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Chambre des représentants de
Belgique
Séance
du mardi 13 janvier 1835
Sommaire
1)
Pièces adressées à la chambre
2)
Projet de loi portant le budget du département des affaires étrangères pour
l’exercice 1835. Discussion des articles.
Traitement des agents en inactivité (Verdussen),
remboursement des frais des agents diplomatiques (Gendebien,
de Robaulx, de Muelenaere,
de Foere, de Muelenaere, Nothomb, Gendebien, Nothomb, de Foere, Gendebien, de Muelenaere,
(+contribution extraordinaire de guerre) de Robaulx, de Muelenaere, de Robaulx, H. Dellafaille, Smits, de Foere, Gendebien, de Robaulx, de Muelenaere, de Foere, de Muelenaere, de Robaulx, de Muelenaere, de Robaulx, de Foere, Desmanet de Biesme, de
Muelenaere, Gendebien, de
Muelenaere, Gendebien), missions extraordinaires
(notamment en Italie) (Gendebien, de Muelenaere, Nothomb, Verdussen, de Muelenaere, Gendebien, Nothomb, Gendebien, de Muelenaere),
indemnité de logement du ministre (de Muelenaere,
Milcamps, de Robaulx, Coghen, Ernst, de Muelenaere, Eloy de Burdinne,
de Robaulx, Ernst)
3)
Projet de loi portant le budget du département de la marine pour l’exercice
1835. Discussion générale. Constitution d’une marine militaire belge (de Foere, de Muelenaere)
(Moniteur belge n°14, du 14 janvier 1835)
(Présidence de M. Raikem)
M.
de Renesse fait l’appel nominal à une heure.
M. Brixhe donne lecture du procès-verbal de
la séance précédente ; la rédaction en est adoptée sans réclamation.
M.
de Renesse fait connaître l’analyse de pétitions suivantes.
PIECES ADRESSEES A
« Les anciens agent
du cadastre de la province de Limbourg réclament le paiement de leurs salaires
et indemnités pour opérations d’expertise cadastrale. »
________________
« Le sieur C.-J.
Ranson, ex-commis aux écritures de l’hôpital militaire de la ville de Bruges,
demande à être réintégré dans son emploi et que les sommes qui lui ont été
retenues lui soient restituées. »
________________
« Les notaires de
campagne de l’arrondissement d’Anvers demandent que la chambre adopte la
disposition du projet de loi relatif à la circonscription des cantons, qui
permet aux notaires de campagne d’instrumenter dans le ressort de l’arrondissement
judiciaire. »
________________
« Le sieur G. Versuyf,
aubergiste, réclame contre le projet de redressement de la route d’Audenaerde à
Alost qui traverserait sa propriété ou qu’il lui soit alloué une indemnité de
deux mille cinquante francs. »
________________
« Plusieurs fermiers cultivateurs de la
commune de Gulleghem demandent la suppression des
droits d’entrée sur les tourteaux de graine grasse. »
________________
Par dépêche en date du
12 janvier 1835, M. le ministre de la justice
(M. Ernst)
transmet à la chambre un état des travaux urgents à exécuter aux prisons. Cet
état sera déposé au greffe.
________________
Par arrête royal en date
du 12 janvier
Discussion des articles
M.
le président. - La chambre reprend la discussion sur le chapitre III.
Chapitre III. Traitement des agents en
inactivité
Article unique
« Art. unique. Traitement des agents en inactivité, de retour de leur
mission : fr. 10,000 »
La section centrale
propose d’ajouter : « sans qu’ils y soient remplacés. »
M.
Verdussen. - J’ai fait partie de la section qui a proposé l’addition de
ces mots, lesquels faisaient partie du budget de l’an passé. Je persiste dans
l’opinion que ces mots doivent être conservés dans le budget de cette année.
J’avoue que je n’ai pas été touché des motifs allégués dans la séance d’hier
par M. le ministre des affaires étrangères et par l’honorable M. Nothomb. En effet de quoi s’agit-il
aujourd’hui ? De savoir si des agents en inactivité doivent recevoir un
traitement, en d’autres termes de savoir s’il y aura deux titulaires.
Si jamais on n’avait
admis le libellé dont il s’agit, je pourrais passer outre et ne pas l’admettre.
Mais une fois qu’il a été admis, le rayer ce serait dire ouvertement que l’on
veut payer un homme qui n’est plus en activité.
L’honorable M. Nothomb a
dit hier qu’un agent diplomatique pouvait être rappelé et remplacé dans sa
mission par des motifs honorables pour lui ; mais il en est ainsi de tous les
fonctionnaires. Un ministre peut perdre son portefeuille par des motifs qui
l’honorent. Un gouverneur, par excès de zèle, peut se mettre dans une position
telle qu’il ne soit plus utile dans sa province ; il sera par conséquent
révoqué, et immédiatement il cessera de recevoir toute espèce de traitement ;
ces fonctionnaires n’auront droit à aucune espèce de traitement d’inactivité.
Je ne sais pas pourquoi il y aurait exception pour les agents diplomatiques.
Le véritable motif pour
écarter l’addition des mots : « sans qu’ils y soient remplacés, » c’est
que ces mots laissent à désirer une explication. Mais le long débat auquel ils
ont donné lieu l’an dernier doit suffisamment fixer le sens qu’il convient
d’attacher à ces mots.
Par ces motifs, je pense
que les scrupules manifestés dans la séance d’hier par l’honorable rapporteur
de la section centrale, ne doivent pas engager la chambre à changer le libellé
qui a été suffisamment expliqué.
Je voterais contre
l’article, si la suppression proposée par le gouvernement était admise.
- La proposition de la
section centrale tendant à l’addition des mots « sans qu’ils y soient
remplacés, » est mise aux voix et adoptée. L’article unique du chap. III ainsi
amendé est adopté.
Chapitre IV. Frais de voyages des
agents du service extérieur
Article unique
« Article unique. Frais
de voyage des agents du service extérieur, frais de courriers, estafettes et
courses diverses : fr. 70,000. »
M.
Gendebien. - L’année dernière, je me suis opposé à l’allocation de 8
florins par poste pour nos ambassadeurs. J’ai fait remarquer que si la somme de
8 florins par poste était nécessaire pour les ambassadeurs, celle de 5 florins
par poste pour les envoyés d’un grade inférieur, pour les secrétaires et les
attachés de légation, était insuffisante.
Le gouvernement a fait
droit, en partie, à ma réclamation qui a paru appuyée par un grand nombre de
membres de la chambre, puisqu’a a adopté un nouveau tarif en avril dernier ; ce
qui est une amélioration sensible, je dois en convenir. Mais je voudrais que le
gouvernement fît un pas de plus.
Je ne veux pas que nos
ambassadeurs aillent mesquinement dans les capitales étrangères ; mais je ne
veux pas non plus qu’ils aient d’excédant.
Je répéterai ce que j’ai
dit l’an dernier : il y deux manières de briller : la manière des prodigues qui
jettent de la poudre aux yeux, et qui, quand toute leur fortune est dissipée,
se trouvent en-dessous de la condition ordinaire ; ils brillent un instant par
leur luxe, mais ils n’en imposent qu’aux badauds et aux imbéciles ; je préfère
des hommes qui se règlent d’après leurs moyens, procèdent avec ordre et
économie et s’attirent ainsi le respect et l’estime des gens sensés. Je
m’exprimais ainsi, employant cette expression de « gens sensés » dont on a
tant fait abus, mais dont je crois avoir fait ici une juste application.
Je ne vois pas qu’il en
soit autrement pour les nations que pour les individus.
Les journaux nous ont
appris récemment que le général Alava, ancien aide-de-camp de Wellington. et l’un des plus honorables militaires de l’époque, était
monté modestement en diligence, partant de Paris pour se rendre à son poste à
Londres. Et cependant. messieurs, le général Alava
représente l’Espagne, pays dont la population est triple de la nôtre, et dont
les institutions sont moins républicaines que les nôtres. Je ne demande pas que
nos ambassadeurs aillent en diligence, quoique je n’y visse pas d’inconvénient.
M. de Robaulx. - Nous y allons bien, nous.
M.
Gendebien. - Puisque c’est l’usage qu’ils aillent en poste, soit je le
veux bien. Mais j’insiste sur la nécessité de réduire le droit de 14 francs par
poste attribué aux ambassadeurs. J’avoue que 4 florins (ou 9 ou 10 francs) par
poste me semblent être tout ce qui est nécessaire. Je pense que le gouvernement
arriverait à une proportion plus juste en mettant les frais de poste à 10 ou 12
francs par poste pour les ambassadeurs, et à 7 ou 8 fr. pour les secrétaires et
chargés d’affaires.
Cette
allocation suffirait, tant pour ces derniers que pour les ambassadeurs qui ont
d’ordinaire trois chevaux ; elle suffirait aussi pour la location d’une
voiture, ou l’intérêt de l’acquisition d’une voiture et ses réparations.
Je n’insisterai pas
davantage. Je pense que quand nous en sommes à augmenter nos contributions,
même pour le pied de paix, alors que nous sommes en état de guerre, sans savoir
jusques à quand cela se prolongera ; je pense, dis-je, que ce n’est pas le
moment de faire des prodigalités.
