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Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 14
décembre 1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Vérification des pouvoirs des membres
nouvelles élus. Elections contestées de Soignies et de Tournay (Jullien) (Goblet, Duvivier)
3) Proposition de loi modifiant la loi
d’organisation monétaire (Seron)
4) Projet de loi portant le budget des voies et
moyens pour l’exercice 1833.
a) Discussion générale. A : contribution
foncière (notamment surtaxe dans les Flandres et Anvers et/ou opérations
cadastrales) ; B : situation générale des recettes et des dépenses,
niveau général des impôts ; C : retard dans la reddition des
comptes ; D : nécessité d’une réforme du système des impôts
(patentes, impôt sur le café, le tabac, etc.) ; E : financement de la
dette à court terme ; F : société générale (B, E, question politique
générale (projet de démission du gouvernement), libre navigation de l’Escaut (Osy), politique commerciale (notamment négociations avec la
France), D (de Theux), C, D, E, F (Lardinois),
E, accusation d’orangisme, B (Meeus), A (Dubois), projet de démission du gouvernement, D (Mary), D (Donny), service de la douane
(Fortamps), clôture de la discussion (d’Elhoungne), D (Pirmez)
b) Discussion des articles. Motion d’ordre (d’Elhoungne, Mary, d’Elhoungne, Duvivier),
autorisation générale de percevoir l’impôt pour une année (de Brouckere, Mary, d’Elhoungne, Verdussen, d’Huart, de Robiano, Gendebien, Duvivier)
(Moniteur belge
n°348, du 16 décembre 1832)
(Présidence de M. Fallon, vice-président.)
M. Liedts
fait l’appel nominal à midi et demi.
M. Dellafaille lit le procès-verbal ; la rédaction en est adoptée.
PIECES
ADRESSEES A LA CHAMBRE
M. Liedts
donne lecture d’une pétition adressée par la députation des états de la
province de Liége. La lecture de cette pétition est autorisée par la chambre,
parce que, relative aux droits de barrières sur les routes, elle se rapporte au
budget des voies et moyens, projet de loi en discussion.
- La chambre ordonne le dépôt de la pétition au bureau
des renseignements.
VERIFICATION DES POUVOIRS DES MEMBRES NOUVELLEMENT
ELUS
M. Jullien,
rapporteur de la commission de vérification des pouvoirs, a la parole. -
Messieurs, dit-il, le district de Soignies avait à procéder à l’élection d’un
représentant. Le collège électoral est divisé en deux sections. Le
procès-verbal présente deux difficultés : il est du devoir de la commission
d’en rendre compte à la chambre. La première consiste en ce qu’il a été
impossible d’établir la seconde section du collège. Plusieurs électeurs ont été
désignés pour faire partie du bureau et n’ont pas accepté la mission qui leur
était donnée ; d’autres ont refusé de prendre part aux délibérations, de sorte
que les électeurs ont décidé entre eux qu’il ne serait formé qu’un seul bureau.
La commission a cru que l’on ne devait pas avoir égard à cet égard à cette
difficulté parce que d’après l’article 19 de la loi électorale, il faut deux
sections quand il y a 400 électeurs, et dans le district de Soignies les
électeurs sont au-dessous de ce nombre.
Les électeurs étaient donc dans l’esprit de la loi, et
cette difficulté n’a pas arrêté votre commission.
La deuxième difficulté est plus sérieuse. Le
procès-verbal en rend compte. Au nombre des votants, se trouvaient cinq
électeurs ayant des cartes délivrées par leurs bourgmestres respectifs. Ces
cartes sont jointes au dossier, Il y avait à examiner si l’administration
communale, quoique compétente en matière d’élection, avait pu réviser une liste
électorale après la révision annuelle : c’est la question qui a été agitée
dernièrement pour les élections de Liége ; mais la commission a pensé qu’il
était fort inutile d’amener une discussion sur ce terrain, parce que les cinq
électeurs, n’affectant pas la majorité, ne peuvent la déplacer. Le nombre des
votants s’élevait à 265 ; M. Auguste Duvivier a réuni 258 voix ; il y a une
immense majorité. Ainsi, qu’on retranche ou qu’on ne retranche pas les cinq
électeurs, la majorité reste la même. D’après ces motifs, messieurs, la
commission a été d’avis, à l’unanimité, de proposer l’admission de M. Auguste
Duvivier.
- Les conclusions de la commission sont admises.
M. Duvivier, ministre des
finances, prête serment après avoir été proclamé membre de la chambre.
_______________
M. Jullien.
- Maintenant je devrais vous rendre compte des élections de Tournay ; mais le
dossier n’est pas complet ; la commission a demandé communication de plusieurs
pièces au ministère de l’intérieur ; quand ces pièces seront arrivées, la
commission de vérification donnera son avis.
PROPOSITION DE LOI MODIFIANT LA LOI D’ORGANISATION
MONETAIRE
M. le président.
- Une proposition a été déposée sur le bureau par M. Seron ; elle sera renvoyée
dans les sections.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DES VOIES ET MOYENS
POUR L’EXERCICE 1833
Discussion générale
L’ordre du jour est la continuation de la discussion
du budget des voies et moyens.
M. Osy. - Messieurs,
vous vous rappellerez que M. Ch. de Brouckere et moi, dans une de vos dernières
séances du mois de juin, nous vous avons démontré que les crédits ouverts pour
l’année 1832 dépassaient les voies et moyens de f. 29,500.000. D’après le
rapport que l’honorable M. Coghen nous a fait dans la séance du 1er décembre,
je vois que nos assertions étaient exactes.
M. Coghen avoue, sur l’année 1832, un déficit de f.
16,400,000, qui n’est pas inquiétant pour le moment, n’étant pas encore de
longtemps à même de payer à la Hollande ce qui nous est imposé par le traité ;
l’excédent du déficit n’est donc que de f. 13,100,000. L’excédent des exercices
1830 et 1831 est de f. 1,636,000.
Pour constater ce fait, il nous faut les comptes
promis depuis si longtemps, et pour appliquer cet excédant à l’exercice 1832,
il faut un projet de loi.
Les impôts, d’après les calculs de M. Coghen,
excéderaient les prévisions de f. 6,200,000.
Comme vous le disait très bien l’honorable M.
Dumortier, le budget des voies et moyens vous était présenté pour une Belgique
des 24 articles et non des provinces méridionales ; donc la croissance des
revenus n’est véritablement que de f. 3 millions, ce que nous ne devons pas
perdre de vue, pour ne nous tromper dans l’avenir en arrêtant les voies et
moyens. M. Coghen nous signale en outre une économie et bénéfice de f.
1,120,000 provenant de rachat des emprunts 10 et 12 millions et de ce que le
2ème emprunt de 24 millions n’a été conclu qu’après le premier semestre.
Total : f. 8.956,000
Et finalement on nous annonce qu’il y aura, en
économies dans les divers ministères, une somme de f. 4.2.00,000
Total : f. 13,156,000
De manière que M. le ministre nous annonce qu’il
pourra clôturer l’exercice 1832 sans demander de nouveaux crédits ni des voies
et moyens, tout en vous prévenant que pour 1831 on nous demandera un crédit
supplémentaire de f. 1,440,000. De manière que définitivement, à la fin de
1832, notre déficit sera f. 17,840,000, somme égale à payer plus tard à la
Hollande.
J’aurais désiré savoir avec quel ministère on fera une
économie de f. 4,200,000 ; je pense que ce sera la guerre, et d’après cela je
conclus qu’on n’aura pas appelé sous les armes toute la réserve qu’on nous a
demandée, et effectivement, si le gouvernement est décidé contre l’honneur du
pays de faire faire nos affaires à l’étranger, c’est une véritable économie,
mais qui ne me paraissait pas être dans l’intention de la chambre.
Maintenant que M. le ministre nous assure que les
services 1832 sont assurés, voyons si le trésor est à même de faire face à tous
ses engagements et je tâcherai de rendre mes calculs aussi clairs que possible,
après avoir entendu les diverses observations qui ontéèté faites ici depuis
plusieurs jours.
Le dernier emprunt doit produire 17,500,000.
Il paraît qu’il n’est entré au trésor que 10/40 : soit
4,400,000.
Reste à recevoir 13,100,000
Sur lesquels il faut déduire 4,000,000
Que les entrepreneurs paieront avec des bons de 12
millions. Reste à recouvrer en 1833 9,100,000
Ce sera cette somme que vous recevrez en moins en
1832, qui doit être remplacée par 8 mois d’anticipation sur la contribution
foncière qui, mis maintenant en recouvrement, ne peuvent pas vous donner au
premier janvier plus de 4 millions ; le trésor sera donc entièrement à
découvert à cette époque de f. 5 millions, et cependant vous avez à rembourser
au premier janvier 6 millions de l’emprunt de 12 millions, et je ne vois pas
moyen d’y faire face, puisqu’on avoue que les mandats à terme en circulation ne
dépassent pas 300 mille f.
Je dois donc partager l’opinion de ceux qui ont des
craintes que le gouvernement ne pourra pas exactement satisfaire à ses
engagements, et si encore ici nous faisons de l’opposition, vous voyez,
messieurs, que ce n’est pas pour nuire au crédit, mais au contraire pour
l’affermir, et offrir notre appui pour ne pas être à même de manquer à nos
engagements, car nous serions coupables si nous nous taisions. J’engage donc
beaucoup M. le ministre d’examiner exactement notre position, pas seulement les
voies et moyens et dépenses votés, mais la situation du trésor. Je sais que M.
Coghen me répondra, et je vais au-devant de ses observations, que les
entrepreneurs de l’emprunt auront à payer au premier janvier 3.400,00 f. soit
fl. 1,300,0000 ; mais ne perdons pas de vue qu’a cette même époque M. le
ministre de la guerre aura besoin, sur le budget de 1833, au moins d’une somme
de deux millions, ce qui absorbe les versements de M. de Rothschild.
Je crois qu’on aura de la peine à me réfuter cette
position.
On nous a beaucoup parlé depuis plusieurs jours de
mandats à termes et de bons du trésor.
Je ne trouve pas que les mandats à terme soient une
opération inconstitutionnelle, mais une opération très dangereuse et onéreuse,
et j’aurais préféré nous voir présenter un projet de loi pour la création de
bons du trésor donnant intérêt, parce que dans ce cas le gouvernement serait à
même de payer régulièrement et ne forcerait pas les entrepreneurs de faire des
pertes qui se montent au moins à 13 ou 15 p. c. par an. Et vous sentez qu’en
définitive cette perte retombe sur le trésor, puisque les entrepreneurs, en
faisant leurs soumissions, calculent sur ces paiements retardés, et les
comprennent dans leurs prix de soumission.
Il faut donc l’éviter et nous demander une loi pour
l’émission régulière de bons du trésor, et établir régulièrement notre dette
flottante. Je sais que, dans le début, nous devrons payer un intérêt un plus
élevé ; mais, peu à peu, cela disparaîtra, et nous trouverons dans des moments
tranquilles à avoir des fonds à meilleur compte. En 1830, après la révolution
de juillet, le trésor de France payait jusqu’à 6 p. c., et maintenant il se
procure des fonds à raison de 4 et même de 2 1/2 p. c., suivant les termes
d’échéances ; c’est par une bonne et régulière administration que le crédit
public s’établit, mais nullement par des demi-confidences faites à quelques
membres, qu’on n’ose avouer à la tribune. C’est la publicité qui établira notre
crédit, et non des demi-aveux.
