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d’intention
Chambre des représentants de Belgique
Séance du mercredi 8
décembre 1841
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre
2)
Motion d’ordre relative à la loi sur les indemnités (Osy, Rodenbach)
3)
Projet de budget de la chambre pour l’exercice 1842
4)
Fixation de l’ordre du jour. Indemnités (Osy, Smits), canal de la mer du Nord à Zelzaete via Damme (Devaux), écoulement des eaux en Flandre, industrie linière
(Delehaye), (d’Hoffschmidt),
canalisation de la Campine (Peeters, Desmaisières), indemnités (Cogels,
Dubus (aîné), Osy), industrie linière
(Delehaye, Smits)
5)
Projet de loi portant le budget de la dette publique et des dotations pour
l’exercice 1842. Amortissement de la dette publique (Osy, Smits, Osy, Smits,
Mercier, d’Huart, Osy,
Cogels, Mercier, Angillis, d’Huart, Cogels, d’Huart, Mercier,
Demonceau, Mercier, Meeus, Mercier, Demonceau,
Meeus, Mercier, Meeus)
société générale (Delfosse Meeus,
Delfosse), amortissement de la dette publique (Smits), pensions à charge du trésor public (Smits,
Osy), subvention à la caisse de retraite (Vandenbossche, Smits)
6)
Motion d’ordre relative à l’industrie linière (Delehaye,
Nothomb, Delehaye, Nothomb, Rodenbach, Cools, Delehaye, Nothomb,
Desmet)
7)
Projet de loi ouvrant un crédit destiné au payement des intérêts de
l’amortissement des emprunts belges et des rentes à charge de la dette publique
(Moniteur belge n°343, du 9 décembre 1841)
(Présidence de M.
Fallon)
M. de Renesse procède à l'appel nominal à midi
et demi.
M. Kervyn donne lecture du procès-verbal de la
dernière séance ; il est adopté.
M. de Renesse présente l'analyse des pièces adressées à la
chambre :
PIECES ADRESSEES A
« Le sieur Adolphe Kirichhoff,
né à Aix-la-Chapelle (Prusse), demande la naturalisation. »
- Renvoi à M. le ministre de la justice.
________________________
« Un grand nombre d'habitants de Bruxelles
demandent la révision de la loi sur la contribution personnelle. »
- Renvoi à la commission des pétitions.
M. Osy. - Messieurs, l'honorable M. de Mérode vous a fait, le 15 mars de cette
année, le rapport sur le projet de loi présenté par le ministre de l'intérieur
dans la séance du 2 décembre 1840, et concernant les pertes résultant de la
guerre.
Maintenant que M. le ministre de l'intérieur vient
de vous proposer un projet de loi pour venir au secours de la capitale et que
les sections vont s'en occuper sous peu, je crois qu'il serait juste et que ce
serait peut-être même dans l'intérêt de ce dernier projet de loi, que nous
discutions, avant, la loi des indemnités et pour réparer également de très
grandes pertes dans les autres parties du pays.
Le rapport sur la loi des indemnités est fait depuis
près d'un an et il n'a pas été discuté l'année passée, à cause du changement de
ministre.
Je crois donc qu'il y a convenance et même intérêt
pour le projet de loi présenté par le ministère actuel, que nous nous
occupions, avant, de la loi des indemnités et je viens vous proposer,
messieurs, de décider, qu'après la discussion des budgets, on mettra à l'ordre
du jour la loi des indemnités.
Si cette proposition est adoptée par la chambre, je
rappellerai au ministère qu'un membre de la commission a déposé, en même temps
que le rapport de M. de Mérode, une proposition qui diffère essentiellement de
la conclusion de la majorité de la commission.
Ce membre fait aujourd'hui partie
du ministère et j'espère que, quoique ministre, il soutiendra sa proposition. et je l'engage, d'ici à la discussion, de s'entendre avec
ses collègues pour que nous sachions si son opinion de justice et d'équité se
trouve appuyée et partagée par le ministère.
M. Rodenbach. - Je demande que l'honorable préopinant renouvelle sa motion après le
comité secret, lorsque MM. les ministres seront présents. Il me semble qu'on ne
peut pas, en leur absence, mettre un pareil projet à l'ordre du jour. Je ne
disconviens pas que l'honorable M. Osy peut avoir
raison, mais il me semble qu'il faut attendre la présence de MM. les ministres.
M. Osy. - Je renouvellerai tantôt ma proposition.
PROJET
DE BUDGET DE
La chambre se forme en comité secret, pour la
discussion de son budget.
A deux heures la séance publique est reprise.
M. Osy. - Messieurs, je renouvelle ma proposition de mettre à l'ordre du jour,
après les budgets, le projet de loi relatif aux indemnités, sur lequel M. le
comte de Mérode a fait un rapport, au mois de mars. En même temps je demanderai
à l'honorable M. Smits qu'il veuille bien communiquer à ses collègues du
ministère les amendements au projet dont il s'agit, qu'il a présentés à la
chambre, afin que le ministère puisse nous dire s'il se rallie à ces
amendements.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Je ne puis qu'approuver la
proposition de M. le baron Osy pour la mise à l'ordre du jour du projet de loi
relatif aux indemnités. Quant aux amendements que j'ai présentés dans le temps,
ces amendements se trouvent joints au rapport de la commission, et la chambre
pourra les examiner en même temps que le travail de la commission.
M. Osy.- Je demande que M. le ministre des finances communique ses amendements à
ses honorables collègues, afin que nous puissions savoir si le ministère est
d'accord à cet égard.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Pour le moment où la proposition sera
mise en discussion, le ministère aura à délibérer sur la
question de savoir quelle marche il aura à suivre.
M. Devaux. - Messieurs, je ne m'oppose pas à la motion d'ordre de l'honorable M.
Osy, mais je demande que la chambre mette également à l'ordre du jour, après
les budgets, la discussion du projet de loi relatif au canal de Damme, la
première section du canal de Zelzaete. Vous vous rappellerez, messieurs, que,
dans la dernière session, l'honorable M. de Puydt a fait rapport sur la
proposition de l'honorable M. Lejeune ; le projet de loi relatif au canal de Zelzaete
a déjà été discuté et adopté par la chambre ; c'est par suite d'un amendement
introduit par le sénat que le projet a été retiré par le gouvernement.
Aujourd'hui la nécessité de ce canal est reconnu plus encore qu'autrefois ; les
inondations ne font qu'augmenter, et en même temps par les fréquentes baisses
d'eau qu'elles nécessitent dans le canal de Bruges à Ostende, elles sont cause
de la détérioration de ce canal et de fréquentes interruptions de la
navigation. Ces inconvénients font sentir de plus en plus, non seulement au
commerce des Flandres, mais aussi à celui du Hainaut, la nécessité d'un canal
d'écoulement pour les eaux du nord de
Il s'agit ici d'une indemnité, d'une indemnité très
juste et surtout très urgente, car il ne s’agit pas seulement de réparer un
dommage déjà causé, mais d'empêcher ce dommage de se continuer et de se
renouveler.
Je demande que le projet dont il s'agit, soit mis à
l'ordre du jour en même temps que le projet de loi sur les indemnités, dont a parlé M. Osy.
M. Delehaye. - Messieurs, je m'associe aux vœux émis par l'honorable député de Bruges
; mais pour que nous dotions les Flandres d'un système parfait d'écoulement des
eaux, il conviendrait, dans mon opinion, de rattacher à l'examen du projet de
loi concernant le canal de Zelzaete, celui d'un projet soumis à votre examen
par les administrations communales de Deynze et
autres communes.
Ce projet n'est pas de nature à entraîner de grandes
dépenses tout en assurant à jamais un écoulement facile des eaux, pour cette
partie de
Je demanderai donc qu'il plaise à la chambre
d'engager la commission qui a été chargée d'examiner le projet en question de
nous faire promptement son rapport, afin que le jour de la discussion venu,
nous puissions nous occuper de l'une comme de l'autre proposition.
Il est un autre projet encore plus important,
puisqu'il tend à mettre un terme à la misère qui désole les Flandres ; je veux
parler du projet de loi sur les lins. J'ai déjà souvent appelé l'attention du
ministère sur cette question, et jusqu'à présent le ministère a gardé le
silence. Je lui demanderai de nouveau s'il compte sans autre retard saisir la
chambre d'un projet de loi sur les lins. La misère est portée au plus haut
degré dans les Flandres et je puis dire sans exagération aucune que les choses sont arrivées à tel point que le moindre retard
peut occasionner des malheurs irréparables.
