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Chambres des représentants de Belgique
Séance du jeudi 9 juin 1836

(Moniteur belge n°163, du 11 juin 1836)

(Présidence de M. Raikem.)

Appel nominal et lecture du procès-verbal

M. de Renesse fait l’appel nominal à midi et quart.

M. Schaetzen lit le procès-verbal de la séance précédente ; la rédaction en est adoptée.

Pièces adressées à la chambre

« Des négociants et cultivateurs de tabac indigène, de Grammont, demandent la prohibition des tabacs étrangers ou leur assujettissement à un droit élevé. »

- Cette pétition est renvoyée à la commission des pétitions chargée d’en faire le rapport.

Projet de loi modifiant le tarif des douanes

Discussion générale

M. le président. - Le premier objet à l’ordre du jour est la discussion des conclusions de la section centrale chargée de l’examen du projet de loi portant des modifications au tarif des douanes.

Ces conclusions tendent à renvoyer à l’avis des chambres de commerce les divers articles du projet, à l’exception de quatre suivants : bois de réglisse, boissons distillées, tissus de soie et vins ; ces derniers articles seraient soumis à l’examen immédiat des sections.

M. A. Rodenbach. - Je demanderai à M. le ministre des finances s’il nous présentera un projet à part pour ces quatre articles ; ou s’il ne vaudrait pas mieux attendre jusqu’à ce que nous pussions voter sur de la loi.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Messieurs, l’assemblée apprendra qu’en présence des nombreuses objections qui ont été présentées contre certains articles du projet de loi de modifications du tarif des douanes, il serait impossible d’espérer que ce projet pût être discuté en entier par la chambre avant notre séparation.

D’un autre côté, le rapport de la section centrale prouve que relativement aux quatre articles qu’elle a indiqués, il n’y aura probablement pas une discussion très longue ni très sérieuse.

Nous croyons dès lors utile de scinder le projet, et de renvoyer les quatre points dont il s’agit à l’examen immédiat des sections : car il convient, nous semble-t-il, de prouver à la France notre bonne volonté d’entrer dans la voie où elle nous a appelés.

En adoptant donc ces quatre articles, lesquels ont toutefois aussi leur importance, nous donnerons à nos voisins l’assurance que si nous n’avons pas sanctionné un plus grand nombre de dispositions favorables à la France, c’est que la législature a jugé indispensable de s’entourer préalablement de nouveaux renseignements.

J’appuie, en conséquence, la proposition de la section centrale.

M. Smits. - Je demande que la batiste soit comprise parmi les quatre objets que la section centrale propose de renvoyer immédiatement à l’examen des sections.

- Cette proposition est appuyée.

M. Lardinois. - Je voudrais savoir si les batistes sont comprises dans le projet relatif aux modifications.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Oui, elles y sont comprises avec les soieries.

On a toujours placé ces tissus sur la même ligne que les soieries ; et il n’y a pas plus d’objection à faire contre un de ces articles que contre l’autre.

Au reste, le double renvoi que la chambre va ordonner ne préjuge rien quant au chiffre, de sorte qu’il n’y a pas d’inconvénient à ce que l’objet dont il s’agit soit renvoyé aux sections avec les quatre autres articles.

- L’amendement de M. Smits est adopté.

Les conclusions de la section centrale, avec l’amendement de M. Smits sont ensuite mises aux voix et adoptées.

Projet de loi qui alloue un crédit supplémentaire au département de la guerre pour le service du couchage des troupes, exercice de 1836

Discussion des articles

Article unique (du projet du gouvernement) et articles 1 à 5 (du projet de la section centrale)

M. le président. - La chambre passe au second objet de l’ordre du jour, qui est la suite de la discussion des propositions relatives aux lits militaires.

Il reste à voter sur le chiffre demandé par le ministre de la guerre pour le couchage des troupes pendant l’exercice 1833.

Voici l’article unique proposé par M. le ministre :

« Le budget des dépenses du département de la guerre pour 1836, fixé par la loi du 12 février dernier à la somme de 37,341,000 fr., est augmenté de 723 mille fr. pour le service de couchage des troupes.

« Cette dépense formera l’article 15 (casernement des hommes) de la 3ème section du chap. Il du budget du département de la guerre. »

La commission a proposé une somme de fr. 778,603,20.

M. Verdussen. - Messieurs, dans la séance d’hier, j’ai annoncé que je proposerais une réduction sur le chiffre demandé par M. le ministre de la guerre ; mais c’était dans la supposition que l’amendement de M. Pirson pouvait ne pas être adopté.

Comme cet amendement a été adopté, je me désiste de ma première idée, car il est maintenant assez peu indifférent de voter tel ou tel chiffre.

- Le chiffre de 723,000 fr. proposé par M. le ministre de la guerre est mis aux voix et adopté.

L’article unique du projet, amendé par M. Pirson, est adopté avec ce chiffre.

M. le président. - Par suite de l’amendement de M. Pirson, les propositions de la commission deviennent sans objet. (Adhésion.)

Comme il y a eu des amendements, s’il n’y a pas d’opposition, le vote définitif est fixé à samedi.

M. Desmanet de Biesme. - Je crois que si l’on n’y voit pas d’obstacles, le vote pourrait avoir lieu d’urgence. Car le sénat est assemblé ; avant qu’il puisse voter le projet, il faudra qu’il le renvoie à une commission qui voudra l’examiner longuement. Il faudra ensuite qu’il soit soumis à deux lectures au sénat. Je demande donc que l’urgence soit déclarée, et qu’il soit procédé immédiatement au vote par appel nominal.

M. le ministre de la guerre (M. Evain). - J’appuie d’autant plus volontiers la proposition de l’honorable membre que, depuis 5 mois, je n’ai pas pu payer un centime aux diverses villes et régences qui fournissent les lits. Je suis accablé de réclamations. Quelques jours d’avance me mettront à même de répondre plus tôt à ces justes réclamations.

En conséquence j’appuie la proposition de l’honorable préopinant.

M. Dubus. - Cette proposition est inopinée. J’aurais désiré au moins qu’elle fût faite hier ; car beaucoup de membres s’attendaient à ce que l’on suivît la règle ordinaire ; s’ils avaient prévu que le vote définitif eût lieu aujourd’hui, peut-être se seraient-ils rendus à la séance. Si on trouve qu’il y a urgence, que le vote ait lieu non pas demain, mais après-demain. Cela ne tient pas à un jour.