Je partage tout à fait l’opinion que si le ministère avait,
dans le courant de l’année, pensé à une meilleure répartition de la
contribution foncière comme nous en avions posé les bases dans la commission de
finances dont j’avais l’honneur de faire partie, nous n’aurions plus à déplorer
les mêmes abus et injustices pour l’exercice qui va commencer ; mais maintenant
que cette contribution est déjà mise en recouvrement, je crois qu’il n’y a pas
moyen d’éviter de rester dans ce cercle vicieux pour 1833 ; mais comme je doute
que même dans deux ou trois ans le cadastre sera entièrement achevé, j’engage
M. le ministre de nous présenter un meilleur moyen de répartition pour 1834, ce
qui n’est pas difficile si on le veut, et qui aura encore cet avantage de
rendre les dégrèvements et les augmentations, après l’achèvement du cadastre,
moins sensibles ; car, d’après ce que l’honorable M. Meeus vous a si clairement
démontré, les provinces des Flandres et Anvers seront fortement dégrevées, et
le Hainaut et autres seront considérablement augmentés.
Pour ce qui est de la contribution personnelle, avec
un peu de bon vouloir on aurait pu vous présenter de grandes améliorations, et
encore, en votant des douzièmes provisoires, je pense qu’avant peu le ministère
pourrait vous présenter une bonne loi pour mettre en exécution en 1833.
Pour ce qui est des patentes à remettre sur l’ancien
pied, je m’y opposerai, d’autant plus que cette loi aurait dû être révisée, et
vous sentez, messieurs, par les hostilités qui se passent dans le pays, et par
la crainte que nous finirons par avoir la guerre l’année prochaine, la prise de
la citadelle, la retraite de l’armée française ne finissant nullement nos
affaires, il est incontestable que toutes les branches de commerce et
d’industrie ont et auront encore beaucoup à souffrir ; je crois qu’il est peu
convenable de mettre en recouvrement la totalité de la contribution des
patentes.
Je suis décidé à voter contre le projet de loi qui
vous est présenté, non seulement pour ces raisons, mais parce qu’en bonne
comptabilité il faut examiner et arrêter avant les comptes de 1830 et 1831, si
longtemps promis ; commencer à voter les budgets de dépense et ensuite, les
voies et moyens pour niveler nos recettes à nos dépenses ; et ensuite, n’ayant
pas de ministère et ne sachant à qui nous accordons notre confiance (je ne
parle pas tant des hommes que du système à suivre), il serait peu convenable de
voter dès aujourd’hui nos recettes pour toute l’année ; mais comme il faut
soutenir le gouvernement de tous nos moyens, je me rallierai à l’amendement qui
vous sera proposé pour autoriser le gouvernement à mettre en recouvrement 3 ou
4 douzièmes des contributions actuelles, et alors nous examinerons à notre aise
les budgets de dépense. Attendons le budget de la guerre sur pied de guerre (ne
voyant pas encore moyen de désarmer de si tôt), nous éviterons de devoir voter,
à chaque instant des suppléments de crédits, et nous préviendrons les déficits,
qui seront considérablement à la paix, lorsque nous aurons à payer à la
Hollande ; le gouvernement ayant sollicité au lieu de déclarer qu’à partir du
31 janvier 1832 nous retiendrons de ce que nous avons à payer à la Hollande nos
frais de guerre.
Comme plusieurs de nos honorables collègues, j’ai été
très étonné du langage tenu par des journaux salariés et rédigés par des
ministres et employés du gouvernement contre la majorité de cette chambre, de
la permission de voir circuler contre les 42 des libelles sans noms d’auteurs
ni imprimeurs, des sorties peu convenables d’un ministre d’Etat, et même des
pétitions où je vois à la tête des agents du pouvoir, entre autres un
commissaire de district : au lieu de calmer les passions et les divergences
d’opinions politiques, le pouvoir ne fait qu’aggraver le mal.
Je suis persuadé que cela ne nous fera pas changer
d’opinion, et si nous continuons d’être de l’opposition, qu’on sache que ce
n’est pas contre les hommes, mais contre le système qui infailliblement
amènerait pour la Belgique la honte et la ruine ; j’entends dire : L’opposition
ne sait que démolir et non former un ministère ; on se trompe : que le
gouvernement veuille suivre la marche indiquée par les lois et les besoins du
pays et il trouvera des hommes qui, même dans ces circonstances difficiles,
prendront en main le timon des affaires, et je sais même que leur système
serait reçu avec reconnaissance par la nation.
Rappelez-vous qu’au mois de mai on voulait former un
ministère, à la tête duquel on aurait mis un de nos collègues qui siégeait à la
place où je me trouve, et si on avait suivi ses conseils et son système, vous
ne seriez pas dans l’embarras où vous êtes aujourd’hui ; les affaires ne
seraient pas au bord du précipice où des mains inhabiles les ont menées.
Voilà un exemple, l’on ne dira plus que nous savons
démolir sans reconstituer ; mais dans la situation actuelle des affaires
extérieures, un homme d’honneur ne peut entrer au pouvoir sans changement
complet de système. Et si on ne le veut pas, nous resterons longtemps sans
ministère, ou nous en aurons un qui n’aura pas notre confiance. Il est plus que
temps qu’on y songe, et cette incertitude est mortelle pour le pays ; il faut
vouloir, et vous trouverez des hommes dévoués et qui réuniront les diverses
opinions.
M. le ministre des finances finit par dire, dans ses
développements à l’appui du projet de loi, que la force des choses l’a emporté
sur les prophéties sinistres et sur l’incertitude des événements.
Lorsqu’il nous dira que le traité du 15 novembre est
accepté par la Hollande, et exécuté franchement, nous pourrons voir un avenir ;
mais lisez avec attention ce que disait M. le duc de Broglie lors de la
discussion de l’adresse, vous y voyez clairement que l’on vous prépare, comme
je l’ai souvent dit, à de nouvelles concessions humiliantes, et qui, pour ma
part, me donnent de graves inquiétudes pour notre avenir politique, commercial
et financier, et même sur l’existence de la Belgique ; car après les hostilités
près d’Anvers, vous aurez la fermeture de l’Escaut ou l’équivalent par des
droits de visite sur nos arrivages, qui ne nous mettront plus à même de
concourir avec nos voisins, si même le Rhin vous est ouvert, ce qui n’est pas
encore certain ; en un mot, soyez sûrs qu’on aura soin, si on vous ouvre la
porte de sortie, de tenir fermée la porte d’entrée. Et, il nous faut
l’ouverture des eaux, l’Escaut sans droits de visite et le Rhin avec le simple
tarif de Mayence.
Anvers, pendant les dix premiers mois, avait repris,
et les arrivages ont été nombreux ; et je puis vous annoncer avec satisfaction
que le projet de loi que je vous avais proposé et que vous avez bien voulu accueillir,
a été une des grandes sources de nos affaires et a fait beaucoup de bien à vos
ports de mer et votre navigation et commerce intérieur, sans avoir nui
nonobstant une belle récolte à votre agriculture. Cela vous prouve encore que
nonobstant notre opposition, nous cherchons les moyens, pendant l’inactivité du
ministère, à contribuer le plus possible au bien-être du pays.
Les arrivages en denrées
coloniales diffèrent considérablement avec nos importations des années 1828,
1829 et même 1830 ; c’est naturel, ne faisant que le commerce de la
consommation du pays et nullement le commerce d’exportation d’Allemagne ; pour
nous procurer, de nouveau, ces débouchés, il nous faut le Rhin et en même temps
l’Escaut entièrement libres.
La Hollande, pour ses possessions des Indes, a occupé
notre industrie ; mais le rétablissement de l’ancien droit de 25 p. c. aux
Indes pour les produits étrangers, même sous pavillon hollandais, va de nouveau
ralentir nos exportations de manufactures. Nous devons regretter de voir s’éloigner,
de plus en plus, notre belle flotte marchande, qui, à défaut d’emploi, est
obligée de se réfugier en Hollande et d’y prendre le pavillon hollandais ; cela
éloigne de chez nous bien dethede capitaux et d’industrie.
Je regrette que le gouvernement n’ait rien encore pu
obtenir de la France, pour nos houilles, fers et toiles de lin, et je suis même
étonné que le ministère ne nous en parle pas. Je regrette que l’honorable
l’honorable M. Zoude a du vous présenter un projet de loi pour maintenir le haut
droit sur les importations du fer, preuve malheureuse que cette branche reste
toujours très souffrante.
M. de Theux. - Dans une des séances précédentes, un honorable
membre, M. Levae, a attribué exclusivement à la sollicitude du gouvernement
français pour ses propres intérêts la proposition de modifier le tarif
d’importation du bétail étranger ; il a cru que le gouvernement belge avait
négligé de solliciter cette mesure et n’avait pas soigné nos intérêts
commerciaux avec les pays voisins.
Si mon honorable collègue M. de Muelenaere, l’ancien
ministre des affaires étrangères, était présent, je lui laisserais le soin de
réfuter cette assertion.
Vous n’ignorez pas messieurs, qu’au mois de novembre
de l’an dernier, mon prédécesseur fit nommer par le Roi une commission
supérieure d’industrie et de commerce ; arrivé aux affaires, je proposai
d’augmenter le personnel de cette commission et d’y adjoindre plusieurs
propriétaires distingués par leurs lumières et par leur zèle pour les intérêts
de l’agriculture.
Cette commission s’est occupée avec zèle de nos
intérêts industriels et agricoles et nommément de l’exportation de notre bétail
vers la France.
Des instructions ont été données à notre ministre
plénipotentiaire près la cour de France, et ce ministre a fait des démarches
concernant cet objet.
Je répondrai également à l’honorable M. Osy que les
houilles ont été l’objet de la sollicitude du gouvernement et de notre ministre
en France ; on peut attribuer à ces vives instances les dispositions prises
récemment par le gouvernement français pour une enquête, et qui, je l’espère,
amèneront d’heureux résultats.
La pétition des états-députés de la province de Liége,
dont on vient de nous donner lecture, est basée sur une erreur. Je ne pense pas
qu’il ait été dans l’intention du ministre des finances de porter les droits de
barrière sur les routes de 2ème classe en recettes réelles pour l’Etat ; ce
n’est qu’une opération fictive, puisque ces droits doivent être portés en
dépenses et être mis à la disposition des provinces. La loi qui existe sur la
matière met obstacle à toute fausse interprétation.
L’honorable M. Jullien s’est plaint de ce que les
routes sont entretenues aux frais des villes qu’elles traversent, et non aux
frais du trésor : vous vous rappellerez, qu’un amendement avait été présenté
l’année dernière pour cet objet dans la discussion du budget de l’intérieur, et
qu’il fut rejeté ; depuis, j’ai pris des informations pour arriver à une
répartition équitable de ces charges entre les villes et le trésor ; on pourra,
lors de la discussion du budget des dépenses, se fixer sur ce point.
Plusieurs membres ont proposé de ne voter que des
douzièmes ; ils désirent, en ajournant le vote du budget, obtenir des réformes
dans nos lois financières. Quant à moi, je crois que l’ajournement
n’atteindrait pas le but que l’on se propose. Vous savez que divers projets de
loi de finances ont été présentés au congrès et spécialement d’un projet sur
les distilleries, et que la chambre a été également saisie de plusieurs
projets, tant sur les finances que sur d’autres matières.
Mais la discussion de ces projets a été rendue
impossible par la discussion de projets plus urgents, par des discussions
politiques et autres discussions dues aux circonstances extraordinaires.
Si nous nous bornions à voter des douzièmes
provisoires, il nous faudrait, lorsque la discussion du budget des voies et
moyens reviendrait, employer de nouveau 8 ou 9 jours en discussion que nous
aurons déjà épuisées maintenant ; en votant au contraire un budget définitif,
nous pourrions employer utilement ce temps à réviser la loi sur les
distilleries ou sur le sel.
Certains orateurs ont parlé de
la révision partielle de quelques lois financières, qui auront pour objet d’en
faire disparaître les principaux vices.
Ce système pourrait amener les plus graves
inconvénients ; l’on ne doit toucher que rarement aux lois financières, si l’on
ne veut risquer de compromettre les intérêts du trésor ou ceux des
contribuables, et souvent même ceux de l’industrie et du commerce ; il faut
donc, lorsqu’on révise une loi, le faire en une seule fois, et après des
discussions les plus approfondies.