M.
d’Hoffschmidt. –Quels que soient, messieurs, le zèle
et l'activité que nous mettions dans nos travaux, je crois que tous les budgets
ne pourront pas être votés avant six semaines d'ici. Dès lors, je demande s'il
est rationnel de décider dès aujourd'hui ce que nous ferons après l'adoption
des budgets ? Je ne le crois pas, messieurs ; car d'ici là il pourra se
présenter des projets de lois que l'on considérera peut-être comme plus urgents
que ceux dont viennent de parler les honorables préopinants. Je sais bien que,
quant à moi, je ne pourrais pas décider maintenant quel est l'objet auquel nous
devrons donner la priorité après les budgets. Je voudrais que nous eussions le
temps d'examiner quels sont les divers projets soumis à la chambre. Du reste,
nous ne savons pas lesquels sont les lois qui peuvent nous être présentées
d'ici à l'époque où tous les budgets seront adoptes. Je crois donc, messieurs,
qu’il est prudent de ne rien décider à cet égard dans le moment
actuel.
M. Peeters. - Je viens, à mon tour, messieurs, rappeler à votre souvenir un projet
qu'il serait enfin temps d’aborder. Je veux parler du projet de canalisation de
Maintenant il paraît que ce projet a été englobé
dans un grand projet de canalisation de
M. le ministre des
travaux publics (M. Desmaisières) - Messieurs le département des travaux publics
s'occupe en ce moment d'un grand travail général sur les canaux. Ce travail a
été commencé sous mon honorable prédécesseur, et j'espère qu'il sera
incessamment achevé, alors je pourrai soumettre aux chambres tous les documents
convenables sur la question soulevée par l'honorable M.
Peeters.
M. Cogels. - Messieurs, je ne conteste pas du tout l'utilité des projets dont on
vient de demander la mise à l'ordre du jour mais il est quelques-uns de ces
projets qui ne sont encore qu'à l’étude ; dès lors il serait extrêmement
difficile de fixer l'époque où l'on pourra les discuter. Quant au projet
relatif aux indemnités, en le maintenant à l'ordre du jour immédiatement après
les budgets, la chambre ne fera que confirmer une décision qu'elle a déjà
prise, car ce projet, on voudra bien se le rappeler, a déjà obtenu la priorité
plusieurs fois, et c'est toujours à cause de circonstances survenues, que la
discussion n'en a pas eu lieu. Ainsi, messieurs en réclamant la priorité pour
le projet de loi des indemnités, nous ne faisons que vous
demander la confirmation d'une décision antérieure.
M. Dubus (aîné). - Je crois, messieurs, que le projet de loi sur
les indemnités, qui a obtenu la priorité dans la session précédente l'obtiendra
encore après le vote des budgets, mais je ne vois pas la nécessité de décider
cela aussi longtemps d'avance ; nous ne pouvons pas connaître dès à présent
dans quelle position nous nous trouverons à la fin de la discussion des
budgets.
Nous allons aborder le premier budget des dépenses,
et il me semble que l'on pourrait renouveler la motion lorsque nous en serons,
sinon au dernier, du moins à l'avant-dernier budget ; si alors il y a quelque
loi urgente, vous devrez naturellement voter cette loi avant de vous occuper du
projet relatif aux indemnités ; je crois bien que les honorables auteurs de la
motion l'entendent ainsi, et alors la chambre ne serait pas liée par la
résolution qu'on lui demande. Eh bien, je crois qu'il est plus simple
d'attendre que nous soyons plus avancés dans la discussion des budgets.
Je le répète toutefois, et l'on peut prendre acte de
mes paroles, si à la fin de la discussion des budgets, nous sommes dans la même
position qu'à présent, je ne verrai aucun inconvénient à ce qu'on donne la
priorité au projet de loi sur les indemnités.
M. Osy. - Je retirerai pour le moment ma proposition et je
la reproduirai lorsque nous serons à la fin des budgets.
M. Delehaye. - Déjà plusieurs fois, messieurs, j'ai interpellé le ministère sur la
question des lins, et toujours il garde le silence. N'aurait-il pas quelques
paroles de consolation pour les malheureux tisserands et fileuses des Flandres
? Ne peut-il pas nous promettre qu'incessamment il nous présentera un projet de
loi sur cette matière ? Si le ministère recule, je prierai quelques-uns de mes
honorables collègues des Flandres de se joindre à moi pour
présenter un projet.
Il doit être constant pour le ministère que
l'industrie est dans une souffrance extraordinaire et je demande si, après une
enquête qui a duré un an et demi, il n'est pas enfin temps de prendre des
mesures pour mettre un terme à la misère des Flandres. Cette misère est connue
du gouvernement et le premier projet que je m'attendais à voir présenter après
l'ouverture de la session, c'est bien certainement un projet de loi sur les
lins. Eh bien, messieurs, je m'étais trompé, on est venu nous présenter un
projet de loi en faveur de la ville de Bruxelles et l'on a laissé sans réponse
les réclamations des Flandres.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Messieurs, l'honorable membre qui
vient de parler, peut être persuadé de toute la sollicitude du gouvernement
pour les industries du pays et notamment pour une des industries les plus
intéressantes, l'industrie linière, mais il me serait impossible, en l'absence
de mon honorable collègue, le ministre de l'intérieur, de dire à la chambre à quel
point d'avancement en est le travail sur cette question. Je prierai en
conséquence l'honorable M. Delehaye de vouloir bien ajourner son interpellation
jusqu'à l'arrivée de M. le ministre de l'intérieur spécialement chargé du
commerce et de l'industrie.
PROJET
DE LOI PORTANT LE BUDGET DE
Discussion
des articles
Personne ne demandant la parole dans la discussion
générale, on passe à la discussion des articles.
Chapitre Ier – Intérêts de la dette
Article premier
« Art. 1er. Intérêts de la dette active
inscrite au grand-livre auxiliaire : fr. 611,894 17
« Complément de la rente annuelle de 10,582,000
fr. 58 c. (5 millions de florins), à payer en exécution de l’article 13 du
traité signé à Londres le 19 avril 1839 : fr. 9,970,116 41
« Total : fr. 10,582,010
38. »
- Adopté.
« Art. 2. Intérêts de l’emprunt belge de 100,800,000 fr. à 5 p.c. autorisé par la loi du 16 décembre
1831 : fr. 5,040,000
« Dotation de l’amortissement de cet emprunt :
fr. 1,008,000
« Total : fr. 6,048,000 »
M. Osy, rapporteur. - Messieurs, je renouvellerai le vœu exprimé par la section centrale,
pour que le gouvernement s'occupe de la formation d'une caisse d'amortissement.
M. le ministre a dit que, jusqu'à présent, il y avait une faible partie de nos
emprunts dont l'amortissement se fait dans le pays. Cependant l'amortissement
de la moitié du nouvel emprunt doit se faire dans le pays ; il en est de même
d'une partie de l'emprunt 4 p. c. Vous avez, après cela, les fonds de
consignation, les fonds de dépôt et les fonds de cautionnement. Je demande donc
que M. le ministre s'occupe d'un projet de loi à cet égard.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Messieurs, je me propose de m'occuper
de cet objet en même temps que de la loi sur la comptabilité, et de celle sur
la cour des comptes.
- L'article est mis aux voix et adopté.
Articles 3 à 7
« Art. 3. Frais relatif au paiement des
intérêts et à l’amortissement du même emprunt : fr. 122,000. »
« Art. 4. Intérêts de l’emprunt de 30,000,000 de francs à 4 p.c. autorisé par la loi du 18 juin
1836 : fr. 1,200,000 »
« Dotation de l’amortissement de cet emprunt :
fr. 300,000
« Total : fr. 1,500,000. »
« Art. 5. Frais relatif au paiement des
intérêts et à l’amortissement du même emprunt : fr. 4,500. »
« Art. 6. Intérêts de l’emprunt de 50,850,800 fr. à 3 p.c., autorisé par la loi du 25 mai 1838 :
fr. 1,525,324.
« Dotation de l’amortissement de cet emprunt :
fr. 508,308.
« Total : fr. 2,034,032. »
« Art. 7. Frais relatifs au payement des
intérêts et à l'amortissement du même emprunt : fr. 32,000
Ces divers articles sont successivement mis aux voix
et adoptés.
« Art. 8. Intérêts de l'emprunt de 86,940,000 fr., à 5 p. c., autorisé par la loi du 26 juin 1840
: fr. 4,347,000 »
« Dotation de l'amortissement de cet emprunt :
fr. 869,400. »
« Total : 5,216,400. »
M. Osy, rapporteur. - Messieurs, la section centrale a exprimé le vœu que les fonds destinés
à l'amortissement de ce dernier emprunt soient employés à l'achat de bons du
trésor, portant intérêt, pendant tout le temps que les obligations seront au
pair ou au dessus, et que dès lors l'amortissement ne pourra avoir lieu. Je
demanderai à M. le ministre des finances s'il compte opérer
dans ce sens.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Messieurs,
l'observation que vient de présenter l'honorable M. Osy me paraît parfaitement
fondée ; mais le gouvernement aura à examiner s'il doit faire usage de ces
fonds, soit à l'achat de bons du trésor, soit de toute autre manière qu'il
trouvera la plus convenable.
