont que pour la forme et que MM. les ministres
ont trouvé le moyen de ne faire aucune attention à nos délibérations.
Dans
cette session nous avons déjà eu plusieurs cas qui prouvent qu'il y a un
parti-pris et qu'on a trouvé la route d'éluder nos votes, et cela ne finira pas
avant que nous donnions un exemple de sévérité ; car on nous force toujours de
voter des dépenses faites en nous disant : Ce sont des faits accomplis ; et ne
perdez pas de vue que, quand on veut cacher à la chambre et à la nation des
dépenses non votées, on a bien soin de tenir tout bien secret, jusqu'à ce qu'il
n'y a plus de remède au mal. Je vous le prouverai par ce qui s'est fait pour
l'achat du steamer.
Avant
d'aborder cette question, je dois vous dire que je sais que non seulement on
élude nos votes du budget en disposant du trésor sans contrôle de la cour des
comptes, mais même je sais qu'on dispose sur des caisses de receveur et qu'on a
encore là trouvé moyen de cacher des dépenses à la cour des comptes. On dispose
sur ces receveurs pour des dépenses non autorisées, et tous les ans, on donne
ordre aux receveurs de reporter les mandats acquittés comme écus en caisse au
1er janvier, de manière que vous avez là encore un encaisse fictif. Je connais
un receveur où ces opérations irrégulières se font depuis plus de 7 ou 8 ans et
nous ne trouvons pas un ministre des finances qui ait le courage d'arrêter et
apurer ces irrégularités. J'espère que M. le ministre des finances actuel
mettra ordre à ces irrégularités et prendra des mesures pour qu'elles ne
puissent plus se renouveler.
Si
je ne craignais pas de compromettre l'existence des receveurs, je pourrais en
nommer où cela s'est fait, et à cette occasion je regrette que les membres de
la chambre ne soient pas autorisés à puiser leurs renseignements chez les
receveurs, comme nous pouvons le faire à la cour des comptes.
Véritablement
nous ne pouvons pas avoir un mode de comptabilité plus vicieux que celui que
nos ministres sont parvenus à créer depuis 10 ans si où nous n'y mettons ordre
l’un ou l’autre jour, nous pourrons entendre parler de grands malheurs.
Je
reviens maintenant à l'objet qui nous occupe. Tout le monde doit être d'accord
que la loi du 29 juin 1840 n'autorisait pas le gouvernement à acheter un ou des
bateaux à vapeur ; le ministre de l'intérieur, dans le sein de la section
centrale, s'est formellement engagé à ne pas le faire, et la loi est assez
claire en disant favoriser, qu'il ne pouvait pas être question de
devenir acheteur et exploiteur.
Ainsi
le gouvernement n'était pas autorisé à capitaliser les 400,000 fr., et vous
voyez dans le rapport de M. le ministre de l'intérieur, § 7, page 11, qu'il dit
:
«
La loi autorise une dépense annuelle de 400,000 fr., mais elle n'autorisait pas
le gouvernement à émettre aucune obligation de quelque nature que ce fût.
« Les
obligations créées jusqu'à ce jour, sont toutes revêtues du visa de la cour des
comptes et ce collège refuserait indubitablement d'apposer son visa sur des
obligations créées dans un but spécial et non autorisées par la loi ; or y a-t-il
des obligations valables sans le visa de la cour des comptes ?
«
Il y a donc impossibilité pour le trésor d'acquitter le prix d'achat ;
il fallait le visa de la cour des comptes, qui ne pouvait l'accorder en
l'absence d'une loi. »
Voilà
certainement un raisonnement très juste et je ne conçois pas quelle fatalité a pu
pousser le ministère a s'écarter de ces principes et d'avoir puise dans la
caisse du pays, sans que la cour des comptes ait eu à viser le mandat ; et,
comme nous devons croire qu'on ne nous a rien caché en faisant le rapport de
cette affaire, que j'appellerai monstrueuse, tant dans son exécution que dans
ses conséquences, je dois encore vous exprimer tout mon étonnement, que tout se
soit fait sans arrêté royal et rapport motivé au Roi ; au moins le chef du
gouvernement aurait pu se refuser à faire agir les ministres contrairement à
toutes les lois et règlements et on aurait pu arrêter ainsi le mal.
M.
le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Il y a eu un arrêté royal.
M.
Osy. - Il n'a
pas été publié. (L'orateur reprend en ces termes) :
II
est vrai que les ministres auraient pu insister, mais alors il en serait
résulté une question de cabinet, si les membres n'avaient pas voulu céder à
l'évidence.
Vous
voyez, messieurs, que jamais affaire n'a été traitée plus légèrement ; on fait
signer au roi des arrêtés les plus insignifiants, comme achats de tableaux,
etc., et pour une affaire comme celle-ci on se passe de sa signature !! C'est
vraiment agir d'une manière trop légère et manquer à toutes les convenances.
Je
regrette que M. le ministre n'ait pas publié en entier les propositions de la
société anversoise des bateaux à vapeur, mais j'ai fait venir d'Anvers toute la
correspondance et je l'ai communiqué à la section centrale, et, si vous le
permettez, je la déposerai pendant les discussions au bureau.
Vous
y verrez, messieurs, que cette société avait fait au gouvernement des
propositions très avantageuses et le ministre dit lui-même qu'elles étaient les
plus favorables, mais je vous prie de lire la fin de la lettre du 4 juin 1840.
Ainsi avant l'adoption de la loi (la loi a seulement été votée le 13 juin par
la chambre des représentants) la société disait clairement :
« Nous
croyons donc nous flatter, M. le ministre, que ces considérations, jointes à
celles contenues dans notre précédente requête (elle était du 16 mai 1840,
veuillez bien noter les dates) feront accueillir favorablement nos
propositions, et que, modifiant le projet primitif, le gouvernement, d'accord
avec les chambres, acceptera notre demande d'une garantie éventuelle de 4 p. c.
et 1 p. c. d'amortissement sur le capital de 6 millions sur les bases que nous
avons proposées. »
Après
l'adoption de la loi, le 4 août 1840, la société disait encore clairement à M.
le ministre la même chose, et comme elle n'est pas très longue, permettez-moi
de vous donner lecture de toute la lettre.
« 4
août 1840.
« Après
plusieurs réunions de la direction de notre société, dans lesquelles nous avons
examiné et discuté toutes les combinaisons possibles et fait tous les calculs,
afin de pouvoir vous faire des propositions pour la navigation transatlantique,
en y joignant les navires que nous avons pour alimenter cette nouvelle ligne en
voyageurs et en marchandises, et dont l'un, l'Antwerpen, pourrait
immédiatement commencer le service de New-York, ayant la conviction qu'il
pourrait très bien faire ce trajet jusqu'à la mise en activité des bateaux à
construire, nous avons le regret de devoir vous annoncer que, malgré le désir
prononcé que nous en avions, nous croyons qu'il est impossible de vous faire
des propositions rentrant dans les termes de la loi adoptée par les
chambres. »
Cette
lettre devait éclairer le gouvernement, et ainsi à votre réunion de novembre
1840 le ministre d'alors devait vous dire l'impossibilité d'exécuter la loi,
mais vous proposer un léger changement, c'est-à-dire vous demander 300 mille
francs pendant 20 ans, soit 6,000,000 francs, au lieu de 400 mille francs
pendant 14 ans, soit 5,600,000 francs et en ayant pour garantie les 5 navires
existant à Anvers et qui pouvaient faire le succès des ports d'Europe, pour
vous amener voyageurs et marchandises, et en outre, veuillez bien remarquer que
si les lignes de New-York et d'Europe ne perdaient pas annuellement les 500
mille francs, le gouvernement n'avait pas la totalité à payer et en accordait
en cas de bénéfice 1/4 au gouvernement, après avoir mis de côté 1/4 pour
amortissement extraordinaire, 1/4 pour fonds de réserve et on n'accordait que
le dernier 1/4 aux actionnaires.
Veuillez
noter encore, messieurs, que la société des bateaux à vapeur à Anvers est
dirigée par des personnes qui n'ont institué cette société que dans l'intérêt
du pays, et leur désintéressement allait si loin, qu'ils disaient dans leur
lettre du 4 juin 1840 :
« Nous
ne voulons aucune commission sur le produit bruit des frets à faire, ce qui
pourrait se monter à des sommes énormes, mais seulement une faible part dans
les bénéfice réalisés, auxquels même pour nous personnellement, nous sommes
prêt à renoncer, dans l'intérêt public, ne voulant maintenir cette stipulation
que pour nos successeurs et ce uniquement quand le succès sera venu constater
l'avantage de nos combinaisons, qui seront, en tout cas, utiles à la généralité
du pays, nous soumettant entièrement au contrôle et à l'impulsion du
gouvernement comme le porte notre première requête. »
Je
dois y ajouter, messieurs, et l'honorable M. Liedts devra se rappeler, que la
direction, sur quelques observations de M. le ministre des travaux publics, a
ajouté verbalement :
« Nous
vous donnons notre parole d'honneur, de rester à la tête de la direction,
jusqu'à l'entier achèvement et mise en mer des navires transatlantiques. »
Convenez,
messieurs, que le gouvernement ne pouvait pas avoir des propositions plus
loyales et avantageuses et qu'avec un léger changement à la loi le but tant
désiré était rempli.
Je
ne veux pas rechercher les causes pour quoi on a traité ces propositions avec
autant de dédain, si je puis m'exprimer ainsi ; il faut que, dès cette époque
(avant l'adoption de la loi ), on ait déjà eu en vue d'autres idées et que les
appels publics n'ont jamais été très sérieux, mais je déplore dans l'intérêt du
pays et surtout dans ceux du ministère de 1840, qu'on n'ait pas assez
approfondi les propositions désintéressées qu'on a fait alors, car, dans ce
cas, les ministres auraient agi dans toutes les prescriptions de la loi, et
vous n'auriez pas aujourd'hui à prendre en considération, ce qu’il y a à faire
avec un meuble très coûteux et qui vous mènera à des dépenses que je redoute,
si vous voulez l'utiliser et approuver l'achat.
A
Anvers, où on sait parfaitement ce qui se passe dans les pays voisins, on a eu
depuis le mois de février 1841 des inquiétudes, que le gouvernement voulait
devenir acquéreur des grands steamers, mais tout était tenu tellement secret au
ministère qu'on ne connaissait pas au juste les intentions du gouvernement ;
mais lorsqu'ou a su les achats du Président et British-Queen, il n'y a eu chez nous
qu'un cri d'indignation, car tout le monde (pendant que le gouvernement écrivait
à M. Van de Weyer de bien s'informer pourquoi la société vendait) savait qu'on
vendait parce que la société était ruinée et que des steamers de cette
dimension ne convenaient pas à la navigation transatlantique ; comme voulait le
faire
On
espérait toujours à Anvers que l'achat ne pourrait pas se consommer, comme vous
n'aviez voté que 400 mille fr. pour favoriser une navigation, mais nous étions
trop peu instruits de l'esprit inventif des ministres pour éluder la loi. Nous
nous disions : la cour des comptes est là ; elle ne visera pas des annuités et ne
visera pas un mandat de 5,600,000 fr., car il ne se
trouve que 400 mille fr. au budget. - Nous étions assez simples pour avoir
cette confiance et cette sécurité, et jamais on n'aurait pu se douter d'une
pareille irrégularité, pour ne pas dire plus, que de payer 1,800,000 fr, sans
arrêté royal à l'insu de la cour des comptes et en puisant tout bonnement dans
le trésor.
