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Chambre des représentants de Belgique
Séance
du lundi 16 décembre 1833
Sommaire
1) Projet de loi portant le budget des voies et moyens pour l’exercice
1834. Second vote. Produits de la fabrication des monnaies (Verdussen, Gendebien, Verdussen, de Robaulx, Donny, de Robaulx, de Brouckere, Kerkhoven, de Brouckere, Coghen, Gendebien, Donny, Lebeau, de Brouckere, Meeus, Verdussen, Lardinois)
2) Projet de loi relatif au mode de
nomination des juges de paix (+circonscriptions judiciaires) (de Robaulx, A. Rodenbach, Lebeau, de Robaulx, de Brouckere, (+allusion aux orangistes (A.
Rodenbach, de Robaulx, Lebeau,
de Brouckere, Quirini, Dumortier)), Lebeau, Dumortier, de Theux, de Robaulx, Lebeau, d’Huart, Dumortier)
3) Projet de loi portant le budget
du département de la guerre, pour l’exercice 1834
4) Projet de loi relatif au
contingent de l’armée pour l’année 1834
(Moniteur belge n°352, du 18 décembre 1833)
(Présidence de M. Raikem)
A une heure, un de MM.
les secrétaires fait l’appel nominal.
A une heure et un quart
la séance est ouverte.
Le procès-verbal de la
dernière séance est lu et adopté.
Divers mémoires adressés
à la chambre, sont renvoyés à la commission des pétitions ; quelques-uns étant
devenus sans objet par suite des délibérations de la chambre, sont retirés.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DES
VOIES ET MOYENS POUR L’EXERCICE 1834
Discussion des articles
Trésorerie générale
Recettes diverses
M.
le président. - L’ordre du jour est le voté définitif sur le budget des
voies et moyens.
- Les divers
amendements, adoptés par la chambre, sont maintenus sans discussion.
A l’occasion des 251,000
fr. portés aux recettes diverses de la trésorerie sur la proposition de M. le
ministre des finances, comme bénéfice présumé sur la fabrication des monnaies
de cuivre, M. Verdussen demande la parole.
M.
Verdussen. - Messieurs, je ne viens pas demander qu’on change le
chiffre porté aux recettes de la trésorerie, quoique, pour répondre au vœu de
la section centrale, il eût fallu porter en recettes la totalité des sommes
provenant de la fabrication des monnaies de cuivre qui doivent entrer au trésor,
et d’un autre côté porter en dépenses tout ce que cette fabrication doit
coûter. Pour cette année, cependant, je me contente du chiffre porté de 251,000
fr., qui n’est que le résultat de l’opération. Mais, l’année prochaine, je
voudrais que la chose fût régularisée. Je me réserve de prendre la parole,
lorsqu’il s’agira des 995,000 fr. portés pour ordre, dont je me propose de
demande la suppression.
- Le chiffre de 251,000
fr. porté comme bénéfice présumé sur la fabrication des monnaies de cuivre, est
définitivement adopté.
M.
le président. - Un autre amendement a été adopté sur la proposition de
M. le ministre des finances. Une somme de 995,000 fr. a été portée aux recettes
pour ordre, comme résultant des versements faits ou à faire en nouvelles
espèces de cuivre.
M.
Verdussen. - Je demande la parole. Messieurs, je viens demander la
suppression de cet amendement. La recette dont il s’agit n’est pas de la nature
de celles qu’on porte aux recettes pour ordre. La recette pour ordre est un
revenu de l’Etat, qui, par une disposition spéciale, doit être affectée à une
dépense spéciale. Ici ce serait précisément l’inverse, car on a commencé par
faire la dépense. Si les 995,000 fr. étaient portés aux recettes pour ordre,
ils devraient être immédiatement employés encore une fois à l’achat de matières
premières, soit en or, soit en argent, soit en cuivre. C’est donc comme
contraire à la nature des recettes pour ordre que je demande la suppression de
la somme de 995,000 fr., qu’on y a mentionnée.
M. le président met l’amendement aux voix.
Plusieurs membres n’ayant pas entendu la question
mise aux voix, on demande le renouvellement de l’épreuve.
M de Robaulx. - M. le ministre des finances vient de se
lever contre son amendement ; je le prie de dire s’il l’abandonne.
M.
le ministre des finances (M. Duvivier) - Je n’avais pas entendu : je demande
le maintien de l’amendement que la chambre a adopté sur ma proposition.
M. Gendebien. - C’est pour mettre dans les
comptes une régularité plus grande que celle qu’on y avait mise jusqu’ici,
qu’on a porté aux recettes pour ordre le produit de la fabrication des monnaies
de cuivre ; on portera en dépense les frais de fabrication, etc. qu’aura coûté
la matière première.
M. Verdussen. - On n’a pas fait un grand pas
vers la régularité en portant en recettes les 251 mille francs représentant le
bénéfice que doivent procurer les opérations de monnayage de cuivre faites en
1833 et 1834 ; cela ouvre une porte pour vérifier tout ce qui a été fait et
rechercher si les arrêtés du ministre sont ou non constitutionnels. Mais quant
aux 995 mille fr., je me permettrai deux remarques : d’abord ; comme je l’ai
déjà dit, ce n’est pas une recette pour ordre ; une recette pour ordre est un
revenu ordinaire qui, après avoir été mentionné sans qu’on puisse en fixer le
montant, doit servir à acquitter certaines dépenses spéciales déterminées par
une disposition législative. Si vous portiez 995 mille francs pour les monnaies
de cuivre, il faudrait en porter une bien plus forte
pour les monnaies d’argent, car je ne vois pas pourquoi on ne porterait au
budget que les opérations monétaires en matière de cuivre.
