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Chambre des représentants de Belgique
Séance du samedi 2 juin
1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Projet de loi portant organisation du service
de la douane (notamment détermination du rayon de douane) (Mary,
Legrelle, Serruys, Jullien, Verdussen, Jullien, Destouvelles, Legrelle, Poschet, Osy,
Serruys, A. Rodenbach, Destouvelles, Coghen, Jullien, Serruys, Destouvelles, Verdussen, Duvivier, A. Rodenbach, Serruys, Mary, Destouvelles, Coghen, Poschet, Jullien, Ch. de Brouckere, Duvivier, Destouvelles, Legrelle, Jullien, Van Meenen, Coghen, Fallon, Destouvelles, Bourgeois, Lebeau, Fallon, Legrelle,
Raikem, d’Huart, Lebeau, Coghen, A.
Rodenbach, Destouvelles, Ch. de Brouckere, Coghen, Destouvelles, Duvivier, Ch. de Brouckere, Coghen)
3) Projet de loi portant organisation du système
monétaire (Lebeau, Seron, Ch. de Brouckere, Coghen)
(Moniteur belge n°156, du 4 juin 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est
ouverte à une heure.
M. Dellafaille fait l’appel nominal, et donne lecture du procès-verbal dont la
rédaction est adoptée.
PIECES ADRESSEES A LA CHAMBRE
M. Jacques présente l’analyse de plusieurs pétitions adressées à
la chambre. Ces pétitions sont renvoyées à la commission spéciale.
Il fait ensuite
lecture d’une lettre de M. le ministre de la guerre, sur un nouveau système
d’attelage qui a été proposé. Les expériences auxquelles le système a été
soumis, n’ont pas prouvé qu’il pût donner les résultats annoncés par son
auteur.
PROJET DE LOI PORTANT ORGANISATION DU SERVICE DE
LA DOUANE
Discussion des articles
Article additionnel
L’ordre du jour
est la continuation de la discussion du projet de loi concernant le nouveau
rayon de douanes.
M. Mary, rapporteur de la section centrale, est appelé à la tribune. -
Messieurs, la section centrale n’avait pas cru devoir vous proposer de sanction
pénale contre les capitaines de navires qui seront trouvés dans une partie du
rayon de surveillance sur mer, ayant des cargaisons de marchandises prohibées
ou soumises aux droits d’accises ; M. le ministre des finances en a jugé
autrement ; il vous a proposé un article supplémentaire pour combler cette
lacune, article qui, après la discussion qui s’est établie dans votre séance
d’hier, a été renvoyé à l’examen de votre section centrale. M. le ministre des
finances s’est réuni à nous, et c’est d’un commun accord, que nous avons
l’honneur de vous proposer une nouvelle rédaction de son amendement.
Quant au tonnage
des bâtiments soumis aux pénalités, et quant à la distance des côtes dans
laquelle pourraient agir les préposés de la douane, ce sont les dispositions
que vous avez déjà adoptées dans votre séance d’hier. On ne peut atteindre que
les bâtiments ou les embarcations du port de 30 tonneaux et au-dessous,
louvoyant, côtoyant ou à l’ancre dans la distance d’un quart de myriamètre de
la côte. La loi ne sévit contre eux que s’ils portent des marchandises
prohibées ou des objets soumis aux droits d’accises en Belgique.
Vous savez qu’il
n’y a de prohibition absolues à l’entrée que pour des objets de peu d
importance, mais, que vis-à-vis de la France nous prohibons les verreries, les
draps de casimir, les acides muriatique, nitrique et sulfurique, et les
eaux-de-vie de grains. La prohibition à la sortie n’atteint que les engrais,
les pailles, la marne, la pierre à chaux, le minerai de fer et les matières
premières pour la fabrication du papier et de la colle forte.
Les contraventions
seront punies de la confiscation tant du navire que de la partie de la
cargaison qui aura donné lieu à la saisie.
La section
centrale a dû cependant prévoir le cas où les objets passibles du droit
d’accises se trouvent à bord d’un bâtiment sortant d’un port de la Belgique.
Ils peuvent, en se munissant de documents de douanes, se mettre à l’abri de
toute difficulté. Cette disposition a nécessité un paragraphe additionnel,
En conséquence,
j’ai l’honneur de vous proposer, au nom de la section centrale, l’adoption de
l’article suivant qui formerait l’article 3 de la loi en discussion.
« Si des
bâtiments ou embarcations du port de trente tonneaux et au-dessous se trouvant
à l’ancre, côtoyant ou louvoyant dans la distance d’un quart de myriamètre de la
côte, sont chargés de marchandises prohibées ou d’objets soumis aux droits
d’accises en Belgique, ils seront saisis et la confiscation en sera prononcée
ainsi que de la partie de la cargaison qui aura donné lieu à la saisie.
« Si dans le
cas ci-dessus mentionné, des objets passibles de droits d’accises, se trouvent
à bord d’un bâtiment sortant d’un port de la Belgique, ils devront être
couverts d’expéditions ou documents requis pour justifier qu’il a été satisfait
aux lois du pays en matière d’accises ; à défaut de cette justification, la
confiscation du bâtiment et desdits objets sera également prononcée. »
M. le président. - Quelqu’un demande-t-il la parole ?
M. Jullien. - Je prierai
M. le président de vouloir bien donner une seconde lecture de l’article
proposé.
M. le président fait cette lecture.
M. Legrelle. - Si je me le rappelle bien, il n’était d’abord
question dans la loi que de navires sortant de nos ports et non de navires
venant de l’étranger ; je ne sais quelles sont les intentions de la section
centrale, en frappant les autres navires. Je voudrais qu’elle s’expliquât.
M. Serruys. - Autant je suis ennemi de toute mesure
préjudiciable au commerce, autant je crois qu’on doit sévir contre la fraude.
Pour moi, j’ai la conviction intime que toute petite embarcation qui se met à
l’ancre à la distance d’un quart de myriamètre a de mauvaises intentions et se
dispose à faire la fraude ; je suis persuadé que tout petit navire à l’ancre,
ou qui louvoie sans y être contraint par la nécessité à une demi-lieue de la
côte, et qui porte des marchandises prohibées et soumises aux droits d’accises,
est un fraudeur.
M. Jullien. - Mais vous voulez détruire la petite navigation, le
cabotage.
M. Serruys.
- Le cabotage ne se fait pas avec de si petits navires ; tout bâtiment, de 30
tonneaux et au-dessous, qui vient se mettre à l’ancre près de la côte, est
évidemment suspect ; pourquoi ne va-t-il pas plus loin ? Quand ce navire est
chargé de marchandises prohibées, ou soumises au droit d’accise, je ne doute
pas que ce ne soit un fraudeur ; ce navire doit être saisi.
M. Verdussen. - Je crois que les conclusions de la commission
centrale sont de nature à être méditées. Dans le peu de mots qui expriment les
dispositions de l’article 3 qui nous est présenté, je trouve tant de choses à
combattre, qu’il faudrait que je fusse pénétré de la matière par un examen
attentif. Je désire que la discussion soit remise à une autre séance. (Bruit.) Il m’est impossible de
comprendre qu’on puisse saisir un bâtiment qui n’a pas eu le temps de faire une
déclaration ; il n’y a pas de bureau
de douane en mer où l’on puisse faire une déclaration.