Le
public avait confiance dans la moralité ministérielle, tandis qu'aujourd'hui
que le voile est tombé, nous devons être dans des défiances continuelles, et il
est malheureux pour un pays, quand la confiance est détruite et qu'il faut
redouter tous les jours qu'on puisse dilapider et trouver moyen de vider nos
caisses, sans aucune autorisation.
Il
est fâcheux de devoir vivre dans une défiance continuelle et c'est peut être un
des plus grands malheurs de cette affaire scandaleuse.
Maintenant
que j'ai prouvé que l'achat du British Queen s'est fait contrairement
aux lois, en violant toute règle de comptabilité, il nous reste a voir ce qu’il
y a à faire.
Ce
qui serait le plus conséquent, c'est dire aux ministres actuels : Voici une
véritable responsabilité ministérielle ; débrouillez-vous avec les anciens ; et
celui ou ceux qui ont agi contrairement aux lois, doivent garder ce fameux
steamer, et nous vous chargeons de poursuivre la rentrée des fonds illégalement
sortis de nos caisses, et si la fortune de tous ne suffit pas, nous devons
porter comme dépense et comme perte ce que nous ne pouvons pas recouvrer.
Il
est vrai que c'est le moyeu extrême, et espérant que nos discussions
d'aujourd'hui seront une leçon sévère pour les ministres présents, passés et
futurs, je veux bien consentir à voter les 1,800 mille fr., prix d'achat, si
l'on nous demande un bill d'indemnité, c'est-à-dire que nous puissions voter
après un blâme sévère.
Mais
si on ne nous demande pas un bill d'indemnité, je suis très décidé à refuser
d'accorder la somme qu'on nous demande. MM. les ministres nous forceront de
recourir au premier moyen, c'est-à-dire que les coupables auront à restituer
au trésor les fonds qui sont sortis pour cette déplorable affaire.
Je
vous disais, messieurs, que je ne puis concevoir comment on peut donner des
instructions pour connaître la raison qui engagerait la société anglaise à
vendre les bateaux à vapeur ; jamais il n'est venu à l'idée d'un
acheteur de pouvoir en être exactement informé, on aurait dû beaucoup plus tôt
être effrayé de ce qu'une société veut vendre deux navires avec une perte d'un
million de francs, et cela aurait dû mettre les acheteurs en garde.
J'ai
ici le compte-rendu de la société anglaise des bateaux à vapeur, que je
déposerai aussi, avec votre permission, au bureau, et vous y verrez que tout le
capital de la société, de liv. 67,000, est perdu, et qu'elle doit encore une
somme de liv. 9,500 ; perte totale liv. 76,500, ou 1,920,000
fr. Mais il est vrai qu'elle a perdu 1 million sur la vente du British
Queen, et sur ce que le Président était moins assuré que son prix de
construction.
Reste
toujours une perte de près d'un million de francs, et
Et
notez que
liv.
61,600 pour transport de voyageurs,
14,000
pour marchandises,
6,300
pour paquets et lettres.
Soit
environ 82,000 liv., ou par voyage 9,100 liv. ou 227,500 fr., tandis que plus
tard je vous prouverai qu'en établissant tout au plus beau, nous ne pourrons
pas calculer sur une recette brute par voyage, de 100,000 fr.
Avant
de finir cet objet, je dois attirer votre attention, et le gouvernement fera
bien pour la morale publique de s'informer, d'un objet assez important, qui m'a
frappé dans la reddition du compte de la société anglaise.
On
y dit que le montant net reçu pour
On
sait positivement que les assureurs ont payé pour le Président liv. 60,000
Donc
les actionnaires n'ont reçu pour
Nous
l’avons payé liv. 70,000 ; plus 2 p. c. de commission ou encore une dépense de
35,000 fr., ainsi il reste à renseigner aux actionnaires ou à nous liv. 4,100,
ou plus de 100,000 fr. Je suis en correspondance avec les actionnaires de Cork
en Irlande, qui ont intérêt comme nous de connaître la vérité ; et si je reçois
des données exactes, je les communiquerai à la chambre. Je n'accuse personne,
j'attire seulement votre attention sur un fait qui m'a frappé, ainsi que les
malheureux actionnaires qui ont perdu toute leur mise.
Ce
qui m'a encore frappé dans la correspondance de notre ambassadeur à Londres,
c'est son insistance de pousser notre gouvernement à conclure cette malheureuse
affaire, et à pouvoir donner le conseil (lui qui connaît parfaitement nos
institutions, ayant coopéré à la constitution, qui doit ainsi connaître l'art.
115) de ratifier cet achat, de manière à rendre inutile tout recours
ultérieur à l'intervention des chambres, convaincu que cette affaire doit
rester dans le domaine du pouvoir exécutif.
Je
conçois que, si nous avions deux bateaux à vapeur et faire ainsi huit voyages
par an, nous pourrions attirer le transit de marchandises d'Allemagne et de
Suisse, c'est-à-dire des objets de valeur comme soie, draps, etc., mais jamais
pour former une cargaison pleine, car les marchandises d'encombrement ne peuvent
payer un fret de 100 francs par tonneau, et nous avons assez de navires à
voiles américains et autres qui quittent nos ports sur lest, et qui se
contentent d'un fret de 50 fr. et moins pour des marchandises d'encombrement,
comme zinc, verres à vitres, garances etc., il ne faut pas cette grande
accélération, ce n'est utile que pour des objets de valeur et vous n'aurez
jamais par voyage pour remplir 200 tonneaux ou 200,000 kil.
Mais
après la perte du Président le gouvernement pouvait encore très bien rompre
et il devait le faire, Car ce n'est pas en faisant 4 voyages par an que nous
pourrons attirer les affaires, d'autant plus qu'avec un navire il faut compter
sur les accidents imprévus, et si pendant un an ou seulement partie d'une
année, vous devez stater la navigation, vous perdrez le peu de relations que
vous aurez pu former. L'étranger, et je veux vous parler d'un événement certain
et que vous voyez dans un des certificats des ingénieurs de l'amirauté, c'est
le renouvellement des chaudières, qu'il faudra dans 12 ou 18 mois, et c'est une
opération qui peut vous faire perdre toute une campagne.
Le
bateau à vapeur l'Antwerpen après 3 ans de navigation, avait besoin de
chaudières ; elles ont éte commandées à la société du
Renard en mai 1841 et seulement en décembre il aurait pu prendre la mer. Si la
société n'avait pas eu un second bateau, toute l'année 1841 aurait été perdue
ainsi que les relations que nous avions pu former en concurrence avec la
société anglaise.
Les
chaudières de
Je
ne conçois pas comment un homme sérieux comme M. Van de Weyer a pu dire au
gouvernement, toujours pour le pousser à ratifier le dernier traité, et voyez à
ce sujet sa lettre du 23 mars 1841, page 33 du rapport :
« Il
doit infailliblement résulter de cette prompte exécution de la loi, non
seulement la réalisation du principe qui l'avait dictée, mais encore le
monopole pour
C'est
une exagération à laquelle on ne devait pas s'attendre d'un homme d'Etat aussi
distingué, car quoique l'Angleterre n'ait, heureusement pour elle, plus les
deux grands steamers, les Anglais n'auront pas recours à nous pour l'expédition
de leurs marchandises, elle a bien d'autres bateaux à vapeur, et ses navires à
voiles, qui souvent ont déjà fait le trajet à New-York de 15 à 20 jours, et ce
terme devient maintenant presque régulier, à cause du grand perfectionnement
dans leurs constructions.
Ainsi
cet espoir de M. Van de Weyer ne pourra faire effet sur l'esprit de personne de
nous. Et ce qu'il disait encore un peu plus loin dans sa lettre du 23 mars,
page 34 :
« Ne
doit-elle point détacher de l'Angleterre une certaine partie de la consommation
américaine, qu'elle trouvera désormais chez nous avec une plus grande rapidité
d'exécution de ses ordres, » est encore une exagération de plus.
Nous
pouvons attirer des marchandises de valeur d'Allemagne et de Suisse, peut-être,
mais ne comptez pas que les Français, et encore moins les Anglais, feront la
moindre expédition par Anvers, surtout avec 4 voyages ou tous les deux mois, et
maintenant qu'on a gaspillé tant de fonds, je pense que les chambres ne seront
plus tentées d'en voter d'autres pour la navigation transatlantique, et quand
on vous demandera de l'argent pour le commerce et la navigation, le ministère
ne l'obtiendra plus, et c'est peut-être un des plus grands malheurs de cette
affaire déplorable.
Soyez
persuadés, messieurs ; que la société anglo-américaine vendait ses deux grands
steamers parce qu'elle était ruinée après 12 voyages, et parce que ces navires
n'avaient pas répondu à l'attente, qu'ils étaient beaucoup trop grands et que
les frais d'exploitation étaient trop considérables, et qu'il était prouvé
qu'on ne pouvait lutter contre les bateaux de 1200 tonneaux, tant pour la
vitesse que pour les frais d'exploitation.
M.
Van de Weyer disait encore, à plusieurs reprises, que la non-ratification
serait compromettre le nom belge en Angleterre ; c'était un traité fait avec
des particuliers, et un nouveau ministère voyant que tout était traité
contrairement à la loi, aurait, d'après moi, prouvé par la non-ratification,
que les intérêts du pays lui étaient chers, et la société anglaise, tout en
regrettant de ne pas avoir vendu, n'aurait pu que vous approuver de nous
débarrasser d'une affaire désastreuse.
Car
je puis vous donner lecture de lettres de Londres qui me disent que cette
affaire est jugé comme décidément mauvaise et que le
navire est trop grand pour pouvoir donner de bons résultats.
Les
puissances étrangères, en ne ratifiant pas le traité des 18 art., et
L'intervention
de l'amirauté ne devait pas non plus être un obstacle, comme elle n'était pas
partie intéressée et donnait seulement son avis par complaisance ; mais à cette
occasion, je dois vous dire que certainement les avis des ingénieurs de
l'amirauté sont très respectables, mais ils devaient donner leurs avis sur les
propriétés de leurs compatriotes, et je suis étonné, j'en fais ici un nouveau
grief au ministère, que vous n'ayez pas eu assez de confiance dans les lumières
des experts belges, car même jusqu'aujourd'hui, on n'a pas fait faire la
moindre expertise.
