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Chambre des représentants de Belgique
Séance du lundi 24 décembre
1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Proposition de loi relative à la taxe des
lettres (Verdussen, Duvivier,
Angillis, Verdussen)
3) Proposition de loi relative à la patente des
avocats (C. Rodenbach)
4) Projet de loi portant le contingent de
l’armée pour l’année 1833 (Gendebien, Dumortier, Lebeau)
5) Proposition de loi relative aux droits sur
les fers (Corbisier, Davignon,
de Robiano, Zoude)
6) Projet de loi accordant des crédits
provisoires au département de la guerre pour l’exercice 1833 (Evain)
7) Proposition de loi portant modification de la
loi d’organisation monétaire (proposition Seron) (Angillis,
Seron)
8) Projets de loi relatifs à la garde civique et
à la cour des comptes (Rogier)
(Moniteur belge
n°358, du 26 décembre 1832)
(Présidence de M. Raikem.)
La séance est ouverte à une heure.
M. Jacques
fait l’appel nominal.
M. Dellafaille lit le procès-verbal ; la r2daction en est adoptée.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
M. Jacques
expose sommairement l’objet des pièces adressées à la chambre.
- M. de Haerne écrit pour s’excuser de ne pouvoir
partager aujourd’hui les travaux de ses collègues ; une indisposition le
retient chez lui.
PROPOSITION DE LOI RELATIVE A LA TAXE DES LETTRES
M. le président. - L’ordre du jour est le vote définitif sur la loi
relative au système monétaire, adoptée provisoirement par la chambre dans sa
dernière séance.
On a paru désirer que la proposition de M. Seron fît
partie de cette loi ; mais la commission de l’industrie n’a pas encore fait son
rapport sur cette proposition.
M. Verdussen.
- Je voudrais que le vote définitif sur la loi monétaire fût remis à la fin de
la séance pour que la commission ait le temps de faire son rapport.
M. le président. - Veut-on commencer par la proposition faite par M.
Zoude ? Le rapport sur cette proposition a été inséré au Moniteur d’après le vœu manifesté par la chambre.
M. le ministre des finances (M.
Duvivier). - Je demanderai
la parole pour faire une observation sur la proposition de M. Verdussen.
Quelle que soit la décision qui sera prise sur la
proposition de M. Seron, il convient de voter la loi monétaire telle qu’elle
est ; quand le rapport sur la proposition de M. Seron sera fait, il restera à
délibérer sur une question grave. J’ai reçu des renseignements importants que
je dois vous soumettre. L’administration des monnaies aura sans doute aussi des
réflexions à vous soumettre ; il faut rendre la proposition de M. Seron
indépendante de la loi monétaire.
M. Angillis.
- Je viens appuyer la proposition de M. le ministre des finances. Le rapport
sur le projet présenté par M. Seron est bref ; mais la commission propose un
projet spécial ; ainsi rien n’empêche que le vote sur la loi monétaire n’ait
lieu maintenant. Si la chambre veut discuter la proposition de M. Seron après
le rapport, elle le pourra.
M. Verdussen.
- Je voudrais qu’on ne multipliât pas inutilement les lois, et que par un
article additionnel la proposition de M. Seron soit insérée dans le projet de
loi monétaire.
- La chambre consultée décide qu’il y aura une loi
spéciale pour la proposition de M. Seron.
Elle passe au vote définitif sur la loi monétaire.
Les articles de cette loi, avec les amendements
adoptés dans la dernière séance, ne donnent lieu à aucune discussion, et sont
adoptés sans modification.
On procède à l’appel nominal sur l’ensemble de la loi.
Ont voté pour : MM. Boucqueau de Villeraie,
Coppieters, Corbisier, Dautrebande, Davignon, H. de Brouckere, Deleeuw,
Dellafaille, de Meer de Moorsel, de Nef, de Renesse, de Robiano, de Roo,
Desmet, de Terbecq, de Theux, d’Hoffschmidt, d’Huart, Domis, Donny, Dubois,
Dugniolle, Dumortier, Duvivier, Ernst, Fortamps, Helias d’Huddeghem, Hye-Hoys,
Jacques, Jonet, Jullien, Lardinois, Lebeau, Liedts, Meeus, Milcamps,
Morel-Danheel, Olislagers, Poschet, Raymaeckers, A. Rodenbach, C. Rodenbach,
Rogier, Seron, Speelmans, Ullens, M. Vanderbelen, Verdussen, Verhagen,
Vuylsteke, Watlet, Zoude, Raikem et Levae.