M. Desmanet de Biesme. - Je me rallie à la proposition de M. Dubus. Je n’avais proposé de voter aujourd’hui que parce que j’ai appris que plusieurs membres de l’autre chambre sont dans l’intention de partir dimanche.

- La chambre fixe à demain le vote définitif.

Projet de loi qui accorde une rente annuelle à la veuve Kessels

Discussion et vote de l'article unique

M. le président. - Le projet de la commission auquel le gouvernement se rallie est ainsi conçu :

« Article unique. Le gouvernement est autorisé à faire l’acquisition d’une collection d’ouvrages de sculpture exécutés et délaissés par le sieur Mathieu Kessels, sculpteur, décédé à Rome pendant l’année 1836.

« Le gouvernement pourra constituer à cet effet, à charge de l’Etat, et sous les conditions qu’il déterminera, une rente annuelle de 2,000 francs, laquelle, dans tous les cas, s’éteindra après la mort de la dame veuve Kessels, lorsque le plus jeune des enfants Kessels qui lui survivront, aura atteint l’âge de vingt-cinq ans. »

- Ce projet de loi est adopté par appel nominal à l’unanimité des 62 membres qui prennent part au vote.

Proposition de loi qui accorde une pension à la veuve d’Isidore Plaisant

Discussion des articles

M. le président. - La suite de l’ordre du jour appelle le projet de loi relatif à la pension à accorder à la dame veuve Plaisant.

M. Lardinois. - Le rapport sur ce projet de loi vient seulement d’être distribué. Je demande donc que la discussion soit ajournée à demain. Je fonde cette demande sur ce que l’auteur de la proposition n’est pas ici. (Appuyé).

- La chambre fixe à demain la discussion du projet de loi relatif à la pension à accorder à madame veuve Plaisant.

Projet de loi concernant la délimitation des communes de Jemeppe-sur-Sambre et de Moustier

Discussion des articles et vote sur l'ensemble

M. le président. - Les deux articles du projet présenté par le gouvernement, et dont la commission propose l’adoption, sont ainsi conçus :

« Art. premier. Le hameau dit Froidmont, faisant partie actuellement de la commune de Jemeppe-sur-Sambre (province de Namur), est distrait de ladite commune et réuni à celle de Moustier. »

« Art. 2. La commune de Moustier aura pour limites, du côté de Jemeppe, la Sambre, la commune de Ham-sur-Sambre et Ornoz, le tout conformément au plan cadastral annexé à la présente loi. »

- Ces deux articles sont successivement mis aux voix et adoptés.

L’ensemble du projet est ensuite adopté à l’unanimité des 55 membres qui prennent part au vote.

Projet de loi qui érige en deux communes distinctes les villages de Breendonck, Calfort et Puers

Discussion et vote de l'article unique

M. le président. - L’article unique du projet du gouvernement, dont la commission propose l’adoption, est ainsi conçu :

« Article unique. Les villages de Breendonck, Calfort et Puers, dont la réunion forme actuellement la commune de Puers (province d’Anvers), sont érigés en deux communes distinctes, dont l’une se composera des villages de Puers et Calfort (sections C et D), et l’autre de celui de Breendonck (sections E et F), le tout conformément au plan cadastral annexé à la présente loi. »

M. Verdussen. - J’ai demandé la parole pour signaler une erreur qui s’est glissée dans l’exposé des motifs présenté par M. le ministre de l’intérieur. On pourrait croire que la commune de Puers, dont on vient de détacher le hameau de Breendonck, resterait à peu près de la même population que le hameau de Breendonck à ériger en commune. Mais il n’en est rien. Le chiffre de 1,633 qui est au bas de la première page de l’exposé des motifs est une erreur. Ce devrait être le chiffre de 3,914 ; car la totalité des habitants de toutes les sections composant la commune de Puers est de 5,375 habitants. Le hameau de Breendonck qui va être érigé en commune, a une population de 1,461 habitants, de manière, qu’il reste à la commune de Puers une population de 3,914 et non de 1,633 habitants.

- L’article unique du projet est adopté par appel nominal à l’unanimité des 62 membres qui prennent part au vote.

Projet de loi sur le transit

Second vote des articles

Articles 1 à 5

- Les amendements introduits dans les articles 1 à 5 sont confirmés par le vote de la chambre.

Article 6

« Art. 6. Indépendamment des déclarations à faire par les assujettis à l’importation et à l’exportation des marchandises, conformément à la loi générale du 26 août 1822, il sera exigé d’eux, pour les marchandises destinées au transit, une déclaration spéciale indiquant :

« 1° Quant à celles que le tarif des douanes à l’importation impose à la valeur, ou quant à celles dont l’importation est prohibée, la valeur exacte des unes et des autres ;

« 2° Quant à celles que le tarif à l’importation impose au poids, ou à la mesure, ou au nombre, le poids, la mesure ou le nombre (cette dernière spécification devant d’ailleurs toujours être fournie, quel que soit le mode de perception), et dans tous les cas pour les tissus, étoffes et rubans, le poids net que les colis renferment.

« Ces éléments serviront de base à l’application éventuelle des droits et pénalités ; dans les cas où le transit de ces différentes marchandises ne serait point légalement consommé, les déclarants, quelque minime que puisse être le droit de transit sur celles ainsi déclarées, seront soumis, sous ce rapport et à l’égard même du transit, aux dispositions établies, relativement à l’inexactitude des déclarations, par la loi générale prémentionnée, qui confère aux employés de l’administration, soit le droit de préemption en ce qui concerne la valeur, soit le droit de confiscation en ce qui concerne la différence au brut et nu net du poids, du nombre et de la mesure, sans préjudice aux autres dispositions répressives de la fraude. »

A l’article 6 le poids net des colis est exigé pour le transit.

