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Chambre des représentants de Belgique
Séance du jeudi 19 avril 1832 (séance du soir)
Sommaire
1) Interpellation relative à l’enlèvement du
gouverneur de la province du Luxembourg (Thorn) (Dumortier,
de Muelenaere, d’Elhoungne,
Dumortier, A. Rodenbach, Lebeau, de Muelenaere, d’Hoffschmidt, de Theux, d’Huart, Raikem, Dumortier)
2) Projet de loi portant le budget de l’Etat
pour l’exercice 1832 (département de l’intérieur). Encouragement aux
beaux-arts. Monument pour les victimes de septembre 1830 (Rogier),
société de médecince (C. Rodenbach), monuments pour
les victimes de septembre (Delehaye, Rogier,
de Theux), (Van Meenen, Dumortier), académie de Bruxelles (A.
Rodenbach), (Lebeau, Jullien,
d’Huart), culte catholique (érection de l’évêché de
Bruges) (Mary, de Roo, d’Elhoungne, de Haerne, de Muelenaere, Barthélemy,
Devaux, Jullien, d’Huart, Angillis, de Theux, d’Hoffschmidt, Jullien, Mary, Ch.
Vilain XIIII, Gendebien, Ch.
Vilain XIIII, de Theux, Fallon,
Destouvelles)
(Moniteur belge n°112, du 21 avril 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La séance est
ouverte à six heures trois quarts.
L’ordre du jour est
la suite de la discussion du budget.
INTERPELLATION RELATIVE A L’ENLEVEMENT DU
GOUVERNEUR DE LA PROVINCE DU LUXEMBOURG (THORN)
M. Dumortier.
- Messieurs, avant de reprendre la discussion du budget, il me semble que nous avons
à nous occuper d’un objet bien autrement important, c’est de l’arrestation de
l’honorable M. Thorn. Je demanderai aux ministres s’ils n’ont pas reçu depuis
la précédente séance de nouveaux renseignements.
M. le ministre des
affaires étrangères (M. de Muelenaere). - J’ai eu l’honneur de dire tantôt à la chambre tout
ce que le gouvernement avait appris sur cet événement. Je ne pense pas que
depuis lors on ait reçu aucune nouvelle qui soit de nature à être communiquée à
la chambre ; il est par conséquent inutile de s’occuper de cet objet en ce
moment.
Quelques voix. - Appuyé.
M. Dumortier.
- Un de nos honorables collègues, M. d’Hoffschmidt, a reçu d’un de ses parents une
lettre contenant des détails sur cet événement, il faut les connaître ; on ne
doit pas passer légèrement sur un fait aussi grave que l’enlèvement d’un membre
de la représentation nationale.
M. d’Elhoungne. - La discussion qui pourrait s’ouvrir à cet égard
serait tout à fait oiseuse et ne produirait aucun résultat ; je demande que
nous revenions au budget. (Appuyé !
appuyé ! L’ordre du jour !)
M. le président. - La parole est
à M. Rogier sur le budget.
M. Dumortier.
(vivement). - Je m’oppose à l’ordre du jour, et je demande au ministère de nous
dire la conduite qu’il tiendra dans le cas où il recevrait la nouvelle
officielle de l’enlèvement de M. Thorn. (C’est
inutile ! l’ordre du jour !)
M. A. Rodenbach. - Messieurs, la nouvelle n’est que trop vraie, M.
Watlet vient de me l’affirmer. Le digne sénateur, M. Thorn, a été arrêté par
les sbires du roi Guillaume. Selon moi, ce fait équivaut à une déclaration de
guerre. (Agitation. L’ordre du jour !
l’ordre du jour ! Non ! non !)