M. le président. - Je vais lire encore une fois l’article.
M. Jullien. - Messieurs,
je combattrai ce projet de loi jusqu’à la fin, parce que je ne veux pas avoir à
me reprocher d’avoir, par un moyen quelconque, prolongé l’existence de la loi
de 1822, que je considère comme un véritable fléau pour le commerce et
l’industrie. Je vous le dis, messieurs, avec le sentiment d’une conviction
profonde.
Si les
législateurs qui nous ont dotés de cette loi avaient été condamnés à lire les
325 articles qui la composent, et surtout à les comprendre, jamais elle n’eût
affligé le pays ; jamais des milliers de procès n’auraient ruiné des milliers
de familles, et nos belles distilleries dans les Flandres, dont l’existence se
lie si intimement à la prospérité de votre agriculture et qui ont été ruinées
par cette loi, seraient encore debout. Que nous propose-t-on de faire ? On nous
propose, par des modifications à cette loi déloyale, c’est l’épithète que je
lui donne et qui lui convient, on nous propose de la consolider et d’y ajouter
des rigueurs qui n’existaient pas. Le droit de visite en mer, messieurs, c’est
le droit de courir-sus ; voilà ce qu’on ajoute à la législation. Cette
législation de 1822, qui ne contient pas le droit de suite, avait sans doute eu
une raison quelconque pour s’abstenir ; et nous devons penser que le génie
fiscal qui avait présidé à sa rédaction, avait de très bons motifs pour ne pas
établir ce qu’on veut faire aujourd’hui.
La Hollande ne
voulait pas se brouiller avec ses voisins en faisant des actes dont je
démontrerai bientôt l’illégitimité.
Vous avez conféré,
dans un article précédent, le droit de visite sur les navires de 30 tonneaux et
au-dessous, à une lieue de distance ; vous voulez donner maintenant le droit de
saisir toutes les fois que ces navires n’auront pas les papiers nécessaires, ou
qu’ils seront chargés de marchandises prohibées, ou simplement de marchandises
soumises aux droits d’accise ; vous allez établir des croisières en mer, et des
douaniers qui monteront sur ces croisières ; ces gens-là voudront naturellement
sévir : ils voudront aller sur tous les navires de 30 tonneaux et même sur de
plus considérables, parce qu’en mer on en reconnait pas aisément le tonnage des
navires ; ils feront des procès-verbaux ; ils saisiront ; ils arrêteront
l’équipage ; et les tribunaux seront appelés à prononcer.
Mais, dites-vous,
on peut par des témoins prouver l’exactitude des assertions contenues dans les
procès-verbaux ; eh ! messieurs, quand un acte arbitraire de cette nature, se
commet en mer, où voulez-vous qu’on aille chercher des témoins ? Les témoins
seraient le capitaine, ou le capitaine en second, les gens de l’équipage, mais
tous ces gens-là seront précisément les accusés. On ne pourra pas recevoir leur
témoignage ; et ces procès-verbaux dressés par des hommes dont vous avez
vous-mêmes reconnu la corruption, la démoralisation, il faudrait qu’ils fissent
foi en justice ; de là une foule de désordres surgiront : il y en avait pour
tous bien assez dans la législation de 1822.
On n’abandonnera,
dit-on, que les bâtiments qui louvoieront ; mais louvoyer, c’est un moyen de
marcher ; quand un navire a le vent ou la marée contraire, il faut qu’il
louvoie. Les gens de l’équipage vous diront qu’ils ne louvoyaient pas, qu’ils
marchaient ; le procès-verbal dira au contraire qu’ils louvoyaient, On dira en
un mot, dans le procès-verbal tout ce qu’on voudra, parce que les employés
feront tout ce qu’ils voudront, à la différence de ce qui se passe dans les
villes en public, où l’on peut appeler des témoins.
On vient vous
proposer de prendre et de confisquer tous les navires de trente tonneaux et
au-dessous, qui seraient trouvés porteurs, sans papiers, de marchandises
prohibées, ou même de marchandises simplement soumises au droit d’accise. Je
crois qu’il y a là véritablement violation de tous les principes. D’abord,
toutes les fois que l’on commerce avec une nation policée, tout navire, de
quelque grandeur qu’il soit, qui apporte des marchandises, a le droit d’entrer
dans le port. Un navire étranger ne peut vouloir enfreindre des lois qu’il ne
connaît pas, et que souvent les nationaux ne connaissent pas eux-mêmes ; votre
tarif n’est pas connu de tout le monde ;à peine est-il connu par tous les
négociants du pays. Tout ce qu’on peut faire à des étrangers, c’est de les
renvoyer avec leurs marchandises prohibées. Voilà comment on agit entre peuples
policés, entre peuples civilisés. Mais saisir à une lieue, à une demi-lieue,
c’est transformer les douaniers en pirates, c’est faire de la piraterie.
Celui qui sera sur
vos côtes dira : je vais en Hollande, je suis en mer, quel droit avez-vous de
m’arrêter ? Que vous importent les marchandises que j’ai à bord ? C’est quand
je passerai à vos bureaux, quand j’entrerai dans vos ports, que vous avez le
droit de me demander ce que je porte. Voilà les règles de la civilisation
ordinaire. Mais on nous dit : on fait en France et en Angleterre comme nous
voulons faire ; nous devons imiter la France et l’Angleterre : messieurs, il en
prend souvent mal aux petits, de vouloir imiter les grands. La France et
l’Angleterre sont des pays qui peuvent appuyer leurs lois et leurs paroles par
la force de leurs actes ; mais nous chétifs, pourquoi irions-nous nous créer
des embarras, et nous susciter des querelles avec nos voisins, en appuyant nos
tarifs sur une marine inquisitoriale ? Songez d’ailleurs que le commerce de
cabotage qui se fait par la navigation le long des côtes, sera frappé de mort
par de telles mesures, que vous le livrez à vos douaniers, et à une sorte de
piraterie.
On n’a pas fait
suffisamment attention à une observation principale : c’est que ces grandes
sévérités des lois françaises et anglaises viennent de l’étendue du système
prohibitif établi en France et en Angleterre. Dans ces pays, le système
prohibitif est très large, tandis qu’ici il est très restreint. Quand on
prohibe une marchandise, c’est que cette marchandise peut tuer une branche de
notre commerce et de notre industrie. Les marchandises prohibées doivent être
distinguées des marchandises soumises aux droits.
Quand vous faites
entrer une marchandise sous condition d’un droit, s’il y a fraude, c’est le
fisc seul qui perd. S’il avait eu des employés plus vigilants ou moins
corrompus, il eût moins perdu ; mais le public y perd-il ? Quand on fait entrer
des vins, des eaux-de-vie, des soieries en fraude, qu’en résulte-t-il ? C’est
qu’on a le vin, l’eau-de-vie et les soieries à meilleur marché et que le fisc
perd un droit ; mais l’entrée des marchandises prohibées, je le répète, peut
tuer notre industrie on notre commerce ; alors on peut user de sévérité ;
l’étendre au-delà, c’est une injustice, ne donnons donc pas la grande rigueur
des lois françaises et anglaises à nos lois, puisque nous ne connaissons que
très peu de prohibitions.