M. le commissaire du
Roi, dans ce qu’il vous a dit, ne m’a paru préoccupé que des monnaies de cuivre
; cependant, nous savons qu’en vertu de l’arrêté du 11 novembre on frappera
également des monnaies d’argent ; et si vous adoptez le principe qu’il faut
porter en recettes le produit des monnaies frappées, vous devez également
porter le produit des monnaies d’argent. Dans tous les cas, ce n’est pas aux
recettes pour ordre qu’il faut les porter ; car ce sont des rentrées après
dépenses faites ; tandis que les recettes pour ordre doivent être dépensées
après. Voilà pourquoi l’amendement doit être rejeté.
M. de Robaulx. - Je ne vois pas l’importance
de cette discussion. Mais je crois devoir faire observer que le préopinant se
trompe en argumentant de ce qui se fait pour le monnayage d’argent. Le
monnayage d’argent se fait par entreprise ; le gouvernement paie tant pour cent
au directeur, tandis que, pour le monnayage du cuivre, c’est le gouvernement
qui se charge de la fabrication. Or, il y a sur cette fabrication un bénéfice
présumé. Le ministre croit que, sur tant de mille francs qu’il fera fabriquer,
ce bénéfice sera 251 mille fr. ; il est naturel de le mentionner aux recettes
réelles. Mais ensuite je pense qu’il faut porter aux recettes pour ordre les
995,000 fr, qui entreront au trésor comme produit de la fabrication, et quand
on présentera la loi des dépenses, on y portera les frais de fabrication et
d’achat de matière première. En bonne administration pour que rien n’échappe au
contrôle de la chambre, on doit porter d’un côté toute la recette et de l’autre
toute la dépense. Voilà pourquoi je pense que l’amendement proposé par M. le commissaire
du Roi, qui est en même temps directeur du trésor, doit être maintenu.
M. Donny. - Messieurs, voici comme je conçois
l’affaire. Je me permettrai de différer d’opinion avec l’honorable M. de
Robaulx ; je crois qu’il s’est trompé sur les chiffres qu’il a posé, et c’est de là qu’est venue l’erreur dans laquelle il
est tombé. Il paraît, d’après ce que nous a dit M. le ministre des finances,
que l’opération du monnayage de cuivre procurerait un bénéfice d’environ
251,000 francs. Ce bénéfice doit être compris dans la loi des voies et moyens
comme tous les revenus de l’Etat ; mais il y a deux moyens de l’y faire figurer
: d’abord, on peut porter 251 mille francs comme produit net de l’opération ;
mais on peut suivre une autre marche,
porter aux voies et moyens la somme de 995 mille francs qui représente
le produit brut, et par contre, porter dans le budget des dépenses le coût de
la matière première et les frais de fabrication ; ces frais ne s’élèvent pas à
995,000 francs, comme cela semblerait résulter de ce qu’a dit le préopinant,
mais à 744 mille francs. En adoptant cette marche, la différence de la recette
sur la dépense représentera le bénéfice ; mais cette différence, ce bénéfice,
ne doivent pas figurer aux voies et moyens, car si vous portez dans la loi des
voies et moyens et le bénéfice de 251 mille francs et la recette brute de 995
mille francs, il est évident que vous ferez un double emploi.
Il
faut de deux choses l’une : ou porter 251 mille francs en recettes comme
produit net de l’opération et ne rien porter en dépenses, ou bien porter en
recettes le produit brut de 995 mille francs et faire figurer en dépenses 744
mille francs pour les frais de fabrication.
Comme déjà le chiffre de
251 mille francs a été adopté, je pense que l’amendement dont il s’agit doit
être rejeté.
M. de Robaulx. - J’avais proposé de porter
toutes les recettes et toutes les dépenses aux dépenses et aux recettes pour
ordre, et de porter en recettes réelles le bénéfice présumé de 251 mille
francs. C’est comme cela qu’on l’a entendu quand on a adopté cet amendement de
M. le ministre des finances ; je ne vois pas de motif pour revenir sur cet décision.
M. de Brouckere. - Comme M. de Robaulx, je
pense que la discussion est sans importance ; mais il me semble que M. Donny a
parfaitement exposé la question. Ne portez en recettes que le produit net de
251,000 fr. et ne portez rien pour dépenses ; car, si en même temps vous portez
995,000 fr. pour mémoire, les 251,000 fr. se trouvent portés deux fois ; une
fois en réalité, et une fois pour mémoire. Si vous tenez à ce que tout figure
au budget, portez aux recettes pour ordre, pour mémoire, 744,000 fr., montant
présumé des frais de fabrication, et vous porterez une somme égale aux
dépenses.
Je
ne fais que répéter ce que vous a dit M. Donny, parce que je pense que tout le
monde ne l’a pas compris.
M.
Gendebien. - Portez 995,000 fr. en recettes, et vous en porterez 744 en
dépenses.
M.
Kerkhoven, commissaire du Roi. - Les 995 mille francs qu’on désire voir porter pour ordre sont les
nouvelles espèces de cuivre versées au trésor de 1833 et 1834. Nous devrions
alors porter au budget des dépenses les 744 mille francs de frais de
fabrication, et la différence entre les deux sommes constituerait le bénéfice
de 251 mille francs. Je crois que cette deuxième somme est la seule qu’il
faille porter aux voies et moyens. Quant aux 995 mille francs, on en rendra
compte à la cour des comptes ainsi que des 744 mille francs.
M. de Brouckere. - Je suis étonné que le
ministère ne comprenne pas l’explication donnée par M. Donny et que je viens
d’avoir l’honneur de répéter.
M. Coghen. - Comme M. de Brouckere, je pense que
comme nous avons déjà porté 251 mille francs aux recettes réelles, nous devons
porter 744 mille francs aux recettes pour ordre, sauf à porter une somme égale
au budget des dépenses.