M. Hye-Hoys. - Je demande la suppression de ces mots : le poids net.

Messieurs, introduire la déclaration en poids brut et en poids net, c’est détruire pour les marchandises qu’on y soumet la tare légale établie par le tarif du 26 août 1822, et déroger à ses dispositions générales. Le poids brut n’étant jamais susceptible que de la déduction de la tare légale, il s’en suit que les colis sont toujours, et de droit, réputés contenir le restant en poids net. Cette contestation de poids net sera sans utilité aucune dans l’intérêt du transit, une entrave rebutante, onéreuse et essentiellement préjudiciable au commerce. Le poids net ne devrait être constaté qu’à la demande du négociant, lorsqu’il juge la tare légale insuffisante, ainsi que l’art. 5 des dispositions générales précitées loi en laisse la latitude.

M. Lardinois. - L’honorable préopinant veut que l’on supprime le mot « poids net, » parce que c’est une disposition qui déroge à la loi générale. Il motive aussi sa demande sur les craintes que lui inspire une telle mesure ; le commerce en serait entravé, dit-il ; moi qui ai de l’expérience, je sais que cette condition imposée au transit ne gêne pas le commerce. Avant d’emballer la marchandise, le négociant qui l’envoie en transit la pèse. Cela se fait tous les jours.

M. Hye-Hoys. - Comment voulez-vous que l’on connaisse le poids net des marchandises qui viennent d’Angleterre et qui sont emballées avec des barres de fer ? Vous créez le chemin de fer pour le transit, eh bien, il sera inutile si vous exigez le poids net des marchandises.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je ferai d’abord remarquer qu’il n’y a pas lieu à revenir sur cette disposition ; car dans le projet primitif le poids net est exigé pour le transit. J’ajouterai qu’il a été donné des motifs suffisants pour établir cette dérogation à la loi de 1822. Dans le cours de la discussion il a été fait mention d’une circulaire de l’administration française qui fait connaître ce que l’on entend sainement par poids brut et par poids net, et nous avons dit que les dispositions de cette mesure seraient mises en pratique chez nous au moyen d’une circulaire de l’administration belge ; mais nous avons démontré qu’il serait dangereux d’insérer ces dispositions d’une manière formelle dans la loi.

Quoi qu’il en soit, il est contraire au règlement de revenir sur une disposition qui n’est pas un amendement.

M. Coghen - Il est très facile au commerce d’avoir la tare et le poids net des marchandises ; et exiger ce renseignement, c’est éviter la fraude dans beaucoup de cas.

M. Dumortier. - Je ne sais comment le ministre peut invoquer une fin de non-recevoir. L’article est amendé en plusieurs points, et par conséquent nous pouvons le remettre en discussion. Je suis bien aise qu’on puisse le discuter de nouveau, car exiger le poids net, c’est donner lieu, toutes les fois que l’administration le voudra, à des saisies. Vous savez comment s’achètent et se vendent les étoffes de soie, les tissus, les rubans. Ce n’est jamais au poids ; c’est à la quantité ; or le négociant qui a acheté ne connaît pas le poids net ; comment voulez-vous qu’il le déclare ? M. Hye-Hoys vous l’a dit : les marchandises qui arrivent d’Angleterre sont cerclées en fer ; on connaît bien le poids de la balle, mais on ne connaît pas le poids de la marchandise.

En Prusse, dit-on, on exige le poids net pour le transit ; les draps de Verviers sont pesés avant d’être emballés ; mais vous avez les draps chez vous pour les peser. Il n’en est pas de même des marchandises qui arrivent.

M. Lardinois. - L’Angleterre peut aussi peser les marchandises qu’elle envoie.

M. Dumortier. - Soit ; mais un négociant belge qui reçoit des marchandises sera obligé de réduire le poids anglais en poids belge ; il commettra des erreurs ; et voilà des procès.

Il y aura une circulaire en Belgique comme en France, dit M. le ministre des finances, et cette circulaire sera faite de manière à ne pas tourmenter le commerce ; je crois qu’on doit éviter les circulaires. Qu’une affaire soit portée devant les tribunaux, ils ne jugeront pas d’après la circulaire, mais d’après la loi ; et ils condamneront en vertu d’une disposition inutile, et qui, par son inutilité, devient dangereuse. Que l’on ait le poids brut, on a tout ce que l’on doit avoir.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Si on veut rentrer dans le fond de la discussion, je répondrai à l’honorable préopinant ; cependant, il ne s’agit pas d’un amendement, et si nous revenons sur toutes les parties de la loi non amendées, nous n’en finirons pas aujourd’hui.

L’honorable M. Dumortier prétend qu’on peut donner le poids brut et le poids net pour les draps de Verviers envoyés en Prusse, et que les négociants belges ne pourront pas avoir le poids net des marchandises qui leur sont envoyées ; mais tous les pays qui nous enverront des marchandises en transit sauront que notre loi exige le poids net et le poids brut, et fourniront ces renseignements aux destinataires.

C’est à la valeur, dit l’orateur, que le droit se perçoit ; il n’en est pas toujours ainsi : prenons les soieries pour exemple, celles-ci paient un fort droit et sont tarifées (erratum inséré au Moniteur belge n°164, du 12 juin 1836 :) au poids ; n’aurait-on pas le moyen d’enlever des rubans en soie, et de laisser en leur place des rouleaux en bois ? Or, c’est en partie en vue d’éviter la fraude qui sellait aujourd’hui de cette manière sur les soieries, que la disposition est réclamée. Trop fréquemment on substitue des rouleaux en bois recouverts de quelques aunes de rubans, aux rouleaux de rubans des colis.

On a encore fait une autre observation sur la manière d’estimer les poids au déballage ; mais j’ai déjà annoncé que des instructions feraient connaître comment les poids devraient être évalués par les employés en cas de visite approfondie. (Aux voix ! aux voix !)

M. Dumortier. - On ne peut pas demander la clôture sur un point aussi important.

Le ministre vient de dire des choses inexactes, des choses qui sont véritablement des hérésies. Les dispositions de l’article sont inexécutables ; on ne peut pas les voter... (Aux voix ! aux voix !) Quand le silence sera rétabli, je parlerai. Il est impossible de clôturer tant qu’on n’aura pas démontré la possibilité d’exécuter la disposition ; pour moi je voterai contre la loi tant qu’on n’aura pas fait cette démonstration.

M. de Brouckere. - Eh bien, votez contre !

- La chambre consultée ferme la discussion.