Je suis étonné des accessoires que l’on ajoute à la trop odieuse loi de
1822 quand le ministre ne les demandait pas. Le ministre ne nous demandait
qu’un rayon unique, au lieu de deux qui sont établis. Eh bien, il fallait s’en
tenir là, lui donner son rayon unique et ne pas faire d’addition à la loi de
1822 ; mais au lieu de la réforme,, vous prenez ce qu’il y a de plus dur dans
la législation de France et d’Angleterre, pour compléter un système déjà odieux
par sa nature, et qui restera odieux tant qu’il subsistera.
Je ne puis donner
mon assentiment à aucune partie du projet.
M. Destouvelles. - Messieurs, je conçois certainement que, puisant des
exemples dans la législation de nos voisins, nous puissions, pour la protection
de notre commerce, visiter les navires qui rapprochent à une certaine distance
de nos côtes, et que les bâtiments sujets à la visite doivent produire les
pièces et documents nécessaires pour légitimer le montant de leur cargaison.
Partant de là, je conçois les dispositions du paragraphe premier du projet :
mais je l’avoue, je ne saisis pas aussi bien le sens du paragraphe second, et je prie M. de me dire ce qu’il entend par ce paragraphe
; peut-être après ses explications pourrai-je en démêler le sens, Voici ce que
porte ce deuxième paragraphe (voyez plus
haut.) Je ne conçois pas qu’un bateau puisse sortir chargé de marchandises
sujettes aux droits d’accises sans que l’administration des accises ait épuisé
à leur égard toutes les formalités prescrites par la loi. Mais d’un autre côté,
s’il sort sans avoir payé les droits, je ne sais pas pourquoi on l’empêcherait
de suivre sa route et d’aller porter sa cargaison à l’étranger. Le droit
d’accises est en effet un droit de consommation. Or, une marchandise qui sort
du pays ne s’y consomme pas, et c’est la consommation seule qui donne lieu au
droit. Je ne comprends donc pas ce que veut dire ce paragraphe ; il est pour
moi chose incompréhensible. Il est possible que par ses explications M. le
ministre m’en fasse sentir l’utilité, je le prie de me la démontrer, et je
déclare à l’avance que je ne repousserai pas la lumière qui pourra jaillir de
ses paroles.
M. Legrelle. - Je pense qu’il serait fort dangereux d’introduire,
tel qu’il est rédigé, l’amendement dans la loi ; je demande en effet comment on
fera, si le bâtiment vient d’Angleterre, de France ou de Hollande, et que son
intention soit de déclarer la marchandise pour lui permettre de faire cette
déclaration. Je sais bien que les navires qui ne voudront pas frauder entreront
immédiatement dans le port, et qu’ils ne perdront pas leur temps à louvoyer ou
à côtoyer ; mais il est possible qu’un bâtiment soit forcé par le temps des
approches de la côte, d’y louvoyer, en attendant le moment favorable pour
entrer dans le port ; mais aura-t-on foi à son dire ? Cela ne donnera-t-il pas
lieu à des difficultés ? Je vous avoue que je trouve les mots louvoyer et
côtoyer beaucoup trop vagues et si je vote pour l’amendement, ce ne sera que
pour autant que l’on retranchera ces mots de l’article et qu’on se contentera
de l’appliquer aux navires qui seraient à l’ancre, à la distance fixée.
M. Poschet. - Si les renseignements qu’on me donne sont certains,
on prétend que dans les Flandres, les distillateurs embarquent des genièvres,
et comme on ne paie pas de droits à l’exportation, ils sortent d’un port de la
Belgique, comme s’ils allaient à l’étranger, et dans la réalité ce n’est que
pour réimporter en Belgique leur marchandise en fraude. C’est ce qui
expliquerait pour M. Destouvelles le sens du paragraphe 2 de l’article.
M. Osy. - Je voudrais certainement que l’on pût remédier à la
fraude scandaleuse qui se fait et qui augmentera sans aucun doute si on ne
prend des mesures sévères pour l’empêcher ; mais l’amendement proposé me paraît
dangereux et propre à nous susciter mille difficultés. En effet les navires
hollandais, partant de la Zélande pour aller dans la Flandre hollandaise,
seront obligés de passer sur nos côtes.
M. Serruys.
- Non ! non !
M. Osy. - Mais au
moins ceux qui iront de Flessingue à l’Ecluse…
M. Serruys.
- Pas davantage.
M. Osy. - De Blanckenberg à l’Ecluse, il faudra
nécessairement passer devant nos côtés et vous serez obligés d’avoir là une
station. Vous aurez sans cesse des difficultés avec les bâtiments hollandais
qui ne manqueront pas d’adopter contre vous les mêmes mesures sur leurs côtes.
Si l’amendement ne parlait que des navires en mer, je le concevrais, mais vous
dites, les côtes maritimes ; par ces mots, on peut comprendre les rives de
l’Escaut ; ce sera, je vous le répète, une source intarissable de difficultés.
M. Serruys.
- Je commencerai par faire observer que c’est à tort que l’honorable M. Osy
avance que les navires allant de Flessingue à l’Ecluse, seront obligés de
passer sur nos côtes. Il suffit de jeter les yeux sur la carte, pour se
convaincre du contraire.
Au reste, il ne
s’agit pas, dans l’article, d’arrêter les navires qui voyagent, mais ceux qui
sont à l’ancre, à la distance d’un quart de myriamètre, ou qui y louvoient, car
ceux-là ne voyagent, ni n’ont l’intention de voyager. Si cependant on tient à
la suppression des mots côtoyer et louvoyer, je n’y vois pas un grand
inconvénient. Il suffirait alors de permettre la saisie des navires à l’ancre à
une demi-lieue, car il est évident que quand de tels navires sont à l’ancre à
ces distances chargés de genièvre, ce n’est que pour l’introduire en fraude.
Mais, dit-on, comment fera-t-on pour les navires qui voudraient faire leur
déclaration ? Mais, messieurs, cela n’est pas défendu par l’amendement.
L’amendement n’est fait que pour empêcher la fraude, ceux qui s’approchant de
la côte diront vouloir faire leur déclaration, seront mis à même de le faire.
Il y a deux mois qu’un navire appelé l’Actif,
venant de Dunkerque, chargé d’eau-de-vie, fut saisi de cette manière. Si vous
ne défendez pas aux petits navires de venir ainsi jeter l’ancre si près de
terre, je vous défie d’empêcher la fraude.
Je
répondrais maintenant un mot aux objections de M. Destouvelles contre la fin de
l’article. Messieurs, il faut faire attention que l’article dit : si dans le
cas ci-dessus mention. Il faut donc se rapporter à la première disposition de
l’article. Il y a des fraudeurs qui exportent du genièvre et qui ne paie pas de
droit à l’exportation. Si après être sorti d’un port, le navire vient à jeter
l’ancre à quelque distance de la côté, il est évident que c’est pour frauder,
et alors on le saisit et on fait bien ; mais s’ils poursuivent leur route, on
ne les arrêtera pas. Il n’y a donc pas d’inconvénient à adopter la deuxième
disposition de l’article.
M. A. Rodenbach. - J’ai émis déjà mon opinion contre l’ensemble de la
loi. Je n’y reviendrai pas, on sait qu’elle est fondée principalement sur la
substitution d’un seul rayon aux deux qui existent actuellement. Mais je dois à
la vérité de dire que si on l’admet par l’amendement, il sera impossible
d’empêcher la fraude. Les smogleurs français viendront introduire leurs esprits
dans le pays et vous en inonderont. Les smogleurs hollandais feront la même
chose. Depuis très peu de temps, ces derniers en ont versé en Belgique plus de
60 mille de ces petits barils dont on se sert en Hollande et dont le nom
m’échappe. J’appuierai donc les observations de M. Serruys.