J’ai dit que les moindres changements peuvent amener
des déficits considérables dans les recettes, c’est-à-dire que ceux apportés
l’an dernier à la taxe des barrières ont causé une diminution de près d’un
10ème dans le prix d’adjudication.
Persuadé qu’en votant un crédit de quelques mois, nous
ne serons guère plus avancés qu’aujourd’hui, lorsque l’ajournement serait écoulé
; persuadé que l’adoption d’un budget définitif contribuera à fortifier le
crédit, je lui donnerai mon vote.
M. Lardinois.
- Messieurs, je commence par vous déclarer que je voterai contre le budget des
voies et moyens parce que je veux, avant de voter les impôts, que le pouvoir
royal reconstitue le cabinet, et en second lieu, que le compte des dépenses des
années antérieures et les budgets pour l’exercice prochain nous soient fournis.
Nous saurons alors à qui la fortune publique sera confiée et quelles seront les
dépenses que le budget des voies et moyens devra couvrir.
Cette résolution n’a rien qui puisse entraver la
marche du gouvernement. Les caisses de l’Etat, grâce à l’imprévoyance du
ministre, sont vicies, et vous aurez beau vous gendarmer contre les crédits
provisoires, nous serons obligés d’en passer par là. Je crois donc qu’il vaut
mieux se résigner immédiatement à adopter la proposition annoncée par
l’honorable M. d’Elhoungne, qui consiste à accorder à chaque département un
crédit provisoire pour trois mois et à autoriser le gouvernement à percevoir
les contributions sur le pied fixé par la loi du 22 décembre 1831, avec
anticipation de paiement s’il est nécessaire.
Notre système financier ouvre un vaste champ à la critique,
et plusieurs orateurs ont eu le courage de répéter les philippiques qui se
débitent à chaque présentation des budgets.
Je souhaite que le gouvernement s’occupe une bonne
fois des vœux de la représentation nationale, en refondant toutes les lois financières
pour composer un nouveau système d’impôts, mieux proportionné, qui frappe le
riche et ménage le pauvre.
En attendant, nous devrons nous traîner dans
l’ancienne ornière, et voter, lorsque le temps sera venu, les fonds nécessaires
aux services généraux.
Attentifs aux débats de cette chambre, vous aurez sans
doute remarqué avec moi, messieurs, les combats qu’on se livre tour à tour, les
uns pour soutenir la prospérité de nos finances, les autres pour en démontrer
la pénurie.
Il faudrait être doué d’une foi bien aveugle pour
croire que nous ne finirons pas par être grevés d’une dette énorme : les
révolutions ne se font pas sans d’immenses sacrifices, et tant que l’état de
guerre durera, ces sacrifices iront dans une progression croissante.
Ouvrez les budgets et vous verrez que, pour notre
petit pays, nous avons une armée qui coûte à peu près cent mille florins par
jour.
Mais il ne s’ensuit pas, messieurs, que si nous
entrevoyons pour l’avenir une dette publique considérable, la Belgique ne
puisse y faire face. Repoussons toutes prédictions sinistres ! L’étranger aussi
bien que nous est pénétré de nos immenses ressources ; il ne faut que procurer
des débouchés aux produits de notre industrie et rouvrir les voies au commerce
pour payer facilement nos impôts.
Le trésor public, momentanément obéré par les dépenses
considérables du département de la guerre, s’est libéré d’une partie de ses
engagements, en payant certains créanciers en mandats à terme sur la banque.
Cette opération, familière aux négociants, doit toujours se faire avec réserve
et précaution si l’on ne veut pas porter atteinte à son crédit. Ce mode de
paiement ne devrait jamais être imité par le gouvernement, attendu qu’il n’est
souvent adopté qu’au préjudice des créanciers de l’Etat et en violant la foi
des contrats.
Ces mandats ont été fournis sur la banque, qui refuse
de les accepter et même de les escompter. Je ne conçois pas, messieurs, une
pareille impéritie du ministre des finances. Quoi ! vous émettez des traites
pour 3 à 400 mille florins, et vous ne prenez pas vos mesures pour qu’on y
fasse honneur à présentation ! Quoi ! vous avez un banquier que vous chargez de
tous vos paiements, à qui vous confiez des sommes énormes, et vous permettez
qu’il laisse votre signature en souffrance pour une aussi faible somme, lorsque
vous pouvez donner à l’instant même des garanties pour vingt fois la valeur !
Vous avez ainsi compromis non le crédit public, il a des racines plus profondes,
mais le crédit particulier du gouvernement, c’est-à-dire que vous avez ébranlé
la confiance que les entrepreneurs avaient en vous, puisque vous ne tenez pas à
vos conditions de paiement et que vous leur fournissez un papier dont la banque
refuse l’acceptation et l’escompte. Cette conduite, messieurs, est sans excuse
; elle décèle une administration sans prévoyance, et je crains beaucoup qu’on
ne nous révèle bientôt d’autres bévues plus répréhensibles les unes que les
autres.
Si je blâme cette émission de mandats, je dois répéter
qu’elle ne peut pas compromettre le crédit public. Le gouvernement n’a qu’à
vouloir, et ces mêmes mandats ne seront pas escomptés au taux de 7 à 10 p. c.,
comme on se plut à le dire, mais à celui de 5 au maximum. J’engage beaucoup le
ministre à ne pas se laisser effrayer par les bruits sinistres que colportent
les agioteurs : c’est à dessein qu’ils répandent les alarmes, parce qu’ils
méditent de nouveaux emprunts et qu’ils voudraient avoir en tutelle le trésor
public pour le diriger à leur guise et l’exploiter à leur profit.
La banque, qui refuse
l’acceptation et l’escompte d’une faible somme, est cependant débitrice du
trésor d’un solde de compte arrêté au 30 septembre 1830, s’élevant à environ
sept millions de florins ; c’est du moins ce qu’affirment les agents du
gouvernement. En admettant le fait pour vrai, comment concilier la bonhomie du
ministère qui ne provoque pas la rentrée de cette somme, et la sévérité de la
banque qui refuse de se mettre à découvert pour 3 à 400 mille florins ? Quant à
moi, je ne conçois pas encore, dans cette occurrence, la conduite du
gouvernement qui néglige le recouvrement d’une somme aussi forte, tandis qu’il
fait des emprunts en souscrivant à une perte de 30 p. c. Il y a dans cette
affaire quelque chose d’obscur que nous n’apercevons pas : quoi qu’il en soit,
le devoir du gouvernement exige qu’il fasse liquider cet ancien compte, et que,
s’il est dû une somme quelconque au public, elle soit réclamée et payée avant
que la banque n ait réalisé ses domaines. J’ai dit.
M. Meeus. -
Messieurs, vous me pardonnerez si je prends de nouveau la parole dans cette
discussion. Vous m’avez vu, dès le principe, dominé par une seule pensée ;
cette pensée était que pour le moment le ministre des finances était plus
qu’imprévoyant, qu’il était imprudent et compromettait à la fois le service
public et le crédit public. Messieurs, il m’est bien désagréable de devoir
encore une fois voter dans un sens opposé au gouvernement : je fais aussi partie
des 42, comme on les appelle. (On rit.)
Je fais aussi partie des 42, comme on les appelle dans le public. Il est vrai
que, pour avoir voté selon nos convictions, on nous a accusés, les uns de
vouloir la réunion à la France, les autres l’anarchie, les autres de vouloir le
retour de la maison d’Orange. De ces trois catégories j’ai été placé dans la
dernière ; je suis orangiste, je suis orangiste…
Messieurs, jusqu’à présent je ne vous ai pas encore
ennuyés d’une profession de foi ; permettez-moi de vous dire deux ou trois mots
à cet égard.
Je ne suis pas de ces hommes profonds qui ont vu venir
la révolution ; mais je suis du nombre de ceux qui depuis longtemps
reconnaissaient des griefs contre le pouvoir. La révolution est arrivée ; ce
n’est pas moi qui l’ai faite, et je ne ravirai pas aujourd’hui une partie des
palmes conquises par ceux qui l’ont opérée ; cependant j’ai pris part à cette
révolution. J’ai siégé au congrès, et en entrant dans cette auguste assemblée,
je sais ce que cela imposait à tout homme d’honneur, c’était d’abord
l’exclusion de la maison de Nassau. (Bien
! bien !) Je l’ai trouvée prononcée, et je l’ai admise comme un fait
consommé. Ce que je devais vouloir ensuite, c’était la Belgique indépendante,
et un roi de son choix. (Bien ! bien !)
J’ai admis ce vote en entrant dans le sein du congrès,
et ce n’est pas d’aujourd’hui que j’ai juré la constitution. Je suis du nombre
de ceux qui n’ont pas craint de repousser cette œuvre d’iniquité des 18
articles ; mais considérant ce qui était possible, j’admets les 24 articles
comme notre droit public ; je les veux les 24 articles, je les veux en entier ;
et dès qu’on me présentera quelque chose qui les altérerait, je croirais
manquer à la constitution si j’y adhérais de mon vote.
Je crois que cette explication suffira, non pour vous,
mais pour un public que l’on cherche à tromper à éblouir, à égarer. Je le
répète : ce que je veux, c’est la Belgique des 24 articles, c’est la
constitution tout entière
Passons maintenant à la discussion des lois
financières. Si je parle contre le ministre, c’est par devoir ; c’est parce que
le ministre a démenti que je veux éclairer la chambre. Alors qu’il n’existe
plus de gouvernement, c’est l’assemblée législative qui est gouvernement. Eh
bien, examinons notre situation financière, voyons les chiffres, les chiffres
qui doivent être clairs pour tout le monde, et si je me suis trompé ce matin en
les jetant à la hâte sur le papier, je pense qu’ils seront assez exacts pour
appuyer mes raisonnements. Je viens d’en faire faire deux copies pour mettre
sous les yeux de l’assemblée.
Messieurs, les dépenses votées pour l’exercice 1832
s’élèvent à 96,373,896 fl.
Il faut en déduire comme non dépensé l’article voté au
budget pour la Hollande, 18,000,000 fl.
Reste : 78,373,896 fl.
Il faut déduire de ce premier reste les 4 millions que
MM. Rothschild sont convenus de ne donner en paiement, sur les 12 millions, que
lors des derniers paiements à faire pour les 48 millions.
Reste : 74,373,896
fl.
Les voies et moyens, en supposant (ce qui est
impossible) que les revenus soient rentrés pour le 31 décembre, produiraient à
cette époque 37,500,000 fl.
L’exercice 1830 présente un excédant de 136,000 fl.
L’exercice 1831 présente un excédant de 1,500,000 fl.
Les économies annoncées, qui ne sont pas des
économies, mais des dépenses que l’on n’a pas faites, 4,200,000 fl.
Les intérêts sur l’emprunt de 48 millions, 720,000 fl.
L’amortissement anticipé des 10 et 12 millions,
400,000 fl.
Les produits de l’emprunt de 48 millions, 35,500,000
fl.
Il faut en déduire ce qui doit ne rentrer qu’en 1832,
de janvier en septembre, 12,752,397 fl.
Reste : 22,747,603 fl.
Ensemble vous avez donc 67,203,603 fl.
Et cela pour faire face à une dépense de 74,373,896
fl.
Il y a donc déficit de 7,170,293 fl.
Et ce déficit a lieu en supposant que les revenus
aient suivi les dépenses. Ce qui est impossible. On dépense au jour la journée
; les dépenses de l’armée se font sans lacunes, tandis que les recettes ne se font
pas aussi vite ; et la preuve, c’est que dans vos budgets on vous présente
toujours un arriéré. Quoi qu’il en soit, voilà un déficit de 7,170,293 florins.