M. Kerkhoven, commissaire du Roi. - C’est toujours la même chose.
M.
Gendebien. - Il suffit de poser la question en chiffre pour voir la
différence. Si vous portez en recettes effectives 251,000 fr., et en recettes
pour ordre 995,000 fr., vous avez un total d’un million 246,000 fr., et si vous
en déduisez les 744,000 fr. pour les dépenses, il en résulte une différence de
502,000 fr. Si au contraire vous portez d’un côté la recette brute, et de
l’autre la dépense, votre bénéfice se trouve dans la différence.
M. de Robaulx. - Toute la difficulté vient
de ce que nous discutons les voies et moyens avant d’avoir apprécié les
dépenses.
M. Kerkhoven, commissaire du Roi. - C’est pour ne pas enfler
inutilement le budget que nous n’avons porté toute la somme en recettes.
M. Donny. - Je me proposais de reprendre la parole
; mais puisque M. le commissaire du Roi paraît se rendre à nos observations , je crois inutile d’insister davantage.
M. de Brouckere. - Pour la régularité, il
faut porter 744,000 fr. aux recettes pour ordre à moins qu’on ne veuille
revenir sur le vote de 251,000 fr.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il y a un
précédent conforme à la proposition de M. le commissaire du Roi qui consiste à
porter la recette totale aux voies et moyens, et de porter en dépenses tous les
frais occasionnés par l’opération. Le précédent que j’invoque, je le trouve
dans mon département. Vous avez porté pour les prisons 1,400,000
fr. en recettes, et en dépenses 1,000,000. (L’année dernière vous avez réduit
l’allocation à 1,000,000). Si on avait procédé comme
on propose de le faire ici, on n’aurait porté que le bénéfice de 400,000 fr.
Je pense que si vous
portez la somme de 995 mille francs en recettes et 744 mille francs en
dépenses, vous procéderez avec la même régularité que vous l’avez fait pour les
prisons.
M. de Brouckere. - Le précédent que vient de
citer M. le ministre de la justice n’est pas conforme à ce que demandait M. le
ministre des finances, mais bien à ce que nous demandons depuis une heure. M.
le ministre des finances voulait qu’on portât 251,000 fr. pour recettes
effectives et 995.000 fr., aux recettes pour ordre. Si on avait appliqué la
même manière de raisonner à l’article des prisons, outre les 1,400,000 fr., on
aurait porté en recettes les 400,000 fr. de bénéfice présumé, ce qui aurait
porté le chiffre à 1,800,000 fr., irrégularité que vous avez eu soin d’écarter.
C’est aussi ce que nous voulons éviter. Choisissez : porter 995,000 fr. au lieu
de 251,000, ou maintenez les 251,000 fr. et portez 744 pour mémoire, sauf à
porter au budget des dépenses tous les frais de fabrication.
M. le ministre de la
justice (M. Lebeau) - Messieurs, le préopinant me prête une assertion
que je n’ai pas émise. J’ai dit que je partageais la dernière opinion exprimée
par M. le commissaire du Roi qui était de porter en recettes le produit de
995,000 fr., et en dépenses les 744,000 fr. de frais de fabrication.
M. Meeus. - Je crois qu’il est plus régulier de laisser
les 251,000 fr. de bénéfice aux recettes effectives, et de porter pour mémoire
744,000 fr., somme égale à la dépense.
M. Verdussen. - La manière la plus régulière
est celle proposée par M. le ministre de la justice. L’année prochaine je
proposerai de suivie ce mode ; mais, pour cette année, comme déjà vous avez
voté les 251,000 fr. représentant le bénéfice présumé (et en cela vous avez
procédé comme pour l’administration des postes), je pense qu’on ne peut se
dispenser de revenir sur la délibération prise : si, cependant la chambre
jugeait à propos de le faite, je ne m’y opposerais pas.
M.
Lardinois. - Je pense que vous devez porter en recettes la somme totale
de 995,000 fr., et en dépenses, celle de 251,000 fr. ; vous aurez toujours pour
résultat un bénéfice de 251,000 fr. Mais ce mode présente un autre avantage, en
ce que de cette manière le contrôle des sommes reçues et dépensées appartiendra
aux chambre ; tandis que ce serait à la cour des comptes, si ces sommes
figuraient au budget pour mémoire.
M. Kerkhoven, commissaire du Roi. - J’ai voulu procéder comme on le
fait en France, ne faire figurer aux recettes effectives que le produit brut,
afin de ne pas enfler le chiffre du budget.
M. de Brouckere. - M. le président, mettez
aux voix la réduction des 251,000 fr. et l’insertion des 995,000 fr.
M.
Verdussen. - Je propose de rayer la somme de 251,000 fr. et de la
remplacer par la somme de 990,000 fr.
M.
le ministre des finances (M. Duvivier) - Je propose d’inscrire au
budget des recettes, à l’article des recettes diverses, trésorerie, comme
produit en espèces nouvelles, la somme de 995,000 fr.
M.
Lardinois. - Nous sommes maintenant d’accord.
- La proposition de M.
le ministre des finances, mise aux voix, est adoptée.
Vote sur l’ensemble du projet
Le total du budget des
recettes est de 84 millions.
L’ensemble de ce budget
est soumis à l’appel nominal.
67 membres sont
présents.
61 votent l’adoption ;
6 votent le rejet.
En conséquence le projet
de loi des recettes est adopté et sera transmis au sénat.
Ont voté l’adoption :
MM. Bekaert, Brabant, Brixhe, Coghen Dams, Dautrebande, de Behr, de Brouckere, A. Dellafaille, H.