M. Destouvelles. - Les explications données par les préopinants n’ont
pas du tout dissipé mes doutes, et il me sera bien facile, en donnant lecture
des deux paragraphes de l’article, de prouver que le second est pour le moins
une superfétation inutile. « Si des bâtiments ou
embarcations du port de 30 tonneaux et au-dessous. » C’est ainsi que
commence l’article, et je dois faire remarquer qu’il ne fait aucune distinction
entre les navires belges et les navires étrangers ; l’orateur continue jusqu’à
la fin la lecture de l’article (voyez
plus haut) et reprend ainsi : vous voyez, messieurs, d’après les termes de
l’article, qu’il suffit de l’existence d’un bâtiment quelconque dans la
distance d’un demi-myriamètre de la côte, pour donner lieu à la saisie.
L’article n’établit aucune distinction sur la question de savoir si les navires
sont et viennent de la Belgique, ou s’ils sont et viennent de l’étranger. Que
signifie donc, je réitère ma demande à M. le ministre, que signifie le deuxième
paragraphe de l’article ? Je dis, moi, que le moindre reproche que l’on puisse
faire à ce paragraphe, c’est d’être inutile ; il n’ajoute rien à l’article
premier qui établit aussi bien la confiscation pour les navires belges que pour
les navires étrangers. Or, ce serait assez de cette considération pour le
retrancher, car, dans les lois il ne faut rien d’inutile, parce que les
dispositions inutiles nuisent toujours en ce qu’elles peuvent donner lieu à des
interprétations là où il n’en fait pas.
M. le ministre des finances (M. Coghen). - Messieurs, on a parlé contre les vices de la loi de
1822, on a représenté cette législation comme accablante, surtout pour les
distilleries, industrie si précieuse dans les Flandres.
Eh bien, la loi
actuelle est faite précisément pour réprimer la fraude qui accable les
distilleries, pour empêcher l’introduction des produits étrangers qui se fait
si facilement aujourd’hui, parce que le gouvernement n’a pas la force de la
réprimer. Hier je vous ai parlé de la saisie du navire l’Actif ; pour cette seule prise, il y a 50 autres expéditions de ce
genre qui ont réussi. J’en ai la preuve dans ce qui se passe aujourd’hui. Du
midi de la France, on n’expédie plus des eaux-de-vie à Ostende ou à Anvers,
mais à Dunkerque, parce qu’on sait que là, il est très facile de les introduire
en fraude en Belgique. Dans cette enceinte j’ai entendu très souvent divers
membres se plaindre de la fraude qui se fait.
Aujourd’hui on
craint que par l’adoption de la loi nous ne nous brouillons avec les puissances
voisines, la France et l’Angleterre, qui ne nous ménagent guère. Si parce que
notre pays est petit, nous consentons à nous rendre victimes des autres
nations, notre position serait par trop déplorable. Il est indispensable que le
gouvernement ait en main la force nécessaire pour empêcher la fraude si l’on
veut que le trésor n’en souffre pas, si l’on veut que l’industrie n’en soit pas
accablée. Les craintes manifestées par l’honorable M. Osy,
sur la navigation de l’Escaut, ne sont pas fondées, parce que nous n’avons
aucun droit d’étendre nos visites de ce côté. Un bureau sera établi à Lillo,
aussitôt qu’il nous sera possible de le faire, nous n’avons pas à étendre notre
surveillance plus loin. Quant au deuxième paragraphe proposé par la section
centrale, je m’y suis réuni parce que, loin de détruire le premier il lui
donnera une nouvelle force en en expliquant bien le sens pour ce qui est
relatif aux navires belges ; toutefois, la suppression de ce paragraphe
pourrait être faite sans inconvénient, car la loi générale contient des
dispositions suffisantes pour réprimer le cas prévu. Quant à la suppression des
louvoyer et côtoyer demandée par M. Legrelle, je dois m’y opposer et voici
pourquoi : le rayon est d’un demi-myriamètre, ce qui ne représente guère qu’un
gros quart de lieue ; si vous ne déclarez saisissable que les navires à l’ancre,
jamais vous ne pourrez effectuer de saisie parce que les navires auront
toujours le temps de lever l’ancre quand ils verront venir les bateaux
croiseurs.
M. Jullien. - J’ai déjà eu l’honneur de dire que louvoyer, pour
un navire, était une nécessité toutes les fois qu’il avait contre lui le vent
ou la marée et qu’il n’avait pas d’autre moyen d’avancer. Quand il louvoie on
peut le visiter et le confisquer parmi les marchandises dont il est chargé, il
s’en trouve de prohibées, voilà l’effet de l’amendement. Et si vous attaquez
ainsi un navire appartenant à une puissance étrangère, je vous demande de
quelle manière elle envisagera cette piraterie.
Mais du moins,
dit-on, on pourra prendre le navire qui jettera l’ancre et qui sera chargé de
marchandises prohibées. Messieurs, un navire est forcé de jeter l’ancre quand
le mauvais temps l’y force ; quand il est battu par la tempête, dans cette
position, iriez-vous le saisir ? Il voulait peut-être continuer sa route et
aller en Hollande venant de France, ou aller en France venant de Hollande.
Rien n’empêchait
ce navire d’entrer dans le port et de faire sa déclaration ; mais comment
irait-il faire sa déclaration, si vous le saisissez quand il approche de la
côte ? Tout navire que vous saisirez pourra vous dire : mon intention était
d’entrer dans le port, de faire une déclaration ; que demandez-vous ? Au reste
la mer n’est-elle pas un chemin ouvert à tout le monde et que tout le monde
peut traverser ?
Avec l’amendement,
vous ne pouvez éviter aucun des inconvénients que je viens de signaler. Mais le
trésor en souffrira !... Messieurs, quand le trésor souffre c’est sa faute. Il
a une armée de cinq mille douaniers pour observer la côte et la ligne de terre.
La côte est plus facile à observer, parce qu’on y voit tout ce qui se passe en
mer, et les tentatives de débarquement sont faciles à empêcher. On n’avait pas
employé le moyen rigoureux que l’on propose sous l’ancien gouvernement ;
cependant la plus grande fraude ne se faisait pas sur les marchandises
prohibées ; elle se faisait sur les marchandises dont l’entrée était permise en
payant un droit ; pourquoi ? parce que les employés se laissaient corrompre.
Ils peuvent se laisser corrompre encore, et cela aura lieu toutes les fois que
vous leur donnerez l’appât du gain. Ayant le pouvoir de faire en mer des
procès-verbaux ou de n’en pas faire, vous les rendez peut-être les auxiliaires
de la fraude ; dans tous les cas, vous exposez le commerce de cabotage à toutes
les avanies, à toutes les vexations qu’il ne devrait pas rencontrer chez nous.
On
dit que le cabotage nuit à nos distilleries de genièvre ; il y a un moyen bien
simple de protéger cette industrie ; baissez les droits sur les genièvres, et
bien loin que vous avez à craindre les importations de la Hollande, c’est vous
qui pourrez exporter chez nos voisins.