Les mots « le poids net, » mis aux voix, sont conservés et adoptés définitivement.

Article 8

« A l’art. 8, le paragraphe suivant est un amendement de la section centrale :

« Le cautionnement à fournir pour les marchandises prohibées à l’importation sera égal au montant du double de leur valeur. »

- Cet amendement est de nouveau adopté.

Etats annexés à l’article 9

M. le président. - Deux états sont annexés à l’art. 9, et ces deux états ont seuls été amendés. Voici les amendements. (Ils sont en italique.)

Etat littera A

Au n°2 on a supprimé les mots « à l’exclusion du sucre raffiné. »

Etat littera B

« Marchandises non sujettes aux accises :

« 1° Armes et munitions de guerre : le transit n’en est permis que par les bureaux des frontières vers les pays qui sont en paix avec la Belgique ;

« 2° Drilles et chiffons ;

« 3° Fers, savoir :

« Minerai, fontes en gueuses, en plaque ou en autre forme non ouvrée, battus ou étirés, en barres, verges et carillons, y compris les barres à rainures dites rails et tôles, encres coulées et battues, vieux fers, ferraille et mitraille ;

« 4° Pierres à diguer ;

« 5° Poudre à tirer ;

« 6° Vinaigre de toute espèce.

(On a supprimé les n°2° et 6° du premier projet.)

« Le dépôt et le transit des objets prohibés restent permis dans les entrepôts libres, sous la condition que l’importation et l’exportation en soient effectuées respectivement et exclusivement par le port même de l’entrepôt dans lequel ces objets seront entrés, conformément à la loi du 31 mars 1828. »

- Tous ces amendements sont de nouveau adoptés.

Article 10

« Art. 10. Les marchandises déclarées en transit, après avoir été vérifiées et reconnues conformes aux acquits-à-caution délivrés, seront plombées, à l’exception des liquides, autres que ceux de la troisième catégorie, et des métaux non ouvrés, et pourront même, si l’administration le juge utile, être convoyées, le tout, plombage comme convoyage, aux frais des intéressés. »

Le convoyage aux frais des intéresses est un amendement.

M. Hye-Hoys. - Je demande la suppression des mots : « si l’administration le juge utile, être convoyées, le tout, plombage comme convoyage, aux frais des intéressés. »

On ne peut s’expliquer comment on veut faire convoyer des marchandises expédiées en transit ; et cela encore aux frais du commerce, puisque l’art. 154 de la loi générale du 26 août 1822, qui ne l’autorise pas en transit, sauf pour les vins (art. 80), dit que le convoi, lorsqu’il est autorisé par la loi, aura lieu sans frais pour l’administration.

« Les convoyeurs peuvent être au nombre de trois, et il faut leur donner la nourriture (art. 153), indépendamment de 2 fr. par jour à chacun, tant pour l’aller et le séjour que pour le retour (art. 14 du projet) : on voit ce que pourraient coûter au commerce les expéditions en transit lorsque l’administration le jugerait à propos.

Et en définitive, à quoi bon ce convoi ? A rien ; car les marchandises expédiées en transit, à la différence de celles qui arrivent par mer sur les entrepôts, sont vérifiées avant le départ, et leur poids, nombre ou valeur renseignés dans l’acquit-à-caution, lequel en assure ainsi l’identité, sous la garantie des droits d’entrée cautionnés, qui en cas de fraude sont acquis au trésor.

M. Lardinois. - Les motifs que l’honorable ministre des finances a donnés dans la précédente discussion pour faire convoyer les marchandises, subsistent toujours. J’en ajouterai un autre ; c’est que le convoyage devient indispensable depuis que l’on a autorisé le déchargement des marchandises en transit.

M. Legrelle. - Nous ne nous opposons pas au convoyage ; dans certains cas il est nécessaire ; mais nous nous opposerons de nouveau à ce que les frais de ce convoyage soient à la charge des négociants. Le ministre a dit que la mesure était comminatoire, qu’il en ferait rarement usage ; mais si les frais du convoyage ne sont pas à la charge de l’administration, je crains que l’article ne devienne une source d’abus. Que le plombage soit aux frais du négociant, j’y consens ; mais il ne peut en être ainsi des frais du convoiement. Je demande la division de l’amendement.

M. Hye-Hoys. - Je demande à M. le ministre des finances s’il y a un assez grand nombre d’employés pour faire des convoiements.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Messieurs, je remarque d’abord que l’honorable membre qui s’est opposé au maintien de cette disposition pense qu’elle est obligatoire, qu’il faudra toujours faire convoyer les marchandises en transit, tandis que le contraire est écrit dans la loi.

J’insiste sur un point : c’est que l’administration, et non les employés (auxquels du reste on suppose à tort un intérêt pécuniaire dans cette question), ordonnera le convoyage.

Je vous prie, messieurs, de ne pas oublier que l’indemnité accordée aux employés pour déplacement causé par le convoyage a été rigoureusement calculée au juste nécessaire, puis qu’elle n’est que de 2 fr. par jour. Au surplus, c’est l’administration supérieure qui, je le répète, ordonnera le convoyage, quand elle jugera cette mesure utile aux intérêts de notre industrie et de notre agriculture.

Mais on demande si l’administration fera convoyer dans un grand nombre de cas ; je n’en sais rien. C’est la fraude exercée sur telle ou telle marchandise qui déterminera la conduite de l’administration à cet égard. Ce n’est pas, en effet, dans l’intérêt du fisc, mais dans l’intérêt de toutes nos industries que ce moyen de surveillance est employé. Envers qui d’ailleurs cette mesure sera-t-elle employée ? Envers ceux même qui jouissent de la faculté de transit, qui en tirent de grands bénéfices. Et de plus, pour que l’administration ordonne le convoyage, il faudra que la crainte d’une fraude notable sur telle ou telle marchandise fasse employer cette mesure exceptionnelle.