MM. de Muelenaere, Desmanet de Biesme et Gendebien se
sont abstenus, parce qu’ils n’ont pas pris part à la discussion.
Aucun membre n’a répondu non.
Le projet de loi est adopté, et en conséquence il sera
transmis au sénat.
PROPOSITION DE LOI RELATIVE A LA PATENTE DES AVOCATS
M. le président.
- Les sections ont autorisé la lecture de la proposition faite par M. C.
Rodenbach.
M. C. Rodenbach. - J’ai l’honneur de proposer à la chambre le projet de loi suivant,
compris dans un article unique :
« La disposition de l’article 3 de la loi du 21
mai 1819, qui exempté les avocats de la patente, est rappelée. A partir du
premier janvier 1833, les avocats seront placés dans la même catégorie que les
avoués pour ce qui concerne le droit de patente. »
Jeudi prochain, la chambre entendra M. C. Rodenbach
pour présenter les développements de sa proposition.
PROJET DE LOI PORTANT LE CONTINGENT DE L’ARMEE POUR
L’ANNEE 1833
M. Gendebien, président et rapporteur de la commission qui a été
chargée d’examiner le projet de loi relatif au contingent de l’armée pour
l’année 1833, est appelé à la tribune. L’honorable membre s’exprime en ces
termes. - La commission, tout en regrettant que la neutralité imposée à la
Belgique ne puisse la soulager des charges immenses résultant de l’entretien
d’une armée en disproportion avec la population et les ressources du payé, est
néanmoins d’avis, à l’unanimité, d’accorder le contingent demandé pour l’année
1833. Elle espère que le gouvernement sentira bientôt la nécessite de sortir
d’une position qui présente tous les inconvénients et toutes les charges de la
guerre, sans autre profit que les chances d’une agression sans cesse menaçante
de la part d’un ennemi obstiné.
La commission propose de donner force obligatoire à la
loi dès le 1er janvier 1833, et d’ajouter à la loi proposée un quatrième
article, comme il a été fait pour la loi du 30 décembre dernier, et qui serait
ainsi conçu : « La présente loi sera obligatoire au 1er janvier
prochain. »
M. le président. - Quand désire-t-on discuter cette loi ? (Mercredi ! mercredi ! Immédiatement !
immédiatement !)
M. Dumortier.
- Nous ne pouvons discuter immédiatement, nous n’avons pas les pièces. J’ai des
observations à soumettre à la chambre, observations qui n’ont pas été faites
par la commission. Il s’agit d’une armée de 140 mille hommes ; c’est
extrêmement important.
M. le ministre de la justice (M. Lebeau). - Je crois que M. le ministre de la guerre va
présenter un projet de loi sur les crédits provisoires nécessaires à son
département ; rien n’empêche qu’on ne réunisse la discussion des deux lois qui
ont entre elles la plus grande connexité.
- La chambre renvoie la discussion à mercredi.
M. le président.
- La suite de l’ordre du jour est la discussion de la proposition de M. Zoude.
M. Corbisier. - Je dois faire remarquer que la commission a
modifié le projet de M. Zoude, et que M. Zoude s’est réuni à l’opinion de la
commission. Le rapport de la commission a été inséré au Moniteur.
M. le président. - La commission des finances et de l’industrie
réduit la proposition de M. Zoude à l’article suivant :
« La loi du 16 décembre 1831 continuera à être
exécutée jusqu’à la révision du tarif général des douanes. »
M. Davignon.
- Ce n’est que la continuation de l’état de choses que le congrès et la chambre
ont déjà jugé nécessaire d’établir. D’après la proposition de la commission,
cet état de choses demeurera jusqu’à l’époque très prochaine de la révision du
tarif des douanes. Je ne crois pas devoir entrer dans d’autres détails pour
obtenir votre assentiment à l’article unique du projet.