Dellafaille, de Longrée, de Meer de Moorsel, F. de Mérode. W. de Mérode, de
Muelenaere, de Nef, de Puydt, de Roo, Desmaisières, Desmanet de Biesme, de Stembier, de Theux, Dewitte, d’Hane, d’Huart, Donny, Dubois, Dubus, Duvivier, Eloy de
Burdinne, Hélias d’Huddeghem,
Hye-Hoys, Jadot, Lardinois, Lebeau, Meeus, Morel-Danheel, Nothomb, Olislagers, Pirson, Polfvliet, Quirini,
A. Rodenbach, C. Rodenbach, Rouppe, Rogier, Schaetzen, Simons, Trentesaux, Ullens, Vandenhove,
Vanderbelen, Verdussen, Vergauwen, C. Vilain XIIII, H. Vilain XIIII, Vuylsteke, Wallaert, Zoude, Raikem.
Ont voté le rejet :
MM. de Foere, de
Renesse, de Robaulx, Dumortier, Gendebien, Seron.
Se sont abstenus :
MM. Davignon,
C. Vuylsteke et Desmet.
Les deux premiers
exposent qu’ils n’ont point pris part aux débats de la loi.
M. Desmet motive ainsi son abstention. - Messieurs, j’ai
voté à l’ouverture de la présente session contre le projet d’adresse, parce que
je ne pouvais pas exprimer mon approbation à la marche du gouvernement qui à
tout instant viole la constitution ; pour ce même motif je devrais aujourd’hui
refuser les subsides que nous demande le gouvernement, et surtout depuis la
déshonorante convention passée à Zonhoven avec les Hollandais, où la loi
fondamentale a été si scandaleusement violée. Mais je crains, vu l’approche de
la fin de l’année, que le rejet du budget des recettes ne puisse compromettre
l’administration du pays, et c’est pour ce motif seul que je ne vote pas contre
ce budget et que je trouve utile de m’abstenir. Et je saisis l’occasion du vote
des subsides pour protester de toutes mes forces contre l’infâme convention de
Zonhoven et contre tous les actes du ministère par lesquels il a violé la
constitution.
PROJET DE LOI RELATIF AU MODE DE
NOMINATION DES JUGES DE PAIX
Discussion générale
M.
le président. - Ce projet est ainsi conçu :
« Art. 1er. Le
délai fixé par l’article 54 de la loi du 4 août 1832 (Bulletin officiel, n°
582), pour la nomination des juges de paix, est prorogé jusqu’au 1er octobre
1834. »
« Art. 2. La
présente loi sera obligatoire le jour de sa promulgation. »
La discussion générale
de ce projet est ouverte.
M. de Robaulx. - Messieurs, quoique
l’accueil tout bénin de la section centrale au projet du ministre me fasse
présager une adoption certaine, je ne me crois pas dispensé d’exprimer une
opinion contraire.
L’intention bien
manifeste qui a présidé à la rédaction de la loi du 4 août 1832 sur
l’organisation judiciaire était que les juges de paix participassent le plus
tôt possible à l’inamovibilité créée en faveur de la magistrature ; néanmoins
un délai de 16 mois a été laissé au gouvernement pour opérer dans le personnel
les changements indispensables.
Pendant cet espace de
temps, le sort des juges de paix est demeuré entièrement à la disposition plus
ou moins capricieuse du ministre, et la place de chaque juge de paix, capable
ou non, est en butte aux intrigues clandestine, de cette nuée d’avocats de nom,
sans cause et sans talents, de ces honnêtes gens qui, par avarice ou par besoin
d’être quelque chose, se font adjuger la place d’autrui et ont l’impudeur de
dépouiller ainsi des hommes valant mieux qu’eux.
De son côté, le
ministre, si je suis bien informé, en agit sans façon et même un peu
cavalièrement avec ceux qu’il déplace. Je connais un juge de paix, justement
regretté par une population libérale qui a donné des gages à la révolution :
cet homme, qui a rendu des services et qui pouvait continuer à en rendre dans
les fonctions qu’il remplissait au gré de ses concitoyens, plus capables de
l’apprécier que le ministre ; eh bien ce fonctionnaire fut destitué sans en
avoir été prévenu, et c’est le journal du matin qui le premier l’a informé
qu’un autre avait pris sa place. Tout étourdi de ses mésaventures, l’ex-juge de
paix est encore à en rechercher la cause ; faute d’autres, ses amis croient la
trouver dans son libéralisme éclairé et dans les élections que cette
destitution a suivies de près.
Ce que je viens de dire
fera, sans doute, sentir la nécessité de mettre un terme à la fausse position
des juges de paix.
On m’objectera qu’avant
de terminer l’organisation du personnel des justices de paix, il faut que la
loi relative à la circonscription des cantons soit portée.
Messieurs,
ce n’est pas à nous qu’il faut s’en prendre si cette loi n’a pas été mise en
délibération, c’est le ministre qui devait la présenter ; il ne l’a pas fait
quoiqu’il connût l’art. 54 de la loi du 4 août 1832.
Cette négligence ne peut
trouver d’excuse dans d’autres travaux du ministère de la justice, car je n’ai
vu encore sortir de ce ministère aucune des nombreuses propositions que nous
attendons de lui.
Je termine en priant la
chambre de restreindre le plus possible le délai demandé, si toutefois elle
juge nécessaire d’en accorder.
M. A. Rodenbach. - La loi sur les
circonscriptions judiciaires n’a pu être portée, parce que nous avons été
occupés de travaux longs et importants ; j’adopterai donc la loi proposée, parce
qu’elle est indispensable. Quant à la conduite du ministre, je ne puis en juger
par ce qui s’est passé dans la province
du Hainaut que je ne connais pas ; mais j’en juge par ce qui a été fait dans
les Flandres ; or, dans ces contrées le ministre a agi comme tout bon
administrateur doit faire : les déplacements qu’il a opérés étaient
indispensables. J’attaque le ministère quelquefois avec trop de vivacité ; je
dois donc aussi lui rendre justice lorsque ses actes sont conformes aux
intérêts de notre révolution, aux intérêts du pays.