Cependant
nous avons dans nos ports de mer des personnes très capables de donner leur
avis désintéressé et impartial, même pour la sûreté des voyageurs que nous
aurons à transporter et pour couvrir toute notre responsabilité morale, je ne
voudrais pas tarder d’ordonner une expertise belge, en s'adressant à des
personnes qui connaissent parfaitement cette partie et, sur lesquelles vous
pourrez compter.
Je
vous fais principalement cette observation après avoir lu avec attention le
certificat de M. R. Abetheel, que vous trouverez page
48 du rapport où il dit, en parlant de
Ce
manque de confiance dans les lumières de gens expérimentés en Belgique, dont encore
plusieurs ont été attachés à la marine française du temps de l'empire, n'a pas
peu surpris les personnes qui ont approfondi cette malheureuse affaire, et
j'aurais voulu que votre section centrale eût pu rester plus longtemps à
Anvers, et on aurait reçu l'assurance que pas dix personnes approuvent cet
achat et qu'il est devenu la risée, du public et même du peuple.
Ce
que la section centrale doit avoir appris de deux commissaires anversois l'aura
assez instruite de ce qu'on en pense.
Il
ne faut pas écouter seulement les personnes qui ont prôné et dirigé cette
affaire.
Pour
moi, j'ai consulté des gens de l'art, car d'après les bruits qui courent en
Angleterre depuis que le British Queen est belge, j'ai de grandes
inquiétudes, si je voyais, par exemple, des émigrants, s'y embarquer (car les
voyageurs qui ont de la fortune iront certainement par l'Angleterre), on
prendrait peut-être ces émigrants à bon compte, pour au moins avoir quelque
fret, et voici ce qui m'a été dit.
Pour
obtenir toute la confiance qu'exige cette navigation, il faut que tous les
moyens de sécurité pour la mer soit bien démontrés, non par des enquêtes
insignifiantes, mais par des visites d'experts irrécusables, des hommes de
l'art, des ingénieurs capables d'apprécier la construction du navire, des
machines et de l’armement. Des ingénieurs experts ont déjà visité le bâtiment
en Angleterre, mais ont-ils pu faire un examen général du corps du navire,
notamment de ses fonds ? Tout porte à croire que cette visite, cet examen n'a
pu se faire que superficiellement, par la raison qu'au moment de l'opération de
ces experts, le fond du navire contenait encore une quantité assez considérable
de marchandises et de charbons qui ne permettait pas de voir si la partie
principale, la fondation du bâtiment, était en bon état de navigabilité, s'il y
avait apparence de rupture dans les fonds, comme les hauts du bâtiment semblent
l'indiquer, par les défectuosités de la tonture, par l'exhaussement des ponts
vers le milieu, ce qui constitue ce que les marins appellent un navire
arqué, ou si le navire n'avait pas déjà un commencement de rupture dans le
milieu de varangues, comme on pourrait le croire par une sorte d'affaissement
des côtés, vers le milieu, qui fait penser que les bouts de varangues et genoux
de fond doivent avoir subi un abaissement qui doit placer le dessous des empatures dans l'alignement du dessous de la quille, ce qui
offre en ce cas un grand danger pour la sécurité de la navigation, en ce que le
dessus des pièces que l'on nomme dormeurs ou carlingères
des côtés, n'étant plus dans un même plan, au même nivellement., dérange
l'alignement de l'axe des arbres des roues a aube et occasionne un frottement
énorme qui tend à détraquer le système des meilleures machines et à faire
briser ses pièces les plus essentielles pour le mouvement progressif.
Si
la situation du fond était telle, il faudrait nécessairement aviser à des
réparations importantes avant de risquer en mer un navire d'une aussi grande
valeur, avec une riche cargaison et la vie d’un nombreux équipage et d'une
quantité de passagers qui pourraient se livrer avec confiance à la hardiesse
des navigateurs qui montent le bâtiment pour le diriger et le manœuvrer au
milieu d'un élément aussi perfide que la mer.
Il
serait pénible de penser qu'après avoir fait de si grands sacrifices,
Nous
nous chargeons d'une grande responsabilité aux yeux de la nation si nous
n'insistons pas à engager en tout cas le gouvernement à le faire faire
expertiser par des gens de l'art. Notre conscience de représentants de la
nation nous fait un devoir de la provoquer pour tranquilliser les personnes qui
se proposent de traverser l’Océan atlantique.
L'homme
expérimenté que j'ai consulté m’a encore observé qu'il y a une grande différence
de navigation, toutes choses d'ailleurs égales, entre Liverpool et New-York et
entre Anvers et New-York.
En
sortant de Liverpool, la traversée de l'Atlantique commence, et il suffit de
suivre, autant que possible, la ligne des vents réguliers des diverses époques
de l'année, pour tirer le meilleur parti des machines et de la voilure. Il n'en
est pas de même pour la navigation de
On
doit également avoir égard aux difficultés que présentent des bâtiments d'une
grandeur telle, que leur largeur absolue ne leur permette pas d'entrer dans le
premier bassin d'Anvers à toutes les époques de l'année, soit pour accélérer le
chargement ou le déchargement des marchandises, soit pour y subir des
réparations d'avaries à l'arrivée, pour éviter les pertes de temps. Le
placement d'un grand bâtiment à vapeur contre un quai extérieur, situé le long
du fleuve, présente beaucoup de dangers pendant les grands coups de vents
d'ouest et sud-ouest. Les abordages à quai ne peuvent se faire sans danger, en
arrivant avec un gros temps. II faut alors jeter l'ancre au milieu du fleuve ;
là il y a encore des risques à courir pour de grands bâtiments.
L'ouverture
de la première écluse du bassin d'Anvers étant de 17 1/2 mètres, la largeur
absolue des plus grands bâtiments naviguant sur Anvers ne devrait pas excéder
Ces
observations me conduisent naturellement à faire connaître ce qu'il y a de
défectueux dans la grandeur de
J'ai
aussi pris des renseignements auprès de nos assureurs et ceux d'Amsterdam, et
j'en ai ici le certificat d'un de nos courtiers d'assurance, et, que les
assureurs d'Amsterdam et d'Anvers, se refuseront d'assurer le navire et sa
cargaison, et les expéditeurs de marchandises, comme le fait
Voilà
donc encore des craintes sérieuses que vous ne trouverez pas de chargeurs de
marchandises, comme vous ne trouverez pas de voyageurs ; l'exception peut être
d'émigrants non expérimentés, et ainsi raison de plus, que notre devoir nous
obligera de veiller à leur sûreté, car si jamais il y aurait malheur, et que je
ne vous aurais pas, comme représentante de la nation, fait ces observations, je
ne pourrais me le pardonner de la vie, et maintenant je me décharge de toute
responsabilité et c'est celle du ministère qui commence.
Maintenant
il me reste à vous parler de ce qu'il y aura à faire si vous approuvez l'achat,
soit en vous ralliant à la proposition de la section centrale, ou si nous
votons le prix d'achat après que le ministère nous demandera pour lui et
surtout pour l'ancien ministère (car tout le monde a commis des fautes) un bill
d'indemnité, c'est-à-dire après un blâme sévère.
Pour
moi, si c'était mon affaire particulière, je me dirai, j'ai fait une bien
mauvaise spéculation, mais je veux arrêter mes pertes et couper le mal dans sa
racine et je ne balancerai pas de revendre publiquement ce malheureux meuble,
et comme les puissances étrangères ne peuvent pas l'acheter d'après les lois
qui régissent chez elles comme chez nous la navigation, vous seriez obligés de
vendre à très bas prix à une compagnie qui voudrait peut-être se former, je
doute même que vous en trouviez qui le veulent pour rien, à condition de le faire naviguer,
ainsi il n'aura pas d'autre valeur que celui du bois, fer, machines, etc., et
la perte sera certainement très forte, mais il vaut mieux savoir tout d'un coup
ce que vous perdez que de devoir tous les ans perdre des sommes énormes.
C'est
donc la première proposition que je ferai de le revendre publiquement, soit
pour l'exploitation ou exportation, ou démolissement,
et si elle n'est pas approuvée, je voudrais au moins que vous décidiez que le
gouvernement n'exploitera pas pour son compte, car je ne veux pas qu'il soit
armateur, et dans le cas du rejet de ma première proposition, je fais
subsidiairement celle d'autoriser le gouvernement d'affréter
Si
maintenant on rejette encore cette proposition et que l’on décide de faire un
essai pendant un an et que vous votiez une somme pour cet objet, je me réserve
de prendre la parole pour vous démontrer par des calculs à quel dépense vous
attirez le pays, mais comme j'ai l'espoir de vous faire au moins adopter ma
seconde proposition, je trouve inutile et avant le temps de vous donner
connaissance de mes calculs, car cela pourrait effrayer les fréteurs et vous
faire demander une trop forte somme. Je pense, messieurs, que vous approuverez
cette réserve. Mais si vous voulez que le gouvernement soit encore armateur,
rien ne me retiendra de vous dire toute la vérité. J'aurais désiré que la
section se fut également réservé de vous communiquer les renseignements
recueillis des sacrifices annuels à faire si nous laissons le gouvernement
exploiter ce steamer, jusqu'à ce que nous ayons décidé si nous ne trouvons pas
convenable de revendre et, en cas négatif jusqu'à ce que vous décidiez s'il
faut affréter le navre avec subside.
Il
paraît que la section centrale conseille de ne pas faire assurer,
vraisemblablement pour diminuer les pertes annuelles, car le gouvernement en
faisant assurer contre incendie aura un système opposé et qu'ainsi nous devons
décider.
La
section centrale, d'après les renseignements de MM. les administrateurs à
Anvers, qui ont tant poussé à ce malheureux achat, calculent eux-mêmes que la
perte annuelle peut se monter au-delà de 250,000 francs par an, et le calcul de
MM. les commissaires du gouvernement se rapprochent beaucoup de cette somme.
Si
maintenant à cette somme de fr. 250,000, vous ajoutez :
assurance à 5 p. c. (je crois que vous ne l'obtiendrez pas à Londres
au-dessous de 6 p. c.), cela fait une somme de : fr. 100,000
intérêt de 5 p. c. sur le prix d'achats et frais : fr. 100,000
et
comme dans le cas le plus heureux, ce navire ne pourra voyager que 10 ans, il
faut encore porter pour détérioration 10 p. c. par an : fr. 200,000
de manière que tous les ans cette belle spéculation coûtera au
pays : fr. 650,000.
et sans amener le moindre bien-être au pays !
Avant
de finir et pour être tout à fait exact, je vous disais il y a quelque temps
que les administrateurs à Anvers avaient un traitement au
minimum de 8,000 fr. et il fallait dire un maximum fixe de 4,000 fr. chacun.
M.
Liedts. -
Messieurs, je suis du nombre de ceux qui pensent que la convention faite par le
ministère actuel pour l'achat de
Je
suis du nombre de ceux qui sont convaincus que, si le gouvernement et les chambres
donnent une impulsion efficace à nos relations, les Etats-Unis sont destinés à
devenir un jour un des plus grands débouchés de nos produits indigènes, et que,
de tous les moyens imaginés jusqu'ici pour donner de l'extension à nos
relations avec ce pays, qui consomme pour 800 millions de produits européens,
il n'en est pas dont la réussite soit plus certaine et plus immédiate que le
rapprochement des deux pays au moyen de communications accélérées et
régulières.