Mais pour que le service marche, je pense qu’il faut
de l’argent. Je sais fort bien, par exemple, qu’avant que les caisses de l’Etat
aient passé dans les mains de la banque, le service exigeait constamment 35
millions de fonds morts ; quand la banque eut pris les caisses de l’Etat, elle
pouvait faire le service avec 9 à 10 millions de florins, parce que, joignant
ses affaires à celles de l’Etat, elle pouvait faire des reports d’une caisse à
l’autre très facilement. Je veux que sous ce gouvernement on soit plus malin (on rit) que l’on ne l’a été sous
l’ancien, et j’admets qu’au lieu de 9 millions de florins, on puisse marcher
avec 4 millions. Mais ces quatre millions, il les faut : 4,000,000 fl.
Il faut ajouter à cela que dès le premier janvier vous
aurez à payer un douzième de vos dépenses extraordinaires, dont on ne vous
parle pas : on ne vous présente pas de moyens pour couvrir les dépenses
extraordinaires de la guerre. Je garderai de la modération et une grande
modération en ne les portant qu’à 1,500,000 florins. La section centrale a
parlé de 48 millions qui manquaient pour l’année. Je porte donc 1,500,000 fl.
Les deux dernières sommes réunies au déficit forment
un total de 12,670,293 fl.
M. le ministre nous dit avoir amorti de l’emprunt des
12 millions, 2,000,000 fl.
Ce sera heureux si, pour l’anticipation des deux tiers
de l’impôt foncier, il se trouve en recettes au premier janvier, 2,500,000 fl.,
car les avertissements viennent à peine d’être donnés.
Total du produit 4,500,000 fl.
Reste donc en déficit 8,170,293 fl.
Voilà les chiffres que j’oppose à ceux qu’a présentés
M. Coghen. Et je suis bien fâché de le dire, il n’y aura pas de solde qui soit
dû par la banque ; et quoiqu’en dise M. Lardinois, le syndicat, s’il laisse un
solde en faveur de la Belgique, c’est un solde qui arrivera après une longue
liquidation.
Je suis bien fâché de vous
dire que vous ne devez pas être tranquilles sur votre position financière ; que
vous devez, au contraire, en être effrayés, que, si vous étiez tranquilles,
vous compromettriez et le crédit public et la fortune de l’Etat. Je le dis
assez haut pour que mes paroles parviennent jusqu’au trône, et qu’on fasse
attention.
M. Lardinois a soulevé une question sur laquelle je
puis présenter quelques observations. Il est terrible, a-t-il dit, que la
banque n’escompte pas les mandats du gouvernement ! M. Lardinois a-t-il bien réfléchi
sur ce que c’est qu’une banque nationale ? Une banque nationale ne forme son
crédit qu’autant qu’elle se tient dégagée de toute opération qui la puisse
compromettre vis-à-vis du gouvernement. C’est dans cette pensée qu’on a fait
mettre dans les statuts de la banque qu’elle ne ferait pas d’avances au
gouvernement. Cette pensée était si claire que le roi Guillaume, qui commettait
de grandes et de si nombreuses fautes, a reconnu cette vérité et a fait mettre
dans les statuts de la banque des règles contre lui-même.
Si le gouvernement a des garanties à donner à la
banque, si elle peut lui être utile d’une autre manière, elle s’empressera de
le faire. Elle s’inquiète peu des criailleries, des clameurs ; elle comprend sa
mission ; c’est celle d’obliger tout le monde. Elle est comme la divinité ;
elle fait du bien, même à ceux qui lui font du mal.
M. Dubois.
- Messieurs, je vous demanderai la permission de pouvoir ajouter à cette longue
discussion quelques mots pour motiver mon vote. Admis nouvellement parmi vous,
il m’importe de vous donner ces explications.
Je voterai pour le budget des voies et moyens tel que
l’a amendé et que nous l’a présenté votre section centrale.
Non pas que je n’aie été frappé comme vous tous du
mode inconstitutionnel et subversif de tous usages avec lequel on nous présente
ce budget.
Non pas que je ne regrette d’y rencontrer encore la
surtaxe des Flandres et de la province d’Anvers, surtaxe qui deviendra encore
plus sensible par les 40 p. c.
additionnels.
Non pas que je n’aie aperçu bien des vices que
présente notre système financier. Vices dans les lois et spécialement dans
celles sur le personnel et les patentes ; vices dans l’administration qui offre
un personnel innombrable et trop richement doté, au point que les frais de
perception s’élèvent sur les sommes à percevoir à près de 14 p. c. !
Non plus que je regrette de ne rien entendre à ce que
peut devoir au gouvernement l’établissement de la banque, dont on a tant de
soin de cacher le bilan.
Je voterai ainsi, messieurs, mu par la nécessité
suprême où nous placent le temps et les circonstances ; mu par l’idée qu’il ne
nous appartient pas de laisser sans ressources le gouvernement, ni de porter
les premières atteintes à son crédit et à la bonne foi que nous lui
reconnaissons.
Je voterai ainsi, parce que la ressource du crédit
provisoire ne me satisfait pas, parce qu’elle me semble illusoire et qu’elle ne
tend à rien qu’à ramener dans trois ou dans six mois la discussion qui nous
occupe. Car, messieurs, on ne retourne pas si facilement tout un système de
finances ; ce n’est pas l’œuvre d’un jour que d’opérer les changements que
réclame un système cousu de lois, d’arrêtés et d’interprétations ministérielles
de cinq ou six régimes divers.
Au reste, si la chambre veut dorénavant stimuler le
ministre des finances pour qu’enfin il se mette à l’ouvrage, pour qu’il aborde
les améliorations que le pays réclame, il se présentera pour le faire assez
d’occasions dans le courant de cette session, et particulièrement quand le
ministre viendra nous demander des subsides extraordinaires pour la guerre.
Car, messieurs, en votant aujourd’hui de confiance, je
ne prétends pas donner pour la suite un bill d’indemnité au ministère. Loin de
là ! J’espère bien qu’à l’avenir on choisira une autre époque pour nous
présenter nos budgets ; j’espère que la discussion actuelle portera ses fruits
; j’espère bien que M. le ministre saura stimuler M. l’administrateur du
cadastre pour qu’il achève au plus tôt cet important ouvrage qui doit mettre de
l’équité dans la répartition foncière ; j’espère même que nous ne nous
séparerons pas sans avoir décidé quelques lois qui tendent à rectifier et à
améliorer notre déplorable système des finances. A cette seule condition je
pourrai lui continuer ma confiance.
M. Mary. -
Messieurs, vous ne vous attendez pas sans doute à ce que je rentre dans le
cercle des développements que j’ai déjà eu l’honneur de vous soumettre et dans
le rapport de la section centrale et dans la réplique que j’ai prononcée dans
votre séance d’avant-hier. Je me bornerai à répondre à quelques-uns des
orateurs que vous avez entendus dans la séance d’hier et d’aujourd’hui.
On s’est encore récrié contre la discussion d’un
budget des voies et moyens pour 1833. Mais, messieurs, cette discussion, c’est
vous-mêmes qui avez déclaré dans l’une de vos précédentes séances qu’il était
urgent de l’ouvrir, c’est vous-mêmes qui y avez déjà donné quatre jours d’une
attention soutenue. Mais, ajoute-t-on, comment accorder une telle loi lorsque
nous n’avons pas de ministère ? On confond toujours le budget des voies et
moyens avec celui des dépenses.
Ce dernier seul est un budget politique, parce qu’en
ouvrant des crédits aux divers ministères, vous témoignez de la confiance que
vous inspirent les hommes placés à la tête de ces départements, et ce n’est
qu’alors seulement que l’on peut faire emploi des ressources que vous accordez
au trésor. Cette vérité est sentie dans tout gouvernement représentatif, où le
seul ministre des finances est appelé à en soutenir la discussion avec les
commissaires spéciaux qu’on lui adjoint.
Mais en supposant qu’elle ne soit pas également reçue
chez nous, ne vous êtes-vous pas réservé la faculté de différer votre vote
définitif jusqu’à la composition du nouveau ministère, après avoir adopté les
articles partiels du projet, messieurs, mesure qui vous a permis d’utiliser le
temps fixé pour les travaux de la chambre, mesure sage surtout puisqu’elle vous
mettra à même d’apprécier, à la suite de nos débats, ce qu’il convient de faire
pour assurer la rentrée des impôts et ne pas compromettre le crédit encore peu
affermi de notre nouvel Etat ?
En présence des circonstances qui nécessitent chez nous
un surcroît de dépenses, que vous ont proposé quelques orateurs, de greffer sur
le provisoire que nous avons à subir depuis quinze jours dans l’une des parties
essentielles du pouvoir exécutif, un provisoire financier tout aussi dangereux,
inutile même puisque la discussion est soulevée devant un ministre des finances
: peu importe qu’il soit ad interim ; car, ainsi que l’ont fort bien remarqué
antérieurement la plupart des opposants, tout ministre étant à la nomination du
Roi et révocable à volonté par lui est placé dans un poste intérimaire.
Remarquez même, messieurs, que l’on ne se refuse pas à
lui accorder des fonds, mais on demande seulement de les restreindre dans un
délai moindre que celui d’un an. Ainsi, tandis que la constitution déclare,
dans son article 111, que les impôts au profit de l’Etat sont votés
annuellement, et que les lois qui les établissent n’ont de force que pour un
an, on vous demande de repousser des formes constitutionnelles que vous avez
juré d’observer, et de restreindre, sans utilité, votre vote dans des limites
encore plus étroites en n’accordant au gouvernement qu’un certain nombre de
douzièmes ; mais ici se présente une singularité qui fait voir combien le mode
proposé est peu praticable.
Vous vous souvenez que, dans votre séance
d’avant-hier, un membre que vous avez entendu au commencement de celle d’hier,
vous a demandé d’accorder à chacun des départements ministériels un crédit égal
au quart de celui qui leur a été alloué pour l’exercice de 1832, en laissant
subsister pendant ce temps les contributions existantes. Je lui ai répondu que
cette proposition était contraire à la constitution, qu’en outre elle était en
opposition avec la loi que vous aviez votée le 6 de ce mois, loi par laquelle
vous aviez accordé, à l’unanimité, la perception anticipée de 8 douzièmes de la
contribution foncière ; qu’elle n’était pas moins contraire avec les usages
parlementaires qui semblaient nous destiner non pas à majorer les demandes de
crédits que nous fait le gouvernement, mais à les diminuer quand nous en
trouvions la possibilité. J’ai dit qu’il était dès lors singulier de lui
allouer au-delà de 50 millions pour un trimestre, taudis que, par le budget des
dépenses qui vous a été présenté, il ne vous demande que 22 millions.
Cependant le même membre ne s’est pas dissimulé une
partie de ces difficultés, s’il faut en juger par la nouvelle rédaction de son
amendement, dont il vous a donné lecture hier. Mais cette lecture a dû vous
prouver encore davantage, messieurs, et combien son système présente
d’irrégularités, et combien, dans l’exécution il entraînerait de complications
dont quelques-unes seraient insolubles. D’abord il vous propose de porter au
tiers de l’année, et non plus au quart, l’allocation de crédits équivalents à
ceux que vous avez accordés pour le tiers de l’exercice 1833. Le même défaut de
convenance parlementaire surgit donc ici, puisqu’il demande d’accorder 70
millions au lieu de 28, que réclame le ministre des finances pour cette même
période. Ensuite il amène votre discussion sur un terrain autre que celui sur
lequel elle était portée, car vous n’examinez, en ce moment, que la loi des
voies et moyens ; celle des crédits est encore en délibération dans vos
sections. Aucun rapport ne vous a été soumis sur ce point, et sauf ce qu’en dit
l’amendement de cet honorable orateur, personne dans cette enceinte n’a examiné
s’il était nécessaire de les porter, pendant les 4 premiers mois de 1833,
beaucoup au-dessus du double des prévisions du gouvernement lui-même.