M. de Robiano de Borsbeek. - Il faudrait dire dans la loi : « jusqu’à la
révision générale du tarif des douanes en ce qui concerne les fers. »
M. Zoude.
- C’est le vœu de la chambre, exprimé l’année dernière, que le tarif des
douanes soit entièrement révisé. J’ai cru devoir me renfermer dans les mêmes
dispositions.
- L’article unique soumis est adopté à l’unanimité.
PROJET DE LOI ACCORDANT DES CREDITS PROVISOIRES AU
DEPARTEMENT DE LA GUERRE POUR L’EXERCICE 1833
M. le ministre de la guerre (M. Evain) a la parole
pour présenter un projet de loi tendant à accorder à son département un crédit
provisoire de 18,000,000 de fr. pour assurer le service du premier trimestre de
l’exercice 1833. Voici comme le ministre s’exprime. - Messieurs, je suis chargé
de vous soumettre un projet de loi, relatif au crédit provisoire dont le
gouvernement réclame l’ouverture dans les premiers jours du mois prochain pour
assurer la solde de l’armée pendant le premier trimestre de l’année 1833, en
attendant que le budget des dépenses de cet exercice puisse être définitivement
fixé par la loi.
Le gouvernement se borne à demander ce seul crédit
provisoire, en attendant le résultat de vos délibérations sur l’ensemble de la
loi à intervenir, par la raison que la solde de l’armée doit être assurée dans
les premiers jours de chaque mois, et qu’un retard dans les paiements, qui ont
été faits si régulièrement jusqu’à présent, pourrait entraîner quelques
inconvénients.
Dans les documents que j’aurai l’honneur de remettre à
la commission à laquelle vous renverrez l’examen de ce projet, elle puisera la
conviction que le montant des dépenses de l’armée sur le pied où elle est
aujourd’hui, s’élèverait, pour l’année 1833, à la somme de 73,000.000 de
francs, et qu’en la maintenant sur ce pied pendant le premier trimestre, la
dépense sera de 18,800,000 fr.
C’est donc cette somme, dont le gouvernement demande
le crédit pour assurer le service du département de la guerre, pendant les
trois premiers mois de l’année qui va commencer.
Je vous prie d’observer, messieurs, qu’il est vivement
à désirer que la commission veuille bien s’occuper très prochainement de
l’examen de ce projet de loi, que les circonstances n’ont pas permis au
gouvernement de vous soumettre plus tôt.
« Léopold, Roi des Belges,
« A tous présentés et à venir, salut.
« Sur la proposition de notre ministre directeur
de la guerre, et de l’avis du conseil des ministres ;
« Nous avons arrêté et arrêtons :
« Notre ministre directeur de la guerre est
chargé de présenter aux chambres, en notre nom, le projet de loi suivant :
« Considérant que d’ici à ce que le budget des
dépenses puisse être réglé définitivement, il importe d’assurer le service du
département de la guerre ;
« Nous avons, d’un commun accord avec les
chambres, décrété et nous ordonnons ce qui suit :
« Article unique. Il est ouvert au ministre
directeur de la guerre un crédit provisoire de la somme de dix-huit millions
huit cent mille francs, pour faire face aux dépenses du 1er trimestre de
l’année 1833.
« Léopold. »
- La chambre renvoie le projet à la même commission
qui a été chargée de l’examen du projet de loi sur le contingent de l’armée.
PROPOSITION DE LOI PORTANT MODIFICATION DE LA LOI
D’ORGANISATION MONETAIRE
M. le président.
- La parole est à M. Angillis pour faire le rapport de la commission chargée
d’examiner la proposition de M. Seron.
M. Angillis.
- Messieurs, à la séance du 20 décembre,
l’honorable M. Seron a développé les motifs d’une proposition, à l’effet
d’abroger l’article 20 de la loi monétaire du 5 juin précédent, dont la
disposition ne deviendra exécutoire que le 1er janvier prochain.
Votre commission des finances s’est empressée
d’examiner et de discuter cette proposition à l’intervention de son auteur, et
elle m’a confié l’honorable mission de vous rendre compte du résultat et de
vous soumettre son travail.
A l’unanimité, la commission reconnaît que la
dépréciation des espèces ne devient juste que lorsque le gouvernement fournit
aux détenteurs le moyen de les échanger sans perte.