Persuadé,
messieurs, que telle est aussi la conviction des membres du ministère actuel,
je devais m'attendre à ce qu'ils vous présentassent l’acquisition de
Cette
manière de présenter la question, contraire à tous les faits et à tous les
principes, m'impose l'obligation de vous démontrer que le ministère actuel
n'était obligé ni par le droit civil, ni par le naturel, à acquérir
Je
crois, messieurs, pouvoir m'abstenir de répondre au discours du préopinant :
vous avez tous compris quelle est la source de son grand mécontentement : c'est
une chose indigne, selon lui, que le ministère précédent n’ait pas accepté les
propositions de la société anversoise ; ce ministère est très coupable, à ses
yeux, de n'avoir pas admis le projet d’exploitation des bateaux
transatlantiques présenté par la société anversoise. Puisque l'honorable membre
a cru pouvoir me désigner par mon nom, je dirai à mon tour que celui qui était
à la tête de cette Société anversoise, c est le préopinant lui-même, M. Osy. Eh
bien, je n'hésite pas à dire que j'aurais eu éternellement à me le reprocher,
si j'avais eu la faiblesse d'accepter ses propositions. Sachez
, messieurs, que cette société exploitait trois petits bateaux à vapeur,
sur Hambourg, suffisants tout au plus à la navigation de cabotage. Or, comme
les finances de la société étaient fort délabrées, M. Osy voulait tout
simplement céder ces navires à une société de navigation transatlantique et
couvrir ainsi le déficit de la société anversoise avec les fonds du
gouvernement.
J'ai
repoussé énergiquement ces offres et je m'en félicite. J'ai dit à M. Osy, que
s'il avait à faire des propositions susceptibles d'être acceptées, il devait
consentir à ne pas mettre à la charge de la nouvelle société les anciennes
dettes de la société anversoise et proposer l'acquisition d'autres bateaux que
les siens. M.. Osy n'a pas voulu et tout a été rompu.
Voilà,
messieurs, l'indignité commise par l'ancien cabinet. Il n'est pas étonnant
qu'avec cette préoccupation d'esprit, M. Osy trouve détestable toute
combinaison qui n est pas la sienne, et il me permettra de récuser comme
entachés d'une exagération manifeste et comme ne méritant aucune réfutation
tous les calculs qu'il vous a présentés.
Je
reviens au rapport de la section centrale :
Avant
de prouver que le ministère actuel était parfaitement libre d'acquérir ou de ne
pas acquérir
Ce
fut le 29 juin 1840 que fut votée, aux acclamations des principales industries
du pays, la loi qui autorisait le gouvernement à favoriser l'établissement d'un
service de bateaux à vapeur entre
Six
jours après, le gouvernement, fit par la voie du Moniteur, un appel aux
capitalistes du pays et de l'étranger. Les soumissions devaient être faites
avant le 5 août. Tout faisait espérer qu'aux propositions formelles déjà faites
avant le vote de la loi, seraient venues s’en joindre
d'autres et de plus favorables, qui eussent permis au gouvernement de faire un
choix.
Mais
entre ces deux époques, c'est-à-dire, entre le jour de l'annonce au Moniteur
et le délai fixé pour faire des soumissions, fut signé à Londres le fameux
traité du 15 juillet, qui faillit allumer la guerre générale entre les
grandes puissances, qui coûta des centaines de millions à
Toutefois,
au jour fatal fixé pour la remise des soumissions, il se présenta au
gouvernement un capitaliste américain, M. Colden,
muni des papiers et des recommandations les plus honorables.
D'un
côté, les circonstances où se trouvait le continent, et, d'un autre coté, les
propositions favorables de ce citoyen engagèrent le gouvernement à contracter
avec lui sous la condition résolutoire que tout arrangement serait censé non
avenu si, dans un délai déterminé, il ne fournissait un cautionnement, 200,000
fr. à compte desquels il avait à fournir 30,000 fr. avant de recevoir le double
de la convention signée par le ministre de l'intérieur.
M. Colden, qui avait espéré que la crise commerciale qui
arrêtait toute spéculation sur le continent, se serait fait sentir avec moins
de violence aux Etats-Unis, s'aperçut malheureusement à son retour dans son
pays natal que ses compatriotes étaient aussi alarmés que les capitalistes de l'Europe.
M. Colden, en faisant connaître au gouvernement belge
l'impossibilité où il se trouvait de réunir les capitaux sur lesquels il
croyait pouvoir compter, demanda un délai indéterminé pour conclure
définitivement. La proposition d'un délai illimité ne pouvait convenir ni au
gouvernement, ni à l'industrie belge ; dès lors la convention projetée entre
les deux parties fut considérée comme non avenue.
Cette
dernière tentative ayant échoué, le gouvernement reconnut, et vous reconnaîtrez
sans doute avec lui, qu'il ne fallait pas songer de longtemps à une société
capable de réunir un capital suffisant pour faire construire des bateaux à
vapeur d'une dimension suffisante et pour les mettre en exploitation.
Tous
ceux qui ont suivi attentivement les événements qui se sont déroulés sous nos
yeux en 1840, conviendront que le défaut d'exécution de la loi, au moyen d'une
société propriétaire de bateaux à vapeur transatlantiques, est uniquement due à des circonstances en dehors de toute prévision
humaine.
Le
capital eût été formé au mois de mai et même au mois de juin 1840 si, avant le
vote de la loi, il eût été possible d'engager le trésor public pour plusieurs
exercices ; mais les choses changèrent de face au mois d'août par le bruit de
guerre parti de
Le
reste de l'année 1840 s'écoula en vaines tentatives pour constituer une société
particulière. Ceux qui disent aujourd’hui qu'il eût fallu faire un nouvel appel
aux capitaux, ont oublié complètement la terreur inspirée aux capitalistes par
les événements d'août ; mais, ce qui est digne de remarque, c'est que les mêmes
personnes qui nous adressent ce reproche, reconnaissent que la crise
commerciale, issue de la crise politique, dure encore et rendrait encore
aujourd'hui impossible la fondation de cette société.
Reconnaissons
donc, de bonne foi, que la combinaison qui était dans les vœux de tout le
monde, était devenue irréalisable.
Ce
fut dans de telles occurrences qu'au commencement de 1841 la société
anglo-américaine, propriétaire des deux plus beaux navires qui existassent au
monde, le British-Queen et le Président, et qui jusque-là n'avaient rien perdu de leur haute réputation,
offrit au cabinet précédent de les lui vendre.
La
première question que durent se poser les ministres était celle de savoir si la
loi de juin 1840 autorisait une semblable acquisition. Cette question occupa
longtemps les membres du cabinet et ce ne fut qu'après de longues et mûres
délibérations qu'elle fut résolue affirmativement.
Nous
savions, messieurs, tout le parti qu'on peut tirer de certaines expressions de
l'exposé des motifs de la loi de juin 1840, et des discours prononcés à cette
occasion, pour soutenir, qu'à cette époque, il était dans les intentions du
gouvernement et des chambres qu'une société particulière acquît elle-même les
bateaux à vapeur et les exploitât moyennant un subside d'une somme
moyenne de 400,000 francs par an ; et, en effet, messieurs, personne, à cette
époque, ne mettait en doute la possibilité de réaliser ce projet, personne ne
prévoyait, ici ni ailleurs, le traité du 15 juillet ; mais une preuve que les
chambres n'ont pas voulu nécessairement et comme condition sine qua non, exclure
toute autre combinaison, c'est qu'elles ont rejeté l'amendement qui tendait à
n'autoriser l'intervention du gouvernement dans cette affaire que moyennant un
simple subside.
Disons
le donc ; ce qu'on a voulu par la loi de juin 1840, c'est que le gouvernement favorisât,
soit par un subside annuel, soit de toute autre manière, et le plus tôt
possible l'exploitation par des bateaux à vapeur de la ligne d'Anvers à
New-York, pourvu que cette exploitation ne coûtât au trésor public que 400,000
francs, terme moyen par an, pendant 14 années.
Le
cabinet fut donc unanimement d'avis que toute combinaison qui réunirait ces
deux conditions, 1° exploitation régulière par une société, au moyeu de bateaux
à vapeur ; 2° dépense moyenne de 400,000 fr. par an pendant 14 années ; que
toute combinaison semblable, disons-nous, rentrait dans l'esprit de la loi.
En
effet, au lieu de dire à une société : « le gouvernement vous accordera
400,000 francs par an pendant 14 années, à la charge par vous d'acquérir des
navires à vapeur et de les exploiter » ; on pouvait lui dire : « le
gouvernement, convaincu de l'impossibilité où vous placent les circonstances du
moment, de réunir un capital suffisant pour l'acquisition de deux navires à
vapeur, le gouvernement mettra lui-même à votre disposition deux navires à
vapeur représentant, par exemple, 300,000 francs par an, et vous accordera
100,000 pour couvrir le capital d'exploitation ; de cette manière, la société,
au lieu de recevoir 400,000 francs en argent, reçoit en quelque sorte 300,000
francs en bateaux à vapeur, ou, si vous voulez, en instruments d'exploitation
et 100,000 francs en argent. D'une manière comme dans l’autre, le but principal
de la loi, but tant désiré par tous ceux qui se préoccupent de l'avenir de
notre industrie, est rempli, et la dépense annuelle n'excéderait en moyenne
400,000,francs par an, qu'autant que le prix des navires fût exagéré.
Pour
procéder avec prudence, il fallut se mettre en rapport avec la société anglo-américaine ; des instructions
furent, à cet effet, expédiées à notre agent à Londres, M. Van de Weyer. Ces
instructions se trouvent imprimées dans le rapport que vous avez sous les yeux,
page 32.
Croirait-on,
messieurs, qu'on soit allé jusqu'à faire un grief à l'ancienne administration
d'avoir adjoint à l'homme chargé de cette négociation notre agent à Londres.
Mais qu'on suppose un instant que le ministère se fût abstenu de cette mesure
de précaution, et qu'on nous dise s'il y aurait eu des termes assez durs pour
blâmer la légèreté de la conduite du gouvernement. Comment, aurait-on dit,
justifier cette négligence ? quand il s'agit d'acheter pour le gouvernement ou
pour les chambres, ne fût-ce qu'un livre de prix, on emploie l'intermédiaire de
notre agent ; et lorsqu'il est question de l'achat de deux navires, on confie
la mission à un homme presqu'inconnu à Londres, qui ne connaît pas la manière
d'y traiter les affaires, qui a pu prendre, pour expertiser les navires, des
constructeurs ignares, qui ne peut donner au gouvernement que des
renseignements incomplets, et qui, en un mot, avec la meilleure volonté du
monde, doit rester au-dessous d'une mission aussi importante.