En finance, je
l’ai déjà dit, deux et deux ne font pas toujours quatre ; vous voulez avoir 15
pour cent sur les spiritueux, voilà pourquoi il y a des entrepreneurs de fraude
qui les font entrer à 5 pour cent. Mettez les droits à 5 pour cent, vous
encouragerez les distilleries, et c’est chez l’étranger que vous ferez des
exportations et que vous porterez la fraude.
Je
vote pour qu’on nous débarrasse de la législation de 1822.
M. Serruys.
- Mon honorable ami M. Jullien a dit que dans plusieurs circonstances, le
navire est obligé d’envoyer ou de jeter l’ancre ; je le sais ; mais je sais
aussi que la force majeure est une exception de droit et qu’on sera admissible
à le prouver. Cette exception établie, je soutiens qu’on n’empêchera pas la
fraude si on ne saisit pas les petits bâtiments, parce que tous les petits
bâtiments chargés de marchandises prohibées ou d’eau-de-vie qui payent des
droits, jetteront facilement leur cargaison à la côte.
M. Destouvelles a dit que le second paragraphe de l’amendement était
inutile. Je ferai observer que cette addition faite à la proposition du
ministre prévoit un cas tout différent, tout particulier. Un petit navire,
chargé de genièvre, par exemple, peut être expédié de nos côtes, pour faire
entrer la liqueur en fraude. Si ce petit navire a besoin de se mettre à
l’ancre, il peut le faire en prouvant qu’il y a été obligé ; mais généralement,
les petits navires ne se mettent à l’ancre que pour faire la contrebande. S’ils
n’avaient pas de mauvais desseins ils continueraient leur route. Je le répète,
si un petit navire est à l’ancre par cas de force majeure, on le verra bien.
M. Destouvelles. - M. le ministre des finances, en examinant le second
paragraphe de l’amendement a dit qu’il s’était rallié à l’opinion de la section
centrale, relativement à ce second paragraphe, parce qu’il ne détruisait pas
l’effet du premier ; moi, j’ai posé la question sur un autre terrain ; j’ai
demandé si le second paragraphe ajoutait quelque chose au premier. Ce que l’on
doit éviter dans les lois, ce sont les dispositions inutiles, parce qu’elles
peuvent faire naître des doutes, des incertitudes, des interprétations, et c’est
déjà un grand mal que les doutes, les incertitudes et les interprétations.
J’appelle
l’attention du ministre sur le paragraphe premier, qui soumet indistinctement à
la confiscation, tous les navires à l’ancre, à la distance d’un demi-myriamètre
de la côte : que le navire sorte de la Belgique, avec des eaux de vie, de
grains, et qu’il ait l’intention de les introduire en fraude sur la côte, ou
que, chargé d’eaux de vie de France, il veuille faire la même fraude, tous deux
sont dans la même catégorie.
Le second
paragraphe n’étant qu’un commentaire extrêmement dangereux du premier, je
demande qu’ils soient mis séparément aux voix.
M. Verdussen. - Je présenterai de courtes observations pour
m’opposer à la nouvelle rédaction de l’article, parce que je ne veux pas d’une
loi dont je ne vois pas l’exécution possible ; les observations même de M.
le ministre et de M. Serruys viennent à l’appui de mon observation ; on dit
qu’on prendra les bâtiments qui seront dans la distance d’un quart de
myriamètre ; mais, messieurs, où
commencera le quart de myriamètre, à quelle marque connaîtra-t-on la limite ?
Sera-ce 1/8 en deçà ou au-delà, tout cela est impossible à préciser, ce seront
dons des disputes continuelles. On dit, et c’est à M. Serruys qu’appartient
cette observation, qu’on saisira les navires qui auront l’air de passer et qui
cependant louvoieront pour tâcher de débarquer leur cargaison ; mais quand
a-t-on l’air de passer ? Il serait je pense assez difficile de le décider ; je
pense d’un autre côté, que M. Destouvelles s’est trop élevé contre le deuxième
paragraphe, et si j’avais à adopter l’article, il serait à cause de ce
paragraphe, et voici pourquoi : tout navire chargé de marchandises sujettes au
paiement d’un droit de consommation doit avoir obtenu décharge de ce droit en
quittant le port, puisque ces marchandises exportées ne paient aucun droit : il
est donc prudent de parer à ce que cette marchandise ne se réintroduise pas
dans le pays en fraude des droits dont elle a été déchargée.
Si
l’honorable M. Osy s’est trompé en disant que pour aller de Flessingue à
l’Ecluse, on devait passer sur nos côtes, on ne se tromperait pas en disant
qu’on y est obligé en allant de Dunkerke à Flessingue, et je demanderai si le
droit de visite est si bien établi et reconnu qu’on ne doive pas craindre de
difficultés en l’exerçant. Pour moi je redouterais que la France, plus forte
que nous, ne nous chercha à tout instant querelle, et que ce droit de visite
qu’on nous représente comme avantageux ne nous fût réellement très nuisible. Je
voterai donc contre l’article.
M. Duvivier. - Messieurs, les objections auxquelles l’amendement
donne lieu ont le genièvre pour objet, la crainte que cette mesure n’imposât
des gênes ou des entraves au commerce maritime, aux importations régulières,
enfin, à la libre navigation des navires nationaux ou étrangers.
Mais on a perdu entièrement de vue les limites dans
lesquelles l’amendement restreint le droit indispensable de visite et de
saisie, qu’il s’agit de conférer à l’administration, et je prie l’assemblée de
considérer que cette restriction le réduit à deux termes qui en écartent tous
les inconvénients.
L’un au maximum du
tonnage des embarcations qui au-dessous de 50 tonneaux, ne comprend que des
chaloupes et carrots que l’on n’emploie guère à l’importation régulière, mais
qui rentre au contraire dans la classe de ces petits bateaux et pontons qui
servent si facilement au genre de fraude qu’un honorable député a expliquée, en
ce que leur exiguïté leur permet d’arriver à une très grande proximité des
côtes et d’y opérer ainsi des débarquements clandestins.
L’autre au maximum
de la distance d’un quart de myriamètre, dans lequel des navires d’un tonnage
supérieur en servant aux importations régulières ne peuvent guère arriver que
dans les ports.
Or, les navires
au-dessous de 50 tonneaux sont totalement exceptés du droit de visite et ceux
au-dessus de 30 tonneaux le sont du droit de saisie. Ceux d’un tonnage
inférieur le sont également, quant au droit de saisie ; au-delà de la distance
de 2,500 mètres (1/2 lieue), et quant à la visite, au-delà de celle de 10,000
mètres (2 lieues).
Ils sont de plus à
l’abri de toute difficulté et peuvent librement naviguer et circuler à toute
distance, lorsqu’ils sont pourvus de documents.
Mais vous sentez
sans doute, messieurs, qu’il est indispensable de soumettre ces mêmes petites
embarcations seulement à une police réelle, dans une distance convenable des
côtes, et dès lors d’admettre la nécessité d’une sanction pénale, sans laquelle
cette police n’aurait aucun résultat, aucune efficacité.
Cette
observation, en ce qui concerne la distance et le tonnage dans lesquels
l’amendement referme le droit de saisie, suffira donc pour écarter toute
appréhension des conséquences que l’on a tirées uniquement d’une extension que
l’amendement ne porte point à l’égard des navires servant au véritable commerce
maritime qui ne souffrira ainsi aucun inconvénient de la mesure proposée.