Telle avait été aussi, messieurs, l’opinion de la
section centrale, quand elle vous a présenté son travail sur la loi monétaire
votée pendant la dernière session. Mais l’amendement qu’elle avait proposé à
cet effet ayant été écarté à la demande de M. le ministre des finances le
législateur a sanctionné l’opinion contraire.
Faut-il maintenant revenir sur cette disposition, à la
veille de sa mise à exécution ? Sans hésiter un instant, la commission vous eût
proposé l’abrogation pure et simple de cet article, si elle eût pensé que
l’intérêt public et le respect pour la foi donnée eussent exigé un semblable
hommage ; mais elle doit le déclarer : grâces à des circonstances fortuites, la
disposition finale de l’article 20 de la loi du 5 juin n’aura point, pour les
détenteurs de la monnaie décriée, les funestes effets dont elle les menaçait ;
et il a moyen de leur épargner toutes pertes, sans toucher à la loi qui a
obtenu votre assentiment, au moyen d’une mesure transitoire qui deviendra le
complément d’un acte législatif qui se trouve aujourd’hui dans la main de tous
les banquiers de l’Europe.
D’après le titre et le poids donné à la pièce de 5 et
de 10 florins, ces espèces ont une valeur monétaire exagérée comparativement à
la monnaie d’or de France, dont vous avez adopté le système. Cette exagération
est de de 2/13 pour 100 ; ainsi, la réduction que l’article 20 de la loi du 5
juin prononce n’a fait que rétablir, à une fraction excessivement minime près,
les deux monnaies à leur véritable rapport.
Mais, par suite de la position politique de l’Europe,
la valeur relative de la monnaie d’or à l’égard de la monnaie d’argent éprouve
depuis quelque temps un changement sur toutes les pièces cambistes du
continent. L’agio sur les napoléons, dépassant les 2 pour cent, agit à son tour
sur la valeur monétaire de nos pièces de 5 et 10 florins, à tel point que non
seulement on les reçoit partout pour leur ancienne valeur nominale, mais que de
plus on peut les placer avec un faible avantage. C’est ainsi que le mouvement
du commerce a paralysé encore une fois l’effet injuste d’une mesure
pernicieuse, qui faisait subir, au détriment de possesseurs de bonne foi, une
perte d’environ 2 /2 pour cent sur la monnaie d’or de l’ancien gouvernement.
Aussi avez-vous vu, messieurs, la banque annoncer publiquement qu’elle continuera
de la recevoir et de l’échanger à son ancien taux, et s’engage à ne revenir sur
cette mesure qu’en en prévenant le public 8 jours d’avance.
Du moment qu’il y a agio sur ces espèces, les
détenteurs peuvent se tranquilliser. Pouvant les échanger avec profit, aucune
perte ne les menace en réalité. Ce ne sera que lorsque d’autres événements
politiques auront établi le rapport d’un à 15 1/2, qui tout récemment encore
existait entre les deux métaux monétaires, que cette perte pourrait se
réaliser. Mais alors ceux qui viendraient à l’éprouver subiraient seulement
l’une des chances de leurs spéculations, et devraient s’en prendre à eux-mêmes
pour avoir négligé de mettre leurs intérêts à couvert et n’avoir pas su mieux
profiter des avertissements de la loi.
Cependant, la commission ne s’est pas dissimulé que
l’échange de ces monnaies tarifées doit présenter des difficultés pour
l’habitant des campagnes et pour quelques autres classes de citoyens d’autant
plus dignes, messieurs, de toute votre sollicitude, que la médiocrité de leurs
ressources leur rend toute espèce de perte si poignante. C’est, mue par cette
considération, que la commission des finances a l’honneur de vous proposer une
mesure transitoire propre à tout concilier.