M. Lebeau. - Si j’étais sûr que les excellentes intentions de M. le ministre des finances, sur lesquelles je n’élève aucun doute, fussent partout observées, je pense qu’il n’y aurait aucun danger à admettre l’amendement de la section centrale. Mais il n’en sera malheureusement pas toujours ainsi. M. le ministre dit formellement que le convoyage n’aura lieu que sur la réquisition de l’administration. Qu’est-ce que l’administration ? Ce n’est pas le ministre dans ce cas. Ce sont les fonctionnaires sur les lieux qui peuvent seuls déterminer la nécessité du convoyage.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Ce sera le directeur.

M. Lebeau. - La nécessité du convoyage est un fait qui peut se reproduire tous les jours, qui dépendra de circonstances particulières, toutes du moment. Il sera impossible d’établir un règlement sur cet objet. C’est pourquoi je pense qu’il faut que le convoyage n’ait pas lieu aux frais des intéressés. Quand il sera aux frais de l’administration, il aura lieu moins souvent. Les employés auront un intérêt à ne pas multiplier sans raison cette gênante formalité, parce que si elle se reproduisait sans nécessité, ils encourraient des reproches de l’administration pour l’avoir entraînée dans des dépenses inutiles.

C’est une véritable anomalie d’exiger de la part du commerce la rémunération d’un droit dont il sera frappé au transit. Il serait aussi logique d’exiger que l’on payât les frais de visite et toutes les formalités que M. le ministre des finances, dans sa sollicitude pour le fisc, a introduites dans la loi.

Pour ce qui est du plombage, je n’insisterai pas là-dessus, bien que d’après la législation en vigueur il ne soit pas exigible dans tous les cas.

Mais le convoyage, messieurs, remarquez-le bien, n’avait pas été demandé par M. le ministre. C’est un renchérissement de rigueurs introduit par la section centrale. Il paraît que dans cette circonstance M. le ministre a trouvé excellent le proverbe : Ce qui est bon à prendre, est bon à garder.

Je demande le maintien de l’article ministériel.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - L’on semble vouloir tirer un argument de ce que le convoyage n’a pas été présenté d’abord par le gouvernement. J’y puise au contraire une raison puissante pour le maintien de la disposition. Il est évident que la section n’a pu l’introduire qu’après y avoir réfléchi mûrement. Elle ne l’a adopté d’ailleurs que de commun accord avec l’administration.

On croirait, à entendre nos honorables adversaires, que les employés gagneraient beaucoup plus au convoyage payé par le commerce que s’il était à la charge de l’administration ; c’est une erreur ; car ils ne recevraient dans tous les cas que 2 fr. d’indemnité, et 2 fr. sont toujours 2 fr.

L’administration n’ordonnera du reste le convoyage que dans l’intérêt de l’industrie ? Et faut-il que cette mesure soit à la charge de celui qui jouit du transit ou à la charge du budget, voilà toute la question. Quant aux employés, c’est en vain qu’on les montrés intéressés dans la mesure ; ils ne le sont en aucune manière.

L’on a demandé s’il était plus raisonnable de faire payer le convoyage que de faire payer tous les frais de visite de douane. Je réponds que c’est une juste indemnité que l’on paie dans ce cas aux employés pour le déplacement que cette mesure leur occasionne. Il en est de même pour le maniement des marchandises, ces frais sont à la charge du commerce par la loi.

M. Dumortier. - L’un des premiers actes du congrès a été de supprimer les leges qui étaient des rétributions au profit des employés. C’est précisément le renouvellement d’un pareil impôt, d’un leges que l’on vous propose de voter.

La question est simple, dit M. le ministre des finances ; il s’agit de savoir qui du commerce ou de l’administration doit payer le convoyage. Je demanderai à M. le ministre des finances, quel est le devoir des employés des douanes. Ce sont des agents du service actif. Leur devoir est de se transporter partout où le gouvernement le leur ordonne. Quand ils accompagnent un convoi, ils font leur devoir, ils n’ont droit à aucune indemnité du trésor public, excepté quand il y a lieu pour eux à déplacement.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Excepté quand il y a lieu pour eux à déplacement.

M. Dumortier. - Si vous mettez les frais du convoyage à la charge du commerce, il en résultera que vous aurez grevé le commerce d’un leges sans diminution pour le trésor public. Car vous ne diminueriez pas les appointements des employés, parce qu’ils auront eu un transit à escorter. C’est donc un leges que vous établissez, et un leges que le roi Guillaume n’avait pas eu l’idée d’imposer au commerce, puisque sous le gouvernement des Pays-Bas les convoyages se faisaient aux frais de l’administration, hors dans les cas formellement exceptés.

On a soulevé une question importante sur l’autorité qui ordonnera le convoyage. M. le ministre des finances dit que ce sont les directeurs ; admettons-le. Les employés verront de la fraude partout. N’a-t-on pas exigé que le poids de toutes les marchandises fût vérifié, parce que l’on a fraudé sur les rubans ? Comme les employés auront un bénéfice réel dans le convoyage, leur intérêt sera de démontrer au directeur que cette mesure est nécessaire, et ils n’auront pas de peine à convaincre ce fonctionnaire. De là multiplicité de convoyage, de là nécessité pour le gouvernement de créer une nuée d’employés.

Je citerai un exemple. A l’entrepôt de Tournay il se fait quelquefois cent à deux cents expéditions de transit par jour, à toute heure de la journée, depuis le lever jusqu’au coucher du soleil. Il faudra donc 100 à 200 employés pour escorter les marchandises jusqu’à la frontière.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Est-ce là le transit ?

M. Dumortier. - Oui, c’est là le transit. Toute marchandise qui sort de l’entrepôt marche en transit. L’entrepôt est un territoire neutre pour le commerce.

Je vous le dis, voilà où vous arriverez si vous adoptez la proposition qui vous est soumise. Le gouvernement sera obligé de créer une nuée d’employés qu’il emploierait mieux à la répression de la fraude.

De plus, vous aurez occasionné une dépense énorme au commerce au profit des employés sans dégrever le commerce, et les employés, dans le but d’augmenter leur traitement, prouveront tous les jours aux directeurs la nécessité de convoyer telle ou telle marchandise.

M. Legrelle. - M. le ministre a dit que la section centrale n’a introduit son amendement qu’après de mûres réflexions. Voulez-vous savoir ce qui s’est passé à la section centrale ? La section centrale a cru qu’il y avait du doute dans l’interprétation de l’article du gouvernement. Elle a demandé à M. Engels ce que l’administration entendait faire, et la rédaction qu’elle a présentée n’a été que la traduction de la pensée de l’administration.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - En définitive elle a adopté la disposition.