M. Osy, rapporteur. - Je vois que M. le' ministre des finances est d’accord avec moi sur ce
point, mais il a ajouté que, quant à l'emploi du fonds, il serait affecté à
l'achat de bons du trésor, ou recevrait telle autre destination que le
gouvernement trouverait la plus convenable. Selon moi, il n'y a d'autre moyen
que de l'employer en bons du trésor.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Quand j'ai fait pressentir que,
dans mon opinion personnelle, le meilleur usage à faire de ces fonds, c'était peut-être
l'achat de bons du trésor, je n'ai cependant pas voulu me lier à cet égard ;
d'autres moyens peuvent se présenter, qui seraient tout aussi convenables et
peut-être plus lucratif pour le trésor. Par conséquent, le gouvernement doit
avoir toute latitude. Au reste, la chambre peut être persuadée que jamais ce
fonds ne sera détourné de sa destination.
M. Mercier. - Je voulais faire l'observation qui vient d'être présentée par M. le
ministre des finances ; j'ajouterai seulement qu'il serait
possible qu'il n'y eût pas de bons du trésor à émettre.
M. d’Huart. - Je demanderai à l'honorable M. Osy de s'expliquer clairement sur
l'interpellation qu'il a faite à M. le ministre des finances. Veut-il qu'il soit
fait de ces intérêts ainsi réservés en fonds spécial, pour
amortir à jour déterminé ? S'il s'agit d'un fonds spécial, si l'honorable
membre veut qu'on hypothèque une partie des ressources du, pays, sans qu'il
puisse en être disposé, je ne pourrai pas donner mon
assentiment à une pareille mesure.
M. Osy. - D'après le contrat fait avec les prêteurs pour l'emprunt de 86,000,000 fr., il y aura un amortissement d'un pour cent, qui
ne devra pas être effectué pendant les six premières années, aussi longtemps
que les fonds publics se trouveront au pair et au-dessus. Eh bien, si à
l'expiration de l'année, les fonds d'amortissement n'ont pas été employés, il
faudra alors les affecter à l'achat des bons du trésor.
M. Cogels.
- Messieurs, je ne
sais si le gouvernement peut suspendre l'amortissement, sans y être
autorisé, car la loi établit l'amortissement comme obligatoire. Voici le texte
de la loi :
« Il sera consacré à l'amortissement
de cet emprunt une dotation d’au moins 1 p. c. par an du capital
nominal, indépendamment des intérêts des obligations amorties. L'amortissement
se fera par le gouvernement.
Interrogé par la section centrale chargée
de l'examen du budget de 1841, sur les clauses et conditions des derniers
emprunts, au début de la session précédente, l'honorable M. Mercier répondit :
« qu'il s'était réservé pour le terme de six années, à partir du 1er
octobre dernier, la faculté de suspendre l'amortissement lorsque le cours des
obligations serait au-dessus du pair ; qu'après ces six années, le gouvernement
reprend la faculté de rembourser au pair ; que pour cette suspension un projet
de loi sera incessamment présenté à la chambre. »
Ainsi, si la condition de l'amortissement était tout
à fait facultative, si le ministère l'avait regardée comme telle, certainement
il n'aurait pas eu besoin de proposer un projet de loi. Maintenant, ce projet
est-il nécessaire ou non, d'après le texte de la loi ? Je laisse à la chambre à
apprécier cette question.
Mais, puisque j'ai la parole, je me
propose de m'étendre un peu sur la question de l'amortissement et sur la
manière dont il se trouve organisé.
Déjà l'année dernière on avait émis le vœu de voir
s'organiser une caisse d'amortissement. Ce vœu a été renouvelé cette année. M.
le ministre a fait à la section centrale une réponse d'après laquelle il ne
paraît pas partager son opinion, parce qu'il regarde la chose comme trop peu
importante. Les parties de l'emprunt dont l'amortissement se fait ici autrement
que par le tirage au sort, ne s'élèvent en effet, actuellement, qu'à 277,500
francs environ par semestre. Mais, messieurs, les gouvernements ne doivent pas
travailler seulement pour le présent ; ils doivent aussi travailler pour
l'avenir.
Eh bien, il y a telle circonstance qui
peut faire tomber le cours de nos 5 p. c. au-dessous du pair.
Dès lors l'action de l'amortissement reviendrait
très importante ; elle s'élèverait au-delà de 2 millions. Il est vrai que, par une
clause que je ne saurais approuver, mais par laquelle il a fallu passer, il a
été stipulé que l'amortissement du premier emprunt de 100 millions se ferait à
Paris, par les soins de la maison Rothschild. On n'a pas alors non plus prévu
ce qui devait arriver ; car nécessairement le crédit de
Eh bien, quelle est la conséquence de cela ? C'est
que toute la partie de l'amortissement qui doit se faire à Paris, se fait
effectivement à Bruxelles ou à Anvers ; que fait-on ? Des maisons de Paris ou
d'ici, qui sont instruites des époques où l'amortissement doit se faire,
achètent à Bruxelles et à Anvers, et vont revendre à Paris, au gouvernement,
avec un ou un et demi p. c. de bénéfice, C'est le pays qui perd et le banquier
qui gagne. Voilà ce qu'il faudrait éviter ; et pour cela, l'institution d'une
caisse d'amortissement est extrêmement utile, Car, tout en reconnaissant qu'il
nous est impossible de faire comme en France, c'est-à-dire, d'ordonner que
l'amortissement se fasse jour par jour, parce que la somme serait trop minime,
cette somme ne serait que de 1,500 à 2,000 fr. par jour. On pourrait ordonner
que l'amortissement se fît une ou deux fois par semaine, et l'on donnerait à
l'action de la caisse toute la publicité nécessaire.
On pourrait commettre pour cela un agent de change
près de la bourse de Bruxelles ou d'Anvers qui serait chargé, par la
commission, d'effectuer les rachats. De cette manière, l'action de
l'amortissement serait permanente ; le gouvernement aurait la certitude de
n'acheter qu'au cours moyen ; tandis que les rachats se sont faits jusqu'ici
beaucoup au-dessus du prix moyen du semestre dans lequel l'amortissement a eu
lieu.
J'ai
remarqué dans les réponses du ministre que, pour la seconde partie de l'emprunt,
la moitié de l'amortissement se faisait par la maison Rothschild à Paris. Je
ferai observer que ce mode d’amortissement n'est pas obligatoire et ne peut pas
l'être. Si on avait rendu ce mode obligatoire dans le contrat, on aurait violé
une des dispositions de la loi qui porte : que l'amortissement sera fait par
le gouvernement.
Dans les explications données l'année dernière, M.
le ministre des finances a dit qu'il n'avait pas voulu s'engager vis-à-vis la
maison Rothschild ; qu'il s'était réservé le choix des agents pour opérer
l'amortissement. Il a bien fait ; car il arrivera un moment, et ce moment n'est
pas éloigné, où le gouvernement aura intérêt à payer à la maison Rothschild une
commission pour ne rien faire du tout. Ce sera là ce qui sera le plus
profitable ; sans cela, nous lui paierions une commission pour acheter à Paris
1 à 1 1/2 peut-être plus cher qu’on n’achèterait à Bruxelles.
Nous ferons bien de lui payer la commission stipulée
par le contrat en lui disant : vous êtes déchargée de toute gestion. Nous y
trouvons notre compte l'un et l'autre.
Ces observations prouveront à la chambre combien il
est urgent instituer une caisse d'amortissement ; elle pourrait être confiée à
la même commission que les dépôts et consignations. En France, le personnel
n'est pas le même, l'organisation l'est complètement.
M. Mercier. – Lorsqu’il s'est agi de conclure l'emprunt, le gouvernement a désiré ne
pas s'engager à en amortir les obligations, quand leur cours serait au-dessus
du pair. Mais, lié par la loi, il savait qu'il ne pouvait faire à cet égard une
stipulation absolue. C’est pour cela qu'il n'a fait que se réserver la faculté
d'amortir ou ne pas amortir quand l'emprunt serait au-dessus du pair. Pour se
dégager de l'obligation d'amortir stipulée dans la loi d'emprunt, le ministère
se proposait de soumettre aux chambres un projet de loi que les circonstances
ne lui ont pas permis de présenter avant sa retraite. Mais il est indispensable
qu'une loi autorise la suspension de l'amortissement. Cette loi pourrait même
avoir un effet rétroactif.