A dater du 1er janvier prochain, personne ne sera plus
légalement tenu d’accepter la monnaie d’or des Pays-Bas que sur le pied
déterminé par l’article 20 de la loi du 5 juin. Toutefois, pendant toute la
journée de la veille, nous serons obligés de les recevoir en paiement à un taux
supérieur. Le commerce, il est vrai, continuera de l’admettre au même taux en
paiement de ses utiles transactions. Mais, dans un moment où l’urgence des
besoins publics vient de vous imposer la loi, messieurs, d’ordonner le paiement
par anticipation de 8/12 de la contribution foncière de 1833, une multitude de
nos concitoyens, avant de pouvoir songer à faire des échanges commerciaux pour
se débarrasser sans perte de cet or qu’ils ont accepté sous la garantie des
lois, devront faire ressource de tout pour verser des sommes considérables dans
les caisses publiques. Facilitons leur libération et accélérons le recouvrement
de l’impôt, en ordonnant que, pendant un laps de temps suffisant, ils pourront
s’acquitter envers l’Etat en monnaie d’or des Pays-Bas à son taux ancien ;
cette mesure réparatrice complétera la justice que nous leur devons, et ce
tempérament, dont l’équité nous fait un devoir, aura en outre l’avantage
d’activer la rentrée des contributions, sans rien coûter au trésor, puisqu’il
aura la ressource d’opérer en grand avec la banque l’échange de ces monnaies.
Pendant combien de temps les agents du gouvernement
devront-ils ainsi recevoir à l’ancien cours les espèces dont il s’agit ?
La limite naturelle est l’espace de temps strictement
nécessaire pour effectuer l’échange.
Mais, pour les causes que nous avons déjà eu l’honneur
de signaler, il devient de toute évidence que cette opération va recevoir des
circonstances une impulsion extraordinaire, qui en accélérera singulièrement le
terme.
En revanche, nous ne méconnaîtrons pas que l’exiguïté
des nouvelles espèces et les lenteurs qu’éprouvera leur émission, par
différents obstacles qui s’opposent à une fabrication accélérée, peuvent
retarder le retirement effectif de la monnaie d’or des Pays-Bas ; retirement qui,
s’il est précipité, pourrait peut-être occasionner des embarras d’une toute
autre nature et qu’il serait sage de prévenir.
Dans l’absence de notions suffisantes sur la quantité
de ces espèces tarifées qui est aujourd’hui en circulation, la commission a cru
qu’il convient d’accorder au moins un terme de trois mois ; et l’auteur de la
proposition s’est rallié à cette mesure.
D’après ces considérations, que vous pèserez dans
votre sagesse, messieurs, la commission a l’honneur de vous soumettre le projet
de loi suivant : puisse-t-il acquérir, dans vos sages discussions, ce degré de
mérite qui seul peut lui concilier l’assentiment des hommes éclairés et la
reconnaissance du peuple
« A tous présents et à venir, salut,
« Jusqu’à la fin du premier trimestre 1833, les
agents du trésor recevront et échangeront les pièces de 5 et de 10 florins au
taux de 47 cents 1/4 par franc.
« La présente loi, dont le ministre des finances
assurera l’exécution, sera exécutoire le 1er janvier prochain.
« Mandons et ordonnons, etc. »
M. Seron demande la parole pour donner quelques explications.
Il s’exprime ainsi. - Messieurs, en vous soumettant, dans votre séance du 20 de
ce mois, ma proposition relative aux pièces de 5 et de 10 florins, je croyais à
la nécessité de les laisser circuler provisoirement pour leur valeur nominale,
parce qu’il me paraissait difficile, dans l’état actuel des choses, de fixer
l’époque à laquelle l’échange pourrait en être opéré. Mais, après avoir entendu
les observations faites et les assurances données par l’honorable M. Meeus à
votre commission spéciale, j’ai partagé avec elle l’opinion que cet échange
peut s’accomplir d’ici au 31 mars prochain. Dès lors, j’ai consenti à ce que ma
proposition fût modifiée et conçue dans les termes énoncés au rapport que
l’honorable M. Angillis vous a lu. Il me suffit, en effet, que les possesseurs
des espèces dont je parle puissent s’en défaire sans perte, sans se déplacer et
sans passer par les mains des agioteurs.
L’échange une fois opéré, il ne restera plus ici
d’espèces d’or en circulation, à moins que la monnaie n’en fabrique de
nouvelles, conformément à l’article 9 de la loi du 5 juin 1832. A cet égard, je
dois vous soumettre une réflexion que je n’ai faite que postérieurement à la
présentation de mon projet, mais qui, ce me semble, ne vous paraîtra point
tardive.