M. Legrelle. - Ainsi c’est bien au gouvernement, et non à la section centrale, qu’appartient l’idée malheureuse de faire payer au commerce les frais de convoyage.

M. le ministre a dit que le convoyage serait ordonné, non par les employés, mais par l’administration, et l’administration, selon lui, ce sont les directeurs. J’ai la plus grande confiance dans M. le ministre des finances. Mais je n’ai pas la même confiance dans tous les directeurs que je n’ai pas l’honneur de connaître.

En définitive, vous créerez des entraves pour le commerce. A tout instant les employés diront : Je ne sais pas si la marchandise ne doit pas être convoyée. Attendez que nous ayons reçu les ordres de M. le directeur. Voilà donc des retards très préjudiciables pour le commerce. Calculez la perte qui pourra en résulter.

M. le ministre des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - T’t, t’t, t’t.

M. Legrelle. - T’t, t’t, t’t ne sont pas des raisons (hilarité générale.) Voulez-vous savoir à combien monteront les frais de convoyage ?

Je suppose une marchandise valant 1,000 francs. Elle paiera 1 fr. 50 c. de droit de transit. Si vous la faites convoyer par deux employés, en calculant à 4 fr. pour aller et 4 pour retour à chacun des employés, cela fait 26 fr. de convoyage. Vous me direz que 1,000 fr. est une somme modique. Mais supposez une marchandise valant 5,000 fr. le droit ne sera que de sept francs cinquante centimes, tandis que le convoyage coûtera seize francs.

Je vous demande où en est la liberté du commerce de transit en présence d’un semblable impôt ? Veuillez réfléchir aux conséquences de votre vote, messieurs. Ce que je viens de vous dire est de la plus exacte vérité. Je défie qu’on m’y réponde. Toutes les apostrophes, tous les chuchotements ne prouveront pas le contraire.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je n’ai pas chuchoté ; je n’ai pas non plus apostrophé M. Legrelle. Ainsi je n’ai pas à lui répliquer à cet égard.

Quelle est, messieurs, l’administration capable de vexer le commerce dans le seul but de faire gagner quelque argent à ses employés, en supposant, dans le cas présent, que les employés aient réellement quelque chose à gagner au convoyage. En vérité, pour ma part, je ne connais aucune administration publique de ce genre.

Peut-on s’imaginer que l’administration ordonnera le convoyage de ballots d’une valeur peu considérable, ou contenant des marchandises sur lesquelles la fraude n’est pas facile à exercer ? Il n’en peut être ainsi.

On dit toujours que le convoyage sous la législation actuelle a lieu aux frais de l’administration. Mais l’on oublie que dans les cas les plus fréquents c’est le commerce qui supporte ces frais ; car, dans la loi générale, l’exception absorbe la règle quant au convoyage mis à la charge du trésor. Les craintes que l’on manifeste sont du reste exagérées. Le commerce loyal ne sera jamais tourmenté.

On prétend que nous rétablissons les leges, mais y a-t-il aucune apparence de leges dans l’indemnité que l’on demande ? Les leges étaient des rémunérations à titre gratuit, tandis que l’indemnité en question sera une rémunération à titre onéreux. Il est juste que quand on fait sortir un employé à 6 ou 700 fr. hors de sa résidence, qu’on le force de coucher à l’auberge, il lui soit accordé une indemnité pour les frais extraordinaires que ce déplacement lui occasionne.

L’administration fera un règlement dans lequel les attributions des directeurs seront déterminées quant au transit. Ce règlement portera, entre autres dispositions, que l’on ne pourra soumettre au convoyage les marchandises qui ne sont pas fortement imposées à l’intérieur, non plus que celles qui ne donnent pas lieu à la fraude, au détriment de nos manufactures. Les marchandises seront classées en différentes catégories, et la chose sera réglée de telle sorte que le commerce n’aura rien à redouter du caprice des directeurs de province, lesquels, au surplus, ne sont pas aussi rigoureux qu’on veut bien le dire. Ils ne sont peut-être que trop disposés à se montrer indulgents envers le commerce qui est toujours très puissant dans leur résidence.

M. le président. - M. Dumortier présente l’amendement suivant :

« Dans le cas où ces frais sont mis à la charge de la partie intéressée par la loi. »

M. Dumortier. - Je me borne à demander que les choses restent dans l’état où elles sont actuellement.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Il me semble que ce qui touche le plus M. Dumortier, c’est que nous faisons une innovation à la loi actuelle.

Mais une innovation qu’on semble perdre de vue, c’est l’innovation que nous faisons dans l’intérêt du transit.

Désormais les tissus de soie qui payaient 1-40 par 100 kilogrammes paieront 20 c.

Les tissus de coton qui payaient 7 fr. paieront 20 c.

Les tissus de laine qui payaient 21-20 paieront 20 c.

Il me semble que cette innovation compense bien l’autre.

M. Dumortier. - Qu’importe que vous diminuiez le droit de transit, si, d’un autre côté, vous paralysez tous les bons effets de cette diminution par une dépense à la charge qui, comme M. Legrelle l’a fort bien prouvé, dépassera de beaucoup le droit.

- La proposition de M. Dumortier est mise aux voix et rejetée.

L’art. 10 est ensuite mis aux voix et confirmé tel qu’il a été primitivement adopté.

Articles 11 à 24

- Les articles 11 à 24 sont successivement adoptés définitivement sans discussion.

Article 25

« Art. 25. Toute déviation de la route directe déterminée pour le transport, tout déchargement de marchandises déclarées en transit, ou changement de moyens de transport opéré sans que le capitaine, batelier ou conducteur en ait instruit les préposés avant le commencement de la vérification au bureau de sortie, tout bris, rupture ou altération soit entier, soit partiel des scellés, des plombs ou des cordes auxquelles ils sont attachés, ainsi que leur rajustement frauduleux, entraînera, par le fait, l’annulation du transit avec amende du double droit d’importation ou d’accise le plus élevé, sur toute la quantité mentionnée au document, à charge des assujettis prédésignés ; le capitaine, batelier ou conducteur étant d’ailleurs responsable de cette amende, sauf recours contre qui il appartient, l’administration ne sera point tenue de mettre en cause d’autres intéressés sans préjudice toutefois à son action contre eux, tant pour cette pénalité que pour des amendes et confiscations applicables à la fraude dont l’un ou l’autre ces faits serait accompagné.