Si le pays était riche,
et que nous en fussions à diminuer les contributions, je consentirais à ce que
l’on augmentât le traitement des fonctionnaires. Toutefois, je n’accorderai
jamais rien au luxe, et je m’opposerai toujours aux prodigalités.
M. de Robaulx. - L’honorable M. Gendebien,
qui vient de prendre la parole, n’est pas revenu sur un abus qu’il a signalé il
y a un an ; c’est seulement pour faire cette observation, que je veux un
instant occuper la chambre.
Vous vous rappelez que,
l’an dernier, M. Gendebien vous a rapporté ce que l’on avait remarqué dans un
compte d’ambassadeur, dans un compte de M. Le Hon ; car il faut toujours nommer
les personnes, c’est le seul moyen qu’il n’y ait pas d’équivoque. Ce compte
était un compte de frais de courtiers pour un voyage fait par M. Le Hon, notre
ambassadeur à Paris, dans le but, si je ne me trompe, de venir chercher à la
frontière le Roi des Belges qui se rendait en France.
Ainsi, depuis la
frontière jusqu’à Paris, notre ambassadeur a voyagé avec le Roi, car vous savez
que lorsqu’un ambassadeur voyage avec la cour, il est d’usage, de bon goût, de
bon ton, qu’il voyage à la suite du Roi son maître. Alors les frais de poste
sont payés par le Roi. Si je me trompe sur ce point, je prierai M. le ministre
des affaires étrangères de vouloir bien rectifier mon erreur.
M. Le Hon a donc eu ses frais
de poste payés par le Roi. (Je ne fais ici que rappeler un fait cité par
l’honorable M. Gendebien.) Eh
bien, qu’est-il arrivé ? C’est que M. Le Hon, dans le compte relatif à ce
voyage, a porté pour frais de poste la différence entre le montant réel des
frais de poste et la somme allouée à ce titre par le tarif. Je vais
m’expliquer. Je prie la chambre d’excuser mon inexpérience en cette matière ;
c’est que je n’ai pas l’habitude de voyager en poste. Je ne fais pas, à cet
égard, comme M. Goblet et autres. Je vais simplement en diligence, sans me
croire pour cela moins honorable que ces messieurs.
M. Le Hon a fait
observer que la somme allouée par le tarif étant de 8 fl. par poste, et la
dépense réelle n’étant que de 4 ou 6 fl., il perdait 2 ou 4 fl. s’il ne lui
était rien alloué parce qu’il avait voyagé avec le Roi qui avait payé les frais
de poste. Des lors, si le fait est vrai, et j’adjure l’honorable M. Gendebien
de me rectifier si je suis dans l’erreur, M. Le Hon aurait porté dans son
compte la différence de 2 ou 4 fl. par poste.
Si le fait est exact, je
demande à M. le ministre des affaires étrangères si le crédit que nous
discutons doit servir à payer ces différences.
Dans
ce cas je ne voterai pas pour le crédit demandé : non pas que j’aie l’intention
de donner un vote approbatif à toutes les autres demandes faites pour la
diplomatie. Vous savez que j’ai une vieille rancune contre la diplomatie. C’est
la diplomatie qui nous a perdus et nous a ravalés au taux où nous sommes. Avant
la diplomatie et sa funeste influence, nous étions quelque chose. Aujourd’hui,
grâce à elle, nous sommes prostitués aux yeux de l’Europe, nous, précédemment
respectés comme nation indépendante. Je ne voterai pas de fonds pour la
diplomatie qui a sacrifié notre nationalité et notre indépendance. Car c’est
dans le tripot de la diplomatie qu’on a travaillé à nous perdre.
Cela est si vrai qu’en
1830 et 1831
Je voterai contre toute
allocation.
Je maintiens mon
interpellation au ministre des affaires étrangères dans le but de savoir s’il
est vrai ou non que la différence entre le taux réel des frais de poste et le
montant du tarif soit allouée à nos ambassadeurs.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Je regrette de ne pouvoir répondre d’une manière
positive à l’honorable préopinant. J’ignore si un ministre plénipotentiaire a
porté en compte la différence entre les frais de poste réellement payés et le
montant des frais alloués par le tarif. Mais il me semble que si un ambassadeur
voyageait aux frais du Roi, il ne serait pas délicat de sa part d’exiger que
cette différence lui fût allouée.
Lorsque je serais
certain que les frais de poste auraient été payés par le Roi je ne manquerais
pas de faire des observations, si on portait une deuxième fois en compte une
somme quelconque pour frais de poste.
M. de Robaulx. - Et sans doute, vous ne
passeriez pas la dépense en compte.
M. de Foere. - Je désirerais savoir si la somme
votée l’année dernière au même titre que celle en discussion, a été dépensée en
totalité, ou bien si les frais sont restés de beaucoup en-dessous de
l’allocation. Il me semble en effet que dans un budget des dépenses, ce sont
les dépenses faites que nous devons considérer et qui doivent être la base de
nos décisions, bien plutôt que les chiffres proposés par le gouvernement.
En second lieu, je
demanderai si les frais de voyage des agents du service extérieur sont aussi à
la charge de l’Etat, lorsque ces agents voyagent par leur propre inspiration ;
par exemple, lorsqu’un ministre plénipotentiaire vient visiter la patrie, et que
c’est le secrétaire qui demeure chargé des affaires du pays ; dans ce cas les
frais de voyage sont-ils à la charge de l’Etat ?
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - L’honorable préopinant a fait deux demandes : il a
demandé si les agents diplomatiques jouissent d’une indemnité de route,
lorsqu’ils voyagent pour leurs propres affaires, Je répondrai que les agents
diplomatiques ne jouissent d’une indemnité de route que lorsqu’ils voyagent par
ordre du gouvernement. Ainsi, je suppose qu’un ministre plénipotentiaire, après
avoir obtenu un congé, vienne en Belgique, il ne jouira pas de l’indemnité de
voyage.
L’honorable préopinant
demande également si la somme proposée est indispensable, si elle est nécessaire,
si la somme de 70,000 fr. votée annuellement est absorbée par la dépense. Je
réponds à cela que notre demande n’est qu’éventuelle. Non ; les années
précédentes la somme n’a pas été absorbée par la dépense. Je crois que sur les
exercices précédents on a disposé d’environ 40,000 fr. sur l’allocation de
70,000. En 1834, sur cette somme de 70,000 fr. on n’a dépensé que 29,037 fr.,
et il reste de disponible 40,963 fr., c’est-à-dire environ les 2/3 de la somme
votée.
La dépense n’est donc
qu’éventuelle, et vous voyez que le gouvernement n’a pas abusé de l’allocation
qui lui a été faite à ce titre aux précédents budgets.
M.
Nothomb. - L’honorable M. Gendebien a rappelé que son grand grief
contre l’article en discussion était l’année dernière le défaut de tarif. M.
Gendebien avait raison sous ce rapport et sur sa demande, je me suis empressé
de promettre comme commissaire du Roi que l’on ferait un tarif. Ce qui a eu
lieu.
Dès lors l’arbitraire
que présentait quelquefois le règlement des dépenses imputées sur cet article a
entièrement disparu. Ces dépenses sont réglées maintenant d’après un tarif
connu, public, car il est inséré au n°36 du Bulletin
officiel.
Maintenant ce tarif
est-il trop élevé ? C’est ce que l’on aura à examiner ultérieurement. C’est ce
que l’expérience seule peut prouver. Pour moi je le crois très modéré.
L’honorable M. Gendebien
a signalé les frais de voyage qui s’élèvent pour les ambassadeurs et ministres
plénipotentiaires à 14 fr. par poste. Mais il faut voir l’ensemble du tarif ;
il faut remarquer qu’il n’est alloué aux ministres plénipotentiaires que 25 fr.
de frais de séjour. Le bénéfice qu’ils peuvent faire sur les frais de poste se
trouve donc bien compensé par la modicité des frais de séjour ; car tout le monde
sait que c’est bien peu de chose que 25 fr. pour le séjour à Paris ou à Berlin
d’un ministre plénipotentiaire avec sa suite, ou au moins un domestique, alors
qu’il doit loger dans l’un des premiers hôtels de ces capitales.
De plus 14 francs pour
frais de poste ne forment pas une somme trop élevée. Un ministre
plénipotentiaire en voyage a besoin d’être précédé d’un courrier, il a donc : 3
chevaux, un courrier, les frais de voiture et de réparation.
Je
crois donc, pour mon compte, que le tarif est très modéré ; il est d’ailleurs
le plus modéré de tous les tarifs diplomatiques qui existent.
On a rappelé un fait
concernant M. Le Hon ; je suis à même de donner quelques éclaircissements à ce
sujet. Quand un roi se rend dans un pays voisin, il est d’usage que son
ambassadeur ou son agent diplomatique accrédité dans ce pays, vienne à la
frontière le recevoir ; c’est ce qu’a fait M. Lehon quand le Roi est allé en
France. En retournant à Paris, l’ambassadeur s’est trouvé dans la voiture du
monarque ; mais c’est momentanément, et M. Le Hon avait sa voiture particulière
qui le suivait.