Lorsqu’en 1786, sous le ministère de Calonne, le
gouvernement français ordonna la refonte des espèces d’or, afin d’ôter 9 grains
au louis de 24 liv. et 18 grains au louis de 48 liv,, le public prétendit que
Calonne le volait. Le public était dans l’erreur : à cette époque, en France,
la valeur des pièces d’or n’était plus en rapport avec la valeur des pièces
d’argent, le louis simple était reçu pour 25 livres tournois. L’étranger le
prenait à un taux plus élevé ; ainsi les 4 écus de 6 livres ne représentaient
plus un louis, Dans cette situation, il y avait nécessité d’ôter au louis une
partie de sa valeur intrinsèque.
Plusieurs années avant la révolution de juillet, l’or
était redevenu fort rare en France ; il y est encore plus rare aujourd’ hui. Si
sa disparition avait une cause analogue à la circonstance qui nécessita la
refonte de 1786, il s’ensuivrait, ce me semble, que votre loi monétaire a donné
trop de valeur intrinsèque aux pièces de 20 francs et de 40 francs qui doivent
être au même et du même poids que les pièces françaises. Dans ce cas, la
prudence ne conseillerait-elle d’en ajourner la fabrication et de se borner
pour le moment à frapper des espèces d’argent et de cuivre ? Pourquoi mettre en
circulation des pièces qui passeraient, aussitôt après leur apparition, à
l’étranger pour être refondue à son profit ? C’est au ministère à y réfléchir.
Mais ce qui ne peut paraître douteux, c’est la
nécessité de faire disparaître les pièces de 25, de 10 et de 5 cents, soit en
les refondant, soit en adoptant une autre mesure qui les reverse en Hollande.
Elles sont plus simples, plus mal faites que les moindres monnaies de cuivre ;
elles semblent n’avoir été imaginées qu’afin de donner à ceux qui ont quelque
propension au crime l’envie de les contrefaire. Il est dangereux de les laisser
dans la circulation. Ajoutons qu’elles ne peuvent que compliquer et embrouiller
le travail des comptables.
- La chambre ordonne l’impression et la distribution
du rapport, et fixe la discussion à mercredi.
PROJETS DE LOI RELATIFS A LA GARDE CIVIQUE ET A LA COUR DES COMPTES
M. le ministre de l’intérieur (M. Rogier). - Messieurs, comme il est possible que des absences
aient lieu d’ici au 1er janvier, et comme il serait à craindre que la chambre
ne se trouvât incomplète par suite de ces absences, je crois devoir appeler son
attention sur deux projets qui devront être transformés en lois le plus tôt
possible. Il y a un décret instituant la cour de comptes, qui déclare que la
révision en aura lieu avant le 1er janvier 1833 ; et un autre décret sur la
garde civique, qui dit aussi que la révision doit en avoir lieu avant la même
époque. Le ministère se serait empressé, messieurs, de satisfaire au vœu de
cette dernière loi, celle sur la garde civique, si le peu de temps depuis
lequel il est aux affaires lui avait permis cette révision qui, dans le vœu de
la loi, et probablement dans l’esprit des chambres, doit porter sur un assez
grand nombre de points.
D’ailleurs, si ce projet de révision lui avait été
soumis depuis l’ouverture de la session, je pense que la chambre, déjà saisie
de travaux nombreux et importants, n’aurait pu s’en occuper avant le 1er
janvier.
Dans cet état de choses, le gouvernement sera dans
l’obligation de vous soumettre un projet de loi tendant à proroger le décret de
1830 sur la garde civique, pour un certain temps, jusqu’à ce que les chambres
aient transformé en loi le projet de révision qui leur sera soumis
incessamment.
Si la chambre entre dans ces vues, j’aurai l’honneur
de lui soumettre, à la prochaine séance, une proposition tendant à proroger la
loi sur la garde civique.
Il en sera probablement de même aussi relativement au
décret sur la cour des comptes.
M. le président
annonce que le projet de loi sur les crédits provisoires sera mis à l’ordre du
jour pour mercredi prochain.
M. Verdussen
demande qu’on y porte aussi les autres projets de loi soumis à la chambre.
La séance est levée à 2 heures et demie.