Ce
reproche, messieurs, eût été mérité, mais je n'accepte pas celui qui a pour
objet une mesure dictée par la prudence la plus vulgaire.
Ceux
qui furent ainsi chargés de cette négociation s'occupèrent, avant tout, de rechercher
quel motif portait la société anglo-américaine à vendre ses bâtiments : nous ne
nous dissimulions pas, en effet, que la circonstance qu'une société puissante
voulait cesser son exploitation pouvait être mal interprétée par le public,
comme elle l'a été. Ses motifs étaient-ils puisés dans l'impossibilité de faire
le service transatlantique avec les deux steamers qu'on offrait de nous vendre,
ou, si l'on veut, dans un défaut de construction de ces navires, ou bien
prenaient-ils leur source dans des causes étrangères à la navigabilité de ces
bâtiments ?
Les
informations prises aux meilleures sources donnèrent la conviction au
gouvernement que la forme, la dimension, la solidité, en un mot la navigabilité
des navires n'étaient pour rien dans la résolution de la société
anglo-américaine.
Cette
société, composée d'un petit nombre de notabilités financières, s'était formée
dans le but d'exploiter la ligne de New York avec cinq navires de la dimension
de
Vous
convenez donc, dira-t-on, que cette société ne réalisait pas de bénéfice,
qu'elle était même en perte, et cependant, vous avez eu le projet de substituer
Restait
à constater la bonté et la solidité des navires, et, à ce sujet encore, il n'y
a pas de bruit si absurde qui n'ait été colporté par la malveillance, accueilli
et accrédité par l'ignorance du public. Je n'ai à m'occuper ici que de
Jamais
bâtiment n'a mieux justifié cette haute réputation des constructeurs anglais
que
Non
content de cette notoriété publique, le gouvernement sollicita et fut assez
heureux pour obtenir le concours des ingénieurs de l'amirauté de
Après
avoir examiné
On
a été, nous le savons, jusqu'à soupçonner, je ne dirai pas la probité, mais la
partialité de ces ingénieurs de l'amirauté. Pour qui connaît les hommes
respectables dont se compose l'amirauté anglaise, cette accusation paraîtra
tellement absurde, tellement indigne du caractère de ces savants ingénieurs,
que je crois pouvoir me dispenser d'y répondre.
En
supposant un instant que l'amirauté anglaise fût composée d’hommes assez vils pour
prostituer leur nom et leur réputation par la délivrance d un certificat de
complaisance, on conviendra au moins que les sociétés d'assurance, qui n'ont,
elles, à consulter que leur intérêt propre et qu'on ne soupçonnera pas
d'exposer légèrement leurs capitaux, on conviendra, disons-nous, que ce n'est
qu'après une enquête profonde et détaillée qu'elles se sont décidées à assurer
le navire en question, au prix le plus bas de leur tarif, avantage réservé aux
bâtiments qui, après mûr examen, sont reconnus à l'abri de tout danger de mer
et qui se distinguent par leur bonne construction. Aussi la société d'assurance
n'a jamais eu à regretter la haute opinion qu'elle avait de la construction de
ce navire, et n'a pas même eu à dédommager ses propriétaires d'une simple
avarie.
Nous
nous résumons donc sur ce point, en disant que la bonté et la solidité de
Quant
au Président, son état devait être constaté à son retour de New York, où
il se trouvait à cette époque.
Ce
fut le 17 mars 1841 que, sous la réserve que le Président serait, à son
retour, trouvé dans un état aussi parfait de conservation que
Nous
ne nous étendrons pas, pour le moment, sur toutes les démarches faites
relativement an prix d'acquisition. Toutes les pièces à ce sujet étant entre
les mains de chacun de vous, vous avez pu vous convaincre que l'honorable M.
Van de Weyer n'a rien négligé pour obtenir le prix le plus favorable ; vous y
aurez remarqué que, plus d'une fois, les pourparlers ont failli se terminer par
une rupture.
Mais
ce que nous ne devons pas passer sous silence, c'est que les deux navires
avaient coûté à la société anglo-américaine 190,000 liv. st., et que
Quant
au paiement du prix, nos agents à Londres, conformément à leurs instructions,
avaient échelonné les termes de paiement de manière à être en harmonie avec les
échéances de la loi de juin 1840, c'est-à-dire que les termes de paiement
rentraient dans l'allocation annuelle de cette loi, et laissaient, chaque
année, disponible une certaine somme pour garantir le capital d'exploitation.
Tels
étaient les termes du contrat projeté par M. Van de Weyer, mais je puis
affirmer que, jusqu'au moment de la retraite du précédent ministère, rien
n'était arrêté sur le mode qu'on suivrait pour opérer le paiement, en supposant
que le contrat devint définitif.
Parmi
les différents modes, la maison Rothschild en soumit un sur lequel le cabinet
précédent n'a pas eu à délibérer, et qui consistait à faire payer par cette
maison le prix intégral en une seule fois, sauf à faire avec le gouvernement un
contrat d'après lequel elle rentrerait d'année en année, et d'après les termes
de paiement indiqués dans la loi de juin 1840, dans le capital déboursé.
Je
sais, messieurs, tout ce qu'on allègue, aujourd'hui que l'entreprise n'a pas
pu se réaliser, pour soutenir que la somme tenue en réserve pour
subsidier éventuellement la société d'exploitation aurait été insuffisante.
Mais
puisque malheureusement l'expérience n'a pas pu donner un démenti à ces
allégations, je me bornerai à dire que le projet de l'ancien ministère n'est pas
susceptible d'être sainement jugé, aujourd'hui que le naufrage du Président est venu, à tort sans doute,
jeter dans l'esprit de tout le monde, de la considération sur ces navires ;
aujourd'hui que les débats actuels vont encore amoindrir la réputation de
Vos
calculs, pour établir le produit probable de cette entreprise n'ont donc aucune
valeur à mes yeux.
Vous
aurez vu, messieurs, dans les instructions données à notre agent à Londres, que
le ministère lui avait dit formellement que le gouvernement voulait se réserver
la faculté de soumettre le projet de convention à la ratification des
chambres. M. Van de Weyer, en envoyant le projet de contrat, avait émis,
à la vente, l'opinion que la ratification des chambres, était inutile ; mais ce
n'était là qu'un simple avis que le ministère pouvait adopter ou rejeter. Je ne
sais quelle était l'opinion de mes collègues sur ce point ; cette question
était restée sans résolution du conseil, et bien que mon avis personnel soit
que la ratification des chambres n'était pas indispensable, je dois déclarer
que le cabinet n’a posé aucun acte dont on peut induire qu'il comptait se
passer de ce mode de ratification et qu'il abandonnait l'instruction transmise
à Londres.
Il
est vrai aussi que cette opinion de notre agent est restée sans réponse et sans
objection de notre part, mais on remarquera que le cabinet s'est retiré au mois
d'avril, et que le ministère avait alors plusieurs semaines encore devant lui
pour discuter l'avis émis par M. Van de Weyer.
Il
est vrai, enfin, que le ministère avait éventuellement remis les deux navires,
pour le cas où la société anglaise accomplirait ses conditions, à une société
d'exploitation, au capital de 760,000 francs, mais une preuve évidente que cela
n'implique ni approbation, ni improbation du projet, c'est que cette remise
d'achat des navires éventuelle à une société aurait pu avoir lieu avant comme
après la signature du projet. Ceci est tellement vrai que la section centrale
fait un grief à l'ancien ministère de n'avoir pas constitué la société avant de
donner des ordres pour acheter les navires ; reproche, soit dit en passant, qui
est inconcevable, puisque si cela eût été fait, la société anglaise, qui en
aurait été infailliblement instruite, eût à l'instant augmente ses prétentions.
Je
viens de vous exposer tous les faits qui se rattachent à la première période de
cette grave affaire ; quel est maintenant le grief que l'on reproche à l'ancien
cabinet ? Le voici tel qu'il résulte du rapport de la section centrale :
Si
le cabinet précédent était resté aux affaires ;
Si
aucun des deux navires n'eût péri ;
Si
une visite rigoureuse eût constaté que tous les deux ils étaient d'une
construction, d'une solidité, d'une puissance dignes de leur réputation ;
Si
les deux navires, trouvés dans cet état satisfaisant, avaient pu être livrés à
Si
enfin, l'achat projeté était devenu définitif par l'accomplissement de toutes
ces conditions, le ministère précédent eût fait un acte de mauvaise
administration.
Voilà,
messieurs, la redoutable sentence, suspendue par 4 conditions, dont aucune ne
s'est réalisée, que la section centrale lance à la tête des membres de l'ancien
cabinet.
Eh
bien, messieurs, n'en déplaise aux membres de cette section, et à ceux qui
pourraient avoir la même opinion, si toutes ces conditions s'étaient
accomplies, j'aurais considéré cet acte comme le plus heureux qui ait été posé
depuis la révolution dans l'intérêt de nos industries, et ce sera pour moi un
objet d’éternels regrets que l'exécution d'une combinaison, qui malheureusement
est rentrée dans le néant, ne soit pas venue donner un démenti éclatant à ceux
qui s'en sont constitués les détracteurs.
Lorsque
l'industrie belge eût vu ces deux navires, les plus beaux de l'univers entier,
et qui jusques-là n'avaient, par aucun sinistre, par aucune avarie, rien perdu
de leur réputation européenne, si l'industrie belge eût vu ces deux navires
réunir en quelque sorte notre pays au continent américain, transporter en 1841
sur le marché de New York nos industriels et leurs produits, déverser à leur
retour plus de voyageurs américains en Belgique, que nous n'en avons vu depuis
12 ans, leur faire connaître un pays dont ils ont à peine une idée, les mettre
en contact avec nos principaux industriels, leur procurer l'occasion d'admirer
les merveilles de l'exposition des produits de l'industrie qui a eu lieu au
mois d'août et de septembre, faire naître ainsi des relations fructueuses pour
le présent et pour l'avenir ; ah, messieurs, n'en doutez pas, la faible voix
des détracteurs de cette entreprise eût été couverte, étouffée par les
acclamations des industriels du pays et de tous ceux qui se préoccupent de
l'avenir commercial de
Je
proteste donc de toutes mes forces contre l'assertion de mauvaise gestion, et
les membres de la section centrale eussent peut-être, les premiers, chanté les
louanges de la convention, si elle eût pu se réaliser.
Mais
pourquoi s'arrêter à cette assertion de la section centrale ; il n'existe plus
de la convention méditée par l'ancien cabinet que le souvenir ; ceux qui, comme
nous, avaient la conviction qu'elle devait produire d'heureux résultats en
sont réduits à regretter qu'elle soit forcément anéantie ; et ceux qui
s'applaudissent de sa non-exécution, parleraient pendant 8 jours pour combattre
cette convention, qu'ils n'auraient rien prouvé du tout, puisqu'ils s'attaquent
au néant, à une convention qui, en droit civil, comme en droit international,
en strict droit comme en morale, est censée n'avoir jamais été contractée.