On lui a alloué des
frais de poste pour le retour ; ils sont inférieurs à ceux de la venue parce
que son courrier a été supprimé ainsi que d’autres dépenses. L’arbitraire qu’on
a cru trouver dans ce cas ne peut se renouveler, car le tarif y met ordre.
M.
Gendebien. - Je ne veux pas revenir sur la discussion qui a eu lieu
l’année dernière. Alors je fournissais textuellement le compte de M. Le Hon ; je
l’avais obtenu à la cour des comptes. Il résulte de ce compte que le Roi a payé
les chevaux de poste pour M. Lehon, tandis que celui-ci recevait 4 florins par
poste ; ordinairement ils reçoivent 8 florins. J’en conclus que nos
ambassadeurs regardaient comme un bénéfice à faire sur les voyages, la moitié
des sommes allouées pour leurs frais de poste.
De plus, je faisais
remarquer qu’en admettant toutes les chances défavorables pour le bris de
voiture, il était difficile d’évaluer les pertes qui en sont la conséquence à 4
florins par poste.
Pour voyager avec 3
chevaux et un courrier en avant, il n’en coûte que 9 fr. 50 c. par poste.
Quatre florins suffisent donc.
Je demanderai comment on
entend payer 25 fr. par journée de séjour.
M. Nothomb. - On paie 25 fr. pour les jours où on
n’est pas en route.
M.
Gendebien. - Ainsi, on ne reçoit pas les 25 fr. quand on voyage. Eh
bien, si ma mémoire est bonne, ce n’est pas de cette manière qu’on a compté
précédemment. Je suis charmé qu’on en soit venu à des idées d’ordre. Vous
donnez actuellement 14 fr. par poste et 25 pour séjour : les 25 fr. ne sont pas
de trop ; mais les 14 fr. par poste excèdent les besoins et le ministre des
affaires étrangères peut réviser son tarif et en présenter une seconde édition
amendée. Le comte Alava, ambassadeur d’Espagne, comme je l’ai dit, n’a pas cru
manquer à sa dignité et à celle de son pays en se rendant, par la diligence, de
Paris à Londres.
M. Nothomb. - M. Lehon s’était rendu à la
frontière avec sa voiture et son courrier ; on lui a payé 8 florins d’après
l’ancien tarif hollandais ; mais en retournant à Paris on ne lui a alloué que 4
florins, et le Roi n’a pas payé les frais de retour de la voiture de M. Le Hon
à Paris.
Je le répète, les frais
de séjour ne peuvent être payés que pour les jours où l’on n’est pas en route.
(Aux voix ! aux voix !)
M. de Foere.
- Le ministre des affaires étrangères, en répondant aux questions que j’ai
faites, a dit que sur les frais de l’année précédente il était resté 40,000 fr.
; on voit donc que la somme de 70.000 fr. n’est pas nécessaire ; alors pourquoi
gonfler notre budget ? On devrait, pour établir le chiffre des frais de poste,
prendre la moyenne des dépenses des années précédentes. Je proposerai à la
chambre de n’accorder que 60,000 fr.
M.
Gendebien. - 50,000 fr. seraient même suffisants.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - En répondant à l’honorable préopinant, j’ai dit que
l’année dernière et les années précédentes les frais de poste n’auraient pas
été absorbés, mais je n’ai pas dit qu’il fût resté de 30 à 40 mille fr. Je n’ai
pas les pièces sous les yeux pour indiquer un chiffre.
L’allocation demandée
est purement éventuelle. La dépense peut varier à l’infini ; cela dépend du
nombre des courriers à expédier. Il est possible que 50,000 fr, soient
suffisants ; il est possible aussi que cette somme soit au-dessous des besoins.
Le gouvernement n’abuse pas du crédit. Il y aurait danger à ne pas accorder la
somme nécessaire.
M. de Robaulx. - Je suis d’accord avec le
ministre ; la somme qu’il demande n’est qu’un crédit purement éventuel, et
l’élévation du chiffre dépend des circonstances. Quoi qu’il en soit, les
crédits éventuels ont des bases. Quand on s’attend à beaucoup de courses
diplomatiques ou a une reprise d’hostilités diplomatiques, on doit prévoir que
les dépenses seront considérables. Si le ministre pense être dans ce cas, je
conçois qu’il doit demander une augmentation à l’allocation. Examinons, dans ce
moment, quelles sont les probabilités… Je vois un honorable membre qui hausse
les épaules mais comme il ne dit jamais rien, nous ne pouvons hausser les
épaules à ses discours : il devrait nous écouter avec indulgence... (On rit.)
Examinons quelles sont
en ce moment, les probabilités relativement aux courses diplomatiques.
Si nous nous en
rapportons à ce qu’a dit le Roi…. (je sais qu’il n’est
pas constitutionnel de le nommer ici ; mais comme il s’agit de ses paroles, il
faut bien que je dise de quelle source elles découlent.) Si nous nous en
rapportons à ce qu’il a dit, il nous a bercés de grandes espérances. Quelques
jours avant le nouvel an, le ministère, par l’organe du ministre des affaires
étrangères, nous avait aussi fait entendre des paroles assez mielleuses. On
parut se tranquilliser. Les ministres, pour avoir les 10 centimes de subvention
de guerre, avaient suivi une autre route. Ils avaient fait faire un rapport
élaboré avec un grand soin. Ce factum ayant fait naître des craintes, on vota
en effet les 10 p. c. Le Roi parlant après a démenti les assertions de ses
ministres : il nous a dit que tout était bien ; que nous pouvions porter chez
nous et à nos électeurs des assurances de paix.
M.
A. Rodenbach. - Il n’a pas dit cela !
M. de Robaulx. - Ne m’interrompez pas !
D’après les paroles royales nous sommes dans un avenir de paix présumable ; dès
lors doit-on supposer que la diplomatie aura beaucoup à faire ? Je ne le crois
pas.
Toutefois, comment se
fait-il qu’après des paroles aussi rassurantes on refuse de rayer, comme
inutiles, les 10 centimes d’impôts additionnels ?Comment
se fait-il que l’on vienne encore nous entretenir de dangers ? Les paroles
royales n’étaient donc basées sur rien ? M. de Muelenaere, la diplomatie
personnifiée, devrait bien nous éclaircir tout cela. Et remarquez-le, messieurs,
je vous prie : c’est au moment des élections anglaises c’est quand elles
annoncent la déconfiture du cabinet tory que le ministre de la guerre vient,
pour la seconde fois, nous faire peur. A cette coïncidence, ajoutez ce qu’a dit
hier M. le ministre de la justice, d’une manière un peu embrouillée, il est
vrai. Il parle ordinairement un peu plus clairement. Il veut sans doute
rivaliser d’obscurité diplomatique avec son collègue. J’ai mis toute ma
perspicacité à le comprendre. Il prétend que si
Tout
ce qu’il y a de cœurs patriotes en France repousse le ministère doctrinaire qui
s’accommode assez du ministère des tories ; serait-il vrai aussi que le
ministère belge ait trouve des garanties suffisantes pour notre indépendance,
des garanties de paix dans le cabinet formé par Wellington ? serait-il
possible que notre administration fraternisât avec les tories ? Serait-il
possible que des dangers naquissent pour nous quand le ministère de Wellington
est menacé de dissolution ?
Je n’ai jamais pu
comprendre comment les ministres pouvaient s’entendre entre eux ; comment leurs
paroles pouvaient concorder avec celles du Roi. J’ai toujours cru que pour
notre pays les plus belles choses devaient se présenter quand l’élément
révolutionnaire était en progrès ; et voilà que les ministres nous parlent de
dangers exactement au moment om les tories sont menacés !
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Mes collègues et moi nous avons suffisamment prouvé
qu’il n’y avait aucune espèce de contradiction entre nos paroles et celles de
S. M. Toutefois, je ne sais si la chambre me permettrait de revenir à la
discussion générale, close dans la séance d’hier, pour répondre à l’honorable
préopinant. Je crois qu’elle ne veut pas déroger à son règlement et qu’il faut
aujourd’hui se borner à la discussion des articles.
M. de Robaulx. - Voila de la diplomatie
toute pure. C’est se moquer du monde.
M.
le président. - Je vais mettre aux voix le chiffre de 70,000 fr.
M. de Robaulx. - Mais il y a un amendement !
M.
le président. - L’usage veut que l’on mette aux voix d’abord le chiffre
le plus élevé.
M. de Robaulx. - L’esprit du règlement est
que l’on doit d’abord mettre aux voix la proposition la plus favorable au
peuple ; ici c’est celle par laquelle on demande une diminution, donc c’est le
chiffre le moins élevé qui doit être mis aux voix le premier.
M.
le président. - Dans la discussion de tous les budgets, les choses se
sont passées de la même manière, ou en commençant par le chiffre le plus élevé,
La chambre veut-elle déroger à cet usage ? (Non
! Non !)
M. de Robaulx. - Il paraît qu’il y a de la
diplomatie partout. M le président, dans un but très louable, celui d’abréger les
délibérations, qu’il met aux voix le chiffre le plus élevé ; mais c’est
peut-être le plus élevé parmi les amendements.
M.
le président. - Non ; tels sont les antécédents. (Aux voix ! aux voix !)