M. Lebeau. - Je viens appuyer l’ordre du jour, et personne
j’espère ne se méprendra sur mes intentions en faisant cette demande, pas plus
que sur celle de la chambre en l’adoptant ; car personne ici ne peut
revendiquer l’honneur de flétrir plus énergiquement que d’autres l’indigne
conduite des agents du roi Guillaume. Il ne peut y avoir l’indigne conduite des
agents du roi Guillaume. Il ne peut y avoir qu’une voix là-dessus. Mais est-ce
à dire qu’il faille en faire maintenant l’objet d’une discussion ? Non,
messieurs, au contraire, ill faut laisser au ministère le temps de recevoir des
nouvelles certaines sur cette affaire.
M. Lebeau. - Il vous dit que non, et il n’a aucun motif de
dissimuler à cet égard. Laissez-lui, je le répète, le temps de recevoir ses
informations nécessaires, et quand elles seront prises, le gouvernement fera
son devoir, comme la chambre le sien. Je le répète, ceci ne peut être l’objet
d’un débat en ce moment, et j’insiste pour l’ordre du jour ; non que je regarde
la question comme peu importante, mais parce qu’elle est évidemment prématurée.
(Appuyé ! appuyé ! l’ordre du jour !)
M. le ministre des
affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Vous sentez, messieurs, qu’il nous est impossible,
en ce moment, de donner des renseignements, que nous n’avons pas, sur le fait
de l’arrestation de M. Thorn. En le supposant constant, il faut, avant de nous
expliquer devant la chambre, que nous connaissions les circonstances de
l’événement et des faits qui y ont donné lieu. Le gouvernement sait tout ce
qu’il doit à M. Thorn, non seulement en sa qualité de membre de la
représentation nationale, mais comme fonctionnaire investi de toute sa
confiance, et sous ce rapport, la chambre peut être parfaitement rassurée sur
la conduite du gouvernement. Mais, je ne puis que répéter ce qu’on a déjà dit,
qu’en ce moment toute discussion serait oiseuse.
M. d’Hoffschmidt. - Ce n’était pas pour critiquer la conduite du
gouvernement, que j’avais fait ma motion dans la séance de ce matin ; au
contraire, je lui rend cette justice qu’il a fait beaucoup pour protéger les
malheureux et braves habitants du Luxembourg ; je n’avais voulu qu’appeler
l’attention sur un fait aussi grave, afin qu’il prît de nouvelles et énergiques
mesures, pour faire rendre M. Thorn à la liberté. J’ai en main la lettre qui
confirme son enlèvement ; si la chambre le désire, je lui en donnerai
connaissance.
Voix nombreuses.
- Lisez ! lisez !
D’autres voix. - Non ! non !
- La chambre
décide que la lettre sera lue.
M. d’Hoffschmidt. Lit la lettre ainsi conçue :
« Notre
gouverneur, s’étant rendu dimanche soir au château de Schoenfettz (fond de
Merche, à trois lieues et demie de Luxembourg), a été arrêté hier matin, à dix
heures, en passant dans un petit bois à proximité de son habitation, par des
maréchaussées hollandais, qui l’ont conduit à Luxembourg. Arrivé à la
Porte-Neuve, on l’a fait monter en voiture pour traverser la ville : le général
hollandais Goedecke était dans la même voiture. On a mis de suite M. Thorn en
prison. La députation a rendu compte de cette affaire au ministre de
l’intérieur, et vient d’écrire avec énergie aux généraux Goedecke et du Moulin
à Luxembourg, pour connaître les motifs de cette arrestation arbitraire. »
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux).
- Je réitère la déclaration, qu’il n’est arrivé au gouvernement d’autre avis,
que la lettre d’un simple employé, dont j’ai parlé ce matin.
M. d’Huart. - On se méprend sur le but dans lequel la motion a
été faite. Ce n’était que pour appeler l’attention du gouvernement sur le
guet-apens, qui présage d’autres événements sans doute, que la motion a été
faite. Mais déjà je sais que des ordres ont été données par le ministère, et
que des mesures sont prises pour protéger efficacement le Luxembourg.