C'est
ici, messieurs, que commence l'examen de la deuxième période qui s'est
accomplie tout entière sous le ministère actuel.
Nous
soutenons que, par le naufrage du Président et par le défaut de
livraison des deux navires à l'époque stipulée au contrat, le gouvernement
était parfaitement libre de contracter ou de ne pas contracter pour
Vous
savez que la clause résolutoire est celle par laquelle les parties conviennent
que cet acte demeurera nul et comme non avenu, soit dans le cas où l'une des
parties ne remplirait pas certaine obligation, soit dans celui où il
arriverait un événement indépendant de leur volonté.
Il
n'y a aucune expression, aucune formule sacramentelle pour stipuler une clause
semblable, il suffit que l'intention des parties soit claire. Lors donc que
j'achète notre navire à livrer avant le 1er janvier prochain en stipulant que
s'il n'est pas livré avant cette date, je ne suis pas tenu de le prendre, la
clause résolutoire est aussi valide et aussi efficace que si j'y ajoutais en
style de notaire : sous la condition résolutoire bien expresse que si le
navire n'est pas livré avant le 1er
janvier la convention sera résolue, si je le désire.
Ces
deux clauses ont la même valeur et le même effet ; c'était donc comme clause
résolutoire que, dans le projet de contrat, et la section centrale en convient,
le ministère précédent avait stipulé : 1° que si l'un des deux navires n'était
pas de retour avant ledit 24 mai, etc., 2° que si l'un des deux navires venait
à faire naufrage ou à essuyer des avaries telles qu'elles ne pussent être
réparées convenablement avant le 24 mai,
La
nouvelle convention faite par le ministère actuel le 28 avril 1841 prouve
surabondamment que c'était bien comme clause résolutoire que les parties
avaient entendu la stipulation de l'acte primitif ; à cette date (le 28 avril),
on commençait à craindre que le Président
fût perdu ; et la société anglo-américaine réitère en termes plus formels encore
que, si le Président ne revenait point et que le gouvernement belge n'eût
pas fait connaître, avant le 24 mai suivant, son intention d'accepter le navire
restant, tout ce qui a été projeté, sera à jamais entièrement et absolument
annulé.
On
a cru, dit-on, devoir à la bonne foi de maintenir le marché quant à
Si
cette allégation ne se trouvait a chaque page, on croirait que c'est par
inattention qu’elle s'est glissée dans le rapport, En effet, proposez le cas,
je le dis pas à un magistrat, je ne dis pas à un juriste, quelque novice qu on
le suppose, mais à un homme de bon sens, guidé par les lumières de la raison,
et il est impossible qu'il admette cette obligation de bonne foi.
Quelqu'un
exploite, au moyen de deux diligences la route de Bruxelles à Anvers et vice-versa.
Il y a une diligence qui part périodiquement de Bruxelles pour Anvers, et
l'autre qui part d'Anvers pour Bruxelles. Voulant me substituer à ce service,
je lui achète ces deux diligences, pour un seul et unique prix, et à la
condition expresse que, si l'une des diligences venait à périr avant le jour de
la livraison, je ne serai pas obligé de prendre l'autre. Osera-t-on soutenir
que, si cette condition résolutoire arrive, si l'une des deux diligences périt,
je serai obligé, en conscience et en équité, d'accepter l'autre diligence ?
Non, mille fois non.
La
bonne foi, c'est-à-dire ce qui est équitable et honnête quod œquum et honestum est, consiste
à remplir fidèlement ses engagements, à être esclave de la foi donnée.
La
mauvaise foi consiste à vouloir autre chose, ou quelque chose de plus que la
convention ne stipule.
La
mauvaise foi est du côté de celui qui veut substituer sa volonté propre à la
volonté commune, exprimée au contrat.
La
mauvaise foi commence là où finit le contrat.
La
mauvaise foi, en un mot, serait de la part de la société qui, après avoir
stipulé qu'en cas de perte d'un navire l'autre ne doit pas être accepté, voudrait prétendre que,
cette condition arrivant, et malgré le contrat, l'autre navire doit être
excepté. Voilà où serait la mauvaise foi, mais non de la part de celui qui se
conforme scrupuleusement, consciencieusement au contrat.
La
section centrale ne parle plus dans son rapport de l'obligation de bonne
foi, mais elle y
substitue une autre théorie, celle des obligations morales.
Après
avoir fait naïvement l'aveu que l'un des deux navires ayant péri, il n'y avait aucune obligation légale
d'accepter l'autre navire, elle ajoute que, cependant, la grande majorité
de la section centrale a pensé qu'il y avait obligation morale pour le
cabinet actuel de maintenir l'achat pour
Tous
les jours, dans les baux, dans les ventes, dans les contrats de toute nature,
on stipule des conditions résolutoires, pour l'une des parties, contre l'autre,
et jusqu'ici personne au monde, que je sache, n'avait songé à faire une
obligation morale pour la partie qui la stipule en sa faveur, de ne pas
invoquer le bénéfice de la stipulation. Si une interprétation semblable pouvait
prévaloir, il faut renoncer à faire des contrats. Les obligations morales sont
soumises à des règles aussi fixes, aussi invariables que les obligations de
droit civil. Assez d'auteurs de toutes les nations les ont recueillies dans
leurs traités de droit naturel, et je porte le défi de m'en citer un seul qui
ne condamne la doctrine de la section centrale.
Mais,
dit-on, par l'insertion de la résolution facultative pour
Ce
serait, au contraire, vous, vendeur, qui violeriez l'équité, la conscience, la
foi du contrat, si vous prétendiez m'imposer la preuve que le navire restant
peut encore me convenir.
Dans
le cas qui nous occupe, la prudence la plus commune inspirait la clause
résolutoire en faveur de
Comment
la section centrale ne s'est-elle pas aperçue des conséquences excentriques où
conduit sa doctrine des obligations morales ?
Ainsi,
par exemple, je suppose que le Président, au lieu de se perdre sur une
île de glace, fût revenu en Angleterre, mais qu'examen fait de sa construction,
il eût été reconnu que le navire était défectueux, détestable, ne pouvant pas
tenir la mer plus longtemps qu'un an ou deux ; ne voyez-vous pas, messieurs,
que dans cette hypothèse comme dans celle de la perte du Président,
Alors
en effet comme aujourd’hui, la section centrale eût prétendu que, puisque
C'est-à-dire
que les rôles sont intervertis ; que la morale, la bonne foi sont du côté de celui
qui foule aux pieds la foi donnée, et la mauvaise foi du côté de celui qui
demande qu'on exécute religieusement la convention. Le ciel nous garantisse de
pareilles doctrines. Malheur au peuple qui les ferait passer dans le code de
ses lois internationales.
Mais
il y a plus ici ; il y a dans l'article du contrat qui nous occupe une partie
que la section centrale ne semble pas avoir vue et dont elle ne s'occupe pas
plus que si elle n'existait pas. Cette partie la voici : « Et il est, par
ces présentes, de plus convenu que dans le cas où l'un ou l'autre desdits
bateaux à vapeur ne soit pas de retour au port de Londres ou de Liverpool ayant
le 24 mai (terme de la livraison), l'acheteur ne sera pas obligé de prendre
l'autre. » etc. La clause résolutoire n'était donc pas seulement stipulée
pour le cas où l'un des navires aurait fait naufrage, mais pour le cas où, en
supposant les deux navires existant eu bon état, l'un ou l'autre ne pouvait pas
être livré avant le 24 mai. Ainsi il ne suffisait pas que les deux navires
existassent, qu'aucun des deux n'eût péri, qu'ils fussent trouvés en excellent
état, il fallait encore qu'ils fussent livrés avant le 24 mal.
Pas
de livraison des deux navires dans le délai voulu, pas de vente ; c'était une condition
résolutoire à laquelle le cabinet tenait et avait de bons motifs de tenir. Nous
connaissions toutes les petites jalousies qu'allait susciter cette entreprise,
nous savions que ceux qui avaient été déçus dans l'espoir d'organiser eux-mêmes
ce service, se feraient un malin plaisir de discréditer l'entreprise ; nous
voulions, par le succès d'une exploitation immédiate, imposer silence à toutes
ces clameurs de l'intérêt personnel, et l'expérience a prouvé que nous avions
bien vu. Il suffirait de quelques discours comme celui du préopinant, pour que
le navire soit tout à fait décrié. Voilà pourquoi pas de livraison des deux
navires dans le délai stipulé, pas de vente.
Comment
se fait-il que la section centrale ne dise pas un mot de cette clause
résolutoire ? Elle a eu de bons motifs pour cela, je pense, car il n’est pas
possible que la clause soit passée inaperçue.
Ou
bien soutiendra-t-elle aussi qu'en supposant qu'aucun navire n'eût péri, il
suffisait qu'un seul fût livré, au terme convenu, et qu'il y avait obligation
morale pour
Mais
alors comment cette section n'a-t-elle pas vu, que s'il n'existait aucune
obligation morale d'accepter un seul navire, lorsque la livraison du second est
simplement tardive, il ne peut, à plus forte raison, exister aucune obligation
morale d'accepter un navire si le second n'est pas seulement livré tardivement,
mais n'est pas livré du tout.
Résumons-nous
en rétablissant les faits dans toute leur vérité : Le ministère avait formé le
projet d'acheter deux navires qui jouissaient, à cette époque, de la plus
grande renommée ; mais cet achat ne devait devenir définitif que par
l'accomplissement de deux conditions résolutoires. La première, qu'aucun des
deux navires ne fît naufrage, et la deuxième, qu'en supposant qu'aucun n'eût
fait naufrage, ils fussent livrés avant le 24 mai 1840.
Aucune
de ces deux conditions ne s'étant accomplie, l'achat s'est évanoui, est censé
n'avoir jamais été conclu, et
Le non-accomplissement
des conditions avait dégagé la foi aussi complètement que si jamais il n'avait
été parlé d'aucune convention.
La
seule formalité à remplir d'après un article formel du contrat, et dans le seul
but d'informer la société anglaise, consistait à faire écrire par M. Van de
Weyer une simple lettre à société ou au bureau de la société.
Qu'on
ne dise donc pas que
Il
n'était pas question non plus de désavouer les ingénieurs de l'amirauté. Ces
officiers n'avaient été appelés qu'à constater un fait, celui de la bonne
navigabilité de
D'après
les principes que je viens d'exposer, il ne vous échappera pas, messieurs, que
la ratification faite par le cabinet actuel du projet d'achat primitif,
notamment en ce qui concerne
C'est
donc un contrat tout nouveau, quels que soient les termes dont on s'est servi,
qui il été fait pour l'achat de
1°
Nouveau contrat pour l'objet acheté : au lieu de deux navires se croisant en
route et partant alternativement d'Anvers et de New York, il n'en reste qu'un
seul.