M. de Robaulx. - Vous aurez votre loi assez
tôt ; soyez tranquilles ! Mais il est de règle, M. le président, de mettre les
amendements aux voix avant la proposition primitive ; c’est comme rappel au
règlement que je fais cette observation, et je crois en conséquence que l’on
doit commencer par l’amendement de M. de Foere.
M. le président. - Autrefois, je commençais, en
effet, par les amendements ; mais la chambre ayant manifesté l’intention de
commencer par les chiffres les plus élevés, j’ai dû m’y conformer.
M. de Robaulx. - Je demande l’exécution du
règlement !
M. H.
Dellafaille. -
La proposition de M.de Robaulx serait souvent inexécutable et empêcherait, dans
bien des occasions, que le vœu de la majorité de la chambre ne soit accompli,
et c’est afin d’obtenir une décision qui soit l’expression exacte de l’avis du
plus grand nombre, que l’on commence par le chiffre le plus élevé.
M. de Robaulx. - L’honorable orateur n’a pas
trouvé la pie au nid. La difficulté n’est pas résolue par ses explications. Du
reste, je n’insiste pas, si M. de Foere ne tient pas à son amendement. Mais
chaque fois que j’en présenterai un, je me réserve de demander la priorité pour
ma proposition, parce que je crois que cela est conforme au règlement.
M.
Smits. - Une autre objection à l’observation de M. de Robaulx se
présente : aux termes du dernier paragraphe de l’article 24 de notre règlement,
il n’est pas permis de prendre la parole entre deux épreuves. Une première
épreuve avait été commencée. Il faudrait que l’on fît la seconde.
M.
de Foere. - Je crois que notre honorable président est dans l’erreur.
La pratique constante de la chambre a été de commencer par voter le chiffre le
plus élevé, lorsqu’il s’agissait de plusieurs amendements. Jamais la
proposition principale n’a été mise aux voix la première.
L’objection de
l’honorable M. Smits est également sans fondement. On ne peut parler entre deux
épreuves sur le fond ; mais on peut parler sur la position de la question.
M. le président. - J’avais déclaré que je mettrais
aux voix le chiffre le plus élevé. Personne n’a élevé la voix contre cette
manière de poser la question. Si la chambre le désire, je la consulterai sur la
question de priorité. Je rappellerai seulement que lors de la dernière
discussion des budgets, l’assemblée avait désiré que je misse aux voix le
chiffre le plus élevé, à quelque proposition qu’il appartînt.
M.
Gendebien. - Il n’est pas exact de dire que l’on ne peut prendre la
parole entre deux épreuves, quand il s’agit de poser une question. Quand une
première épreuve a été douteuse, par cela seul que l’on ne s’est pas compris,
il est naturel que l’on prenne la parole pour s’entendre sur la seconde
épreuve. Quant à la question en elle-même, il est rationnel que quand on
demande l’exécution du règlement, on en revienne au règlement, lors même que
l’on en aurait dévié à plusieurs reprises. La chambre peut, quand elle le veut,
déroger à son règlement. Mais l’exception, par dérogation, ne peut pas détruire
la règle.
M. de Robaulx avait
raison de demander l’exécution du règlement, de demander que l’amendement de M.
de Foere fût mis préalablement aux voix. Du reste la chambre fera comme elle
l’entendra. Je suis sûr que M. de Robaulx n’attache pas d’importance à sou
observation.
M.
le président. - Je vais mettre aux voix la question de priorité.
M.
Gendebien. - Je demande, pour terminer toute discussion ultérieure, que
l’assemblée soit consultée sur la question de savoir si, pendant la discussion
de ce budget, le chiffre le plus élevé d’une proposition d’allocation sera mis
le premier aux voix.
- La chambre, consultée
sur la question de savoir si 1e chiffre le plus élevé de plusieurs propositions
relatives à une même allocation, sera mis le premier aux voix, la décide
affirmativement.
Le chiffre de 70,000 fr.
est mis aux voix et adopté.
Chapitre V. Frais à rembourser aux agents du service extérieur
M.
le président. - La discussion est ouverte sur le chapitre V.
Article unique
« Article unique. Frais
à rembourser aux agents du service extérieur : fr. 50,000 fr. »
M. de Robaulx. - Je demande que M. le
ministre des affaires étrangères spécifie les sommes dont il s’agit dans cet article.
Ces remboursements servent-ils à grossir les appointements des agents
diplomatiques ?
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Cette allocation de 50,000 fr. n’entre pour rien dans
les indemnités auxquelles peuvent avoir droit les agents diplomatiques. Elle
n’est destinée qu’à rembourser les frais que ceux-ci peuvent faire dans
l’intérêt du gouvernement qu’ils représentent. Ces frais sont prévus par
l’arrête réglementaire du 22 septembre 1831. Ils consistent dans les ports de
lettres qui leur sont envoyées par le gouvernement, dans le remboursement des
dépenses occasionnées par l’expédition de courriers pour le service de l’Etat,
et des sommes distribuées aux Belges nécessiteux qui se trouvent en pays
étranger. Ils ne sont payés à l’agent diplomatique qui en fait la demande que
sur la présentation des pièces qui en constatent la légalité.
M. de Foere. - Dans la séance d’hier, M. le
ministre a invoqué un arrêté réglementaire pour justifier l’allocation du
sixième du traitement de l’envoyé à Berlin, en faveur du secrétaire de la
légation, lorsque celui-ci remplit ses fonctions. Aujourd’hui on en invoque un
autre. Il me semble que l’on ne peut s’appuyer de dispositions prises par le
gouvernement, pour déterminer le vote de la chambre. Ces règlements ne peuvent
servir que quand les allocations sont discutées et votées.
Il est vrai qu’il est
nécessaire de régler les dépenses auxquelles la chambre a donné sa sanction.
Mais si les ministres font bien de régulariser la question d’exécution, les
arrêtés qu’ils prennent ne peuvent être d’aucun poids lorsqu’il s’agit
d’examiner la question de savoir si une dépense est nécessaire ou non. C’est à
l’assemblée seule à apprécier si l’intérêt du pays exige qu’elle soit faite.
Les arrêtés pris antérieurement ne doivent pas être invoqués pour influencer en
rien sa détermination.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Je vous avoue que je ne comprends rien au langage de
l’honorable préopinant. Un ministre demande l’allocation d’une somme à son
budget. Il faut bien que la chambre sache l’emploi qu’il fera de cette somme.
Je trouve naturel que l’honorable M. de Robaulx ait demandé quels étaient les
frais à imputer sur cette somme. Pour satisfaire à sa demande, il était
nécessaire que je citasse les dispositions en vigueur qui justifient
l’allocation de 50,000 francs.
L’honorable abbé de
Foere prétend que l’on ne peut invoquer des arrêtés pris par le gouvernement,
pour déterminer le vote de la chambre. Si l’on rappelle ces dispositions, c’est
uniquement pour faire connaître à la législature l’emploi qui sera fait de la
somme que l’on demande. L’orateur que je combats pense que les règlements organiques
ne devraient être portés qu’après le vote des budgets. Il voudrait donc que
l’on fît des règlements nouveaux après le vote de chaque budget. S’il en était
ainsi, le gouvernement serait dans l’impossibilité de justifier ses demandes
d’allocations ; il ne serait pas lié par des règles fixes et invariables dans
l’emploi des sommes qui lui seraient accordées. C’est dans ce but qu’il prend
des arrêtés, qu’il établit des limites dont il ne peut s’écarter ; et s’il le
fait, c’est, comme on le voit, dans l’intérêt seul du pays.
M. de Robaulx. - Si j’ai bien compris
l’honorable M. de Foere dont la voix ne me permet pas d’entendre distinctement
les paroles, il ne conteste pas le droit qu’a le gouvernement de faire des
règlements ; il ne conteste pas que l’on organise les devoirs des agents
diplomatiques, mais il ne veut pas que l’on se serve de ces arrêtés comme d’une
autorité pour appuyer la demande d’allocation. C’est ce à quoi M. le ministre
des affaires étrangères n’a pas répondu.
Ce que je trouve
singulier, c’est que, sous le titre du chap. V, on consacre une allocation pour
remboursement aux agents du service extérieur de frais déjà prévus par les
chapitres précédents. Je conçois que l’on vote une allocation pour
remboursement de dépenses déjà faites. Mais il s’agit ici de dépenses à faire.
C’est ici une somme de 50,000 fr, dont vous allez voter la distribution entre
tous les agents diplomatiques.
Je ne suis pas souvent
d’accord avec MM. les ministres ; ils me permettront d’expliquer ma pensée.
Peut-être bien finirai-je par me rapprocher d’eux dans cette discussion ; car
pour leur système, c’est différent. L’arrêté cité par M. le ministre des
affaires étrangères porte au nombre des remboursements à faire aux agents
diplomatiques, les frais d’expédition des courriers pour le service de l’Etat,
les secours accordés aux Belges nécessiteux, etc. Je trouve tout naturel que
l’on rembourse l’argent déboursé par les agents diplomatiques, pour le service
du pays. Je conçois que lorsqu’un envoyé achète des
objets qui lui sont nécessaires dans l’exercice de ses fonctions, il n’en
supporte pas les frais. Mais la chambre ne doit pas accorder aux agents le
moyen, je dirai, scandaleux, de faire de légères aumônes aux portes des
légations. Ce n’est pas l’intention de la représentation nationale.