M. le ministre de la justice (M. Raikem) donne l’assurance à la chambre, que toutes les
mesures désirables en pareille occasion ont été ordonnées aussitôt que la
nouvelle a été connue. (L’ordre du jour !)
M. Dumortier.
- Il y a méséance de passer à l’ordre du jour. (Agitation.)
- La chambre passe
à l’ordre du jour.
PROJET DE LOI PORTANT LE BUDGET DE L’ETAT POUR
L’EXERCICE 1832 (DEPARTEMENT DE L’INTERIEUR)
Discussion des articles
Chapitre VII. - Agriculture, industrie et
commerce, sciences et arts, service de santé
Article
2
La discussion est ouverte
sur l’article 2 du chapitre 7.
M. Rogier
se plaint de ce qu’on n’alloue pas assez pour l’encouragement des beaux-arts,
et spécialement de ce qu’on a oublié les promesses faites d’ériger un monument
aux braves de septembre. Il faut le dire, ajoute-t-il, la Hollande n’entend pas
les choses comme nous. Voyez les honneurs qu’elle décerne à ceux qu’elle
appelle ses héros et les monuments qu’elle leur élève ; comparez ce qui se fait
chez elle avec ce qui ne se fait pas chez nous. Le gouvernement provisoire
avait décidé qu’un monument serait élevé en
mémoire des victimes généreuses de septembre, sur la place St-Michel :
dix-huit mois se sont écoulés depuis, et rien n’a été fait.
Le peuple seul a
pris soin d’orner leur tombeau d’arbustes et de fleurs, mais on y cherche
vainement le monument promis ; c’est au nom de cet engagement sacré que je
viens prendre la parole, afin d’en réclamer l’exécution. Le gouvernement a
demandé pour cet objet 10,000 florins, et la section centrale a obtempéré à sa
demande avec cette singulière restriction, que ce ne serait qu’autant que la
générosité publique complèterait la somme nécessaire. Souvenez-vous, messieurs,
que la générosité publique a fait sa tâche, 400 mille florins de souscriptions
volontaires ont été versés dans la caisse du gouvernement, et certes cette
somme suffirait bien et au-delà, pour couvrir les frais du monument. Au reste,
des dons spéciaux ont été faits pour cet objet, je le prouve par le rapport du
ministre lui-même. On y voit que M. le comte Félix de Mérode a affecté à
l’érection du monument 16,000 florins qui lui revenait pour son indemnité comme
membre du gouvernement provisoire. M. Nicolas, en a donné 500. Je ne sais pas
pourquoi M. le ministre a borné à ses énumérations, car tous les membres du
gouvernement provisoire ont souscrit, chacun suivant ses moyens, mais aucune
souscription n’est au-dessous de 300 florins.
L’orateur
lit en outre le nom de divers autres souscripteurs, et termine en disant qu’il
proposera un amendement tendant à majorer de 5,000 fl. la somme demandée.
M. C. Rodenbach. - Avant de voter pour les subsides demandés pour
l’académie des sciences et belles-lettres de Bruxelles, pour la société
d’émulation de Liége et pour les deux écoles de musique, je crois devoir
témoigner ma surprise de ce qu’on refuse le léger subside de 300 fl.
Qu’accordait le roi Guillaume à la société des sciences médicales, qui s’est
vue ainsi dans la nécessité de suspendre la publication de ses annales, faute
de fonds. Il me semble cependant que dans un moment où des épidémies sévissent
de toute part, la publication d’un journal de médecine eût été d’un intérêt
majeur pour la société tout entière. Je demande que M. le ministre de
l'intérieur remplisse cette lacune.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux).
- Je n’ai pas eu connaissance que ce subside fût accordé.
M. C. Rodenbach. - J’ai en main copie d’une pétition adressée il y a deux
ans au ministre de l’intérieur pour le réclamer.