« Si cependant il était reconnu que le bris, la rupture ou l’altération des scellés, des plombs ou des cordes auxquelles ils sont attachés, fût l’effet d’un accident dont les intéressés auraient prévenu les préposés avant que la vérification ne fût commencée, et que d’ailleurs cet accident ne décelât aucun indice de fraude, mais seulement une négligence ou une imprudence, il ne sera appliqué pour ce fait qu’une amende de 50 fr., et l’administration pourra autoriser la continuation du transit.

« Aucune amende ne sera exigible si l’accident est l’effet d’une force majeure dûment constatée. »

M. Dumortier. - Je ferai remarquer que cet article renferme une singulière anomalie.

« Si cependant par le deuxième paragraphe il était reconnu que le bris, la rupture ou l’altération des scellés, des plombs ou des cordes, auxquelles ils sont attachés, fût l’effet d’un accident dont les intéressés auraient prévenu les préposés avant que la vérification ne fût commencée, et que d’ailleurs cet accident ne décelât aucun indice de fraude, mais seulement une négligence ou une imprudence, il ne sera appliqué pour ce fait qu’une amende de 50 fr. et l’administration pourra autoriser la continuation du transit. »

Ainsi l’administration pourra, indépendamment de l’amende prononcée, ne pas autoriser la continuation du transit.

Mais, messieurs, il ne dépend pas toujours du commerce que des accidents semblables arrivent dans le transport des marchandises. Ainsi, par exemple, en chargeant une voiture contenant des caisses de sucre candi et des balles de marchandises fabriquées, ou n’aura pas eu soin d’envelopper les colis de paille, de manière à garantir les cordes qui retiennent les plombs ; le frottement qui s’opère pendant le voyage endommage les cordes et les rompt ; quoiqu’il n’y ait aucune apparence de fraude, on peut cependant, dans ce cas, appliquer une amende de 5 fr., et le transit est retiré sauf le cas où l’administration voudra bien en autoriser la continuation. Je ne comprends pas la justice d’une pareille disposition.

A la vérité, le paragraphe suivant porte :

« Aucune amende ne sera exigible, si l’accident est l’effet force majeure dûment constatée. »

Qu’entend-on par force majeure constatée ? Quand on aura négligé quelques précautions pour faire arriver les cordages intacts, sera-ce un cas de force majeure ? S’il en est ainsi je vois dans les deux derniers paragraphes des dispositions qui se détruisent l’une l’autre, car l’une dit qu’il y aura amende et l’autre dit qu’il n’y aura pas d’amende.

Je voudrais qu’on nous dît ce que signifient ces deux dispositions. Si on peut appliquer la première alors même qu’il n’y a aucun indice de fraude, je le déclare, c’est une mesure vexatoire. Je regrette que les mesures fiscales que le gouvernement du roi Guillaume avait cru devoir introduire en matière de douane ne suffisent pas au gouvernement actuel. Je le regrette d’autant plus que je vois le ministre des finances entouré des mêmes employés qui, sous le roi Guillaume, ne voyaient que fraude partout, et se sont pour cela rendus si odieux. Eh bien ces hommes, non contents du système à jamais déplorable de Guillaume, système qui fut tant de fois flétri, portent la représentation nationale à surenchérir sur ce système. Car la loi que nous faisons surenchérit sur les mesures les plus iniques que Guillaume crut devoir prendre contre le commerce.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Je dirai que les paroles de l’honorable préopinant, si elles n’ont pas lieu de m’étonner, ne sont pas moins très injustes. Il faudrait que l’administration vexât les contribuables, pour qu’elles fussent fondées ; et il n’y a pas de pays où l’administration financière fasse moins sentir son action qu’en Belgique. Nous devons le reconnaître, chacun de vous, en retournant chez lui, doit voir qu’on évite de vexer les habitants, soit en opérant la rentrée des impôts, soit en exécutant les autres lois de finances ; et si quelques petits abus se rencontrent quelquefois, ils ne sont pas le fait de l’administration supérieure, mais de quelques agents qui auraient mal interprété la loi, ou qui auraient obéi à l’impulsion d’un zèle mal entendu.

Je ne sais pourquoi l’honorable préopinant persiste à attaquer des absents qui ne sont pas en cause et qui ne peuvent pas y être. Je ne sais pas quelles lois fiscales on peut reprocher à l’administration des finances d’avoir présentées jusqu’ici. La loi sur le transit est la seule loi qu’elle ait proposée qui renferme des précautions qui peuvent paraître minutieuses à quelques membres, et encore ces précautions sont-elles toutes dans l’intérêt de notre industrie. Ces accusations sont donc injustes et ne reposent sur aucun fait.

L’honorable préopinant est encore revenu sur un point qui me paraissait épuisé, celui de la disposition qui a pour but de rendre le conducteur attentif à ce qu’il n’y ait pas de rupture de scellés.

Si vous ne mettez pas de disposition comminatoire contre les bris de scellés, on essaiera de frauder ; si on réussit, tant mieux, on en profitera ; si on ne réussit pas et que le visiteur s’aperçoive du bris des scellés, il n’aura rien à dire, parce que vous n’avez pas mis de disposition comminatoire pour réprimer ces essais de fraude.

Après tout, la disposition que nous proposons n’est pas rigoureuse. Nous demandons qu’on prononce seulement une amende de 50 fr. par transport. Dans le premier projet, c’était 50 fr. par colis.

J’ai déjà fait observer dans une précédente séance que l’administration avait le droit de transiger sur ces sortes de contraventions comme sur celles prévues dans la loi générale de 1822 et l’honorable M. Rogier, pour qu’il n’y ait pas de doute à cet, égard, a proposé d’ajouter une disposition à laquelle je me suis empressé de me rallier. L’administration, je le répète, transigera toujours et fera même remise de toute l’amende, quand elle reconnaîtra qu’il n’y a pas eu d’intention de frauder.