Ce n’est qu’en
perdant de vue cette limitation essentielle qu’on a pu supposer que ces navires
seraient exposés à quelque gêne.
Vous voudrez bien
remarquer d’ailleurs, messieurs, qu’en France, ainsi qu’en Angleterre, cette
police sur les bâtiments côtiers est admise et s’étend dans une distance et sur
des bâtiments d’un tonnage bien supérieur.
M. A. Rodenbach. - Je persiste dans l’opinion que j’ai émise sur la
nécessité d’adopter l’amendement de la section centrale. On pourrait peut-être
s’en passer, si comme l’a dit M. Jullien, le ministre diminuait les droits sur
les eaux-de-vie indigènes, parce qu’il y a cent pour cent à gagner aujourd’hui
en faisant la fraude ; il y a 16 louis de bénéfice sur une pipe d’eau-de-vie,
et il est certain que la fraude cesserait bientôt si ce bénéfice de 16 louis
était réduit à 8 louis. Une réduction serait donc désirable ; mais, d’un autre
côté, n’ayant pas encore fait de traité de commerce avec la France, il serait
peut-être imprudent de modifier, en ce moment, notre tarif. J’appuie donc
l’amendement.
M. Serruys. - Messieurs, j’ai remarqué que dans la discussion on
a souvent employé les mots de « pleine mer » en parlant de la
distance d’un quart de myriamètre, pour nous prouver que nous n’avions pas le
droit de visite à cette distance. Il est essentiel de détruire cette erreur.
Les côtes de la mer appartiennent au pays que la mer baigne de ses eaux ; c’est
un droit reconnu par tous les publicistes, et on sent bien qu’il est nécessaire
au pays, ne fût-ce que pour sa défense. A une lieue en mer, ce n’est pas encore
la pleine mer, c’est pour cela que les petites embarcations qui viennent à
cette distance doivent se soumettre aux lois qui régissent le pays. Le droit de
visite fondé sur la loi est donc incontestable à cette distance.
M. Mary. - La section centrale, dans le projet en cinq
articles, qu’elle vous a soumise, a évité d’entrer dans des collisions avec les
puissances étrangères, collisions difficiles à éviter ; M. le ministre des
finances en a jugé autrement, et a proposé un article en remplacement de
l’article 3. Vous avez renvoyé l’article du ministre à la section centrale, non
pas pour l’approuver ou le rejeter, mais pour le rédiger autrement, tel a été
le mandat de la section centrale ; eh bien, qu’a-t-elle fait ? M. le ministre
des finances proposait de saisir les navires portant des marchandises
prohibées, des marchandises manufacturées ; nous n’avons pas cru devoir adopter
un amendement aussi général ; car les marchandises manufacturées se composent
de cotons, de casimirs, etc., qui sont soumis à des droits divers, selon les
qualités ; nous n’avons pas pensé qu’on pût confisquer des produits semblables,
alors qu’entrés dans nos ports, ils payaient les
droits ; nous avons réservé la saisie aux marchandises. Dès l’instant que les
navires qui les portent se trouvent à l’ancre, à un demi-myriamètre de la côté,
il y a suspicion de fraude ; mais si les navires étaient sortis de nos ports,
il faut une disposition particulière. Quand ils sont munis de documents, nous
ne devons pas les soumettre aux mêmes sévérités ; c’est pour cela que nous
avons fait l’addition d’un paragraphe. Il a été à tort critiqué ; il améliore
le sort de nos navigateurs. Je crois que ces observations suffiront et
détermineront la chambre à adopter ce second paragraphe.
M. Destouvelles. - Quels sont les documents réguliers pour les
marchandises exportées de l’étranger ?
M. Mary. - La loi du 22 août 1791 règle ces documents. Pour
naviguer à l’étranger, l’administration donne des duplicata de passavants, ou
des acquits à caution ; au moyen de ces duplicata, on peut éviter toute espèce
de poursuite.
M. Destouvelles. - Eh bien, l’explication que l’on vient de donner est
pour moi un motif de plus pour persister dans mes observations. D’après le
second paragraphe, il résultera que vous saisirez sur la côte un bâtiment que
vous trouverez louvoyant, tandis qu’un autre bâtiment qui aura des documents,
ne pouvant être saisi, attendra plus facilement l’occasion de faire la fraude.
Telle sera la conséquence de l’explication fournie par l’honorable préopinant.
Il ne peut pas être établi de distinction entre les bâtiments sortant de nos
ports et ceux venant de l’étranger. Une seule question est à examiner, c’est de
savoir qu’elle est la situation qui décèle, dans un navire quelconque,
l’intention de sa part de jeter des marchandises à la côte. Si vous faites une
distinction, au lieu de réprimer la fraude, vous donnez les moyens de frauder :
quand vous dites qu’un bâtiment sortant de la Belgique ne pourra pas être
saisi, que fera ce bâtiment ? Il jettera l’ancre, quoique chargé d’eau-de-vie,
et quand vous voudrez le visiter, vous reculerez devant les documents ; et ce
seront les documents qui le mettront en état de faire de la fraude.
Je remercie le
préopinant des explications qu’il m’a données ; elles prouvent que la loi, avec
le second paragraphe, aurait un effet tout contraire à celui qu’on se propose.
M. le président. - M. Destouvelles a demandé la division.
M. Nothomb.
- C’est de droit !
M. le président. - Comment, c’est de droit ! C’est de droit quand on le demande.
M. Nothomb.
- Il y a deux paragraphes !
- Le premier
paragraphe mis aux voix est adopté.
Le deuxième
paragraphe est rejeté.
M. le président. - Le premier paragraphe forme l’article 3 de la loi.
Article 4
La discussion est
ouverte sur l’article 4, ainsi conçu :
« Toutes les
dispositions de la loi générale précitée qui concernent le territoire mentionné
en l’article 177 sont rendues applicables au rayon à tracer en vertu de
l’article premier.
« Les
préposés de douanes pourront en outre, en cas de poursuite de la fraude, la
saisir même en deçà du rayon ci-dessus fixé, pourvu qu’ils l’aient vu pénétrer
et qu’ils l’aient suivie sans interruption. »
M. le ministre des finances (M.
Coghen).
- Je demande la suppression des mots « vue pénétrer ; » ces mots
rendraient la disposition de l’article presque inexécutable, parce qu’il est
fort rare que le douanier voie pénétrer la marchandise au moment où elle entre
dans le rayon ; il doit suffire, je pense, pour qu’il puisse la saisir hors du
rayon, qu’il l’ait suivie sans interruption depuis qu’il l’a aperçue.
M. Poschet. - Depuis l’établissement du royaume des Pays-Bas,
j’habite le rayon des douanes, et je n’ai jamais vu ni entendu dire que le
droit de suite y ait produit des abus. Sans doute c’est un droit gênant et qui
n’est pas sans inconvénient ; mais la douane elle-même est une gêne et un
inconvénient, mais il faut supporter cette gêne ou supprimer tout à fait la
douane, ce qui n’est pas possible.
Si
vous ôtez à l’administration le droit de suite, c’est lui ôter son droit de
répression, parce qu’à l’extrême frontière le poste de la douane est toujours
faible, et s’il suffit de le passer de vive force ou de courir plus fort que
les douaniers pour être à l’abri de la poursuite, les fraudeurs se présenteront
en force et seront à peu près certains de l’emporter toujours.