Lorsqu’outre un traitement fixe, que je trouve exorbitant pour la taille de
notre pays, on touche des frais de voyage et des frais de séjour, vous
conviendrez qu’il est étonnant que l’on vienne demander à l’Etat de rembourser
les aumônes que l’on peut avoir à faire. A l’exception de leurs souliers, de
leurs chemises et de leurs habits, je crois que nous payons tout aux agents
diplomatiques. S’ils voyagent, l’Etat paie leurs chevaux de poste ; s’ils
reçoivent des lettres, l’Etat leur en rembourse le port ; s’ils font des
aumônes, l’Etat leur en remet le montant. Le trésor public est mis à
contribution pour les frais de leur ménage. Je trouve cela exorbitant. Je
conçois que lorsque des Belges en pays étranger ont besoin d’une somme assez
considérable pour rentrer dans leur patrie, ce soit l’Etat qui supporte les
frais de leur voyage. Mais je demande à M. le ministre s’il sera permis à un agent
diplomatique de faire figurer, comme on l’a déjà vu, dans les comptes qu’il
envoie au département des relations extérieures, les faibles aumônes qu’il aura
distribuées en son nom.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - L’arrêté que j’ai cité détermine exactement les seuls
frais imputables sur ce chiffre de 50,000 francs. Ces frais sont faits dans
l’intérêt de l’Etat. Il est, je pense, de toute justice que nos agents
diplomatiques reçoivent le remboursement du port des lettres qui leur sont
adressées par le gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions. Je ne pense
pas que cela soit contesté par M. de
Robaulx.
M. de Robaulx. - Non, pourvu que ne paie pas
les frais de leur correspondance personnelle.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - En vertu d’une disposition adoptée depuis quelque temps,
les agents diplomatiques sont obligés de justifier du montant des ports de
lettres reçues par un état tenu à la poste. Il ne peut par conséquent s’élever
aucun abus.
L’allocation en
discussion sert également au remboursement des secours accordés à des Belges
nécessiteux en pays étranger. Il ne s’agit pas ici des aumônes particulières
faites par nos agents diplomatiques, Il s’agit des secours que ceux-ci
accordent en leur qualité de représentants du gouvernement, à leurs
compatriotes qui n’ont pas le moyen de rentrer en Belgique. Et, à cet égard,
les frais de route sont déterminés par le gouvernement. Il est rare que des
ministres plénipotentiaires ou que des chargés d’affaires aient des
réclamations à faire de ce chef. La plus grande partie de celles qui nous
arrivent, viennent des consuls dans les ports de mer. C’est ainsi qu’il nous
est arrivé, dans le courant de 1834, des réclamations extrêmement fondées
faites par des consuls pour des matelots belges naufragés, auxquelles ils
avaient fait remettre des objets d’habillement et de chaussure, ainsi que des
fonds pour rentrer dans leur patrie.
Enfin, dans cette
allocation de 50,000 fr. est également compris le remboursement des dépenses
faites pour expédition de courriers. Cette dépense est légitime.
Il peut arriver
également qu’un ministère ait besoin de documents ou d’ouvrages qu’il ne peut
se procurer ou faire copier en pays étranger que par l’intermédiaire des agents
diplomatiques. Il est juste que les dépenses faites de ce chef par eux leur
soient payées.
Ainsi, messieurs, cette allocation n’est
destinée qu’à des remboursements de dépenses faites dans l’intérêt de l’Etat,
et ces remboursements ne s’opèrent que quand les sommes ont été réellement
dépensées. Les agents diplomatiques sont obligés de fournir à l’appui de leurs
demandes de paiement des pièces justificatives.
La
somme de 50,000 francs peut paraître très élevée, et elle l’est en effet dans
les temps ordinaires. On peut s’en convaincre d’après les dépenses qui ont été
faites de ce chef sur l’exercice 1834. Jusqu’au 31 décembre dernier, elles ne
se sont élevées, à la connaissance du gouvernement, qu’à la somme de 5,100 fr.
Il est possible qu’il nous arrive encore des réclamations de la part des
consuls qui résident dans des ports de mer éloignés. Mais la chambre peut
apprécier dès à présent le montant de la dépense faite en 1834.
M. de Robaulx. - Je suis satisfait des
explications de M. le ministre dès l’instant que les aumônes de MM. les agents
diplomatiques ne sont pas comprises dans l’allocation.
M.
de Foere. - Je n’ai pas contesté au gouvernement le droit de porter des
arrêtés réglementaires. Je n’ai pas prétendu que les arrêtés devaient suivre le
vote de la chambre. J’ai dit seulement que les ministres ne peuvent invoquer
les règlements qui ont été portés en exécution des votes de la chambre. Comme
je l’ai dit, on s’est appuyé des règlements existants pour justifier hier le
supplément de traitement du secrétaire de la légation de Berlin. L’on revient
aujourd’hui sur le même argument à l’occasion du chapitre V. J’ai dit, et je le
répète, qu’une semblable manière de procéder ne peut être admise.
M. Desmanet de Biesme. - Je désirerais
savoir si nos agents diplomatiques perçoivent un droit de visa sur les
passeports et les pièces qu’ils délivrent. Je soumettrai à M. le ministre la
question de savoir s’il ne serait pas juste que l’on usât de réciprocité à
l’égard des Français à la légation belge à Paris. Lorsque nous, Belges, nous
voulons obtenir un certificat de vie à la légation française à Bruxelles pour
percevoir des rentes en France, nous sommes obligés de payer des droits de
chancellerie.
Pourquoi n’en serait-il
pas de même à Paris à l’égard des Français qui auraient à percevoir des rentes
en Belgique ? la même inégalité se fait remarquer pour
les passeports. Le Belge qui passe la frontière française est obligé de déposer
son passeport à Valenciennes, par exemple, en d’en prendre un nouveau qui lui
coûte deux francs. Les français ne sont pas soumis aux mêmes formalités en
Belgique.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Les renseignements fournis à cet égard par la section
centrale sont parfaitement exacts. Voici le fait : Les agents diplomatiques
belges ne reçoivent aucun droit de visa sous quelque dénomination que ce soit.
Il est perçu sur les passeports délivrés aux Belges en pays étranger des droits
de timbre qui sont versés plus tard dans le trésor. Il est tenu un compte au
département des finances. Ainsi il est constant que nos agents diplomatiques ne
reçoivent aucun droit de chancellerie.
Reste
la question de savoir s’il conviendrait d’établir au profit du trésor un droit
de visa et de légalisation des pièces et passeports délivrés par les ministres
ou chargés d’affaires. Cette question est très délicate. De ce qu’un
gouvernement suscite quelques difficultés aux étrangers qui arrivent dans son
pays, je ne sais pas s’il est d’une bonne politique d’établir en Belgique les
mêmes règles, pourvu qu’elles ne s’appliquassent pas aux Belges seulement. En
France, ce ne sont pas les Belges seulement qui sont soumis aux formalités
rappelées par l’honorable M. Desmanet, mais tous les étrangers les subissent.
Il ne s’agit donc pas ici d’une question de représailles. Il s’agit de savoir
s’il faut établir pour les étrangers les mêmes droits de visa de leurs
passeports. Je ferai remarquer que les droits de visa et de légalisation
rapporteraient fort peu.
Car je crois que ces
droits qui se perçoivent à la légation française, se perçoivent exclusivement
au profit d’individus employés en sous-ordre dans les consulats, tels que les
chanceliers, mais qu’ils ne tournent nullement au profit du trésor.
M.
Gendebien. - Messieurs, je me proposais d’adresser une question à M. le
ministre des affaires étrangères quand la discussion aurait été terminée. Je
vais la faire en ce moment, puisque j’en trouve l’occasion ; l’an dernier j’ai
fait remarquer à la chambre que, dans un compte présenté par un de nos
ambassadeurs à la cour des comptes, il avait été perçu certaines sommes pour
des passeports et autres actes de chancellerie. La cour des comptes avait dit
que cette somme devait être portée en recette et non pas au compte de
l’ambassadeur. Je demandai où on portait ces comptes en recette. On me répondit
que rien n’était encore régularisé à ce sujet, mais qu’incessamment cela aurait
lieu. J’ai été de nouveau à la cour des comptes, il y a huit ou dix jours, et
toutes les recherches ont été infructueuses ; je n’ai rien pu trouver qui me
donnât des éclaircissements sur ce point. Je demande dans quelle partie des
recettes du budget des voies et moyens cela se trouve.
Je
demanderai en outre que la diplomatie belge s’entende avec la diplomatie
étrangère pour faire abolir ce visa de passeports, qui est une espèce
d’exaction, et surtout les signatures pour simples légalisations, qu’on ne
devrait pas considérer comme si peu de chose. Il est ici un assez grand nombre
de rentiers qui touchent en France des rentes viagères qui ont été tiercées ;
ils sont obligés de soumettre leurs certificats de vie à un visa qui coûte 5
francs. Il est telle cote où le visa représente 15 ou 20 p. c. Il est urgent
que l’on mette un terme à des abus qui attaquent si rudement le petit pécule du
pauvre.