M.
le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je remercie l’honorable
préopinant de l’hommage qu’il a bien voulu rendre aux intentions du
gouvernement, relativement à ce qui a eu lieu dans les contrées qu’il habite.
Je l’en remercie d’autant plus que la chambre doit comprendre combien il serait
difficile à un ministre d’entrer ici dans des questions personnelles. Je dois
déclarer cependant que je n’ai révoqué des magistrats que dans des cas
extrêmement rares, et que je n’ai jamais eu recours à cette mesure qu’après
m’être environné des renseignements les plus circonstanciés fournis par les
autorités judiciaires et administratives. J’ai consulté ensuite, pour les
nominations, les cours, les parquets et les gouverneurs, qui n’ont donné leur
avis qu’après s’être entourés des renseignements les plus propres à leur
permettre d’exprimer une opinion avec connaissance de cause.
Que le gouvernement ait
commis des erreurs, cela est possible ; l’autorité supérieure peut être
trompée.
C’est la première fois
cependant que des réclamations m’ont été adressées sans porter l’empreinte
d’aucun intérêt privé ; Car l’honorable M. de Robaulx, j’en suis persuadé, est
incapable de se rendre ici l’organe de semblables intérêts.
Je ferai remarquer à cet
honorable membre que la loi du 4 août 1832 n’imposait pas au gouvernement le
devoir de présenter dans le cours de cette année, une nouvelle circonscription
cantonale : l’idée de cette circonscription nouvelle a été suggérée au gouvernement
par suite des réclamations nombreuses qui lui ont été adressées et qui lui
arrivent encore.
Aussitôt que le
gouvernement a été saisi de ces réclamations, il a demandé aux parquets de lui
faire des propositions qui conciliassent les intérêts des localités avec ceux
des magistrats. Il faut que les juges de paix aient une position meilleure,
afin d’ouvrir la carrière à des sujets distingués : telles sont les vues du
gouvernement.
Lorsque
le travail des parquets a été terminé, il a été soumis aux députations
provinciales ; ce n’est que depuis
quelque temps que le travail des députations des provinces est parvenu au
ministère. Le gouvernement a tâché de mettre d’accord les opinions très
divergentes, quelquefois même entièrement opposées, des autorités provinciales
et des autorités judiciaires. Il en est résulté un dernier travail qui a de
nouveau été soumis à MM. les procureurs généraux.
Nous attendons leurs
réponses pour soumettre le projet de loi à la chambre. C’est dominés par une
force majeure que nous demandons un délai pour la nomination des juges de paix,
et non dans le désir d’une influence quelconque. La chambre d’ailleurs, occupée
de travaux urgents et importants, n’aurait pas pu donner immédiatement son
attention au projet de loi dont il s’agit.
M. de Robaulx. - Je suis bien aise
d’entendre que je ne suis pas l’organe d’un intérêt particulier : toutefois je
suis toujours disposé à être ici le soutien du faible et de l’opprimé.
J’entends avec plaisir
le ministre déclarer qu’il a pris les avis des autorités avant de prononcer des
démissions ; dans ce cas ce seront les faux renseignements qu’on lui aura
donnés sur des hommes capables, qui l’auront induit en erreur.
Quoi
qu’il en soit, il ne m’a pas répondu sur le reproche que je lui ai adressé
d’agir trop à la légère à l’égard d’hommes estimés dans l’ordre judiciaire : on
ne les prévient pas de la destitution qui les menace ; ils sont frappés sans
être entendus. Celui dont je parle est d’une opinion que je puis garantir, et
son libéralisme ne peut laisser rien à désirer ; il est au moins égal à celui
de M. Lebeau lui-même. Il a appris subitement que sa place était prise par un
autre, et par un autre que je ne veux pas qualifier.
Il est important que la
loi sur les circonscriptions cantonales soit promptement portée pour que les
juges de paix ne restent pas définitivement sous le coup d’une destitution ; ne
soient pas sans cesse exposés aux suites de rapports mensongers qui
compromettent l’avenir d’un honnête père de famille.
M. de Brouckere. - La loi du 4 août impose,
dans son article 54, l’obligation formelle au gouvernement de pourvoir à la
nomination de juges de paix et de suppléants de juges de paix pour le 1er
janvier 1834 ; il est vrai que cette obligation n’est assujettie à aucune
condition.
Cependant le
gouvernement, avant de pourvoir à ces nominations, a pensé qu’il fallait
s’occuper des changements réclamés dans la circonscription actuelle des
cantons. En effet, si on eût nommé à tous les emplois, il aurait fallu par des
modifications cantonales accorder des pensions à des magistrats devenus
superflus et surcharger le trésor ; mais si le ministre avait mis plus
d’activité dans son travail, il aurait pu le présenter plus tôt à la législature.
Ce travail, d’ailleurs, a été élaboré sous les Hollandais.
La loi que vous allez
voter aujourd’hui n’est pas sans importance. La position des juges de paix est
vraiment déplorable. Tout ce qu’a dit M. de Robaulx est d’une vérité parfaite :
ils sont tous sous le coup d’une destitution ; ils sont tous incertains de leur
avenir. Ils cherchent tous les matins dans le Moniteur, avec une curiosité certaine, s’ils ne sont pas remplacés.