M. Delehaye
combat la proposition de M. Rogier, parce que, quoiqu’il soit le premier à
rendre hommage aux braves de septembre, il s’agit des deniers du peuple, il
faut y regarder à deux fois. Il n’est pas besoin, d’ailleurs, d’allocation plus
considérable, s’il est vrai, comme l’a dit M. Rogier, que la souscription se
soit élevée à 400,000 fl. (Il n’a pas dit
cela.)
M.
Rogier. - Je n’ai pas dit cela, j’ai dit que la générosité
publique avait fait ses œuvres en versant 400,000 fl. dans les caisses du
gouvernement pour venir à son secours. Je n’ai pas dit que cette somme fût
destinée au monument, mais que ces dons patriotiques avaient été faits pour
entretenir le feu du patriotisme qui avait opéré la révolution ; et j’ajoute
qu’il y aurait ingratitude de la part du gouvernement, après avoir reçu 400,000
fl. de dons, de refuser le monument qu’il doit aux hommes qui ont péri en défendant
la cause de la révolution.
Après
quelques mots d’explication de M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux)., M. Van Meenen demande la parole pour une motion
d’ordre.
M. Van Meenen. - Messieurs, nous ne nous reconnaissons pas dans la
discussion et, pour ma part, je ne sais pas sur quoi l’on discute.
M. le président. - Nous discutons sur l’article 2 ; M. Rogier a parlé sur la lettre O
et le ministre a répondu sur la lettre M.
M. Dumortier.
- Je demande la division des diverses paragraphes.
M. Jullien. - On s’entend d’autant moins, à ce qu’il paraît, que
beaucoup de membres croyaient discuter sur l’article premier, dont nous
n’avions adopté que deux littera, tandis qu’on discute maintenant sur l’article
2. On a escamoté la moitié de l’article premier.
M. le président. - Je prie la chambre de vouloir bien se souvenir qu’en mettant aux
voix la clôture ce matin, j’ai demandé expressément si on entendait que c’était
la clôture sur tout l’article, et on a répondu oui.
M. le président. - Si la chambre le veut, nous voterons paragraphe par paragraphe. (Appuyé !)
« A. Subside
à l’académie des sciences et belles-lettres de Bruxelles : fl. 4,000. »
M. A. Rodenbach. - Je partage l’opinion de la section centrale, que
l’académie des sciences et belles-lettres de Bruxelles a besoin d’une
réorganisation complète ; car, si je dois en croire la maligne clameur
publique, la majorité de ce corps savant fut sur le point de refuser un diplôme
de membre correspondant au célèbre chimiste anglais Davy, parce qu’ils ne le
connaissaient point. (Hilarité générale.)
Bref, messieurs, l’académie est veuve de son savantissime président, le prince
de Grave, qui, en sa qualité de mathématicien-calculateur, a trouvé bon de partir
pour la Hollande. (Nouvelle hilarité.)
J’aime à croire que l’académie n’attendra pas son retour pour se réorganiser.
M.
Lebeau demande qu’on discute sur
l’article tout entier et non paragraphe par paragraphe, car cette manière
entraînerait des longueurs interminables et serait, d’ailleurs, contraire aux
précédents de la chambre.
Combattue par M.
Jullien et M.
d’Huart, cette motion est
rejetée.
Le paragraphe A et
les paragraphes suivants sont adoptés sans discussion notable.
« B.
Bibliothèque de Bourgogne : fl. 1,900.
« C.
Observatoire astronomique de Bruxelles, fl. 5,433 50 c.
« D. Académie
des beaux-arts à Anvers : fl. 6,400.
« E. Académie
des beaux-arts à Bruxelles : fl. 2,000.
« F. Académie
des beaux-arts à Bruges : fl. 2,000.
« G.
Médailles d’argent à décerner annuellement : fl. 9,000.
« H. Pour
l’encouragement des sciences et des arts : fl. 7,000.
« I. Société
d’émulation de Liége : fl. 260.