II en est de même pour
les passeports. Beaucoup d’ouvriers vont à Paris pour se perfectionner dans
leur état ; cela arrive aussi à de nombreux artistes, à des artisans : on les
force de prendre en passeport. Si la diplomatie est bonne à quelque chose, c’est
à soulager les individus peu riches de frais qu’ils ne peuvent impunément
supporter. Quant au gouvernement français, il y a au moins lésinerie de sa part
à percevoir des droits pour des formalités qui ne lui occasionnent aucune
dépense, car je demande s’il y a le moindre frais dans une signature et un
cachet noir.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Messieurs, j’ai déjà eu l’honneur de vous dire qu’on ne
percevait à l’étranger aucun droit de visa sous quelque dénomination que ce
fût. Seulement ceux qui obtiennent des passeports à l’étranger sont tenus d’en
payer le prix, c’est-à-dire le timbre. Ces passeports timbrés sont fournis au
ministère des affaires étrangères par le ministère des finances. Le premier de
ces départements envoie une quantité plus ou moins grande de ces passeports à
nos agents à l’extérieur. A mesure que le montant en est reçu par eux, la somme
qui en provient est remise au ministère des affaires étrangères, qui la fait
verser au ministère des finances, parce que le ministère des affaires
étrangères est responsable de ces passeports envers le département des finances
; il doit en fournir le montant ou restituer ceux qui n’ont pas été délivrés.
M.
Gendebien. - Pour le timbre, je comprends encore le mécanisme de cette
marche ; mais je crois avoir remarqué d’autres objets de recette, et c’est sur
ce point que j’avais demandé des éclaircissements.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Je n’ai aucune connaissance qu’il ait été perçu d’autres
sommes que pour les passeports.
- Le chapitre V, art,
unique, est adopté.
Chapitre VI. Missions
extraordinaires et dépenses imprévues
M.
le président. - Le chapitre VI, Missions extraordinaires et dépenses
imprévues. 80,000 fr., est mis en discussion.
« Article unique.
Missions extraordinaires et dépenses imprévues : fr. 80,000. »
M.
Gendebien. - Je demanderai à M. le ministre des affaires étrangères de
me dire d’après quelle règle notre envoyé en Italie a été payé de son
traitement et de ses frais de voyage.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Il y a si longtemps que ce fait a eu lieu, et n’ayant
pas d’ailleurs les pièces sous les yeux, parce que je ne m’attendais pas à ce
qu’une question à ce sujet me fût adressée, que je ne pourrais répondre à cet
égard.
M. Nothomb. - Si la chambre me le permet, je vais
donner quelques explications qui pourront servir de réponse à l’honorable M. Gendebien. En ce moment nous
n’avons pas d’agent diplomatique en Italie. M. le vicomte Charles Vilain XIIII
fut chargé de cette mission en 1832, et il était porté au budget pour une somme
de 10,500 fr. ; ainsi. pour tout le temps ou il a été
en mission permanente à Rome, il a été payé à raison d’un traitement de 5,000
florins par an. Le gouvernement le chargea aussi d’une mission extraordinaire,
pour notifier l’avènement du Roi, à Naples, à Turin, à Florence et en Suisse.
Ici sa mission a pris un caractère extraordinaire et pour cela il a été payé
sur le dernier chapitre du budget. Mais, pour son ambassade à Rome, il n’a
jamais reçu de traitement autre que celui fixé d’après le compte du budget.
M. Verdussen. - Je viens appuyer la
proposition faite par deux sections et qui n’a pas été admise par la section
centrale.
Deux sections se sont
opposées au chiffre de 80,000 fr. L’une a demandé une réduction de 20,000 fr. ;
l’autre, une de 15,000. C’est cette dernière que je viens appuyer. La section
centrale a dit, pour justifier ce rejet, que le pays n’était représenté que
près un petit nombre de puissances. En voyant le tableau, je suis loin de le
trouver si restreint. D’après ce qui a été dit, il est évident qu’on aura
encore besoin de moins de fonds cette année que par le passé. Je propose, non
pas une réduction de 20,000 fr., qu’une section a demandée, mais celle de
15,000 ; ainsi donc je réduis le chiffre de 80,000 fr. à celui de 65,000.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Je dois encore répéter que cette demande est purement
éventuelle. Il est impossible de prévoir la dépense qui pourra avoir lieu en
1835, pour missions extraordinaires. Pourtant je ne prévois nullement que la
somme de 80,000 fr. doive être absorbée dans cet exercice, d’autant plus qu’en
1834 il n’a été imputé que 9,000 fr., ce qui conséquemment a laissé intacte la
somme de 71 mille francs environ. Je ne m’oppose nullement à ce que la somme
soit réduite à 65,000 fr., ainsi que le propose l’honorable M. Verdussen.
M.
Gendebien. - Messieurs, je crois que la réduction pourrait être plus
forte encore, puisque le ministre vient de vous dire qu’en 1834 il n’avait été
dépensé de ce chef que 9,000 francs. Je rends justice à le
ministre des affaires étrangères. Il n’a pas abusé du crédit qui lui avait été
alloué ; mais l’allocation demandée n’en est pas moins inutile et même nuisible
; car personne ne peut contester qu’il soit dangereux de laisser figurer au
budget des sommes inutiles. C’est ouvrir une porte aux abus et fournir au
gouvernement un mode trop facile de procurer à ses créatures l’occasion de
voyager en leur donnant des missions soit dans le nord, soit dans le midi.
Quoique le fait soit important, je n’insisterai pas davantage sur ce point.
Je reviens à une autre
question : j’ai entendu dire que les missions à Rome, à Turin, à Florence
avaient été peu coûteuses, Cependant, dans mes recherches à là cour des
comptes, j’ai vu qu’elles avaient occasionné une dépense de 32,863 fr. 62 c.
J’ai malheureusement perdu la note qui donnait les détails de cette dépense.
Mais si ma mémoire est bonne, j’ai trouvé que pour un voyage par mer de Naples
à Marseille, il avait été dépensé 717 ou 747 ducats : le ducat vaut 4 à 5 fr.
Des voix. - Ce sont les ducats de Naples ;
ils valent 4 francs.
M. Gendebien. - Soit ; voilà donc 5,000 francs
environ, et seulement pour un voyage de Naples à Marseille. Vous voyez le
danger de passer légèrement sur les crédits éventuels. Tous les crédits sont
éventuels, excepté pour l’ordre judiciaire et pour les administrations, telles
que l’enregistrement et toutes les administrations dont le personnel est réglé
par des lois ; mais pour le reste, tout crédit est éventuel. Ce sont les abus à
l’avenir qu’il faut craindre, car vous ouvrez ainsi une porte aux
dilapidations. Je pense qu’il ne faut pas s’arrêter à une réduction de 15,000
francs, mais qu’il est bon de diminuer la somme de 30,000 francs, conséquemment
de la réduire à 50,000, et j’ai la conviction qu’il ne sera pas même dépensé
moitié.
M.
Nothomb. - Je regrette beaucoup que l’honorable préopinant n’ait pas pu
avoir une plus ample connaissance des détails de la dépense causée par les
missions extraordinaires auxquelles il vient d’être fait allusion. Je les
connais moi, et je puis affirmer qu’on a mis à les examiner toute la sévérité
possible.
Je
puis en outre assurer que l’agent diplomatique en Italie, dont il est question,
a dépensé le double de ce que le gouvernement lui a alloué. J’ai vu les comptes
de son banquier qui attestent ce surcroît de dépense. Quant au voyage par mer,
dont il est parlé, il a coûté beaucoup moins cher que s’il eût été fait par
terre. Voici un fait que je me rappelle et que je crois pouvoir à propos citer
à la chambre. L’agent diplomatique en Italie passa par Paris pour présenter ses
hommages au roi des Français. On lui fit entendre que ses frais ne seraient pas
portés en compte ; que s’il avait cru devoir présenter ses hommages au roi
des Français, il avait très bien fait, mais qu’il paierait les frais de sa
politesse. Je m’étonne qu’on entre de nouveau dans le détail des comptes des
agents extérieurs. On fait cette exception en faveur de la diplomatie. Dans les
autres ministères, il y a également des agents extérieurs, et ces investigations
n’ont pas lieu. Aujourd’hui, il me semble que les observations de ce genre,
quand elles ne sont pas générales, sont inopportunes. Dans la dernière session,
l’honorable M. Gendebien a eu raison de signaler le défaut de tarif pour la
diplomatie. Je ne pense pas qu’on puisse en dire autant pour la discussion qui
s’attache au détail d’un compte.
M. Gendebien. - Il m’a semblé
indispensable, pour prouver que la réduction de I 5,000 fr, n’était pas
suffisante, de me servir d’un exemple. Celui que j’ai cité m’a paru le
meilleur. Quand un seul agent a coûté à
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Il m’est impossible de prévoir en ce moment le nombre
des agents diplomatiques dont l’établissement sera nécessaire en 1835, mais je
dois dire qu’il y aurait imprudence à réduire la somme de plus de 15,000
francs. Vous voyez quel emploi a été fait des fonds alloués pour cet article
dans l’année précédente, vous avez des garanties dans le passé.