La loi d'emprunt renferme également une clause
d'après laquelle le gouvernement belge peut opérer l'amortissement par tel agent qu’il juge convenable de désigner.
Ainsi, cette partie de la loi a aussi été fidèlement exécutée.
Quant à la création d'une caisse d'amortissement,
une commission a été chargée par moi d'examiner cette question ; son examen
n’était pas terminé au mois d'avril dernier ; elle devait se réunir, une fois
encore pour prendre des conclusions d'après lesquelles je
me réservais de régler ce qui a rapport à l'amortissement et à la caisse des
consignations.
M. Angillis. - La question qu'on vient de soulever prouve de la manière la plus
évidente la nécessité d'organiser en Belgique une caisse d'amortissement fondée
sur les véritables principes financiers et régie par une
administration particulière. Jusqu'à présent cela n'a été qu'un vœu et un vœu
patriotique émis par la section centrale. Je me suis rallié à ce vœu. Le temps
viendra où je le soutiendrai de tous mes moyens. Ce vœu n'a été émis que pour
appeler l'attention du gouvernement sur un objet auquel tous les intérêts de la
nation sont intimement liés. Dans quelque temps, cette question d'une haute
utilité deviendra une nécessité.
Messieurs, les connaissances que nécessitent
l'administration des finances et qui sont si éminemment utiles sont extrêmement
peu cultivées en Belgique. Je voudrais qu'elles fussent de même qu'en France,
qu'on nous cite si souvent comme modèle à suivre.
L'administration des deniers publics se compose de
deux branches bien distinctes : la science d'établir, de régir et de percevoir
les impôts de toute nature et la science d'emprunter.
Comme, toutes les questions qui se rattachent à la
théorie de l'amortissement sont de leur nature extrêmement compliquées, alors
même que la dette publique consiste en deux fonds qui n'ont qu'un seul et même
intérêt ; quand, comme dans notre pays, la dette est constituée à divers taux
d'intérêt, ces questions se compliquent de mille circonstances. Pour bien les
traiter, il faut se livrer à des considérations qui embrassent le passé, le
présent et l'avenir.
De là l'indispensable nécessité d'organiser une
bonne caisse d'amortissement et de créer une bonne administration particulière
pour la diriger.
Cette question mériterait une longue discussion, une
discussion approfondie, Comme elle n'est pas à l'ordre du jour, comme il n'y a
pas de proposition formelle faite, je veux seulement appeler l'attention du
gouvernement sur cet objet.
Si d'ici à un an, c'est-à-dire si à la session
prochaine le gouvernement ne prend aucune mesure et que je sois encore membre
de la chambre, je me propose de faire de cet objet un projet de loi que je
présenterai à la discussion et à la sanction de la chambre.
M. d’Huart.
– L’honorable
préopinant a demandé à M. le ministre des finances de trancher, dès maintenant,
une question que je regarde comme très grave, et je suis, sur ce point, d'un
avis tout à fait différent.
M. Osy veut qu'aussi longtemps que le nouvel emprunt
5 p. c. sera au-dessus du pair et que, par conséquent, il sera interdit
d'employer la dotation annuelle de l'amortissement affectée à cet emprunt, il
veut, dis-je, que cette dotation soit en quelque sorte hypothéquée en bons du
trésor ou de toute autre manière, pour l'accumuler annuellement et
successivement, à l'effet d’en former un fonds de réserve, qui serait nécessairement
employé au rachat de l'emprunt, lorsque le cours en serait redescendu
au-dessous du pair.
Or, moi, je prie, au contraire, M. le ministre de ne
trancher la question dans aucun sens, de la tenir en réserve jusqu'au moment où
il présentera un projet de loi dans le sens indiqué par M. Mercier, projet que
nous examinerons alors sérieusement avec toutes les questions qui s'y
rattacheront.
Si c'était le moment, je vous présenterais de suite
quelques réflexions sur les inconvénients qu'entraînerait avec lui le système
de M. Osy. Je démontrerais que dans telles circonstances données, l'Etat serait obligé dans le même instant de rembourser un emprunt à un taux élevé et de contracter un nouvel emprunt à un taux beaucoup plus
bas pour solder le premier. Or, je crains cette éventualité
et je désire qu'on ne s’y expose pas légèrement.
Quand nous serons appelés à examiner spécialement la
question de l'amortissement dont il s'agit, j'entrerai dans les développements
dont elle est susceptible ; à cette heure je craindrais de faire perdre
inutilement du temps à la chambre en lui exposant ainsi incidemment de plus
longues considérations.
Ceux de mes honorables collègues auxquels je réponds
comprendront mon objection. Si l'emprunt tombait à 98, par
exemple, et que nous eussions 10 millions en réserve selon la demande de M. Osy, nous serions obligés de racheter jusqu'à concurrence de cette somme,
tandis que dans le même moment il pourrait se faire qu'ayant besoin de 10 millions
pour d'autres dépenses quelconques, et la caisse se trouvant dépourvue, nous
devrions emprunter ces 10 millions à des conditions si onéreuses, eu égard aux
commissions à donner aux prêteurs, ainsi qu'à d'autres frais inévitables, que
nous n'obtiendrons pas 95 pour cent, alors que, je le répète, nous
rembourserions d'un autre côté à 98. Nous aurions donc, pour un tel cas,
préparé une mesure éminemment préjudiciable aux intérêts du pays.
Tous les ans, il faut sans doute porter au
budget la somme nécessaire pour la dotation annuelle de 1 p. c.
d'amortissement, mais si cette dotation, pour rester dans les termes du
contrat, n'est pas employée pendant l'exercice pour lequel elle a été votée,
elle peut très bien rester en boni dans la caisse ; c'est au moins là
une question à examiner sérieusement avant d'admettre le
système que M. Osy voudrait faire prévaloir immédiatement.
M. Cogels.
- Je ne m'étendrai
pas non plus sur cette question, bien que j'aie l'occasion de le faire. Je prierai
cependant l'honorable préopinant de remarquer que je suis tout disposé à
reconnaître les inconvénients qui pourraient résulter pour le trésor de la
mesure proposée, mais qu'il ne nous est pas possible de parer à ces
inconvénients ; ils résultent des contrats que nous
avons souscrits, quand nous
avons stipulé un amortissement spécial à chaque emprunt. Il ne faut pas pour
cela qu'il y ait des événements graves, il ne faut pas que
Les fonds publics ne restent pas dans les mains des
spéculateurs. Ils vont, au bout d'un certain temps, dans les mains des rentiers
qui les gardent comme une propriété et à qui vous ne pouvez plus les arracher
que difficilement.
Sur l'emprunt 3 p. c. vous avez affecté 1 p. c. du
capital nominal à l'amortissement. L'action de cet amortissement s'accroît
journellement ; cette progression est en raison inverse de la masse sur
laquelle l'amortissement est destiné à agir. Quand nous aurons racheté la
moitié du 3 p. c., l'amortissement sera plus que
doublé et la masse des rentes à racheter sera moindre de moitié.
Qu'arrivera-t-il ? c'est que vous serez forcés de
racheter peut-être à 98 du 3 p. c., tandis qu'un nouvel emprunt en 4 ou en 5 pour cent
pourra se faire en même temps à un prix inférieur.
C'est là un inconvénient auquel vous ne pouvez pas
porter remède ; vous avez affecté à votre emprunt de 86 millions un
amortissement de 1 p. c. du capital ; il ne vous est pas permis de le détourner
de sa destination, pour l'employer à l'achat d'un autre fonds, lors même que
vous y trouveriez un avantage de 10 p. c.
C'est un tort que nous avons eu. En Angleterre on
n'agit pas ainsi ; l'amortissement est général ; il a lieu selon le plus grand
avantage du trésor, .tantôt sur un fonds, tantôt sur un autre ; mais la loi ne
nous permet pas de procéder de la sorte ; nous devons en
subir les conséquences.
M. d’Huart.
- L'honorable
préopinant raisonne comme si nous étions forcés d'amortir ; cependant il n'en
est pas ainsi ; quand le cours de la rente est au-dessus du pair, il est
loisible, en vertu du contrat, de ne point amortir. Ceci s'écarte de la loi qui
a décrété l'emprunt, j'en conviens ; mais la seule loi qui nous lie, c'est
celle du contrat avec les prêteurs. Or, ce contrat réserve à la législature la
faculté de modifier sa première résolution et de décider, quand elle le voudra,
que l'amortissement annuel ne sera obligatoire que dans le
cas où le cours de l'emprunt sera en dessous du pair.