Ce serait adjuger
une prime à la course que de consacrer pareille disposition. Il faut donc que
les douaniers puissent suivre la marchandise jusqu’au lieu où il sera possible
de l’atteindre.
M. Jullien. - Il faut mettre des douaniers à toutes les portes
des villes.
M. Ch. de Brouckere. - J’appuie la suppression demandée par M. le
ministre des finances. Sans cela il est certain que le droit de suite sera
illusoire. Ce n’est pas en effet sur la limite des deux pays et sur l’extrême
frontière que les douaniers peuvent se mettre en embuscade, car autant vaudrait
dire aux fraudeurs : je serais là à telle heure, n’y venez pas. Les postes de
douanes sont et doivent être un peu dans l’intérieur, pour exercer une
surveillance utile ; il est donc impossible que de son poste un douanier
aperçoive la marchandise au moment où elle franchit la frontière. Il suffit par
conséquent qu’il la découvre dans le rayon et qu’il ne la perde pas de vue pour
qu’il la puisse saisir.
M. Duvivier. - Il suffit, comme l’a dit le préopinant, que la
marchandise soit aperçue dans le rayon pour qu’elle puisse être saisie. Sans cela
le droit de suite serait tout à fait inutile. Jamais les douaniers ne sont
placés à l’extrême frontière, ils sont au contraire placés sur plusieurs lignes
dans le rayon, de manière que les fraudeurs ayant passé une ou deux lignes,
n’auraient souvent plus qu’un pas à faire pour avoir franchi le rayon, et
vainement les aurait-on aperçus dans ce rayon si on n’avait pu les saisir ; ils
seraient à l’abri par cela seul qu’on n’aurait pas vu pénétrer la marchandise.
Ce serait véritablement, comme le disait M. Poschet, adjuger un prix de course.
Il faut donc adopter l’amendement de M. le ministre des finances.
M. Destouvelles. - Je ne partage pas, messieurs, l’opinion des
préopinants, car il est nécessaire de fixer aux employés des douanes un point
de départ, pour savoir où commencera cette suite.
Voix nombreuses.
- Elle commencera dans le rayon.
M. Destouvelles. - Attendez, messieurs, dans le rayon sans doute. Les mêmes
mots se trouvaient dans la loi de 1791, et ils n’ont jamais donné lieu à des
difficultés : « voir pénétrer » ne signifie pas qu’on doive voir la
marchandise à l’extrême frontière, mais voir dans le rayon. Si vous consultez
les arrêts rendus en cette matière par toutes les cours, vous verrez que
toujours elles l’ont décidé ainsi. Toujours on a jugé qu’il suffisait qu’on eût
vu la marchandise dans le rayon et qu’on l’eût suivie sans interruption pour
qu’elle fût saisissable. Quel est le but de cette disposition de la loi, sans
laquelle la fraude serait très facile ? C’est de permettre de suivre la
marchandise partout quand une fois on l’a découverte. Or, souvent à la
frontière, les fraudeurs sont plus forts et plus nombreux que les douaniers ;
souvent ceux-ci doivent se replier après avoir aperçu la marchandise sur un
poste voisin, puis sur un autre, jusqu’à ce qu’ils soient assez forts ou
jusqu’à un village où ils puissent requérir la force publique. Il est donc
nécessaire de laisser dans l’article « vue pénétrer ; » ces mots ne
signifient autre chose que « vue dans le rayon ; » je l’ai déjà dit,
c’est ainsi qu’on l’a toujours Jugé. Ainsi vous fixez le point de départ où
commence le droit de suite : en adoptant au contraire l’amendement de M. le
ministre, ce droit ne commence nulle part.
M. Destouvelles. - L’opinion de l’honorable préopinant repose sur une
erreur de fait ; il n’a pas réfléchi que par cette disposition, le rayon des
douanes est assimilé au territoire étranger ; c’est pour cela que l’article dit
tout ce qu’il doit dire. Je n’ai pas parlé d’interprétation de la loi, j’ai dit
qu’elle avait toujours été entendue ainsi, et qu’il n’était pas possible de
l’entendre autrement : qu’on dise si l’on veut que la marchandise sera
saisissable quand elle aura été vue dans le rayon (On est d’accord ! on est d’accord !) je le veux aussi ; mais je dis
que cela est inutile, car l’article primitif est très clair. Il n’est pas
possible en effet que le législateur ait voulu dire une absurdité et exiger que
la marchandise fût vue à l’extrême frontière. Avec une telle disposition toute
saisie serait impraticable.
M.
Legrelle.
- Il n’y a qu’à retrancher le mot « pénétrer. »
M. Jullien. -Il faut mettre quelque chose à la place.
M. le président. -. - On retranchera le mot « pénétrer. »
M. Van Meenen. - Mettez les mots « vue dans le rayon. »
M. le ministre des finances (M. Coghen). - L’article 4 le donne assez à entendre, ce me
semble.
M. Jullien. - Il ne suffit pas qu’il le donne à entendre, il faut
qu’il le dise.
M. Fallon. - Voici comment je propose de rédiger l’article :
« Les
préposés de douane pourront en outre, en cas de poursuite de la fraude dans le
territoire réservé, la saisir même en deçà du rayon, pourvu qu’ils ne l’aient
pas perdue de vue et qu’ils l’aient suivie sans interruption. »
M. Destouvelles. - Dans le premier paragraphe, il faut supprimer les
mots « à tracer. » (C’est juste
!)
M. Bourgeois. - Je demandais la parole pour proposer une rédaction
qui remplit le même but que la rédaction présentée par M. Fallon. Voici ma
rédaction : « pourvu que dès l’instant où ils l’auront aperçue et
découverte dans le rayon réservé ils l’aient suivie sans interruption. »
M. Lebeau. - Mais il faut que la fraude ait été découverte ou
aperçue dans le rayon réservé pour avoir droit de la suivre.
Plusieurs membres. - Sans doute.
M. Lebeau. - La fraude devant être nécessairement découverte
dans le territoire, j’aime mieux celui de M. Bourgeois.
M.
Fallon. - On suppose que la fraude a été découverte à
l’extrême frontière ; ainsi elle n’a pu être découverte que dans le rayon réservé.
M. Legrelle. - Il me semble qu’il est plus simple de s’en tenir à
la première rédaction qui consiste à supprimer le mot « pénétrer. »
Un membre. - Nous ne sommes pas d’accord sur ce point.
M. le président. -On peut dire : « la saisir même en deçà du rayon, pourvu qu’ils
l’aient vue et qu’ils l’aient suivie sans interruption. »
M. A. Rodenbach. - C’est bon
cela !
M. le ministre de la justice (M.
Raikem).
- Voilà comment j’avais compris la loi de 1791. L’article 35 du titre XIII de
cette loi dit : « Les préposés pourront en cas de poursuite de la fraude
la saisir même en deçà des côtes et frontières pourvu qu’ils l’aient vue pénétrer
et qu’ils l’aient suivie sans interruption. » L’honorable M. Destouvelles
a exposé comment cette disposition avait été expliquée dans la jurisprudence.
Je l’explique de la même manière. C’est en effet le sens de la loi. On pourrait
la rendre plus claire. La section centrale propose : « Les préposés de
douane pourront en outre, en cas de poursuite de la fraude, la saisir même en
deçà du rayon ci-dessus fixé, pourvu qu’ils l’aient vue pénétrer et qu’ils
l’aient suivie sans interruption. »
Il me semble que le
sens du mot « pénétrer » dans le projet de la section centrale et
dans la loi de 1791 signifie : qu’ils l’aient vue dans le territoire réservé.