- Le chiffre de 65,000
fr., auquel s’est rallié M. le ministre des affaires étrangères est mis aux
voix et adopté.
Chapitre Ier. -
Administration centrale
Article premier
M.
le président. - Dans la séance d’hier, on a ajourné à celle
d’aujourd’hui le surplus de l’art. 1er concernant l’indemnité du logement de M.
le ministre des affaires étrangères ; nous allons revenir sur cette partie, et la
remettre en discussion.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Messieurs, les aunées précédentes, vous avez alloué au
ministre des affaires étrangères comme à ceux de la justice et des finances une
somme de 4,000 fr. pour indemnité de logement. La section centrale propose de
retrancher cette somme, puisque, dit l’honorable rapporteur, le ministre habite
l’hôtel des affaires étrangères. Le motif de la section centrale est plausible
pour ce qui me concerne personnellement. En entrant à l’hôtel des affaires
étrangères, j’ai renoncé à ce qui était attribué à ce titre sur l’exercice
courant, parce qu’il est juste que celui qui habite l’hôtel, ne cumule pas cet
avantage avec l’indemnité.
Mais vous savez tous,
messieurs, que l’hôtel est dépourvu des meubles nécessaires pour l’occuper. Il
est inhabitable pour une famille quelque peu nombreuse. Ce n’est qu’en garçon
qu’on peut s’y loger ; dès lors je ne puis pas, par une considération toute personnelle,
renoncer à une indemnité accordée jusqu’à présent.
De deux choses l’une :
ou le ministre des affaires étrangères doit avoir l’indemnité dont jouissent
deux de ses collègues, ou bien il doit avoir un hôtel qui doit être
convenablement meublé, et de manière à pouvoir être occupé par le ministre et
sa famille
L’allocation d’une
indemnité de logement accordée au ministre n’est qu’une mesure purement
provisoire ; cette indemnité participe de la nature des traitements, elle est
payée mensuellement. Je pense que, tout à la fois dans l’intérêt du bien du
service et peut-être même dans l’intérêt du trésor, il serait préférable que la
chambre votât la somme nécessaire pour l’ameublement de l’hôtel et supprimât
définitivement l’allocation pour indemnité de logement.
Dès que l’achèvement de
la partie incendiée de l’hôtel qui est maintenant en construction aura eu lieu,
l’hôtel du ministère pourra être débarrassé de tout ou partie des bureaux qui
s’y trouvent maintenant. Dès lors l’hôtel présentera une demeure convenable
pour le ministre. Il s’agira seulement de pourvoir à l’ameublement de l’hôtel.
Dans ce but, j’ai prié
mon collègue M. le ministre de l’intérieur de vouloir bien faire procéder au
devis estimatif du mobilier nécessaire pour un hôtel de ministère des affaires
étrangères. Ce devis, je le tiens à la main. J’avoue que j’ai été effrayé
moi-même de l’import de ce devis ; ii s’élève à 74,000 francs, (Oh ! oh !)
Je pense avec vous,
messieurs, qu’il y a là exagération, et que ce n’est pas là la somme nécessaire
pour meubler l’hôtel d’une manière décente et convenable. Mais, d’après les
renseignements que j’ai recueillis, une somme de 20,000 francs serait
nécessaire pour l’ameublement de l’hôtel.
Dans une précédente
année, la chambre a accordé à un gouverneur de province une somme de 10,000
florins des Pays-Bas pour achat de l’ameublement d’une partie de l’hôtel qu’il
occupe. Il résulte de l’emploi qui a été fait de cette somme qu’elle a été à
peine suffisante ; et veuillez remarquer qu’elle n’était destinée qu’à
l’ameublement d’une partie de l’hôtel du gouverneur. Dès lors vous ne devez pas
être étonnés que 20,000 fr. soient nécessaires pour l’ameublement de l’hôtel du
ministère des affaires étrangères.
Je crois qu’il y aurait
bénéfice pour le trésor à allouer une somme de 20,000 fr. pour ameublement de
l’hôtel, et à ne pas continuer l’allocation annuelle de 4,000 fr. pour
indemnité de logement.
Je
ferai remarquer que même un simple transfert dans le budget de l’année
précédente suffirait pour couvrir à peu près la dépense. L’an dernier, la
chambre a voté pour traitement du ministre des affaires étrangères 21,000 fr.,
et pour son indemnité de séjour 4,000 fr., ensemble 25,000 fr. Par suite de l’interim rempli sans traitement par l’honorable comte F. de
Mérode, et par suite de la renonciation faite ultérieurement à l’indemnité de
logement, il est resté disponible sur cette allocation de 25,000 francs
(exercice 1834) une somme de 17,000. Ainsi, en effectuant le transfert dont
j’ai parlé, il suffirait d’ajouter 3,000 fr. pour meubler convenablement
l’hôtel et de toute allocation ultérieure pour indemnité de logement.
Je crois qu’il y aurait
économie à procéder ainsi. Je pense que 20,000 fr. suffiront pour meubler
l’hôtel d’une manière décente et convenable. En conséquence, je propose que
l’on supprime le n°2 de l’article 1er. Indemnité de logement, et et que l’on
fasse un article spécial : « Achat du mobilier et frais d’ameublement de
l’hôtel du ministère des affaires étrangères, 20,000 fr. »
M. Milcamps,
rapporteur. -
La section centrale a rejeté l’allocation relative à l’indemnité de logement du
ministre, par le motif qu’il habite l’hôtel du ministère des affaires
étrangères. On a demandé si l’hôtel était meublé convenablement ; il a été
répondu que la section centrale n’avait pas à s’occuper de cet objet, que si
l’hôtel n’était pas meublé convenablement, c’était au ministre à faire à cet
égard telle proposition qui lui conviendrait. Mais j’ai dû comme rapporteur
prévoir la proposition qui pouvait être faite à ce titre ; et sans avoir
mission de la section centrale, je me suis convaincu que l’hôtel était dépourvu
de toute espèce. J’ai vu qu’il n’y avait que deux pièces à conserver : une
pendule et un lustre. (On rit.) Tout
le reste doit être renouvelé. Ainsi la proposition que vient de faire M. le
ministre me paraît devoir être admise. Elle est une conséquence, d’une part du
rejet de l’indemnité de logement, et de l’autre de l’absence de tout mobilier
dans l’hôtel du ministère des affaires étrangères.
M. de Robaulx. - Je sais bien que chaque
fois qu’on propose une réduction, c’est pour nous charger ensuite d’une somme
un peu plus forte ; c’est la règle, et l’honorable M. de Muelenaere en fournit
encore en ce moment l’application.
Jusqu’à présent on a
payé 4,000 fr. pour indemnité de logement. Aujourd’hui, pour faire une belle
économie, après avoir mis à la disposition du ministre un hôtel somptueux sous
le rapport de l’édifice et de sa construction, ou nous oblige à être également
généreux en mettant le mobilier de l’hôtel en rapport avec l’édifice.
Je conçois parfaitement
que le ministre ne puisse pas loger dans un hôtel entièrement dépourvu de
mobilier, et que d’un autre côté il aime mieux occuper un logement somptueux
dans un bel édifice, que conserver un modeste logement en ville en percevant
une indemnité de 4,000 francs.
A présent, on lui a fait
venir l’eau à la bouche ; on lui a dit : « Faites une proposition
pour ne plus avoir l’indemnité, et nous vous donnerons les fonds nécessaires
pour meubler l’hôtel. » Alors le ministre a présenté un petit projet qui
établit la nécessité de dépenser 74,000 francs pour l’ameublement de l’hôtel.
Puis, comme c’est assez l’habitude du gouvernement vis-à-vis de la chambre, de
demander 1000,000 francs pour en avoir 80,000 ; cette fois on a été plus
généreux, on avait présenté un devis de 74,000 francs, et on s’est contenté
(jugez de la générosité) de la somme de 20,000 francs.
Il résulte de là que
cette année nous aurons voté 20,000 fr., et que l’année prochaine, quand on
aura terminé la construction de la partie incendiée de l’édifice, et qu’on aura
débarrassé l’hôtel de la majeure partie des bureaux, le ministre se trouvant
plus au large dans l’hôtel, nous apportera un autre petit devis, nous
persuadera que la somme de 20,000 fr. n’est pas suffisante et nous demandera
une petite augmentation.
Est-ce donc le moment de
s’engager dans cette voie de dépenses interminables, lorsqu’il y a crainte de
guerre, crainte sans doute plus ou moins chimérique, mais enfin lorsque cette
crainte de guerre prochaine a été répandue dans le pays par le ministère,
lorsque nous votons des centimes additionnels, lorsque les questions les plus
fondamentales vont être de nouveau discutées en Europe, lorsque l’existence
même de notre pays est à la veille d’être remise en question ?
En de telles
circonstances, je ne vois pas la convenance de meubler si somptueusement
l’hôtel des affaires étrangères. M. le ministre dit que l’on ne peut y vivre
qu’en garçon ; eh bien, qu’il y vive encore cette année en garçon, et que nous
ne chargions pas le pays de la dépense extraordinaire que l’on propose.