M. Mercier. - Si les observations de l'honorable M.
Cogels sont justes en général, elles ne le sont pas quant à leur application au
cas actuel, ainsi que vient de l'expliquer l'honorable M. d'Huart. En effet, il
s'agit de savoir si nous sommes tenus de conserver un fonds de réserve pour en
faire emploi en bons du trésor ou autrement.
Dans ma pensée, cette question est restée tout à
fait intacte et nous sommes libres de la résoudre selon
notre plus grand intérêt ; du reste, il est inutile de prolonger la discussion
sur ce point que nous examinerons plus amplement lorsque le projet de loi relatif à l'amortissement sera présenté.
M. Demonceau. - J'écoute attentivement cette discussion,
parce qu'elle a du rapport avec la loi même de l'emprunt. Nous voulions (la
majorité de la section centrale) un amortissement annuel ; dans quel but ? Dans
le but d'améliorer la position des créanciers de l'Etat, parce que garantir aux
créanciers de l'Etat un amortissement annuel, c'était garantir en quelque sorte
l'amélioration annuelle de leur capital. Mais nous voulions l'amortissement
annuel de 1 p. c. par les soins du gouvernement et d'après une loi. La loi n'a pu obtenir mon assentiment, quoique je fusse rapporteur, parce qu'on
s'est écarté de nos théories.
Il est vrai que l'obligation d'un amortissement
annuel de 1 p. c. est dans la loi. Mais telle qu'elle a été votée, le
gouvernement pourrait modifier sur ce point la loi même. Aussi a-t-il fait des
contrats d'après lesquels il a suspendu l'amortissement, mais pour un temps
limité. En cela on s'est écarté, sans doute, de ce qu'on avait promis.
M. Mercier. - Je demande la parole.
M. Demonceau. - Mais j'ajoute que la loi autorisait le gouvernement à agir au mieux des
intérêts du pays. Il est certain que si vous devez absolument amortir
annuellement 1 p. c., dans quelques années, c'est-à-dire après le délai fixé de
six ans, il vous faudra racheter ces 5 p. c. à tout prix, fût-ce à 105 ou même
au delà ; à moins que le contrat n'ait modifié la loi ; en ce cas, je crois
qu'il y a un moyen de parer à l'inconvénient, c'est de faire la loi nécessaire
pour régler l'amortissement et autoriser à le suspendre dans des cas donnés.
Toute la question est de savoir si vous pourrez le faire en présence des
contrats au delà du terme y stipulé. Les observations qu'a présentées
l'honorable M. Cogels sur le 3 p. c. doivent s'appliquer également au 5 p. c.
C'est la même théorie dans les deux cas, et M. Cogels vous a prouvé que, dans
un temps donné, il pourra se faire que pour le rachat du 3 p. c., rachat devant
opérer sur un capital considérablement réduit, vous devrez,
peut-être, racheter au pair.
M. Mercier. - Si j'ai bien compris l'honorable préopinant, il pense que, d'après le
contrat, l'amortissement ne pourrait être suspendu que pendant un temps limité,
c'est-à-dire qu'au delà des six ans expirés, l'obligation d'amortir incomberait
au gouvernement. A cet égard l'honorable membre est dans l'erreur ; la
stipulation que renferme le contrat est entièrement en notre faveur, car, après
les six ans expirés, nous pouvons rembourser l'emprunt au pair. Quant à ce qui
concerne l'obligation à laquelle l'honorable membre croit que le gouvernement
sera tenu vis-à-vis des porteurs de titres, elle n'existe pas. Elle n’existe
que vis-à-vis de la loi, car les titres mêmes comprennent la stipulation que le
gouvernement se réserve la faculté de ne pas amortir.
M. Meeus. - J'ai demandé la parole pour faire une
observation en réponse à ce qu'a dit l'honorable M. Demonceau. Il a dit que,
dans quelques années, on pourrait être obligé de racheter du 5 à 105 ou à
Puisque j’ai la parole, je dirai un mot sur
l'amortissement du dernier emprunt. D'après moi, conformément à la loi, 1 p. c.
doit être affecté annuellement à l'amortissement de cet emprunt ; mais une
réserve expresse est faite par le gouvernement, d'après laquelle il peut
suspendre l'amortissement quand les fonds sont au-dessus du pair, ce qui ne
veut pas dire que vous pouvez anéantir l'amortissement annuel, mais ce qui veut
dire que vous renverrez à d'autres temps son application. Voilà comment j'ai
compris la loi et le contrat.
Quant à ce qu'a dit l'honorable M. d'Huart, je lui
répondrai que tout ce qu'il a dit est vrai, sauf cependant pour le 5 p. c. ; car le gouvernement doit conserver la
pensée de rembourser le 5 p. c., pensée que l'honorable M. d’Huart a eu le
premier : Je suis charmé de le dire ici, pour cela il est essentiel que les
fonds affectés à l'amortissements pendant six années s'accumulent, afin de
rendre plus facile l'exécution d'un projet analogue à celui de M. d'Huart,
projet réalisable, si la prospérité nationale va toujours
croissant et si nous conservons pendant plusieurs années encore le bienfait de
la paix.
M. Mercier. - Dans mon intention, lorsque l'emprunt a été contracté, le gouvernement
ne s'est pas engagé à racheter des rentes pour l'amortissement lorsque les
fonds seraient au-dessous du pair, ni à former un fonds de réserve ; il était
entendu que l'on prendrait des dispositions réglementaires et que, par une loi,
il serait stipulé, par exemple, qu’au moment où le rachat par amortissement
devrait avoir lieu par suite de la baisse des obligations au-dessous du pair,
il serait disposé, à cette fin, des
intérêts des obligations déjà rachetées. et de la
quotité de 1 p. c. pendant les deux ou trois mois qui auraient précédé cette époque.
M. Demonceau. - J'avais compris la pensée de M. Mercier, telle qu'il l'explique,
c'est-à-dire que cet honorable membre n'entendait pas que le fonds
d'amortissement fût nécessairement consacré à l'amortissement ; mais vous venez
d'entendre un membre qui a pris part, en une autre qualité, au même contrat ; cet
honorable collègue entend la chose comme moi, avec cette
différence que si la rente était, après six ans, au pair ou
au-delà, il pourrait être procède au remboursement par un nouvel emprunt. Je
comprends maintenant les efforts de l'honorable collègue. Les nouveaux emprunts font
toujours l'affaire de certaines personnes, de certains établissements. Me voilà
donc d'accord avec l'honorable préopinant , il n’y aura possibilité de faire
usage de la somme portée au budget pour l'amortissement annuel qu'après six ans
; vous aurez ainsi 6 p. c. de réserve. Ces 6 p. c. ne pourront être employés
qu'à l'amortissement du capital. Si les 5 p. c. sont au-dessous du pair, le
gouvernement devra appliquer les six années de réserve à l'amortissement ; mais
qu'arrivera-t-il si les 5 p. c. sont au-dessus du pair ? Que l'amortissement
pourra être de nouveau suspendu pour tenir de nouveau l'annuité, si je puis
m'exprimer ainsi, en réserve.
Or, messieurs, ou je me trompe, ou il suffira de
maintenir le 5 pour cent au-dessus du pair, pour que l'amortissement ne puisse
jamais s'opérer qu’au moyen d'une conversion ou d'un nouvel emprunt. Du reste,
les contrats font la loi des parties, ainsi que je l’ai dit dans une autre
circonstance ; la majorité de cette chambre a donné pleins pouvoirs au gouvernement pour obliger l'Etat.
M. Meeus. - J'ai demandé la parole pour attirer l'attention de la
chambre sur une clause formelle de la loi.
M. d’Huart. - C'est le contrat qui fait la loi.
M. Meeus. - Eh bien ! la
loi de contrat, je le pense, veut aussi qu'un pour cent d'amortissement soit
voté annuellement, c'est-à-dire que l'emprunteur et le prêteur ont eu en vue
qu'en 36 ans et quelques mois, l'emprunt se trouverait totalement amorti. Voilà
quelle a été la pensée et de l'emprunteur et du prêteur.
Maintenant, messieurs, dans cet ordre d'idées, je
vous demande s'il est possible, pour arriver à ce but, d'employer un autre
moyen que de mettre de côté le 1 pour cent d'amortissement à cause de la clause
suspensive qui se trouve dans le contrat, et d'attendre le moment où vous
pourrez en faire l'application lorsque l'emprunt tombera au-dessous du pair, ou
bien lorsque le jour où vous pourrez le rembourser au pair sera arrivé. Voilà
la question pure et simple.