Le
ministre de la justice prétend qu’aucune destitution n’a été prononcée par lui
sans l’avis des autorités ; mais souvent l’avis de ces autorités est dicté par
des considérations personnelles. Je crois pouvoir dire, sans me tromper, qu’à
l’occasion des élections il y a eu quelques démissions de juges de paix qu’il
serait difficile de justifier. Dans l’état où en sont les choses, la porte est
ouverte à l’intrigue. Je suis convaincu que M. le ministre de la justice est
importuné tous les jours par des individus qui sollicitent des places dont les
titulaires sont en fonctions et les remplissent dignement ; mais les
solliciteurs supposent qu’à la veille d’un remaniement général il sera
extrêmement facile d’écarter tel et tel et de prendre leurs places.
Les juges de paix ne peuvent
donc pas être considérés comme des magistrats indépendants, quoique
l’indépendance sont indispensable aux magistrats. Le
ministre nous dit qu’il a cédé à une force majeure ; nous céderons également à
une force majeure en adoptant la loi. Mais faut-il laisser le délai jusqu’au
1er octobre ? Je crois qu’on pourrait le mettre au 1er avril : d’ici au 1er
avril, en effet, on pourrit voter la loi cantonale.
M. A. Rodenbach. - Le congrès avait décidé
qu’on s’occuperait le plus promptement possible de l’organisation judiciaire ;
malgré cette décision, la force des choses nous a forcés d’attendre ; nous
pouvons encore attendre, relativement aux juges de paix jusqu’au 1er octobre.
Quant aux élections, je
dis que l’on a bien fait de destituer des juges de paix, s’ils voulaient
coopérer à les diriger dans un sens contraire au vœu national. Dans plusieurs
provinces il y a des juges de paix orangistes ; faut-il les conserver, afin
qu’ils travaillent les élections ? Pour moi, j’aime mieux qu’on appelle ici des
ministériels que des orangistes ; il ne faut plus faire de concessions à ces
derniers. Le ministre de la justice est louable d’avoir, par ses actes, dans le
sens de la très grande majorité de la nation.
Je voudrais que tous les
ministres fissent de même : dans l’administration des finances, il y a des
employés orangistes ; il faut cependant que toutes les nominations soient
faites conformément aux intérêts de la patrie, aux intérêts de
M. de Robaulx. - Messieurs, je désirerais
voir disparaître de cette enceinte les dénominations d’orangistes…
M.
A. Rodenbach. - Il y en a !
M. de Robaulx. - Si leurs opinions ne se
manifestent pas au-dehors, je n’en vois pas. Avec des dénominations semblables
on prend la place d’autrui. Ce n’est pas ainsi qu’on organise l’ordre
judiciaire ou l’administration. Par ces déclamations vous laisserez supposer à
l’étranger que le pays est plein d’orangistes, ce qui heureusement n’est pas.
Il y a bien des hommes qui ont souffert et qui souffrent encore dans leurs
intérêts par suite de la révolution ; consolez-les par de bonnes lois et en
ramenant la prospérité dans le pays, et alors vous n’entendrez plus de
plaintes.
M. A. Rodenbach. - Qu’un marchand, qu’un
industriel soit orangiste, il est libre dans ses opinions ; mais le
gouvernement ne doit jamais souffrir que des orangistes occupent les places. Je
ne parle ici que contre les hommes qui reçoivent des subsides de l’Etat, qui
ont prêté serment, et qui trahissent l’Etat en trahissant les intérêts de notre
indépendance. S’ils sont honnêtes, ils doivent se retirer, ils doivent se faite
justice à eux-mêmes. Ils ont forfait à l’honneur en ne donnant pas leur
démission, puisqu’ils violent leurs serments.
M.
le ministre de la justice (M. Lebeau) - Il ne faut pas croire que le
ministère se soit amusé à promener la faux des épurations sur les juges de
paix, et dans l’intérêt d’une influence quelconque. Par un tableau qui a été
soumis à la chambre lors de la discussion de mon budget pour 1833, on a vu que,
parmi les mutations assez nombreuses opérées dans les juges de paix, il n’y
avait eu que quatre ou cinq révocations. Depuis le dépôt de ce tableau entre
les mains de la section centrale, pas une destitution n’a eu lieu, soit à
l’époque des élections, soit après cette époque. Je puis donner un démenti
formel aux renseignements qui auraient à cet égard induit l’honorable M. de
Robaulx en erreur.
Quant à la proposition
de fixer un délai plus rapproché que celui du projet de loi, en supposant que
je pusse présenter la circonscription cantonale dans le courant du mois
prochain, je ferai remarquer qu’il serait impossible qu’elle fût votée et mise
à exécution pour le 1er avril : vous avez à discuter les budgets des dépenses,
la loi sur le chemin de fer, la loi provinciale, et ces lois importantes
prendront beaucoup de temps ; si l’amendement annoncé par M. de Brouckere était
adopté, il faudrait très probablement, au 1er avril, accorder un nouveau délai.
J’engage donc la chambre à voter le délai que je demande. Je ne ferais aucune
difficulté d’admettre un terme dans lequel toutes les nominations devraient
être faites, à partir de l’adoption de la loi de circonscriptions ; ainsi, par
exemple, deux mois après la promulgation de la loi, tous les juges de paix devraient
être installés : un amendement de cette nature pourrait être accueilli par le
gouvernement si on le présentait.
Le
gouvernement sent très bien quelle est la position des juges de paix : il ne
veut pas chercher son influence dans la dépendance judiciaire. Il ne faut pas,
au reste, s’exagérer cette influence : les juges de paix ne peuvent pas rendre
de bien grands services au pouvoir ; ils ne sont pas dans la position élevée et
influente des magistrats que l’ancien gouvernement a cherché à tenir pendant quinze
années dans sa dépendance.
Par ces considérations,
je dois persister à demander l’adoption pure et simple du projet en discussion,
tel que l’a admis la section centrale,
M. de Brouckere. - Quand nous en serons à la
discussion de la loi sur les circonscriptions cantonales, je demanderai la
nomination la plus prompte possible des juges de paix. Je n’insisterai donc pas
sur ma proposition.