Remarquez,
messieurs, qu’en déboursant ce capital de 20 ou 30,000 fr., et davantage encore
par la suite, nous ne serons pas affranchis d’en payer l’intérêt, parce qu’il y
aura toujours à ce mobilier des frais de réparation et d’entretien.
Il vaut donc mieux voter
chaque année une indemnité de logement de 4,000 fr. qu’ensevelir un capital
qui, aux yeux même de M. le ministre, n’est pas suffisant. Quant à moi, je
déclare que je voterai contre la proposition du ministre.
M. Coghen - Je viens appuyer la demande faite par
M. le ministre des affaires étrangères ; je crois même que l’allocation de 20,000
fr. sera insuffisante pour meubler convenablement l’hôtel du ministère.
M. de Robaulx. - C’est ce que j’ai dit.
M.
Coghen - On sait qu’il n’y a pas assez de meubles dans cet hôtel ; que
ceux qui y sont appartiennent à l’ancien hôtel du ministère des finances du
royaume des Pays-Bas. Il me semble que le ministre des affaires étrangères
devrait être logé dignement pour recevoir les agents et les envoyés
diplomatiques. Dans la demande que l’on fait je ne trouve de reproches à faire
que relativement à l’exiguïté de la somme.
M. le ministre de la justice (M. Ernst).
- Je soumettrai à la chambre une observation qui, je pense, exercera quelque
influence sur sa détermination.
Dans les sections, lors
de l’examen préparatoire du budget de 1834, on s’est occupé de ce chiffre de
4,000 fr. alloué aux ministres pour indemnité de logement. Dans celle dont je
faisais partie on a insisté pour que les 4,000 fr. du ministère des affaires
étrangères fussent supprimés : on a fait remarquer que l’on possédait un
bâtiment assez beau pour loger le ministre, qu’il suffisait de l’approprier à
cet usage ; qu’il n’était pas naturel de payer une rente annuelle de 4,000 fr.
quand on pouvait la rédimer par un sacrifice assez peu considérable.
Il ne s’agit pas en
effet de faire ici l’achat d’un ameublement somptueux ; il ne s’agit pas non
plus de frais de représentation ; car, et contrairement à ce qui se pratique
partout ailleurs, le ministre n’en reçoit pas ; il n’en demande pas, et quand
il représente, c’est à ses dépens. Il s’agit de rendre l’hôtel habitable. Et
pour cela on vous demande un sacrifice de 20,000 fr. pour vous rédimer d’une
rente de 4,000 fr. Je ne pense pas qu’on puisse refuser une telle demande.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Je n’ai été déterminé dans ma demande par aucune
considération personnelle. Je n’ai pas cru qu’on pût supprimer une indemnité de
logement, accordée jusqu’ici, sans fournir les moyens de rendre l’hôtel
habitable. Je vous avoue que je désirerais n’être pas chargé de l’emploi de la
somme de 20,000 fr. pour l’achat de meubles ; j’aurai de la répugnance à
prendre ce soin. Mais comme je n’ai pas la certitude de rester au ministère, je
ne veux pas que mon successeur soit dans une position défavorable, parce que je
l’aurais devancé. J’habite l’hôtel du ministère ; mais un autre ministre ne
pourrait l’habiter avec sa famille. Il ne faut donc pas supprimer les 4,000 fr.
d’indemnité de logement, quoique je ne les reçoive pas.
Il est dans l’intérêt du
service, et plus tard il sera dans l’intérêt du trésor, que tous les hôtels des
ministres soient convenablement meublés et que les ministres y résident. La chambre
doit juger actuellement s’il faut maintenir l’allocation de 4,000 fr. pour
indemnité de logement au ministre des affaires étrangères, ou bien s’il faut
allouer une somme pour ameublement de l’hôtel : je crois que c’est ce dernier
parti que l’on doit choisir.
M. Eloy de Burdinne. - Je veux motiver
mon vote qui sera négatif. On nous dit que 20.000 fr., appliqués actuellement à
l’ameublement de l’hôtel du ministère des affaires étrangères serait une bonne
spéculation, puisqu’on donne 4,000 fr. annuellement pour indemnité de logement
; je le crois ; mais est-ce dans le moment actuel que nous devons sacrifier des
capitaux pour remplacer des dépenses annuelles ? Sommes-nous bien sûrs que nous
ne serons pas attaqués ? N’avons-nous plus de sacrifices à faire pour nous
préparer à repousser une agression étrangère ? Pour moi, je crois qu’il vaut
mieux conserver nos capitaux pour nous mettre en état de répondre à ceux qui
voudraient nous attaquer ; car c’est le moyen de ne l’être pas, que de les
dépenser même en améliorations. Par ce motif, je vote le rejet de l’allocation
de 20,000 fr.
M. de Robaulx. - Je prétends aussi qu’il
vaut mieux payer annuellement 4,000 fr. que de sacrifier actuellement un
capital de 20,000 fr., capital qui devra être augmenté l’année prochaine, car
il sera insuffisant, comme l’a fort bien dit M. Coghen, pour meubler
convenablement l’hôtel. Remarquez encore qu’il s’agit de mettre le capital en
meubles qui se détruisent, qu’il faut remplacer et entretenir tout au moins.
Le ministre qui est
maintenant à la tête du département des affaires étrangères, modeste dans ses
habitudes, n’est pas exigeant pour lui-même ; il ne demande rien ; mais il veut
être généreux pour ses successeurs. Il en résulterait, si l’on suivait son
avis, qu’on serait encore obligé de donner 20,000 fr. l’année prochaine. Il
vaut mieux donner 4,000 fr. pour indemnité de logement.
M.
le ministre de la justice (M. Ernst). - Mais, messieurs, nous n’en
sommes pas réduits à ce point que le sacrifice de 20,000 fr. empêcherait de
prendre vis-à vis de nos ennemis l’attitude que nous devons avoir. Il s’agit
ici d’une question de convenance, de décence. Il est utile que le ministre des
affaires étrangères reçoive les envoyés des autres nations dans l’hôtel
consacré à son département ; mais si le ministre actuel veut bien, dans
l’intérêt public, l’habiter dans l’état où il est aujourd’hui, d’autres
ministres pourront-ils l’occuper et y rassembler leur famille, si on le laisse
dans cet état ? Evidemment non ; il faut donc allouer une somme pour le
meubler.
- La somme de 20,000 fr.
est mise aux voix.
M. de Robaulx., se levant contre l’adoption.
- Quand je devrais être seul, je vote le rejet.
M. Eloy de Burdinne., se levant aussi
contre l’adoption. - Nous serons deux ! (On
rit.)
- L’allocation de 20,000
fr. est accordée.
Discussion générale
M.
de Foere. - Le gouvernement a consulté les chambres de commerce du
royaume, sur la question de savoir s’il était dans l’intérêt du pays de faire construire
une flottille destinée à protéger notre marine marchande dans les mers de nord.
Les documents relatifs à cet objet n’ayant pas été imprimés, la chambre n’a pu
prendre connaissance des réponses faites par les chambres de commerce sur cette
importante question. Je conçois que dans un pareil état de choses, la chambre
ne pourrait pas émettre, sur l’opportunité d’une allocation pour les
constructions maritimes, un vote en parfaite connaissance de cause. Je propose
donc à l’assemblée l’impression des rapports qui ont été adressés au
gouvernement, ainsi que l’ajournement de la discussion d’une allocation pour
constructions maritimes, jusqu’à ce que la chambre se soit éclairée sur la
question de savoir s’il y a lieu de construire une flottille pour protéger
notre marine marchande. Ce n’est pas l’ajournement de la discussion du budget
de la marine que je demande, mais seulement de la question spéciale sur
laquelle je viens d’appeler votre attention.
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - Je pense que la proposition de l’honorable M. de Foere
ne tend pas à ajourner la discussion du budget du département de la marine mais
seulement à ajourner le chapitre relatif à l’établissement d’une marine
militaire jusqu’à l’impression et la distribution des documents sur la matière.
Sous ce rapport, je ne puis manquer d’être de l’avis de l’honorable préopinant.
Car il n’est demandé aucune allocation du chef de constructions maritimes.
Ainsi la discussion est ajournée de droit.
Vous savez que dans une
session précédente l’honorable M. de Foere avait lui-même déposé un mémoire
relatif à la création successive d’une marine militaire. Cette question a été
controversée dans cette enceinte. Le gouvernement a demandé l’avis des
principales chambres de commerce des villes maritimes du pays. Leurs réponses
sont parvenues au gouvernement, et toutes, à l’exception d’une seule, ont
conclu à l’ajournement indéfini de la proposition. Rien ne s’oppose à ce que
ces documents soient déposés sur le bureau et à ce qu’ils soient imprimés et
distribués aux membres de la chambre. L’on pourra examiner la question de
savoir s’il y a lieu de consacrer une allocation à la création d’une marine
militaire. Mais le budget de la marine, je le répète, ne contient aucune somme
de ce chef. Ainsi l’ajournement de la proposition de M. de Foere ne peut
influer sur la discussion de ce budget
- La discussion générale
est close.
Il est procédé à l’appel
nominal pour vérifier le nombre de membres présents.
49 membres répondent à
l’appel. L’assemblée n’est plus en nombre pour délibérer.
- La séance est levée à
quatre heures.