Je demanderai à mon tour à l'honorable M. Mercier,
si lorsqu'il était ministre des finances, il a entendu autre chose que ceci :
c'est que l'emprunt qu'il contractait serait remboursé en 36 ans et quelques
mois, à l'aide d'un pour cent d'amortissement, s'accumulant par les intérêts
d'année en année, ainsi que cela a lieu pour les autres emprunts 5 pour cent ;
Eh bien, certainement la question ainsi posée doit être résolue par
M. Mercier, comme je viens de la résoudre. Vous ne pouvez la résoudre autrement ou vous manquez à la loi et au contrat. .
M. Mercier. - Messieurs, j'ai déjà fait observer que le contrat déroge à la loi, ou
plutôt qu'il laisse au gouvernement la faculté de déroger à la loi ; et cette
dérogation n'est pas limitée, c'est-à-dire que la faculté de ne pas amortir
l'emprunt au-delà du pair n'est soumise à aucune restriction.
Quant au raisonnement de l'honorable M. Meeus, il
pèche nécessairement ; car si l'emprunt était toujours au-dessus du pair,
comment serait-il remboursé en 36 ans ? Nous ne sommes pas tenus non plus à
amortir, ou à rembourser l'emprunt au pair six ans après la date du contrat ;
nous en avons simplement la faculté. Si donc l'emprunt est toujours au-delà du
pair, nous pouvons rester cent ans, sans le rembourser, si cela nous convient.
Il n'y a aucune clause dans le contrat qui stipule que l'emprunt doit être
remboursé ; il y a, comme je l'ai dit, une dérogation à la loi facultative pour
le gouvernement.
Je ne suis donc pas d'accord avec
l'honorable M. Meeus que l'emprunt doit être remboursé en trente-six ans.
M. Meeus. - Je demande la parole. .
M. le président. - Je ferai observer qu'il serait à propos d'abréger cette discussion ; le
contrat d'emprunt n'a pas même été communiqué à la chambre.
M. Meeus. - Je ne dirai que deux mots ; je veux
seulement faire observer que l'argumentation de l'honorable M. Mercier tombe à
faux, lors même que l'emprunt resterait toujours au-dessus du pair, et en effet
l'amortissement aurait l'effet voulu par la loi, puisque le 1 pour cent
s'accumulant dans les caisses de l'Etat, on pourrait rembourser en une ou
plusieurs fois la totalité de l'emprunt.
M. Delfosse. - L'honorable M. Osy a exprimé un regret que nous partageons tous : c'est
qu'un fonds d'amortissement considérable reste et puisse rester longtemps sans
emploi et improductif ; mais, messieurs, le mal est beaucoup plus grave que ne
le signale l'honorable membre ; ce n'est pas seulement le fonds d'amortissement
qu'il a indiqué, ce sont d'autres fonds bien plus considérables qui restent
improductifs, et attendent leur emploi.
Ainsi, nous avons dans ce moment une grande partie
de l'emprunt destiné au chemin de fer qui demeure sans emploi, et qui ne
produit rien. Je sais qu'une portion de cet emprunt a été provisoirement appliquée
à l'extinction des bons du trésor ; mais, je le répète, une autre portion très
importante qui ne pourra être dépensée que plus tard, reste improductive, c'est
là un mal très grave qui doit fixer l'attention du gouvernement et des
chambres.
Et où se trouvent, messieurs, ces fonds improductifs
? Ils se trouvent dans les caisses de
Je conçois très bien le désir qu'a l'honorable M.
Meeus de voir les fonds de l'Etat, destinés à l'amortissement de nos emprunts
ou à tout autre emploi, s'accumuler dans les caisses de
M. Meeus. - Pour moi, messieurs, je ne comprends pas qu'un membre de cette chambre
puisse inculper l'intention de ses collègues.
Je respecte les opinions de M. Delfosse, et quand il
les émet et que je ne les partage pas, eh bien ! au
moins, mettant la main sur ma conscience, je juge les siennes par les miennes,
je crois à ses bonnes intentions et je le prie de croire aux miennes.
Je n'ai ici d'autre intérêt que celui d'un loyal
député ; je sais me dégager ici de toute autre préoccupation, et il n'est
permis à qui que ce soit d'incriminer mes intentions.
Quant à la société générale, puisqu'on l'a attaquée,
je dirai que les fonds qu'elle a dans ses caisses, ou bien sont les siens, ou
bien sont ceux de l'Etat. Ceux de l'Etat sont à la disposition du gouvernement
; et soit qu'ils proviennent des emprunts, soit qu'ils proviennent des
amortissements, soit qu'ils proviennent des impôts, le gouvernement en est le
tuteur ; il peut en disposer. Quant aux fonds qu'elle a
dans son trésor, ils sont bien à elle, elle n'a pas à en rendre compte.
M. Delfosse. - Je n'ai voulu inculper en aucune manière les intentions de l'honorable
M. Meeus ; j'ai cité un fait qui n'a été, et qui ne sera contesté par personne
; c'est que l'État paie en ce moment un intérêt à
L'honorable M. Meeus nous dit que les fonds de
l'Etat qui se trouvent dans les caisses de
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Je crois
qu'il faut terminer ce débat et s'en tenir exclusivement à la
proposition faite par le budget.
La loi du dernier emprunt, comme toutes les lois
antérieures, a fixé à 1 p. c. le taux de l'amortissement, qui dès lors doit
figurer au budget.
L'honorable M. Osy a demandé que la somme demandée à
ce titre pour le dernier emprunt fût employée, c'est-à-dire qu'elle pût
fructifier au profit du fonds d'amortissement même. C'est là un objet à
examiner et sur lequel je n'ai pas voulu prendre d'engagement positif. Nous
Verrons d'après les circonstances, ce qu'il a y aura à faire ; mais, en
attendant, je crois que la chambre ne peut que se tenir dans les termes des
propositions du projet de loi.
- Le chiffre est adopté.
Articles 10 à 16
« Art.10. Intérêts de l'emprunt de fr. 1,481,481 48 c. à 5 p.c., autorisé par arrêté royal du 21 mai
1829, pour l'érection de l'entrepôt d'Anvers : fr. 74,074 07
« Dotation de l'amortissement de cet emprunt :
fr. 14,814 81
« Total : 88,888 88. »
« Art. 11. Frais relatifs au même
emprunt : fr. 200. »
« Art. 12. Intérêts et frais présumés
de la dette flottante calculée sur une
émission éventuelle de 10,000,000 : fr. 500,000. «
« Art. 13. Intérêts de la dette
viagère : fr. 5,500 »
« Art. 14. Intérêts
à payer aux anciens concessionnaires de
« Art. 15.
Intérêts à payer à la société générale pour favoriser l'industrie
nationale, en exécution de la transaction avec lesdits concessionnaires,
autorisée par la loi du 26 septembre 1835 : fr. 230,705 89. »
« Art. 16. Indemnité de reprise à payer à la
société concessionnaire du canal de Bruxelles à Charleroy, aux termes de l'art.
26 de la convention du 6 novembre 1834 entre cette société et le gouvernement :
fr. 661,375 66 »
- Tous ces articles sont adoptés sans observation.
CHAPITRE II.
- Rémunérations
« Art. 1er. Pensions ecclésiastiques : fr.
450,000
« Id. civiles : fr. 540,000
« Id. civiques : fr. 205,000
« Id. militaires : fr. 1,860,000
« Id. de l'ordre Léopold : fr. 25,000
« Arriéré des pensions de toutes natures pour
les exercices clôturés : fr. 5,000
« Total général : fr. 3,078,000. »
M. le président. - La section centrale a proposé de diviser cet article et de faire de
chaque paragraphe un article séparé. M. le ministre se rallie-t-il à cette
proposition ?
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Non, M. le président Messieurs,
la division réclamée par la section centrale avait déjà été établie dans le
budget de 1832 ; mais dans le cours de cet exercice on en a reconnu tous les
inconvénients, et dès 1833, la chambre est revenue sur la décision qu'elle
avait prise.
En effet, messieurs, diviser cet article, c'est
mettre souvent le ministre des finances dans un très grave embarras, parce
qu'il ne peut empêcher ses collègues d'accorder des pensions, conformément aux
lois, aux fonctionnaires qui ressortissent à leurs départements respectifs, et
à qui elles sont dues. Ainsi, messieurs, il arriverait, souvent, que la somme
de 540,000 fr., par exemple, demandée pour les pensionnaires civils,
deviendrait bientôt insuffisante, et alors il faudrait renvoyer de ces
malheureux jusqu'à ce qu'on eût demandé et obtenu une loi de nouveau crédit.
On n'accorde en général des pensions qu'à des
personnes peu aisées, et celles-là ne
peuvent pas attendre six ou sept mois le paiement d'une très modique pension.
Je crois donc qu'il est convenable de suivre la règle qui a toujours été suivie
jusqu'à présent et accorder un crédit global, afin que le ministre puisse imputer
de l'un article sur l'autre, si l'un des crédits devenait insuffisant par suite
de collation de pensions.