Vient ensuite la seconde partie de son amendement
tendante à autoriser la perception de quatre douzièmes des impôts indirects
d’après les lois existantes, et de huit douzièmes des contributions directes et
des redevances sur les mines, d’après les rôles de 1832. Cette différence entre
les quotités des douzièmes mis à la disposition du trésor a dû vous frapper ;
elle offre quelque chose de bizarre, mais on aura sans doute cru éviter par ce
moyen de se mettre en contradiction avec la loi que vous avez votée le 6
décembre. Que d’injustices, cependant, consacrerait la dernière partie de cette
proposition ! Le recouvrement des impôts directs se ferait d’après les rôles de
1832 ; ainsi le contribuable dont la profession aura changé au 1er janvier
prochain devrait payer un impôt de patente qui ne lui serait plus applicable ;
la loi ne l’atteignait pour l’impôt personnel que pour ses forces contributives
existantes en 1833, elles auront disparu ou été modifiées, et vous
l’atteindrez, d’après des bases qui existaient chez lui, une année auparavant,
bien que depuis lors elles aient changé.
Je pourrais pousser plus loin cet examen, mais je le
crois superflu et je pense qu’il suffit de signaler un fait digne de remarque,
c’est que l’honorable opposant au projet de loi commence à s’en rapprocher,
puisque s’il refuse la perception des impôts pendant 12 mois, du moins
l’admet-il pour quelques uns pendant huit. Vous voyez donc qu’encore quelques
pas, et nous allons nous rencontrer. Nous ne croyons pas cet effort impossible,
car voici au vrai l’état de la discussion.
L’article premier du projet en discussion vous propose
dans son premier paragraphe le recouvrement, pendant l’année 1833, des impôts
directs et indirects existants au 31 décembre 1832.
Tout le monde est d’avis d’accorder cette allocation,
sauf que, tandis que la constitution porte textuellement que votre vote doit
avoir la durée d’un an, il est d’honorables préopinants qui vous proposent de
le réduire à 3, 4 ou 8 mois, proposition qui n’amènerait d’autres résultats que
de perpétuer sans nul besoin un provisoire toujours désastreux, proposition qui
a été unanimement repoussée et par vos sections et par la section centrale.
Le second paragraphe de cet article sur lequel vous
aurez à voter séparément, puisque vous avez le droit de diviser les articles,
porte, ainsi que l’article 2 une augmentation sur les impôts foncier, personnel
et des patentes.
Il est toujours pénible d’avoir à légaliser une
aggravation d’impôts ; mais vous avez à apprécier si, dans l’intérêt bien
entendu du contribuable, il n’est pas plus convenable de mettre de suite nos
recettes au niveau de nos dépenses ordinaires que de devoir plus tard recourir,
pour en combler le déficit, à des emprunts onéreux dont un peu plus des deux
tiers entrent seulement dans le trésor public, surtout lorsque, pour faire face
à vos dépenses extraordinaires, vous n’avez déjà que trop à recourir au crédit.
Au lieu alors d’impôts momentanés et qui disparaîtront
des que nous pourrons désarmer, vous devrez admettre un accroissement notable
d’impôts permanents, destinés à payer le remboursement et les intérêts de vos
nouveaux emprunts.
En adoptant, au contraire, la loi que la section
centrale m’a chargé de soutenir devant vous, vous éviterez, en majeure partie,
les embarras financiers que d’honorables orateurs vous ont signalés hier comme
existants à la fin d’un exercice pour lequel vous avec cependant grevé l’Etat
d’un budget de recettes s’élevant à 37 millions de florins, et de deux
emprunts, ensemble de 48 millions même monnaie ; ainsi avec 185 millions de
francs de ressources nominales.
Votre décision négative pourra avoir une grave
influence sur le crédit public, et sur le cours de nos effets nationaux qu’il
importe à l’Etat de porter à un cours élevé, tandis que le capitaliste trouve
trop souvent dans leur baisse une source de faciles bénéfices.
On a cherché, messieurs, à émouvoir votre sensibilité,
en vous disant que le peuple généreux qui a déjà supporté tant de sacrifices ne
devaient pas encore subir le système odieux d’impôts qui l’a provoqué à la
révolution.
Mais faut-il vous rappeler, avec la section centrale,
que ces mêmes impôts que l’on signalait jadis ont disparu depuis la révolution
? La mouture, l’abattage, les loteries n’existent plus, et les impôts par
lesquels l’ancien gouvernement voulait les remplacer ont été rapportés ; on a
supprimé le serment dans les déclarations de succession ; les expertises mêmes
dans l’impôt personnel ont fait place aux anciennes évaluations des
contribuables ; plusieurs impôts ont été dégrevés en tout ou en partie des
centimes additionnels qui pesaient sur eux.
La révision de nos lois fiscales à opérer doit être
soumise au creuset d’un examen attentif, si l’on veut qu’elle atteigne le
résultat que l’on veut en obtenir. Ne semons donc pas des germes de fausses défiances
basés sur des faits qui n’existent plus. En faisant sa révolution, en sachant
conserver son indépendance et sa nationalité, le peuple belge pouvait
s’attendre à être appelé à faire des sacrifices pour consolider le nouvel ordre
de choses, et cependant on a pu diminuer pendant deux ans la somme d’impôts
qu’il payait au temps de sa réunion avec la Hollande.
Ce n’est pas cependant que je partage, d’une manière
absolue, l’opinion qu’a énoncée hier un honorable membre, en disant que le
gouvernement le plus chéri du peuple est celui qui réclame le moins d’impôts du
contribuable. A ce titre, un Russe, qui ne supporte que 12 fr. de charges
publiques par tête serait plus heureux qu’un Anglais qui en paie 70 ou 6 fois
davantage que le premier ; qu’un Anglais qui, en outre, paie pour la dîme, la
taxe des pauvres, les chemins et les dépenses
locales, une contribution qu’on évalue encore à plus de 10 francs par
individu, et qui, par conséquent, est déjà presque l’équivalent de l’ensemble
de tous les impôts qui pèsent sur un Russe.
Quelle différence cependant dans le bonheur physique
et moral de ceσ deux peuples ! L’Anglais de toutes les classes est
confortablement logé, nourri, vêtu ; il jouit de la liberté constitutionnelle
et de l’exacte dispensation de la loi. Son capital s’est considérablement
accru, et on suppose que son revenu annuel est, après le paiement de l’impôt,
plus grand aujourd’hui qu’à aucune autre époque. C’est aux progrès de
l’industrie, du commerce, de l’agriculture, de l’instruction publique, c’est à
la construction de travaux d’utilité générale et à un travail incessant et
utilement appliqué, qu’il doit ce résultat ; car, la fortune publique n’étant
qu’une portion de celle des particuliers, plus grande sera cette dernière et
plus grande pourra être la part qu’on pourra en prélever pour les besoins de
l’Etat.
Vous me dispenserez, messieurs, de placer la condition
des Russes en regard de celle du peuple anglais ; mais je dirai que participant
à une partie des avantages dont jouit cette dernière nation, nous ne paierons
proportionnellement que du quart au tiers des impôts qui pèsent sur eux, si
vous accordez le budget qui vous est soumis ; il s’élève à 88 millions de
francs, tant pour la Belgique que pour les territoires à céder, et la part de
chaque individu n’en sera donc que de 22 francs.
Messieurs, un honorable membre a voulu affaiblir
l’influence que devait exercer sur la chambre l’opinion des sections et de la
section centrale, en disant qu’habituellement ces sections ne se trouvaient pas
complètes.
Mais je ferai observer que la chambre se compose de
112 membres et que presque toujours il n’y en a que la moitié dans cette
enceinte. Il en est de même pour les sections.
Eh bien ! je vois que dans ces sections il s’est
présenté, 40 membres, pour examiner le budget des voies et moyens ; et cela me
semble suffire. Le travail des sections est d’une haute utilité messieurs.
Beaucoup de représentants qui ne prennent point part à la discussion publique y
viennent apporter le tribut de leurs lumières, et j’y ai trouvé souvent des
renseignements qu’on n’apprécie pas assez dans les discussions générales.
Comme rapporteur, j’avais demandé hier qu’on voulût
m’accorder la parole en dernier lieu, pour, en ma qualité de rapporteur,
résumer la discussion. Je basais cette demande sur le précédent de la chambre
dans la session dernière, précédent conforme aux usages parlementaires ; car,
si on laisse la parole à d’autres orateurs après le rapporteur, il est à
craindre qu’on ne perde de vue le point principal de la question et que
l’attention soit appelée sur des points accidentels. C’est ainsi que dans cette
discussion, où l’on ne devait s’occuper que des voies et moyens, on vous a
parlé de l’état du trésor. Je regrette qu’un ancien ministre ait lui-même donné
lieu à cette digression. De là, ont surgi des plaintes répétées sur notre
position, plaintes qui me semblent exagérées et dont nous ne sommes pas à même
de connaître en si peu de temps le bien ou le mal fondé, puisqu’il s’agit de
chiffres à vérifier.
M. Meeus a prétendu voir un déficit de 8 millions et
quelques cent mille florins, en supposant que la moitié de la contribution
foncière, que le gouvernement demande par anticipation, rentrerait bientôt dans
les caisses de l’Etat. Je crois, messieurs, qu’il en rentrera plus de la moitié
; car, beaucoup de propriétaires paieront toute l’année, bien que la loi donne
la facilité de ne payer que par douzièmes. C’est ce qui se pratique
ordinairement et surtout dans les villes. Ainsi, c’est un motif de plus pour
que vous rejetiez les crédits provisoires et que vous admettiez un budget
définitif.
On a voulu séparer la chambre en opinions politiques.
Messieurs, ici il n’y a pas d’opinions politiques ; il ne s’agit que du
maintien du crédit public qui intéresse tous les citoyens, parce que s’il
n’existait pas, nos charges en seraient d’autant plus grandes et nous devrions
retomber, comme l’année dernière, dans les emprunts forcés, voie qui est la
plus désastreuse parce qu’on prend l’argent là où il n’est pas.
Tous, nous tenons notre mandat
du pays, nous sommes les représentants de la volonté nationale dont la chambre
est la véritable expression.
Mais il y a encore un autre inconvénient si vous
admettez des crédits provisoires, car vous n’ignorez pas que vous êtes
surchargés de lois de principes à confectionner. Vous avez la loi provinciale,
la loi communale, le budget des dépenses et une masse d’autres. Une partie de
notre législation financière doit être changée. De plus, vous voudrez sans
doute adopter le mode qui se pratique dans un pays voisin, et vous mettre à
même, dès le mois d’avril ou de juin, de discuter le budget de 1834, afin de ne
pas précipiter vos délibérations et de vous entourer de toutes les lumières
nécessaires.
Je crois donc devoir persister dans les conclusions de
la section centrale.
M. Donny.
- Il est réellement surprenant, messieurs, d’entendre deux honorables orateurs
qui se sont succédé dans la discussion dire, l’un, qu’il y a
inconstitutionnalité à voter la loi des voies et moyens telle qu’elle nous est
présentée, ou, pour me servir entièrement des paroles de l’honorable membre,
que le mode que suit le gouvernement est inconstitutionnel ; et un instant
après, l’autre, M. le rapporteur de la section centrale, qu’il n’y a pas là
inconstitutionnalité, qu’il y a au contraire inconstitutionnalité dans la
proposition que l’on fait contre le budget des voies et moyens qui nous est
soumis. Nous nous trouvons de cette manière dans une voie dont nous pourrons
difficilement sortir avec honneur, car de quelque côté que nous nous tournions,
nous marchons toujours contrairement à la constitution. Quant à moi, je pense,
messieurs, que l’inconstitutionnalité que vous a signalée M. le rapporteur de
la section centrale n’existe pas. Je ne vois pas en effet dans l’article 111 de
notre loi fondamentale que vous ne puissiez point prendre de mesures
provisoires dont l’effet se restreigne à un laps de temps moins long qu’une
année. J’y vois que les impôts au profit de l’Etat sont votés annuellement, ce
qui pour moi signifie qu’à chaque année il nous faudra voter les impôts de
l’Etat. Jusqu’ici il n’y a pas une seule expression qui limite la durée de
l’impôt. Voici la fin du même article : « Les lois qui l’établissent n’ont
de force que pour un an. » Eh bien ! qu’en résulte-t-il ? C’est que cette
disposition limite la durée que peut avoir une loi d’impôt, mais ne défend
nullement de voter une loi d’impôt qui n’atteigne pas cette limite extrême.