2°
Nouveau contrat pour l'époque de la livraison, au lieu du terme fatal fixé au
24 mai,
3°
Nouveau contrat pour le prix ; calculé à raison de la perte d'une saison
d'exploitation ;
4°
Nouveau contrat pour le mode de paiement ;
5°
Nouveau contrat pour le mode d'exploitation.
1l
résulte de ce qui précède que c'est bien abusivement qu'on a mis en cause le
ministère précédent. Je dénie à la section centrale le droit d'inculper des
intentions, qui échappent à l'appréciation, parce qu'ils sont restés à l'état
de simples projets.
C'est
donc sous ce dernier point de vue seulement, comme contrat tout nouveau, qu'il
convient d'examiner l'achat de
Pour
résoudre la question d'utilité, il est important qu'on se rende bien compte de
la position actuelle de
Il
ne peut y avoir de prospérité durable qu'autant que l'équilibre entre la
production belge et la consommation de ses produits soit établie.
Sans
cela, il y a malaise, malaise permanent. Or, cet équilibre a été rompu par deux
causes principales. La première c'est la révolution de 1830, qui nous a enlevé
la moitié de nos consommateurs.
La
seconde, c'est l'aveuglement des industriels, qui, dans ces dernières années,
ont donné à la production un accroissement de puissance inouï jusqu'alors et
hors de toute proportion avec le développement de nos débouchés.
L'équilibre
entre la production et la consommation est donc rompu ; chacun le sent, on le
dit tous les jours, il n'y a qu'une voix sur ce point et dans les chambres et
dans le pays. Ce fait admis, il n'y a que deux moyens de rétablir l'équilibre :
le premier, et au train dont on y va, à en juger par les hésitations
déplorables qui se manifestent dans les chambres, il semblerait que ce soit à
celui-là qu'on s'est arrêté, c'est de laisser s'épuiser en vains efforts les
forces productrices que le pays recèle en trop ; d'attendre la ruine des
établissements gigantesques qui font l'admiration des étrangers ; de traîner,
en un mot, les discussions jusqu'à ce que la mort des industries malades nous
ait débarrassés de leurs doléances
Ce
moyen, messieurs, serait sûr, immanquable, mais il serait inhumain, indigne
d'hommes d'Etat.
Le
second moyen, c'est de procurer à nos nombreuses industries de nouvelles voies
d'écoulement, de développer nos débouchés.
C'est
vers ce but que doivent tendre tous nos efforts, et toutes les autres questions
qui se traitent à là tribune pâlissent devant celle-ci : par quels moyens
parviendra-t-on à procurer de nouveaux débouchés à nos industries ? .
Une
preuve de cette vérité incontestable, ce sont les différents systèmes, les
nombreux moyens qui ont été indiqués et qu'on ne cesse encore tous les jours de
mettre en avant : traités de commerce, système prohibitif, primes
d'exportation, droits différentiels, système des colonies, création d’une
puissante société d’exportation, établissement de bateaux à vapeur entre
l’Amérique du Nord et
De
tous ces moyens, et je n’en connais pas d’autres, un seul a été solennellement
discuté et adopté, c’est l’établissement de bateaux à vapeur. Je dis que c’est
le seul qui puisse immédiatement produire des effets avantageux à l’industrie.
En effet, les traités de commerce avec les nations voisines, il n’y faut pas
songer d’ici à longtemps.
Je
permets qu'on prenne acte de mes paroles ; je ne crains pas d'être faux
prophète, Il n'y a rien à espérer en ce moment ni de
Attendez-vous
votre salut du système prohibitif ; mais en supposant qu'une mesure aussi
hostile à
Le
système des droits différentiels ! Mais, en supposant que tout ne soit pas
illusion dans ce système, ce que nous verrons quand la discussion sera à
l'ordre du jour, ses plus grands partisans doivent déjà convenir que ses effets
ne peuvent se faire sentir que peu à peu et après un certain nombre d'années ;
or le temps nous presse, et il est fort à craindre que ce remède, si c'en est
un, arrive trop tard. Je ne parlerai pas du système des primes qui ne peut être
appliqué qu'à quelques cas exceptionnels, ni du système colonial dont l'examen
serait prématuré, ni enfin de l'institution d'une nouvelle société
d'exportation, à l'instar de la handelmaatschappy,
dont on ne s'entretient encore que vaguement dans le public.
J'admets
du reste que, dans tous ces systèmes, il peut y avoir quelque chose d'utile
pour l'avenir, mais est-ce un motif pour nier l'utilité d’une communication
prompte et régulière avec les États-Unis, alors, surtout, que la navigation à
vapeur transatlantique ne nuit et ne préjudicie à aucun système et vient en
aide à tous.
Les
journaux américains annonçaient, il n'y a pas deux mois, qu'un marchand de
New-York avait placé au-dessus de son magasin une enseigne d'une énorme
dimension, pour prévenir le public qu'on pouvait voir chez lui du drap belge
aussi beau que du drap anglais, ce fait en dit plus qu'un long discours ;
ne-croirait-on pas, en effet, que ce soit là une chose tout à fait inouïe,
prodigieuse ? Ne croirait-on pas, à lire cette annonce, qu'on parle de la
production de quelque coin ignoré de la terre, et cependant c'est du drap
belge, le seul produit belge qui s'exporte en Amérique qu'on annonce de la
sorte, lorsque
C'est
sans doute une chose regrettable, qu'au lieu d'une exploitation d'aller et de
retour, il faille se borner pour le moment à une exploitation d'essai en
quelque sorte, mais il n'a dépendu de personne qu'il en fût autrement, et le
rapport de M. Lejeune joint aux pièces imprimées, démontre clairement que cette
exploitation d'essai peut encore produire de grands résultats. Si de funestes
préventions ne paralysent pas le succès de l'entreprise, je suis convaincu,
pour ma part, qu'avant deux ans d'ici, il n'y aura plus une voix qui s'élèvera
contre sa continuation. Il arrivera de ce steamer ce qui arrive des navires à
voiles que le ministère précédent a organisés sur le Brésil. Leur influence sur
nos exportations vers ce pays est aujourd’hui notoire, et si les industriels se
plaignent parfois, c'est de ne pas trouver place à bord de ces navires pour
leurs marchandises, tant le concours augmente de jour en jour.
Je
suis peu arrêté après cela par les dépenses que ce service impose au pays. Ce
sacrifice est bien léger en comparaison de ceux que nous aurions à faire si
l'on recourait plus tard à d'autres voies pour se créer des débouchés. Les
traités de commerce eux-mêmes étant essentiellement un échange de concessions,
imposeraient des sacrifices bien autrement considérables.
Je
ne demande donc que deux choses au gouvernement. C'est d'abord, si le bateau à
vapeur qu'il a acquis réunit toutes les conditions voulues pour la navigation
transatlantique.
En
second lieu, s'il n'a rien négligé pour s'assurer de la valeur de l'objet
acheté, et pour l'acquérir au moindre prix possible.
Je
me suis assez étendu sur ces deux points, au commencement de ce discours, pour
qu’on n'y revienne plus.
Je
donnerai donc mon approbation à la convention faite et conclue par le cabinet
actuel pour l'acquisition de
Toutefois
en donnant cette approbation, j'ai besoin de mettre une réserve. En supposant,
contre mon attente, que l'exploitation de.
La
première c'est la perte du Président ; bien qu'il n'y ait aucune
conséquence à tirer de ce fait contre la solidité de
La
deuxième circonstance, c'est que si ce discrédit ne résultait pas de ce
naufrage, je crains bien qu'il ne soit produit par la discussion actuelle. Oui,
messieurs, si nous ne mettons beaucoup de circonspection dans nos paroles, si
nous ne nous faisons pas un devoir d'écarter de ces débats tout ce qui peut nuire
à la réputation du beau navire que le gouvernement a acquis, il ne faudra pas
s'étonner que les paroles tombées de cette tribune aillent alarmer le commerce
à l'intérieur et à l'étranger. Il dépend de vous d'étouffer ou
de faire vivre cette entreprise naissante. J'ai dit.
M.
Osy. -
L'honorable M. Liedts ayant cité mon nom en parlant des propositions de la
société anversoise, je dois répéter que ces propositions ont été faites un mois
avant l’adoption de la loi, c'est-à-dire le 14 mai 1840, de manière que le
gouvernement avait tout le temps d'examiner si ces propositions étaient
convenables et si elles pourraient être exécutées.
Quant
à ce qui a été dit par l'honorable préopinant relativement aux ingénieurs
anglais qui ont examiné le navire, je vous prie, messieurs, de jeter un coup
d'œil sur les pages 48 et 49 du rapport ; vous y verrez que les ingénieurs
anglais disent qu'ils n'ont pas pu voir le fond du steamer, parce qu'il y avait
des marchandises à bord ; comment voulez-vous, alors, qu'ils aient pu faire une
expertise complète ?
Je
suis très étonné que le gouvernement n'ait pas eu assez de confiance dans les
ingénieurs belges pour faire examiner le navire par des hommes du pays ; nous
avons bien des ingénieurs qui auraient pu se livrer très utilement à cet examen.
L'honorable
M. Liedts a parlé du prix des assurances ; j'ai pris des renseignements à cet
égard, et j'ai des certificats constatant que l'on ne trouverait ni à Anvers ni
à Amsterdam une compagnie qui voulût assurer le navire dont il s'agit ; on
l'assurera en Angleterre parce que là on assure tout, mais il n'en est pas
moins vrai que les exportateurs qui chargeront des marchandises sur ce navire
auront toujours de grandes inquiétudes ; je persiste à dire que le gouvernement
aurait dû faire faire une expertise dans le pays.
M.
le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, je n'ai jamais décliné ma part de responsabilité
dans l'achat du British Queen, mais j'ai pensé et je pense encore que
cette responsabilité est commune au cabinet actuel et au cabinet précédent.
L'honorable
préopinant, mon prédécesseur, a cherché à isoler complètement la convention du
28 avril ; je crois, messieurs, que c'est là nier l'enchaînement des faits. Je
crois qu'il est impossible de faire ainsi abstraction de l'ensemble des
circonstances. Cependant l'honorable préopinant considère l'acte comme légal et
utile ; dès lors pourquoi repousser, sa part de responsabilité ? Je ne conçois
pas les efforts qu'il a faits pour arriver à ce résultat ; c'est là un
véritable acte de générosité de sa part.
Quoi
qu'il en soit, messieurs, le ministère actuel a maintenu l'achat de
Si
le mode de paiement n'avait pas été changé par le ministère actuel, nous
n'aurions pas besoin de nous présenter devant les chambres, nous échappions à
tout contrôle des chambres car il est bien démontré aujourd'hui que l'achat
d'un seul navire et l'exploitation de ce navire unique rentrent complètement
dans les limites de la loi du 29 juin 1840.