La chambre a déjà .reconnu les
vices de la division qu'on propose, et j'espère qu'elle prendra une résolution
conforme à celles qu'elle a prises précédemment.
M. Osy, rapporteur. - Messieurs,
les sections et la section centrale ont demandé la division, afin qu'on ne
puisse pas imputer d'un crédit sur un autre, afin qu'on ne puisse pas, par
exemple, payer des pensions ecclésiastiques sur le crédit des pensions civiles
ou vice versa. La chambre jugera ce qu'elle croira devoir faire.
M. le ministre des finances
(M. Smits) - Je dois réitérer à la chambre la
déclaration que si elle votait la division, il en résulterait pour le paiement
des pensions les plus graves embarras. La chambre a déjà apprécié les motifs
qui ont été exposés par un de mes prédécesseurs, et je ne puis qu'insister de
la manière la plus vive pour qu'elle maintienne ce qui a existé jusqu'à
présent.
- La proposition de la section centrale est mise aux
voix ; elle n'est pas adoptée.
La proposition du gouvernement est ensuite adoptée.
Article 2
« Article. 2. Traitements d'attente (wachtgelden) : fr. 44,454 55
« Traitements ou pensions supplémentaires (toelagen) :
fr. 48,510 03
« Secours annuels (jaarlyksche onderstanden) : fr. 7,128 04
« Total général :
fr. 100,092 65 »
M. Osy, rapporteur. - Messieurs, la sixième section a demandé, et la section centrale s'associe à ce vœu, que les fonctionnaires en état
de servir soient mis en activité et que les autres soient pensionnés.
- L'article est mis aux voix et adopté.
« Art, 3. Subvention à la caisse de retraite,
200,000 fr. »
M. Vandenbossche. - Je crois, messieurs, que cette
subvention provient de ce que les fonds de l'ancienne caisse de retraite se
trouvent en Hollande, et je crois qu'il en est de même des deux articles
suivants. Je pense que le gouvernement ne devrait payer ces sommes que pour les
défalquer de la rente qu'il paie à
La liquidation de ces sommes n'est pas difficile à
faire, je crois même qu'on peut les regarder comme liquidées ;
Je proposerai donc de retrancher
du budget toutes les sommes que nous allouons du chef des fonds retenus en
Hollande, ou si on veut les y maintenir, de ne le faire qu'à la condition que
le gouvernement les défalque du montant de la rente payée à
M. le ministre des finances
(M. Smits). - Je ferai simplement remarquer à
l'honorable préopinant que les deux cent mille francs dont il s'agit ne forment
pas les fonds retenus en Hollande, mais c'est parce que les fonds de la caisse
de retraite se trouvent en Hollande que la législature a cru devoir accorder ce
subside. Quant aux fonds qui se trouvent dans les anciennes provinces
septentrionales, ils forment l'objet d'une négociation dont il convient
d'attendre l'issue.
M. Vandenbossche.- Si l'art. 3
ne concerne pas les fonds restés en Hollande, alors mon observation s'applique
aux articles 4 et 5.
- L'article est mis aux voix et adopté.
Articles 4 et 5
Tous les autres articles du tableau sont ensuite
adoptés sans discussion. Ils sont ainsi conçus :
« Art. 4. Crédit supplémentaire remboursable
sur les fonds de la caisse de retraite des employés du département des
finances, retenus en Hollande : fr. 538,000 »
« Art. 5. Avances à faire aux titulaires de
pensions acquises depuis le 1er octobre 1830, à la charge du fonds des veuves et orphelins
demeuré en Hollande : fr. 9,947 08 »
Chapitre III – Fonds de dépôts
« Art. 1er. Intérêts des
cautionnements dont les fonds sont encore en Hollande : 130,000 »
« Arriéré des intérêts sur des exercices
clôturés : fr. 2000 »
« Art. 2. Intérêts des cautionnements versés en
numéraire dans les caisses du trésor public de l'Etat, pour garantie de
gestions comptables, pour sûreté du paiement des droits de douanes et accises,
pour garantie de gestions des receveurs communaux, des receveurs de bureaux de
bienfaisance, etc. : fr. 180,000. »
« Arriéré des intérêts sur les exercices
clôturés : fr. 2,000 »
« Art. 3. Intérêts des consignations faites
dans les caisses du trésor public de l'Etat : fr. 50,000 »
« Art. 4. Intérêts et remboursement des
consignations dont les fonds sont encore en Hollande : fr. 20,000. »
TITRE II. - DOTATIONS.
CHAPITRE PREMIER.
« Article unique. Liste civile (Mémoire) : fr. 2,751,322 75. »
CHAP. II.
« Article unique. Sénat : fr. 22,000. »
CHAP. III.
« Article unique : Chambre des représentants :
fr. 402,300. »
CHAP. IV.
Cour des comptes
« Art. 1. Membres de la cour : fr. 43,386
20. »
« Art. 2. Personnel des bureaux : fr.
65,000. »
« Art. 3. Matériel et dépenses diverses : fr.
16,900. »
Vote sur
les dispositions légales de la loi
Les deux articles de la loi sont également adoptés
sans discussion. Ils sont conçus dans les termes suivants :
« Art. 1. Les budgets de la dette publique et des
dotations sont fixés, pour l'année 1842, celui de la dette publique à la somme
de 31,473,652 fr 74 c. et celui des dotations à la somme de 3,300,908 francs 95
c. »
« Art. 2. La présente loi sera obligatoire le
1er janvier 1842. »
Vote sur
l’ensemble du projet
Il est procédé à l'appel nominal sur
l'ensemble du projet, qui est adopté à l'unanimité par les 75 membres
présents. Ce sont :
MM. Angillis, Brabant, Cogels, Coghen, Cools,
Coppieters, David, de Behr, de Florisone, de Garcia de
M. Delehaye. - Messieurs, le ministre des finances
m'avait prié tout à l'heure d'ajourner ma motion d'ordre, jusqu'à l'arrivée de
M. le ministre de l'intérieur ; comme M. le ministre de l'intérieur est
actuellement présent, je vais avoir l'honneur de renouveler ma motion.
Je prierai le gouvernement de vouloir bien nous dire
s’il est enfin décidé à soumettre un projet de loi concernant l'industrie
linière. Si le gouvernement croit devoir reculer la présentation de ce projet,
je déclare que je m'associerai à quelques-uns de mes
honorables collègues, pour présenter une semblable proposition.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs, l'honorable préopinant sait que les
travaux de la commission d'enquête ne sont terminés que depuis peu de temps ;
les pièces ne sont imprimées que depuis peu de semaines, et le recueil
extrêmement volumineux a été seulement distribué il y a quelques jours. Le
gouvernement comprend avec l'honorable membre toute la gravité de cette
question, et il s'occupe de l'examen des conclusions de la commission.
M. Delehaye. - Messieurs, je sais parfaitement bien que
les documents remis par la commission d'enquête sont volumineux. Ces documents
sont utiles, sans doute, et peuvent être consultés avec fruit mais il est dans
le cabinet des membres qui sont parfaitement en position d'apprécier les
souffrances de l'industrie linière, et de connaître le remède qu'il convient
d'y apporter, sans devoir pour cela étudier longuement le travail de la
commission. Cette commission, aux travaux de laquelle je rends hommage, du
reste, ne paraît avoir été instituée que pour fournir au gouvernement
l'occasion de gagner du temps ; mais je le déclare, aujourd'hui il n'est plus
guère possible d'attendre ; des mesures immédiates doivent être prises, et
j'adjure le gouvernement, dans l'intérêt de l'ordre public, de faire descendre
de la tribune quelques paroles moins vagues et plus
positives que celles qu'il vient de prononcer.
M. le ministre de
l’intérieur (M. Nothomb). - Messieurs, il est évident que le gouvernement, ayant institué une
commission d'enquête, n'avait pu, sans manquer à lui-même, et quelqu'éclairés que pussent être quelques membres du
cabinet, faire une proposition â la chambre, avant que cette commission eût
achevé ses travaux. Ses travaux sont achevés maintenant. Je ne parlerai pas,
avec autant de dédain que l'honorable membre, des travaux de la commission
d'enquête, je crois que ces travaux ont jeté de vives lumières sur cette grave
question.
Je le répète, le gouvernement examine les
conclusions de la commission d'enquête ; il sera très probablement amené à vous
faire une proposition, et il vous la fera dans le plus bref délai possible.