Puisque
j’ai la parole, je témoignerai à l’honorable député de
Qu’un juge de paix soit
soupçonné de voir la révolution avec regret ; s’il remplit bien ses fonctions,
s’il ne cherche pas à répandre de funestes doctrines, pourquoi le
déplacerait-on ? Avons-nous besoin de descendre dans le sanctuaire de la
conscience pour savoir ce qui s’y passe ? Ce qu’il faut à un magistrat c’est
l’impartialité, c’est la connaissance des lois, c’est le sentiment profond du
juste et de l’injuste : que nous importe une opinion politique quand elle est
secrète ?
M. Quirini. - Je désapprouve la position pénible
dans laquelle se trouvent les juges de paix ; la commission a été frappée de
cet inconvénient grave, mais elle a été également frappée de la nécessité de
changer les circonscriptions communales.
Les circonscriptions
actuelles ont été formées pour imposer aux habitants du pays l’obligation de
parler ou d’entendre une langue qu’ils n’ont jamais comprise ; nous devons
anéantir cet absurde édifice.
Quant au délai demandé
par le ministre, il ne me semble pas trop long , parce
que la loi de circonscription présentera de graves questions à traiter.
Relativement au reproche
d’orangisme adressé à des fonctionnaires amovibles, je partage entièrement
l’opinion de M. de Brouckere : je crois qu’après une révolution il faut tâcher
de réconcilier et non de mettre les partis en présence. Il est bien difficile
de connaître l’opinion d’un individu : tel qu’on signale comme un orangiste
n’est souvent qu’un malheureux dont les intérêts ont été froissés, II ne faut
pas traquer comme des bêtes fauves ceux qu’on croit orangistes : examinez s’ils
sont hommes d’honneur, alors soyez sûrs qu’ils seront fidèles à leurs serments.
M.
Dumortier. - J’aurais quelques mots à répondre à ce qu’ont dit les
honorables préopinants.
Dans mon opinion, les
fonctionnaires publics ne sont pas inféodés au pouvoir, ne sont pas
nécessairement les instruments des passions ministérielles ; et je blâmerai le
ministère toutes les fois qu’il voudra, par des considérations qui lui seront
personnelles, faire fléchir les hommes qui sont dans les emplois.
Mais il faut bien
reconnaître en même temps que dès que la nation a manifesté sa volonté d’une
manière aussi solennelle qu’elle l’a fait à la révolution, tout fonctionnaire
doit se ranger sous le drapeau qui a été arboré ; sans quoi il est passible
d’une destitution. (Marques d’adhésion.)
Maintenant, messieurs,
j’arrive à la question qui nous occupe.
Je ferai remarquer qu’il
n’est pas nécessaire de reculer très loin l’époque de la nomination des juges le paix. La loi sur la circonscription cantonale est très
urgente, et tellement urgente qu’elle doit précéder le vote de la loi sur
l’organisation provinciale.
Nous avons une
organisation municipale qui marche assez bien ; mais, pour ce qui est de
l’administration provinciale, elle est une perpétuelle inconstitutionnalité.
La
constitution dit qu’il n’y a plus d’ordres, et les états-députés ont été nommés
par les ordres ; la constitution ne reconnaît que l’élection directe, et les
états-députés ont été nommés indirectement.
La constitution attribue
tout ce qui est d’intérêt provincial aux conseils provinciaux, et, depuis trois
ans que la révolution est faite, vous n’avez pas de conseils provinciaux. Les
besoins de la société réclament promptement la loi provinciale ; mais comment
la faire sans les circonscriptions cantonales ? Les élections des conseils
provinciaux doivent, d’après le projet de loi, se faire d’après les
circonscriptions cantonales et d’après leurs populations. Il faut absolument
que la loi cantonale précède l’autre, et le ministre ne saurait trop se hâter
de nous présenter cette loi cantonale. Elle sera promptement votée, car
personne ne sera disposé à entrer dans des détails minutieux, et toutes les
améliorations se feront dans la section centrale ; par conséquent le délai
qu’il faut accorder au ministre ne doit pas être si
long qu’on le demande.
M.
le ministre de la justice (M. Lebeau) - Les observations de l’honorable
préopinant sont parfaitement justes. Je crois comme lui qu’il est difficile et
même impossible d’arrêter la circonscription cantonale dans ses rapports avec
l’organisation des conseils provinciaux avant que la circonscription cantonale
judiciaire n’ait été déterminée. Aussi ai-je dit, et probablement l’honorable
membre n’était pas alors présent, que je ferais tous mes efforts pour présenter
la loi concernant ce dernier objet dans le courant du mois prochain. Vous le
sentez tous, messieurs, l’époque ne dépend pas entièrement de moi. J’attends,
pour vous soumettre ce projet, les derniers renseignements qui me sont
nécessaires. Ces renseignements m’ont déjà été transmis par le parquet de
Bruxelles ; j’espère bientôt recevoir les autres des parquets de Gand et de
Liége, et ce n’est qu’après les avoir obtenus que je pourrai accomplir ma
promesse.
Je ferai remarquer
toutefois que la discussion de la loi provinciale n’est pas tout à fait
subordonnée à l’adoption du projet de circonscription cantonale judiciaire, car
dans la loi provinciale vous aurez d’abord à vous occuper de l’organisation du
personnel et des attributions, ce qui compose la partie importante de cette loi
; ce n’est que dans un des derniers articles qu’il s’agira de la
circonscription des collèges électoraux ; de sorte que cette discussion ne doit
pas être ajournée par le retard qu’on poursuit apporter à la présentation de la
loi dont il s’agit.