Si
la chambre est appelée à statuer de nouveau sur la navigation transatlantique,
c'est uniquement parce que le mode de paiement a été changé. Nous l'avons
changé parce que le nouveau mode est plus avantageux et je me réfère à cet
égard aux détails qui se trouvent dans mon compte-rendu et dans le rapport de
la section centrale. Si la chambre voulait revenir au premier mode de paiement,
celui de la convention du 17 mars, je m'empresserais d'accéder au désir de la
chambre ; si la chambre manifestait ce désir, nous exécuterions la convention
relative à l'achat du British-Queen d'après le premier mode de paiement,
c’est-à-dire en émettant des obligations, mais avec tous les avantages stipulés
par la convention du 17 mars.
L'acte
qui appartient véritablement au ministère actuel c'est le changement de mode de
paiement ; et, je le répète, je suis prêt, si la chambre le désire, à
revenir au premier mode de paiement ; le trésor en souffrira, mais le ministère
actuel échappera à tout contrôle des chambres.
Je
ne veux pas, messieurs, rechercher jusqu'à quel point l'achat des deux navires
et l'exploitation des deux navires peut également se trouver dans les limites
de la loi du 29 juin 1840, ce serait absolument un hors-d'œuvre.
Le
ministère actuel et le ministère précédent se sont assurés de la bonne qualité
du navire ; des expertises convenables ont été faites avant le départ du navire
de l'Angleterre et après son arrivée dans le bassin d’Anvers ; de nouvelles
expertises peuvent se faire.
Je
dois déplorer que l'on décrie
publiquement une entreprise qui est devenue indispensable, car je ne regarde
pas comme sérieux le projet de vendre le navire ; je ne regarde pas ce projet comme
sérieux, puisque nous commençons par décrier nous-mêmes la marchandise que nous
voulons mettre en vente.
Je
regarde, messieurs, comme sérieux, un autre projet qui a été indiqué, celui de
la formation d'une compagnie, mais ce projet n'est pas réalisable en ce moment,
précisément à cause de toutes les préventions que l'on cherche à accréditer.
Une
compagnie pourra se former dans un an, dans deux ans peut-être, lorsqu'un
premier essai aura été fait par le gouvernement. Ce premier essai est devenu
nécessaire ; je ne désespère pas de trouver d'ici à un an ou 18 mois une
compagnie, j'en désespère si peu qu'il entre dans mes intentions de faire un
appel public à la formation d'une semblable compagnie, aussitôt après la
ratification de l'achat par les deux chambres. Le gouvernement fera un essai,
mais dès à présent il préviendra les capitalistes qu'il entre dans ses
intentions de livrer le navire à une compagnie qui voudrait se charger de son
exploitation en y joignant un second navire, moyennant le subside qui est en ce
moment demandé à la chambre.
Ainsi,
messieurs, la chambre ne s'engage pas définitivement à faire exploiter à tout
jamais le service transatlantique, avec le seul navire que nous avons,
directement par l'Etat ; c'est un essai que nous faisons et si, comme je
l'espère, malgré toutes les préventions que l'on cherche à accréditer et qui
malheureusement trouvent des organes ici, si cet essai réussit, une compagnie,
je n'en doute pas, se formera ; dès à présent nous mettrons les capitalistes à
même d'étudier le service, nous mettrons tous les renseignements à leur
disposition afin que tous le monde se trouve suffisamment éclairé, par exemple,
d'ici à la fin de cette année, pour qu'une société puisse être constituée.
Il
y a peu de jours, messieurs, j'ai eu l'occasion d'entretenir un ingénieur
américain. du navire the British Queen ; cet ingénieur, messieurs, qui
est de New- York, M. Schuyler, revenait de St-Pétersbourg,
où il avait conduit un navire de guerre à vapeur construit à New-York pour le compte de
l'empereur de Russie, le Kamtschatka, navire dont le tonnage est de 2,100
tonneaux et qui a coûté deux millions et demi ; dans la visite que cet
ingénieur a bien voulu me faire, j’ai cru devoir l'interpeller sur le British
Queen. Certainement un ingénieur américain ne louera pas facilement un
ouvrage fait en Angleterre ; cependant M. Schuyler
n'a pas hésité à me répondre qu'il connaissait parfaitement le British
Queen, qu'il l'avait vu plusieurs fois en Amérique, et qu'en arrivant en
Belgique il avait été le revoir dans le bassin d'Anvers, que ce navire est
d'une construction parfaite, qu'il est comme neuf et sans aucun des défauts
qu'on se plaît à dénoncer au public ; qu'il ne l'a trouvé ni arqué, ni avarié.
Cet ingénieur américain, par tous les détails qu'il m'a donnés, m'aurait
complètement rassuré sur la qualité du navire, si j'avais eu des doutes à cet
égard. Je cite ce témoignage, parce qu'il n'est pas suspect et qu'il est de
nature à frapper le public. :
Il
est inutile, messieurs, de répondre à un historique par un historique ; tous
les faits sont aujourd'hui connus ; Il est impossible de détruire
l'enchaînement des faits ; j'ai cru qu'il y avait bonne foi à maintenir l'achat
du navire, je l'ai cru avec notre ministre à Londres, qui a été chargé des
négociations sous le ministère précédent.
Notre
représentant à Londres n'a pas hésité, sans qu'il y ait été provoqué de ma
part, à considérer depuis la publication du compte-rendu, comme il l'avait fait
précédemment, à considérer le maintien du contrat en ce qui concerne le British
Queen, comme exigé par la bonne foi.
Je
vais donner lecture d'une lettre qu'il m'a écrite sous la date du 1er janvier.
Cette lettre je ne l'avais pas demandée à M. Van de Weyer ; c'est spontanément
qu'il me l'a écrite :
« Londres,
le 1er janvier 1842.
« M.
le ministre,
« En
classant les archives de l'année qui vient de s'écouler, j'ai trouvé trois
pièces relatives à l'achat du bateau à vapeur
« Au
moment où l'on fait au ministère actuel un grief d'avoir ratifié un contrat
négocié et signé sous l'administration précédente, je croirais manquer à ce que
je dois au Roi, à son gouvernement et à ce que je me dois à moi-même, si
j'hésitais, un instant à rappeler à votre souvenir la part directe que j'ai
prise à ce dernier acte, et à vous autoriser à faire de ces détails l'usage que
vous jugerez convenable devant le sénat et la chambre des représentants.
Lorsqu'un agent diplomatique a suivi littéralement les instructions de son
gouvernement, sa tâche est remplie et sa responsabilité à couvert ; mais, lorsque,
plus tard, il est consulté sur l'acceptation d'un traité ou d'un contrat, et
que l'opinion qu'il a exprimée a exercé quelque influence sur la décision
finale du gouvernement, cet agent doit, à mes yeux, accepter la responsabilité
morale du conseil qu'il a donné.
« A
son entrée aux affaires, le ministère dont vous faites partie sentit la
nécessité de ne point se prononcer sur une question aussi importante que
l'achat de
«
Plus tard, et durant mon séjour à Bruxelles, j'appris que le conseil, avant de
se décider à ratifier le contrat, avait pris la résolution d'adresser à la
compagnie de nouvelles propositions. Je combattis vivement cette résolution ;
j'exposai au Roi, et ensuite au ministère que ces propositions seraient
considérées, en Angleterre, comme une espèce de subterfuge, habilement employé
pour rejeter sur la compagnie elle-même la responsabilité de l'annulation du
contrat. J'ajoutai que le gouvernement du Roi, après avoir obtenu des délais, après
avoir proposé et obtenu un changement dans le mode de paiement, après avoir
ainsi fait encourir à la compagnie et des frais considérables et de nouvelles
pertes, était, à mes yeux, moralement obligé de ratifier le contrat ; que, si
l'on s'en tenait à la lettre de cet acte, et au strict droit, il était sans
doute loisible au gouvernement de refuser sa ratification ; mais que l'on
aurait bientôt lieu de se convaincre de la vérité de l'axiome : summum jus, summa injuria ; qu'un pareil refus serait, à coup sûr,
envisagé comme une violation d'un engagement d'honneur plus sacré même qu'un
contrat formel, et qu'il donnerait indubitablement lieu à un procès dont une
presse hostile saurait s'emparer pour attaquer, avec sa violence ordinaire, la
personne du Roi, et pour accuser son gouvernement d'un manque de foi et de
probité : Enfin, je déclarai au gouvernement du Roi que, s'il persistait dans
sa résolution, je resterais complètement étranger à cette seconde négociation,
et je le prierais d'en charger un autre agent, convaincu que j'étais que la
compagnie ne ferait plus de concessions, et bien résolu à ne point m'exposer à
partager le blâme public dont serait frappée, en Angleterre, l'annulation du
contrat. Ce que j'avais demande me fut accordé : M. Varlet fut envoyé à
Londres, porteur des propositions nouvelles. Ce que j'avais prévu se réalisa :
la direction les rejeta à l'unanimité et annonça l'intention de se rendre à
Bruxelles et de porter ses doléances jusqu'aux pieds du trône. L'acte de
ratification, envoyé par M. Drouet, le lendemain, à la compagnie mit un terme à
ses justes plaintes, et me permit, à mon retour à Londres, de reprendre la
direction de l'affaire.
« Je
suis convaincu, M. le ministre, qu'en ratifiant le contrat, vous avez été,
comme moi, pénétré de la nécessité de remplir un engagement sacré envers une
compagnie, qui, comprenant les difficultés de la position politique, avait eu
pleine confiance en nos paroles, et avait montré la plus grande déférence. En
agissant ainsi, vous avez obéi au premier devoir de tout ministre, celui de
faire respecter le nom du souverain et l'honneur du pays. Ce n'est qu'en
compromettant l'un et l'autre que le ministère actuel, ou tout autre ministère,
aurait pu prendre une autre résolution.
« Agréez,
etc.
« Signé. SYLVAIN VAN DE WEYER.
»
Cette
lettre, messieurs, je ne l'ai pas communiquée à la section centrale, j'ai voulu
que la section centrale ne se déterminât que d'après les pièces qui étaient
connues de vous tous C'est ainsi que les choses ont été appréciées en mai
dernier, elles ne pouvaient pas l'être autrement ; elles ont été appréciées de
cette manière, j'en suis sûr par les membres du cabinet précédent en leur
particulier.
Quoiqu'il
en soit, nous sommes d'accord que l'acte est utile ; en outre, l'exploitation réduite
aujourd'hui à un seul navire, se trouve incontestablement dans les termes de la
loi du 29 juin 1840. Dès lors il me semble que pour sortir de la situation où
nous sommes, la chambre ne peut qu'accueillir les propositions faites par la
section centrale. Si la chambre avait voté les 400,000 fr. demandés au budget
de l'intérieur, le temps aurait régularisé la situation ; aujourd'hui le temps
ne peut plus la régulariser, il faut qu'elle soit régularisée par un acte
positif ; l'heure étant avancée, je bornerai là pour aujourd'hui mes
observations.
M.
Lebeau. – Vous
ralliez-vous aux propositions de la section centrale ?
M.
le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) – Je m’y rallie, sauf que je proposerai un changement
à l’art. 1er, quant au chiffre, et que je demanderai des explications sur la
portée de l’art. 4.
- La séance est levée à 4
heures et demie.