Ainsi l’article 111 de la constitution me semble applicable à cette question,
d’autant plus qu’on ne propose pas à la chambre d’adopter définitivement pour
un temps donné, moindre qu’une année, une loi d’impôt, mais de prendre une
mesure provisoire pour mettre le gouvernement à même de marcher jusque-là.
Dans une séance précédente, l’honorable rapporteur de
la section centrale a fait un raisonnement basé sur des calculs qu’il m’a été
impossible de suivre dans cette séance. Ce matin j’ai vu ce raisonnement dans
le supplément du Moniteur qui nous a
été distribué, et tout à l’heure encore je viens de l’entendre reproduire par
M. Mary, et il s’y est appuyé avec tant de complaisance que je crois de mon
devoir de dire quelques mots pour faire voir combien ce raisonnement est peu
fondé.
L’honorable M. d’Elhoungne venait de nous annoncer
qu’il proposait un amendement tendant à assurer au gouvernement des douzièmes
provisoires. Voici comment M. le rapporteur combattit cette motion :
« Et que vous propose-t-il donc qui doive
paraître une œuvre si supérieure ? D’accorder des crédits provisoires qu’il
voudrait borner aux premiers trimestres de 1833 et qui seraient d’après lui un
quart de ceux accordés pour toute l’année 1832 ? Mais a-t-il bien examiné toute
la portée de cette proposition, a-t-il réfléchi que le quart de ces crédits
s’élèverait à 50 millions de francs, tandis que le gouvernement ne vous en
demande pas la moitié, ne vous demande que de 21 à 22 millions pour ce même
espace de temps ? Et avec quelles ressources vous propose-t-il de faire faire
ces dépenses ? Avec les impôts actuels qui, ne s’élevant par an qu’à 75
millions et demi ne vous donnent par an 19 millions pour un trimestre et vous
offriront un déficit considérable. »
C’est là la phrase telle que l’honorable rapporteur
l’a présentée, et non pas telle que le Moniteur
l’a reproduite avec son exactitude ordinaire. Messieurs, en lisant cette phrase
on ne peut pas s’empêcher de penser qu’il règne de la confusion dans les idées
de son auteur ; car dans le projet de loi du gouvernement il s’agissait de
crédits ordinaires, et la proposition de M. d’Elhoungne tendait à remplacer ces
crédits ordinaires. Eh bien ! M. le rapporteur ne parle pas seulement des
crédits ordinaires de 1832, mais de la somme totale de 200 millions ;
c’est-à-dire des crédits ordinaires et extraordinaires à la fois. D’où résulte
une confusion complète sur ce point.
L’argument qu’il tire ne rencontrera donc aucunement
les propositions de M. d’Elhoungne qui ne s’appliquent qu’aux crédits
ordinaires ; cet argument est à côté de la question et par conséquent ne prouve
rien.
L’honorable rapporteur nous a dit et en cela il n’a
fait que répéter ce qu’avait objecté dans cette séance un autre membre : Vous
avez encore tant de lois à faire ! Vous avez la 1oi des distilleries, etc. (car
je renonce à passer en revue toutes celles qu’il nous a citées). Eh bien,
a-t-il ajouté, si vous voulez procéder de la manière que vous proposez, vous
n’aurez pas le temps de discuter ces lois et tout restera dans la même
situation. Il vaut donc bien mieux nous livrer à l’examen de ces lois si
intéressantes et ne pas nous occuper si longtemps du budget des voies et
moyens. L’honorable membre oublie-t-il donc que nous sommes ici pour remplir
nos devoirs exactement et scrupuleusement, quelles que puissent en être les
conséquences ; que si la loi des voies et moyens actuellement en discussion est
de nature à prolonger nos débats, il nous est impossible, à moins de manquer
à notre devoir, de passer à autre chose
?
M. Mary a résumé à sa manière l’état de la discussion.
Qu’il me soit permis de la résumer à la mienne, je serai très bref. Voici
comment je la conçois :
Le gouvernement vient nous demander des ressources
pour toute l’année 1833. On lui répond : il est de notre devoir de vous
accorder ce dont vous aurez besoin, mais
nous n’allons pas vous accorder des ressources tout d’un coup ; nous allons
diviser l’opération, et vous donner immédiatement de quoi marcher régulièrement
pendant les 6 mois. Durant ces mois-là, nous allons nous éclairer, et quand
nous aurons recueilli toutes les lumières nécessaires, nous fournirons alors
définitivement au reste de vos besoins. Le gouvernement nous réplique : Cette
proposition ne me convient pas ; vous devez voter immédiatement les ressources
que je vous demande, l’impôt que je vous engage à mettre sur la nation. Que
vous soyez éclairés ou non, cela ne m’importe guère ; ce n’est pas mon affaire,
c’est la vôtre. Voilà les deux côtés de la discussion. Ce sera à la chambre à
voir s’il vaut mieux se décider dans le sens du gouvernement ou dans celui des
orateurs qui lui sont opposés.
Quoique nous n’en soyons encore qu’à la discussion de
l’ensemble de la loi, plusieurs membres l’ont déjà examinée dans ses détails
comme s’il avait été question de traiter les articles.
Je dirai à mon tour quelques mots dans ce sens, afin
de n’avoir pas à recommencer plus tard. Je partirai de l’hypothèse qu’il soit
démontré qu’une loi des voies et moyens de 83 millions soit nécessaire pour
faire face aux besoins de 1833, et que par conséquent une augmentation de
ressources de 7 millions soit aussi une nécessité. Ce point admis, je dis que
le gouvernement avait à choisir, pour se procurer ces millions, entre deux
systèmes, à moins qu’il ne voulût créer un impôt tout à
fait nouveau. Voici ces deux systèmes : Il pouvait ou répartir les 7 millions
au marc le franc, sur chacun des impôts existants ; ou bien il pouvait faire
peser sur un seul impôt ou sur une seule branche d’impôt tout le poids de
l’augmentation de ces 7 millions. La première marche me semble préférable ;
elle eût été moins sensible pour les contribuables, parce qu’il aurait suffi
d’ajouter à chaque impôt 10 p. c. ou environ ; elle eût été aussi plus en
harmonie avec notre situation financière, qui est transitoire, en ce qu’elle
laisse subsister entre les impôts actuels la même proportion ; enfin, elle
était plus simple et plus naturelle. Le gouvernement en a jugé autrement ; il a
cru préférable de faire peser sur quelques impôts le poids de 7 millions, et
dans le choix de ces impôts il a eu la main bien malheureuse. Il a précisément
choisi l’impôt foncier, dont la répartition, comme on l’a dit, est détestable ;
il a choisi la contribution personnelle, contre laquelle s’étaient élevées tant
de plaintes ; enfin, il a choisi les patentes, qu’on vous a démontré encore
aujourd’hui n’être pas susceptibles d’augmentation majeure ; quant aux autres
branches, il n’y a pas touché. Sous ce rapport, quand bien même la nécessité
d’une aggravation me serait démontrée, je voterais encore contre le projet de
loi, tel qu’il nous est proposé.
Je me rallierai, du reste, à l’amendement de
l’honorable M. d’Elhoungne, avec les modifications qui seront adoptées par la
chambre.
M. Fortamps.
- Messieurs, un honorable membre dans la séance d’hier nous a signalé des faits
d’une fraude bien préjudiciable à notre industrie et qui se fait dans sa
province.
Désirant de voir cesser des introductions qui se
multiplient journellement sur presque toutes nos frontières, permettez,
messieurs, que je vous entretienne un instant de quelques faits qui sont à ma
connaissance et dont je puis donner la preuve à cette assemblée et au
ministère. Le service des douanes est tellement mal fait, si peu soigneusement
administré, que les introductions des marchandises, prohibées même, se font au
moyen de la prime la plus modique.
Par exemple, si on achète en France des draps dont
l’entrée est interdite en Belgique, parce que nos fabriques suffisent et
produisent bien au-delà de nos besoins, des maisons très solides de
Valenciennes, de Lille et autres, en assurent l’introduction au cœur du royaume
moyennant une prime de 8 p. c., en faisant jouir l’acquéreur de la prime
d’exportation accordée par le gouvernement français et qui s’élève de 12 à 14
p. c., selon la valeur de l’article ou de son poids.
Cette faveur d’un gouvernement ami et protecteur de
l’industrie fait que la marchandise française revient ici de 4 à 6 pour cent
meilleur marché qu’en France.
Les autres tissus non prohibés, qui ne sont même pas
soumis à un droit très élevé, s’introduisent avec plus d’avantages par la voie
indirecte, et cette introduction s’opère en très peu de jours, sans rompre
corde, en ballots de 15 à 20 kilogrammes.
La Prusse, dont le système des douanes et dont la
frontière est mieux observée que la nôtre, n’admet que peu de nos produits ;
cependant elle déverse avec presqu’autant de facilité ses soieries et ses
tissus de coton dans nos provinces.
Les toiles de Westphalie, de Saxe et de Bavière, nous
parviennent au moyen d’un droit trop modique et trop préjudiciable à notre industrie.
J’aurai occasion de revenir sur cet objet lorsque bientôt nous aurons à
discuter le nouveau tarif des douanes, qu’on nous promet et que je désire
ardemment de voir présenté à notre examen.
Entre-temps, je désire que M.
le ministre, qui nous donne tant d’assurances de son appui et de sa sollicitude
pour la prospérité du royaume, je désire, dis-je, qu’il ordonne que la ligne
des douanes soit mieux observée, que les douaniers ne restent pas inactifs dans
les communes, et que surtout pendant les longues nuits d’hiver ils redoublent
d’activité et du surveillance pour arrêter ces introductions frauduleuses.
Il en résultera pour le gouvernement un avantage par
le paiement des droits établis, et pour l’industrie la faveur de pouvoir
concourir avec l’étranger pour la vente de nos produits.
Au reste, je partage avec la majorité des honorables
orateurs qui ont si puissamment développé leurs moyens, l’augmentation de la
contribution foncière établie sur des bases équitables, si cette surcharge est
justifiée par le besoin ; mais quant à l’augmentation de l’impôt personnel,
déjà trop onéreux, je ne puis y donner mon assentiment.
Je me prêterai aussi à une augmentation de droit de
patente sur certaines classes, si elle est établie sur des bases équitables.
M. d’Elhoungne. - Je demande la parole pour une motion d’ordre.
Messieurs, cette discussion s’est étendue sur tant d’objets, et elle a été
traitée avec tant de développements qu’il me semble temps d’en venir à une
conclusion. L’assemblée doit être maintenant éclairée sur tous les points et
nous sommes à même d’aborder avec avantage la discussion des articles. Je crois
que j’exprimerai le vœu de l’assemblée en demandant la clôture sur l’ensemble.
(Oui ! oui !)
M. le président.
- Je ferai observer à l’honorable M. d’Elhoungne qu’il n’y a plus qu’un seul
membre inscrit, c’est M. Pirmez.
M. Pirmez.
- Je parlerai sur l’article premier, si l’on veut. (Non ! non ! Parlez immédiatement !)
Messieurs, on a beaucoup reproché aux différents
ministres, qui se sont succédé depuis la révolution de n’avoir pas proposé un
autre système d’impôt ; je dois dire là-dessus toute ma pensée, je crois que
les ministres ne pouvaient faire autrement.
Ce n’est pas dans les commotions publiques, lorsque
les gouvernements sont sans force, qu’on peut tenter de pareils changements.
Les impôts établis depuis longtemps, quelque absurdes et vexatoires qu’ils
aient paru dans le commencement, sont toujours regardés avec moins
d’animadversion que les nouveaux impôts qu’on leur substitue.