Je ferai observer à cette occasion qu’aucun employé de l’administration centrale ne touche un denier dans les transactions ou procès-verbaux de saisie. C’est une chose à laquelle je prie de faire attention pour se convaincre qu’aucune idée intéressée ne peut dicter les avis des employés de l’administration centrale des finances. Autrefois ces employés avaient des parts dans les prises et dans les transactions ; aujourd’hui ils n’y sont intéressés en aucune manière.

On a demandé ce que c’était que la force majeure. Mais, messieurs, il y aura une infinité de cas de force majeure : une voiture peut être renversée dans un précipice, les chevaux peuvent s’emporter, enfin un malheur quelconque ; ce sont là des cas de force majeure qui ne peuvent donner lieu à aucune contestation.

Je persiste donc à dire que les précautions établies par l’article dont il s’agit ne sont pas une arme dangereuse dans les mains du gouvernement.

M. Hye-Hoys. - Je suppose un capitaine de navire, on un voiturier conduisant des colis pour vingt consignataires différents et qu’on n’appose dix plombs que sur les écoutilles ou les bâches : un des consignataires vent frauder et coupe dix plombs : aux termes du premier alinéa de cet article, tous seront-ils atteints comme fraudeurs par la pénalité qu’il commine, quoiqu’il n’y en ait qu’un seul qui ait réellement fraudé ?

Aussi ne la trouve-t-on pas dans la loi générale du 26 août 1822. Son article 155 ne frappe de pénalité que les marchandises sur lesquelles la mesure de précaution du plombage aurait été prise « inutilement ; » c’est-à-dire sur celles qui seules auraient refraudées.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - L’amende de 50 francs est pour tout le transport. C’est le voiturier ou le batelier qui la paiera. On ne connaît qu’un seul déclarant.

M. Dubus. - J’ai demandé la parole pour faire remarquer que le ministre des finances a répondu tout à l’heure d’une manière tout au moins très insuffisante aux objections faites contre le paragraphe ajouté à l’article 25.

Le ministre, dans sa réponse, vous a fait apercevoir la crainte qu’on n’ouvrît la porte à la fraude. Il n’a pas fait attention que dans l’article proposé on a ajouté : « et que d’ailleurs cet accident ne décelât aucun indice de fraude. »

Le ministre a oublié de se mettre dans la supposition de l’article.

Cette supposition la voici : c’est que le bris ou rupture des scellés fût le résultat d’un accident, et le fait de l’accident démontre que les intéressés en eussent prévenus les préposés avant que la vérification ne fût commencée, et en troisième lieu que cet accident ne décelât aucun indice de fraude.

Dès que vous êtes dans ces suppositions, les peines que prononce l’article sont manifestement injustes.

Mais, dit le ministre, l’article suppose une négligence ou une imprudence, et il ne prononce qu’une simple amende de 50 fr, pour tout le transport.

M. le ministre fait encore abstraction de cette dernière disposition du paragraphe : « et l’administration pourra autoriser la continuation du transit. »

Si vous mettez cette disposition en rapport avec le premier paragraphe, qui commine l’annulation du transit et le double droit, que résulte-t-il de ces deux dispositions ? Qu’alors qu’il n’y aurait qu’un accident sans aucun indice de fraude et dont les préposés eussent été prévenus avant que la vérification ne fût commencée, l’administration ne serait pas tenue de se contenter de l’amende de 50 fr. ; elle serait encore armée du droit arbitraire et évidemment injuste de frapper de l’annulation du transit. Si l’administration voulait pour ce cas priver l’intéressé du droit du transiter, elle le ferait ; c’est en quelque sorte une faveur si elle consent à autoriser la continuation du transit. C’est injuste.

Si on voulait laisser passer cet article il faudrait au moins retrancher ces mots : « et l’administration pourra autoriser la continuation du transit. » il n’y a aucun motif pour l’armer de ce droit arbitraire, dès qu’on suppose que le bris des scellés est le résultat d’un accident dont on a prévenu les préposés avant le commencement de la vérification, et qui d’ailleurs ne présente aucun indice de fraude.

M. le ministre des finances (M. d'Huart). - Il paraît que la dernière partie du dernier paragraphe n’a pas été bien comprise par l’honorable préopinant. Cette disposition serait effectivement exorbitante si elle devait être entendue commune il l’interprète. Mais il n’en est pas ainsi. Par suite de l’accident survenu, le colis peut se trouver dans un état tel qu’on ne puisse pas sans danger le laisser ainsi entre les mains du voiturier ou du batelier pour en continuer le transit ; l’emballage du colis peut se trouver dans un état tel qu’on pourrait impunément soustraire les marchandises qui y sont renfermées. Vous comprenez que l’administration doit se réserver la faculté d’autoriser la continuation du transit, en ordonnant que le colis sera remis dans un état convenable.

D’après ces explications et pour éviter toute fausse interprétation, on pourrait modifier la rédaction comme suit : « L’administration autorisera la continuation du transit en prescrivant les précautions nécessaires. »

(Moniteur belge n°164, du 12 juin 1836) M. Rogier. - Je n’ai plus rien à dire, puisque l’on est d’accord.

Je demande seulement qu’après les mots de « 50 fr. » on ajoute ceux-ci : « pour le transport » et que le deuxième paragraphe de l’article soit terminé ainsi que le propose le ministre des finances, savoir par les mots : « Et l’administration autorisera la continuation du transit en prescrivant les précautions nécessaires. »

- L’article est mis aux voix et définitivement adopté avec cette double modification.

Articles 27 et 33

- Adopté.

Article 36

- A l’art. 36 était annexé un tableau D, dans lequel deux dispositions avaient été modifiées lors du premier vote. Ces deux modifications sont définitivement adoptées.

Articles 37, 38 et 39 (nouveau)

- Adoptés.

Vote sur l’ensemble du projet

La chambre procède au vote par appel nominal sur l’ensemble du projet ; en voici le résultat :

63 membres prennent part au vote

59 votent pour l’adoption.

4 (MM. Dubus aîné, Dumortier, Hye-Hoys et Stas de Volder), votent contre.

La chambre adopte.

La séance est levée à 4 heures et 1/2.