M. le président. - Quelle rédaction veut-on ?
M. d’Huart. - La rédaction primitive est la meilleure.
M. Destouvelles. - On peut supprimer les mots : « Ci-dessus
fixé. »
M. le président donne lecture des divers amendements.
M. d’Huart. - « Découverte dans le rayon, » c’est un
pléonasme. Cette rédaction est tirée d’une loi que la jurisprudence a
expliquée. Maintenant il ne peut plus y avoir de difficulté.
M. le président. - Alors je vais mettre l’article aux voix.
M. Lebeau. - Les amendements doivent avoir la priorité.
M. le président. - M. le
ministre des finances propose de supprimer les mots « ci-dessus fixé. »
M. le ministre des finances (M.
Coghen).
- Il me semble que pour poursuivre, il faut avoir vu et qu’on peut mettre :
« La saisir même en deçà du rayon, pourvu qu’ils l’aient vue dans le rayon
et qu’ils l’aient suivie sans interruption. »
M. A. Rodenbach. - J’appuie la rédaction proposée par M. le ministre ;
elle est très claire. La rédaction de l’ancienne loi était inexacte. M. Jullien
doit savoir qu’elle occasionnait des procès très scandaleux.
M. Destouvelles. - Eh bien ! moi qui ai pratiqué dans un département
de l’extrême frontière, je déclare que jamais, oui jamais, il ne s’est élevé de
doutes sur le sens des mots : « vue pénétrer et suivie sans interruption. »
M. A. Rodenbach. - J’invoque le témoignage de M. Jullien ; il y a eu
un procès à Staden et c’est l’interprétation de cette disposition qui a fait
perdre le procès.
- La suppression
du mot « pénétrer » est mise aux voix et adoptée.
L’article 4 est
adopté avec la rédaction suivante :
« Toutes les
dispositions de la loi générale précitée qui concernent le territoire mentionné
à l’article 177 sont rendues applicables au rayon, en vertu de l’article
premier. »
« Art. 5. La
présente loi sera exécutoire à dater du 1er juillet prochain. »
M. Ch. de Brouckere. - Je demanderai à M. le ministre s’il n’y a pas
danger à rendre exécutoire la loi au 1er juillet, quand on a fixé le 20 juin comme
terme au gouvernement, pour faire connaître la ligne de douane. II n’y a que
six jours d’intervalle entre les deux termes, cela ne suffit pas. En matière de
douane, il faut que la loi soit connue cinq jours avant son exécution dans le
territoire formant le rayon. Les époques sont évidemment trop rapprochées. Je
crois qu’il faut mettre « exécutoire à dater du 15 juillet. »
M. le ministre des finances (M.
Coghen). - Messieurs, en fixant l’époque de l’exécution de la
loi au 15 juillet, c’est donner plus de facilité à l’administration. Cependant
je dirai que le travail préparatoire est fait. Dès que la loi aura passé au
sénat, elle recevra de suite son exécution ; c’est-à-dire aussitôt que les
lignes seront tracées. Si la législature croit devoir donner jusqu’au 15
juillet, nous ne nous y opposons pas ; mais l’administration n’en a pas besoin.
M. Destouvelles. - Il faut cependant avertir le commerce.
M. Duvivier. - Je ne m’oppose pas au délai ; mais je dois dire
que tous les documents sont à l’administration et que chaque province a son
territoire réservé, tracé sur des cartes, et que dès le lendemain de la
promulgation de la loi, des bateaux seront en croisière. Néanmoins, pour plus
de sûreté, on peut dire que la loi sera exécutoire le 15 juillet.
M. Ch. de Brouckere. - Le gouvernement est en mesure ; à la bonne heure !
Cependant la loi n’est pas passée au sénat ; elle n’est pas revêtue de la
sanction royale ; je crois que son exécution est impossible le premier juillet.
M. le ministre des finances (M. Coghen). - Je ne m’oppose pas au délai de 15 jours. Cela
donnera plus de facilité à l’administration.
- L’article 5 est
adopté avec l’amendement de M. de Brouckere.
Le vote sur
l’ensemble de la loi est renvoyé à lundi.
La suite de l’ordre
du jour est la discussion de la loi sur le système monétaire amendé pat le
sénat.
M. Lebeau. - Je demande la parole pour une motion d’ordre. La
discussion ne peut s’établir que sur l’amendement du sénat ; les autres articles
ayant été adoptés par les deux chambres on ne peut les remettre en délibération
; ils ont subi l’épreuve du double vote. (Oui
! oui !)
M. Seron. - Messieurs, vous aviez voté des pièces de 40 francs,
de 20 francs, de 5 francs, de 2 francs, d’un franc, de 50 centimes, de 10
centimes, de 5 centimes, de 2 centimes et même d’un centime. C’était bien assez
pour contenter tout le monde et suffire à toutes sortes de paiements et
d’appoints. Le sénat n’en a pas jugé ainsi ; il veut, en outre, des pièces de
25 centimes.
Mon avis est qu’on
lui donne satisfaction, bien que l’inutilité de ces pièces soit incontestable
et qu’on l’ait reconnue en France où l’on n’en a mis que fort peu en
circulation. Mes motifs sont l’espoir que gouvernement n’en frappera qu’une
très petite quantité, et le désir de voir convertir en loi des dispositions
puisées dans la législation française et que j’ai déjà adoptées comme très
bonnes.
L’essentiel
c’est que les pièces de 25 centimes soient au même titre que les pièces de 5
francs, afin d’ôter aux faux monnayeurs l’envie de les imiter, et de mettre le
peuple à portée de distinguer, à la couleur, les bonnes des fausses. Quant aux
pièces de billon il n’en faut point du tout ; elles sont trop faciles à
contrefaire, témoins les pièces de 10 centimes et de 25 cents. Décréter une
pareille monnaie c’est provoquer la fraude et s’en rendre complice. Je voterai
pour l’amendement proposé par le sénat. (Aux
voix ! aux voix ! Nous sommes tous d’accord !)
M. Ch. de Brouckere. - Messieurs, nous ne sommes pas appelés à voter sur
un seul article. C’est bien dans l’article 2 que le sénat, par amendement, a
introduit la pièce d’argent d’une valeur égale au quart de franc ; mais cet
amendement introduit, exige des modifications dans les articles relatifs au
titre, à l’effigie, etc. Pour moi, je me rallie à l’amendement. Le gouvernement
ayant trouvé que ces pièces étaient inutiles, je pense qu’il n’en fondra pas
aussi longtemps qu’il sera dans la même conviction. Si je croyais qu’il voulût
en fondre, je voterais contre la loi. (On
rit.) (Aux voix ! aux voix !)
M. le ministre des finances (M. Coghen). - Il n’y a rien à ajouter à ce qu’a dit M. Seron, sur
les monnaies de billon.... Je vais vous dire sur quels articles des
modifications ont eu lieu en conséquence de l’amendement du sénat.
M. le président. - Ce sont les articles 2, 4, 6 et 24.
Ces articles sont
successivement mis aux voix et adoptés.
- La loi est
soumise, dans son ensemble, à l’appel nominal et elle est adoptée à
l’unanimité.
La séance est
levée à trois heures.