C’est surtout dans leur origine que les impôts sont
odieux. Comme l’impôt ne peut se présenter sous aucun jour favorable et qu’il
n’a aucun beau côté, lorsque par le relâchement de tous les lieus sociaux les
moyens de coercition sont impossibles, il faut se garder d’en introduire de
nouveaux. Ce n’est que ceux avec lesquels le contribuable est déjà familiarisé,
qu’il peut supporter.
Ne croyez pas, messieurs, que le système que vous
établirez trouvera beaucoup d’apologistes. Quelque différent qu’il soit du
système actuel, il sera violemment attaqué, et si vous n’usez d’une extrême
prudence, il pourrait bien arriver qu’on trouverait votre système pire que
celui contre lequel il s’élève dans cette chambre tant de réclamations.
Et remarquez bien qu’il n’existe rien de plus
attaquable qu’un impôt. Dans tous les temps, dans tous les pays du monde, les
impôts les plus différents entre eux, par leur assiette, leur nature et leur
quotité, ont été attaqués avec un succès presque égal, parce qu’un impôt est
toujours un mal, parce que frappant une multitude de citoyens, il est
généralement senti, et que c’est par conséquent un sûr moyen de popularité
(chose partout si recherchée) que de vouloir les abolir.
Ceux qui montrent les mauvais côtés des impôts ne font
donc rien de difficile et que chacun ne puisse faire comme eux. La difficulté
est de substituer au système qu’on veut détruire un système meilleur, et,
messieurs, il faut le dire, vous n’avez jusqu’à présent sur cette matière
aucune idée. Tout ce qui a été dit sur un nouveau mode d’impositions ne vous
laisse que du vague dans l’esprit, et si par hasard vous entendez une
proposition qu’on puisse saisir, peu de temps suffit ordinairement pour vous
montrer qu’elle est inadmissible ; telle est celle par exemple d’imposer les
créances hypothécaires ; quelques réflexions l’ont fait tomber.
Si une proposition faite d’une manière si générale est
renversée au premier choc, quelles difficultés n’éprouverez-vous pas lorsque
vous entrerez dans tous les détails des lois ! Vous n’avez pas encore trouvé de matière imposable ; tout ce qui
nous a été présenté nous a paru mauvais, et si vous l’aviez trouvée, si vous
aviez par exemple décidé qu’il faut imposer le café, le sucre, le thé ou tout
autre denrée, vous vous trouveriez alors en présence de tout le détail des
lois, comme le mode de perception, le service des employés qui vous offrira des
difficultés que vous ne vaincrez pas en peu de temps. Car, ne vous le
dissimulez pas, tout est aride, rebutant et critiquable en cette matière, et
c’est surtout dans cette occasion que vous expérimenterez qu’empêcher est aisé
et que faire est difficile.
Comme je suis convaincu qu’il est impossible de
changer le système financier en quelques mois, je voterai pour les conclusions
de la commission centrale.
- La clôture de la discussion générale est mise aux
voix et adoptée.
Discussion des articles
- La discussion est ouverte sur les articles.
M. d’Elhoungne. - Je demande la parole pour une motion d’ordre. Messieurs, l’article
premier, tel qu’il est proposé par la section centrale, a deux objets bien
distincts Par le premier paragraphe on maintient purement et simplement les
impôts directs et indirects tels qu’ils existent actuellement ; par le
deuxième, on augmente l’impôt foncier, personnel et des patentes. Je demande
que la discussion et le vote sur ces deux paragraphes aient lieu séparément ;
la discussion en sera plus aisée, et on évitera l’inconvénient de passer tantôt
d’un objet, tantôt d’un autre, ce qui ne peut se faire sans confusion.
M. Mary. - J’avais
moi-même proposé cette marche.
M. H. de Brouckere. - Il me semble qu’il vaudrait mieux faire de ces
deux paragraphes des articles séparés.
M. d’Elhoungne. - C’est ce que je demande.
M. le président. - Il y a 4 paragraphes dans l’article premier.
M. H. de Brouckere. - Dans l’article du projet ministériel, mais non pas
dans celui de la section centrale.
M. le président. - Il faut savoir si M. le ministre des finances s’y
rallie.
M. le ministre des finances (M. Duvivier). - Je me suis rallié au projet tel que l’a proposé la
section centrale.
M. le président.
- Le paragraphe premier de l’article est ainsi conçu : « Les impôts directs
et indirects existants au 31 décembre 1832, en principal et additionnel, tant
pour les fonds et non-valeurs qu’au profit de l’Etat, des provinces et des
communes, continueront à être recouvrés pendant l’année 1833, d’après les lois
qui en règlent l’assiette et la perception, sauf les modifications ci-après, et
celles qui pourront être apportées ultérieurement. »
M. H. de Brouckere. - Je demande la suppression des derniers mots :
« et celles qui pourront être apportées ultérieurement. » Ces mots
sont parfaitement inutiles ; il est bien évident, en effet, que si plus tard
nous rendons une loi qui déroge à celle-ci, celle-ci en sera modifiée. Or, nous
avons toujours le droit, que personne ne peut nous enlever, de faire des lois
qui abrogent ou révoquent des lois précédentes. La phrase est donc inutile et
doit être supprimée.
M. Mary. - Je dois m’opposer à cette suppression ; les
derniers mots rendent l’article plus clair ; si on les faisait disparaître, il
semblerait en résulter que l’assiette et la perception de l’impôt ne pourraient
être changées pendant l’année 1833.
M. d’Elhoungne. - Je considère la question soulevée par M. de Brouckere comme
prématurée. J’ai déposé sur le bureau un amendement qui, s’il est adopté, fera
disparaître tout cet alinéa ; il serait dès lors inutile de s’occuper de cette
suppression.
M. le président.
- M. d’Elhoungne a déposé un amendement qui absorbe effectivement tout
l’article premier. Voici cet amendement : « Jusqu’à la promulgation de la
loi des voies et moyens, pour l’exercice 1833, toutes les contributions
directes et indirectes seront perçues pendant l’année prochaine, d’après la loi
du 26 décembre dernier. »
Plusieurs voix. - Relisez
l’amendement.
M. d’Elhoungne. - Cet amendement se trouve textuellement dans le Moniteur de ce matin. Messieurs, l’objet en discussion se résume en
deux points capitaux. Il s’agit d’abord de savoir s’il faut, sans aucun
renseignement, sans avoir un seul document sous les yeux, pour exercer un
contrôle quelconque sur le meilleur mode de pourvoir aux besoins du trésor ;
s’il faut, dis-je, proroger pour toute l’année prochaine le recouvrement des
impôts existants ; ou si, à l’exemple de ce qui se fait dans tous les
gouvernements constitutionnels, il ne faut pas se borner à fournir au
gouvernement les moyens nécessaires pour gagner le temps où, le budget des
dépenses étant réglé, nous pourrons voter sur le budget des voies et moyens.
Poser la question de cette manière, c’est, me
semble-t-il, l’avoir résolue, De quoi s’agit-t-il, en effet aujourd’hui ? La
marche du gouvernement ne doit pas être arrêtée ; pour qu’elle ne soit pas
arrêtée, il a besoin d’argent ; mais quand il s’agit de puiser dans la bourse
des contribuables, il faut le faire avec réserve et circonspection, et nous
devons, quand nous donnons au gouvernement les moyens de marcher, exercer un
contrôle scrupuleux sur ces moyens, et nous sommes aujourd’hui dans
l’impossibilité de le faire.
Dans le moment actuel, je n’ai pas besoin d’insister
sur cette vérité ; aucun de vous ne peut dire qu’il ait les lumières
suffisantes pour s’être formé une opinion sur la meilleure manière de pourvoir
aux besoins de l’année 1833. Avez-vous vu en effet les comptes des exercices
antérieurs ? Avez-vous connaissance de toutes les demandes que le gouvernement
sera obligé de faire ?
Non, messieurs, les budgets essentiels vous manquent ;
les comptes ne vous ont pas été communiqués ; à peine avez-vous eu quelques
jours pour examiner le projet en discussion. Ce n’est pas sur des données aussi
superficielles que vous pourriez vous prononcer.
Mais, dit-on, il faut bien que le gouvernement marche
; sans doute, et personne ici ne peut vouloir l’en empêcher. Il faut donc
fournir à ses besoins, c’est aussi ce que je propose de faire momentanément et
jusqu’à ce que nous ayons pu voter en connaissance de cause un budget des
dépenses, et ensuite celui des voies et moyens qui en est le corollaire
indispensable, le complément nécessaire. C’est dans ce sens que mon amendement
a été conçu.
Que peut faire de mieux la chambre ? C’est de
maintenir les choses dans l’état actuel. Pourquoi cela ? Parce que, à défaut
d’éléments sur 1a matière, le plus prudent est de se servir de ceux qui
existent et dont le résultat est connu ; jusqu’à ce qu’on ait fourni les
comptes, et tant que le règlement des dépenses n’a pas été fait, vous ne pouvez
avoir de données positives sur les besoins du trésor. Vous ne pourriez donc
vous décider que sur des préjugés, et le résultat de votre décision pourrait
être fatal au pays.
S’il s’agissait de nous taxer nous-mêmes, de régler ce
que chacun de nous peut et doit faire pour l’Etat, je conçois que sans examen, sans
discussion, sans éclaircissements, nous émissions un vote tout de confiance
parce que chacun est maître de disposer de sa propre fortune. Mais il s’agit de
disposer de celle de 4 millions d’hommes, dont la majeure partie ne jouit pas
même de l’aisance ; il faut donc ne régler le budget de l’Etat qu’après un
examen réfléchi : dès lors nous n’avons rien de mieux à faire qu’à assurer le
service public jusqu’au vote du budget, c’est la marche la plus naturelle, la
seule que la raison indique.
Il est vrai que l’honorable rapporteur de la
commission a puisé dans l’article 111 de la constitution une fin de
non-recevoir contre le vote de l’impôt pour un temps moindre d’une année.
Voyons ce que dit cet article : « Les impôts au profit de l’Etat sont
votés annuellement.
« Les lois qui les établissent n’ont de force que pour
un an, si elles ne sont renouvelées. » Que résulte-t-il de cet article ?
Que vous ne pouvez voter l’impôt pour un terme plus long d’un an. C’est une
limite que la constitution a posée à votre pouvoir, et pourquoi l’a-t-elle fait
? C’est pour empêcher que par un entraînement quelconque vous ne greviez la
nation d’un fardeau qu’elle ne pourrait supporter. C’est une restriction
apportée à un excès de zèle qui peut égarer une assemblée délibérante comme un
simple individu. Mais est-ce contrevenir à cette disposition que de voter
l’impôt pour un temps moindre ? Non sans doute. C’est vous y conformer au
contraire, car vous ne vous exposez pas à l’abus que l’article 111 a eu pour
objet de prévenir. Ainsi disparaît l’objection de M. le rapporteur de la
section centrale. Ce qui prouve que cette objection est basée sur une erreur
manifeste, c’est que pour lui donner quelque force, M. le rapporteur est obligé
de lire l’article autrement qu’il n’est écrit.
II vous dit en effet que d’après cet article vous
n’avez le droit de voter l’impôt que pour un an, que vous devez le voter pour
la durée d’un an ; voilà comment l’honorable rapporteur lit la disposition.
Est-ce là, je le demande, l’article 111 ?
Il est une considération puissante à faire valoir,
pour restreindre le maintien des impôts existants à une durée de temps moindre
d’un an. C’est que le gouvernement lui-même a annoncé plusieurs changements à
introduire au système actuel. Pouvons-nous priver les contribuables de ces
améliorations pour l’année prochaine, par le maintien définitif des
contributions directes, dont les rôles une fois formés ne peuvent pas subir die
modifications ?