L’honorable préopinant
pense que le projet de loi sur l’organisation cantonale judiciaire n’exigera
pas beaucoup de temps, et qu’il sera voté par la chambre à peu près dans les
termes où il sera présenté par gouvernement.
Il se fait grandement
illusion, et il aura occasion de s’apercevoir qu’à cette occasion beaucoup
d’intérêts de localités s’agiteront autour de cette chambre ; lui-même sans
doute sera assailli de demandes de cette nature. Ce ne sera pas une querelle de
province à province, de ville à ville, mais une dispute de village à village.
Si, par exemple, le
gouvernement, d’après les renseignements qu’il s’est procurés, croit qu’il y a
lieu de déposséder une localité de sa qualité de chef-lieu de canton, eh bien
de nombreuses réclamations s’élèveront à cet égard.
Déjà, dans l’espèce
d’enquête à laquelle le gouvernement a procédé, ces discussions ont été vives,
et des pétitions nombreuses en font foi. La délibération du projet ne sera donc
pas si courte qu’on semble le croire, et c’est dans cette prévision et eu égard
à la maturité que vous devez apporter à l’examen de la loi provinciale que j’ai
fixé la date du 1er octobre. Mais je prends l’engagement, et vous comprenez que
cela est dans l’intérêt bien entendu de la responsabilité du gouvernement, de
ne pas prolonger le délai que j’ai assigné tout à l’heure, à moins d’y être
forcé. (La clôture ! la clôture !)
M.
Dumortier. - Je demande la parole contre la clôture. Il me semble que
l’assemblée ne trouvera pas mauvais qu’on discute encore un instant sur ce
dernier incident qui est d’une haute importance.
- La chambre consultée
ferme la discussion générale.
On passe à celle des
articles.
Discussion des articles
« Art. 1er. Le délai fixé par l’art. 54 de la
loi du 4 août 1832 (Bulletin officiel, n°582), pour la nomination des juges de
paix, est prorogé jusqu’au 1er octobre 1834. »
M.
Dumortier. - Je demande qu’on change l’époque du 1er octobre en celle
du 1er avril.
M. de Theux. - Je ferai observer qu’il
serait imprudent de fixer un délai aussi court, car il faut que la loi, après
avoir été votée par la chambre, soit adoptée par le sénat.
M. de Robaulx. - Je demande qu’on mette le
1er juin.
M.
le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je ne m’opposerais pas à la
fixation au 1er juin, si j’étais sûr que la loi de circonscription cantonale
fut adoptée pour le 1er mars, ou même pour le 1er avril. Dans ce cas, je le
répète, je ne verrais pas d’inconvénient à fixer le 1er juin, le 1er mai et
peut-être le 1er avril.
Mais j’ai déjà fait
remarquer que la loi de circonscription exigera probablement une longue
discussion. Si je demande cette prolongation, c’est pour ne pas être obligé
plus tard de venir réclamer un nouveau délai de la chambre ; car on s’est
expliqué ici trop franchement de part et d’autre, pour que je n’obtienne pas un
nouveau délais si on limitait trop le premier ; mais
je pense qu’il n’est pas utile, pas convenable d’occuper sans cesse la chambre
de lois transitoires. D’ailleurs, messieurs, si vous avez assez de confiance
dans le gouvernement pour lui accorder trois mois, vous ne pouvez guère lui
refuser trois autres mois.
Déjà,
si je l’avais voulu, me prévalant des dispositions de la loi du 4 août,
j’aurais pu proposer la retraite ou la révocation, avant le 31 décembre,
d’autant de juges de paix que je l’aurais trouvé convenable. C’est un droit qui
se trouve formellement stipulé dans la loi du 4 août. Si donc je prie la
chambre de ne rien changer au délai que j’ai proposé, c’est sans aucune
arrière-pensée. Le gouvernement prend volontiers l’engagement, la loi de
circonscription votée, de procéder, dans le plus bref délai possible, à la
nomination des juges de paix. On peut prendre acte de ces paroles.
M. d’Huart. - Il me semble que le but que
s’est proposé M. Dumortier, c’est de hâter la présentation de la loi de la
circonscription cantonale judiciaire, pour qu’elle ait lieu avant la discussion
de la loi provinciale. Si M. le ministre fait une promesse dans ce sens, il n’y
aura plus de difficulté.
M.
le ministre de la justice (M. Lebeau) - Je prendrais d’autant plus
volontiers cet engagement qu’il est moins rigoureux que celui que j’ai pris
tout à l’heure, puisque j’ai promis de faire tous mes efforts pour présenter la
loi dans le courant de janvier.
M.
Dumortier. - D’après ce que vient de dire M. le ministre de la justice,
je retire ma proposition.
- L’amendement de M. de
Robaulx tendant à fixer le 1er juin est mis aux voix et rejeté. -
L’art. 1er du projet de
loi est adopté sans modification, ainsi que l’art. 2 ainsi conçu : « La
présente loi sera obligatoire le jour de sa promulgation. »
On procède à l’appel
nominal sur l’ensemble de ce projet. Il est adopté par 62 voix contre une.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DU
DEPARTEMENT DE LA GUERRE, POUR L’EXERCICE 1834 ET PROJET DE LOI RELATIF AU
CONTINGENT DE L’ARMÉE POUR L’ANNEE 1834
M. Brabant, rapporteur
de la commission, se dispose à lire ce travail ; mais on en demande
l’impression et la distribution, qui sont ordonnées.
M. Brabant, rapporteur. - Messieurs, je dépose en même
temps sur le bureau le rapport du projet de loi relatif au contingent de
l’armée pour 1834. C’est le même que celui de 1833. Les circonstances exigeant
le maintien d’une armée considérable, au moins sur le papier, la commission, à
l’unanimité, vous propose l’adoption de ce projet.
- La séance est levée à
trois heures et demie.