En entrant dans ces détails, je tenais surtout à
justifier devant la chambre et devant le pays le motif du retard. A en croire
l'honorable préopinant, le gouvernement aurait dû faire une proposition dès
l'ouverture de la session. Cela était absolument impossible. L'instruction
qu'on avait confiée à la commission n'était pas encore terminée ; elle est
terminée aujourd’hui, et le gouvernement délibère sur les conclusions de la
commission.
Du reste, je ne m'oppose pas à ce
que l'honorable membre dépose de son côté un projet de loi ;
c'est son droit.
M. Rodenbach. -M. le ministre vient d'annoncer que dans un bref délai il nous présentera un projet de loi. Moi, député des
Flandres, je prends acte de cette déclaration, et je me plais à croire que le
ministre s'empressera de réaliser sa promesse. Ce qu'a dit un honorable député
de Gand est malheureusement trop certain : la misère est grande. Lorsque j'ai
signalé, il y a quelques mois, cette extrême misère, on m'a reproché de
l'exagération, et aujourd'hui l'on est obligé de convenir que
j'avais dit la vérité.
M. Cools. - Messieurs, je n'ai pas à m'occuper de ce que le gouvernement fera, par
suite des propositions qui lui ont été faites par la commission de l'industrie
linière ; la commission a terminé son travail, elle a remis son rapport : c'est
maintenant au gouvernement à examiner ce qu'il convient ou ne convient pas de
faire. Mais, comme membre de la commission, je dois protester contre les
paroles échappées à l'honorable membre auteur de la motion : que la commission
d'enquête aurait voulu traîner les affaires en longueur.
M. Delehaye. - Je n'ai pas dit cela.
M. le président. - Je crois effectivement que M. Delehaye ne s'est pas servi de ces
expressions.
M. Cools. - Je croyais l'avoir compris ; je saisis du reste l'occasion qui se
présente, de donner une explication sur la marche qui a été suivie par la
commission, et qui a été souvent attaquée dans cette enceinte, sans que la
commission ait cru devoir répondre avant l'achèvement de son travail.
La commission a vu dans la question qui lui était
soumise, une question des plus importantes pour le pays. Elle a cru de son
devoir de s'éclairer avec calme, de s'éclairer avec maturité, et nullement de donner gain de cause à telle ou
telle opinion qui aurait pu s’être formulée d'avance dans le
pays. C'est pour cela que la commission a mis un certain temps à achever son
travail.
La commission a travaillé sans
relâche, et si sa tâche n'a pas été accomplie plus tôt, c'est qu'il lui a été
impossible d'aller plus vite ; son rapport est maintenant terminé. Le
gouvernement, ainsi que tous les membres de la chambre, peuvent user de leur
droit d'initiative, pour présenter un projet de loi conforme aux conclusions de
la commission, ou en dehors de ces conclusions. et la
chambre jugera quelles lumières elle pourra tirer d'un travail qui se trouve
maintenant entre les mains de chacun de ses membres.
M. Delehaye. - Messieurs, je n'ai pas entendu faire un reproche à la commission d'enquête ; M. Cools a mal
saisi mes paroles ; M. le président et d'honorables collègues out déjà rectifié
l'erreur dans laquelle un honorable membre est tombé. Mais, du reste, si
j'avais entendu articuler un reproche, ce reproche ne devait pas aller à
l'adresse de la commission, mais bien du gouvernement : la commission est
l'œuvre du gouvernement, et c'est au gouvernement à répondre de son œuvre.
J'ai fait un reproche au gouvernement de
l'institution même de la commission ; car, si au lieu d’instituer cette
commission, le gouvernement eût pris d'autres mesures, nous ne nous
trouverions pas aujourd'hui dans la fâcheuse position où nous sommes. Je n'en
disconviens pas, les documents élaborés par la commission sont précieux, j'en
ai déjà lu une grande partie, et je suis bien aise de témoigner ici mes
sentiments de gratitude à la commission. Mais le gouvernement avait tout autre
chose à faire. Ces documents fort utiles pour l'examen d'une autre question qui
se rattache à celle dont il s'agit en ce moment, n'étaient pas tellement
indispensables, qu'on ne pût, en leur absence, améliorer la position de nos
tisserands et de nos fileuses.
Voilà l'opinion que j'ai déjà exprimée plusieurs
fois et dans laquelle je persévérerai constamment. J'ai la conviction intime
que c'est en grande partie au gouvernement qu'il faut
attribuer l'état de souffrance où sont réduits nos tisserands.
M. le ministre de l’intérieur (M. Nothomb) - Messieurs,
le ministère actuel a montré quelle est sa sollicitude pour
l'industrie des Flandres, puisqu'il a provoqué l'arrêté du 26 juillet dernier.
Quant à la commission d'enquête qui a été instituée
par l'honorable M. de Theux, je crois qu'on a très bien fait de l'instituer, et que
cette grande question ne pouvait pas être instruite par une autre voie. Je
crois que, de son côté, la commission a mis à l'instruction
de l'affaire toute la célérité
possible. Je saisis cette occasion pour témoigner publiquement toute
la reconnaissance du gouvernement pour l'activité, le zèle avec lequel celle
commission rempli ses fonctions. Aujourd'hui vous êtes saisis, messieurs, d’un
travail remarquable : c'est un des plus beaux documents administratifs que l'on
ait vu naître en Belgique. Je dis que cette enquête a jeté de vires lumières
sur la question ; il faut toujours prendre les choses au
point où elles sont arrivées, et aujourd'hui nous sommes
à même, gouvernement et chambres, de statuer.
M. Desmet. - Comment
la commission d'enquête a-t-elle été instituée ? C'est à la demande de
l'association pour l'industrie linière. Je crois qu'il convient de ne pas
revenir sur le passé. On doit, semble-t-il, être satisfait de la réponse de M.
le ministre, qui a omis de présenter une proposition sous un bref délai. Le
ministre sera sans doute d'autant plus porté à déposer son projet de loi le
plus prochainement possible sur un objet important, qu'il n’ignore pas que la
récolte a été loin d'être parfaite.
PROJET
DE LOI OUVRANT UN CREDIT DE 8,810,363 FR.
Ce projet est ainsi conçu :
« Art. 1er. Il est
ouvert au gouvernement un crédit de huit millions huit cent dix mille trois cent soixante-trois
francs six centimes (8,810,563 fr. 06 c.), destiné à pourvoir, jusqu'au 31
décembre 1842, au paiement des intérêts et de l'amortissement des emprunts belges
et des rentes à charge de la dette publique, sans distinction des époques d'exigibilité.
« Cette somme complétant les crédits demandés au budget de la dette publique
pour l'exercice 1842 sera affectée comme suit :
« a. Au paiement du semestre échéant le 31 décembre
1842 :
« 1° De la rente de 611,894 fr. 17 c. inscrits
au grand livre auxiliaire : fr. 305,947 09
« 2° Du complément de la rente annuelle de 10,582,010
fr. 58 c. à solder à
« b. Au paiement du semestre d'intérêt et de
l'amortissement échéant le 31 décembre 1842, de l'emprunt de 30 millions à 4 p.
c. : fr. 750,000
« c. Au paiement des intérêts et de l'amortissement,
pendant les deux mois de novembre et de décembre 1842, de l'emprunt de 100,800,000 fr., à 5 p.c. : fr. 1,800,000
« d. Au paiement des intérêts et de
l'amortissement, pendant les deux mois de novembre et de décembre 1842, de
l'emprunt de 86,940,000 fr : fr. 869,400
« e. Au. paiement des intérêts et de l'amortissement,
pendant les mois d'août à décembre 1842 inclusivement, de l'emprunt de 50,850,800 fr., à 3 p. c. : fr. 847,513 33
« f. Au paiement des intérêts et de l'amortissement, au
31 décembre 1842, de l'emprunt de 700,000 florins contracté pour l'érection de
l'entrepôt d'Anvers : fr.44,444 44.
« Total : fr. 8,810,363 06 »
« Art.2. Cette allocation formera l'article 12 du chapitre du budget de la dette publique pour
l'exercice 1842. »
- La section centrale propose d'imputer cette
allocation sur le budget de la dette publique pour l'exercice de 1841.
M. le ministre des finances
(M. Smits) déclare se rallier à cette proposition.
- Personne ne demandant la parole, l’art. 1er est
mis aux voix et adopté, ainsi que l'art. 2, avec la modification indiquée
ci-dessus.
On procède à l'appel nominal sur l'ensemble de la
loi.
Elle est adoptée à l'unanimité des 74 membres qui
ont répondu, à l'appel nominal.
Ce sont : MM. Angillis, Brabant, Cogels,
Coghen, Cools, Coppieters, David, de Behr, de Florisone. de Garcia de
M. le président – L’ordre du jour appelle la discussion du budget de la justice.
Un grand nombre de membres. - A demain ! à demain !
- La séance est
levée à 4 heures.