Devons-nous, d’un autre côté, priver le gouvernement
de faire de suite les recouvrements ? Si vous adoptez le projet de la section
centrale, les contributions directes ne seront pas en recouvrement avant trois
mois. La raison en est simple. C’est qu’avant que les rôles pour la
contribution personnelle, pour les patentes, pour la contribution foncière, ne
puissent être formés, il s’écoulera plus de trois mois. Je vous demande, quand
tout le monde sent le besoin de pourvoir à la pénurie du trésor, s’il faut
retarder indéfiniment ou même pour trois mois l’adoption des moyens qui doivent
la faire cesser ? Ne résulte-t-il pas de
là la nécessité d’autoriser la perception sur les rôles de 1832, par le système
de la section centrale ? La gêne du gouvernement pourrait se prolonger pendant
trois mois, inconvénient bien autrement grave que de percevoir l’impôt sur les
rôles antérieurs.
Il est d’autres considérations
encore qui ne vous auront pas échappé. Remarquez d’abord que mon amendement ne
suppose pas nécessairement la perception des douzièmes provisoires. La partie
de ma proposition relative à la perception des douzièmes ne se lie pas
tellement à mon premier amendement, que si les suivants étaient rejetés, la
perception des douzièmes provisoires devînt nécessaire. Mon premier amendement
suppose la perception de l’impôt pour la durée de temps qui s’écoulera jusqu’au
vote du budget. Du moment où l’assemblée n’adopterait pas les articles suivants
de ma proposition, on pourrait par un paragraphe additionnel ordonner la
formation du rôle pour 1833.
Du reste, en adoptant ma proposition, vous ne faites
que suivre un usage consacré en France, et dont nos états-généraux ont donné
l’exemple en 1817. J’aurais présenté mon amendement avec moins de confiance si
c’était mon propre ouvrage. Mais de toutes les dispositions qu’il renferme, il
n’en est pas une qui n’ait été puisée dans les lois votées en France sous la
branche aînée des Bourbons et sous le régime actuel, et même chez nous. De
sorte qu’il n’y a pas eu, comme l’a insinué l’honorable rapporteur de la
section centrale, qui veut toujours deviner d’inspiration une pensée que je ne
lui ai pas fait connaître, il n’y a pas eu, dis-je, d’amour-propre de ma part,
puisque je n’ai eu d’autre mérite que de compulser les lois françaises et celle
qui fut rendue en 1817 par nos états-généraux.
M. Verdussen.
- Avant tout je remercie M. d’Elhoungne d’avoir résumé toute la portée de son
amendement en peu de mots. En effet, toute la question se réduit à ceci :
Accordera-t-on ou n’accordera-t-on pas au gouvernement l’autorisation d’une
perception partielle et provisoire ? Je partage l’opinion de l’honorable
préopinant en ce qui concerne les besoins du trésor. La pénurie de la caisse a
été démontrée, trop bien démontrée pour qu’elle ne soit pas sentie par tout le
monde. Mais je suis persuadé que la première partie de l’amendement de M.
d’Elhoungne renverse toute la loi présentée par le gouvernement et telle
qu’elle a été amendée par la section centrale.
Toutefois, si je partage son opinion quant à la
pénurie du trésor, je diffère essentiellement d’avis avec lui quant aux moyens
que nous devons adopter pour parer à ce mal.
Dans la discussion qui se débat depuis quelques jours
dans cette assemblée, on a, selon moi, élevé des questions trop indiscrètement
pour ne pas devoir craindre que le remboursement des bons de l’emprunt, qui se
serait fait d’une manière plus lente et successive, ne soit exigé dès les
premiers jours de janvier. Si donc on a méconnu les besoins du trésor pour le
commencement de l’exercice, il s’agissait d’augmenter ces moyens, et la
proposition de M. d’Elhoungne tend à les diminuer ; car, messieurs, il est
certain que l’honorable préopinant a eu l’idée de prendre pour base les cotes
de 1832 qui, pour la contribution foncière, ne présentent qu’un total de 105,
tandis que le projet du gouvernement demandait 145 ; et, par conséquent, les
douzièmes à rentrer se ressentiront de cette diminution.
C’est
le mot « provisoire » qui principalement me fait rejeter la
proposition de M. d’Elhoungne. Ce mot tendrait à faire croire aux contribuables
qu’après la discussion définitive du budget, ils seront déchargés d’une partie du fardeau qui pèse ; et, de
cette manière, il est certain que vous n’aurez rien ou presque rien à
percevoir, car on préférera attendre la confection d’un budget définitif avant
de verser ses contributions au trésor.
Messieurs, s’il est vrai que la caisse de l’Etat se
trouve véritablement gênée pour le moment, voulez-vous augmenter encore cette
gêne ? C’est ce que vous feriez en adoptant la proposition que vient de vous
faire l’honorable préopinant. Comme j’ai déjà eu l’honneur de vous le dire, le
résultat, même en adoptant tout le budget, est encore fort douteux, et vous
allez ajouter à cette incertitude en fixant une rentrée inférieure. Je voterai
contre l’amendement et toutes ses conséquences.
M. d’Huart.
- (Le discours de l’honorable membre ne nous est pas parvenu.)
M. de Robiano de Borsbeek. - Messieurs, assez d’orateurs ont fait voir que le crédit
de l’Etat a pu recevoir un échec par notre discussion, surtout par celle
d’hier. Je désire contribuer, si cela m’est possible, à raffermir la confiance.
Le premier objet, l’objet de la plus haute importance pour les hommes qui
doivent régir l’Etat, n’est pas de perfectionner tous les systèmes, de faire
disparaître toutes les injustices, car cela est impossible, mais c’est de faire
marcher et de consolider l’Etat. Tout le monde y est intéressé et tous les bons
citoyens doivent s’empresser de faire les sacrifices qui sont en leur pouvoir,
quand ils les croient nécessaires. Or, il me semble que la somme de 83 millions
est absolument nécessaire au service de l’Etat. Comment s’imagine-t-on assurer
le crédit avec moins de fonds ? C’est ce que je ne puis pas concevoir. Il y a
pour nous, messieurs, une importance extrêmement grande à persuader à
l’étranger que nous voulons soutenir l’Etat. Nous voyons devant nous la
Hollande se résigner à des sacrifices vraiment extraordinaires. Nous avons
aussi fait des dépenses extraordinaires, nous avons fait des avances ; mais
elles nous ont été remboursées ou elles vont l’être. La Hollande au contraire a
fait de plus grandes dépenses encore sans qu’elles soient remboursables. Je
crains que la comparaison ne soit pas à l’avantage de la Belgique. L’opinion
est une grande chose, messieurs : il faut que l’opinion en France et en
Angleterre nous représente unis et d’accord pour faire tous les sacrifices dont
le gouvernement a besoin. Comment cette opinion s’est-elle formée à l’égard de
la Hollande ? C’est par ses soins, parce qu’elle ne dédaigne pas les moyens de
l’établir.
Il faut avant tout chercher à consolider l’Etat, à lui
fournir les ressources qui lui sont nécessaires.
Nous avons pour le budget des dépenses une très longue
discussion à essuyer, des objets très difficiles à examiner. Pour le système
financier que je regarde aussi comme défectueux, c’est bien autre chose encore.
Nous ne pouvons nous occuper de questions secondaires en présence de la crise
imminente qu’on nous fait envisager, quoique je ne pense pas qu’il y ait autant
de danger qu’on l’a voulu dire. Il y a peut-être eu quelques retards dans les
rentrées, on a pu éprouver quelque gêne mais tout cela peut être réparé, et il
eût été plus patriotique de jeter un voile sur cet objet. La publicité en
matière de finances est avantageuse, et je l’admets ; c’est la conséquence du
gouvernement représentatif sous lequel nous vivons. Mais est-ce à dire pour
cela qu’il faille à chaque instant découvrir les embarras du trésor, les
difficultés qui surviennent ? Si chaque fois qu’un membre des chambres aura
reconnu des embarras dans le trésor, il les signale, et qu’il faille lui donner
des explications, il sera impossible au gouvernement de marcher.
Je pense qu’au contraire avec un peu de prudence il
est facile de calmer les inquiétudes. Voici entre autres un exemple frappant.
Nous devons pour le 1er janvier ; mais les créanciers ne sont pas tous pressés
; il y a beaucoup de personnes qui attendraient volontiers, tandis que si vous
excitez des inquiétudes, tous arriveront à la fois pour être payés. C’est ainsi
que la banque d’Angleterre, à cause d’alarmes qu’on avait répandues, s’est vue
à la veille d’une banqueroute, parce que tous les porteurs de billets venaient
en réclamer le paiement. Messieurs, vers la fin de l’année les rentrées sont
moindres dans tous les Etats, et beaucoup de personnes se trouvent gênées. Les
ministres peuvent calculer approximativement ce que l’Etat a de revenus par
mois. Si en novembre et en décembre les rentrées restent en souffrance, les
fonds ne sont pas perdus pour cela, et plus tard le déficit sera comblé.
Dans
notre section on avait manifesté aussi des inquiétudes. MM. Davignon et Dumont,
qui se connaissent en finances, se sont rendus auprès du ministre chargé de les
administrer, et ils en ont rapporté des renseignements qui nous ont tous
rassurés. On a fait avec la maison Rothschild des arrangements dans l’intérêt
du trésor, pour lui donner des facilités. Comme en novembre et décembre le taux
de l’argent est plus élevé, M. Rothschild a consenti à ces délais. Eh bien, les
rentrées se feront, et il n’y a pas là de quoi jeter l’alarme. Il y a de
grandes inégalités, je veux le croire, dans l’impôt foncier ; mais je maintiens
que ces différences ne peuvent pas disparaître dans 2, 3, 4 et même 5 mois…
M. Gendebien,
interrompant l’orateur. - Il me semble que l’honorable membre rentre dans la
discussion générale.
M. le ministre des finances (M. Duvivier). - Je ferai observer que l’exposition faite tout à
l’heure par M. d’Elhoungne n’a pas été autre chose qu’une discussion générale.
Tous ceux qui parleront sur son amendement seront obligés de rentrer dans la
discussion générale, cela est évident. Ainsi on ne peut arrêter un orateur par
cette observation.
M. le
ministre se tournant vers M. de Robiano.
- Continuez, M. de Robiano.
M. Gendebien.
- C’est M. le ministre maintenant qui donne l’ordre à un orateur de continuer !
Cela est singulier.
M. de Robiano.
- Messieurs, si vous n’accordez pas les crédits qu’on vous demande, vous
jetterez l’Etat dans le plus grand embarras, tandis qu’il n’y a aucun
inconvénient à les accorder ; car tous les contribuables justes, et il y en a
beaucoup en Belgique, se résigneront à supporter encore pendant une année
l’inégalité de l’impôt ; ils considéreront qu’on ne leur a rien demandé après
un changement complet de régime.
On a beaucoup parlé de la négligence du gouvernement,
qui ne nous a pas présenté un nouveau système. Quant à moi, il me semble qu’il
s’est passé des choses si graves en 1832, qu’il n’a pu faire tout ce qui était
à faire pour un bon système financier.
On a dit que le 10ème des habitants que nous devions
perdre devait se comparer au 10ème des impôts, et par conséquent le calcul du
ministère est incomplet. Je ne puis pas laisser passer cette assertion, et je
répondrai qu’il est impossible de comparer les revenus du Limbourg et du
Luxembourg à ceux des Flandres. Ainsi cette remarque n’est nullement exacte. Je
bornerai là mes observations ; il me semble que ce que j’ai dit suffira pour
faire sentir la nécessité de donner de la force au gouvernement.
Plusieurs voix. - A demain
! à demain !
M. Mary. - Je
demande la parole. (Non ! non ! A demain
!)
- La discussion est continuée à demain à midi.
La séance est levée à quatre heures.
Noms de MM. les représentants absents sans congé à la
séance de ce jour : MM. Angillis, Brabant, Coppieters, de Foere, Deleeuw, de
Muelenaere, de Woelmont, Dumont, Jaminé, Pirson.