« J. Ecole de
musique de Bruxelles : fl. 4,000.
« K. Ecole de
musique de Liége : fl. 4,000.
« L. Médaille
en l’honneur du régent : fl. 3,000.
« M. Primes
payées pour brevets d’invention : fl. 5,000.
« N. Musée
des arts et métiers : fl. 510.
« O. Monument
à ériger à la Place des Martyrs : fl. 10,000. »
C’est sur ce
paragraphe que M. Rogier propose une augmentation de 5,000 fl. ; elle est
adoptée.
« P. Ecole
industrielle. Portée pour mémoire. »
L’article 2 est
ensuite mis aux voix en entier et adopté.
Article
3
« Art. 3. Service
de santé : fl. 258,500. »
Cette allocation,
sur laquelle la section centrale ne propose pas de réduction, est mise aux voix
et adoptée.
Chapitre VIII. - Cultes
Article
premier
« Art. 1er.
Culte catholique : fl. 1,580,987. »
La section
centrale propose d’allouer cette somme globale et, en outre, de la majorer de
21,155 fl. pour l’érection de l’évêché de Bruges.
M. Mary. - A Dieu ne plaise que je me refuse d’accorder au
clergé les sommes qui lui sont nécessaires ; mais je désirerais avoir quelques
renseignements, car je ne trouve pas dans les développements tous les détails
dont j’ai besoin pour m’éclairer. Je désirerais savoir pourquoi il y a une si
grande disproportion dans les allocations affectées aux diverses provinces pour
le culte ; pourquoi, par exemple, on porte 189,650 fl. pour le Hainaut, tandis
que la province d’Anvers n’a que 164,600 fl.
Quant
à l’évêque de Bruges, j’ai déjà demandé si sa nomination devait se faire
d’après le concordat de 1801 ou d’après celui de 1827, qui a été arrêté entre
la cour des Pays-Bas et la cour de Rome. Comme cela dépend du saint-siège, je
crois qu’il est de la dignité et de l’honneur national d’ajourner le vote de
l’allocation qu’on propose de ce chef.
M.
de Roo appuie la majoration proposée
par la section centrale.
M. d’Elhoungne fait observer que les concordats de 1801 et de 1827
n’existent plus depuis la proclamation de la loi fondamentale, de la liberté
des cultes. Quant à la majoration, il pense qu’elle est inopportune, et qu’il
faut attendre avant de voter l’allocation pour l’érection du nouveau siège
épiscopal. Il ajoute que le sort du bas clergé, qui a déjà subi de grandes
réductions, mérite plus de sollicitude que celui du haut clergé.
M. l’abbé de Haerne appuie la proposition de la section centrale pour l’érection d’un
évêché à Bruges. Il soutient aussi que, d’après l’article 16 de la
constitution, il n’existe plus de concordats.
Quant au bas
clergé, il fait remarquer que personne ne connaît mieux ses besoins que les
chefs des diocèses, et qu’il faut s’en rapporter à eux.
M. le ministre des
affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je n’invoquerai le concordat de 1827 qui, comme on
l’a dit avec raison, a été aboli par l’article 16 de la constitution, que pour
faire remarquer que la nécessité d’un évêché à Bruges a été reconnue par le
Saint-Siège et par la nation belge. Si je suis bien informé, et c’est d’un
grand dignitaire du culte que je le tiens, le Saint-Siège à l’intention de
remplir cette vacature, et quand nous aurons voté le crédit, nul doute qu’il ne
s’empresse d’accéder à la demande qui lui sera faite aussitôt par le clergé.
M. Barthélemy fait observer que la somme demandée cette année pour
le culte catholique est plus forte que celle de 1830 et 1831, et il pense qu’on
devrait la restreindre au même taux. Quant à l’évêque de Bruges, ajoute-i-il sa
nomination dépend entièrement du saint-siège, à qui appartient seul le droit de
régler la circonscription des évêchés ; il faut donc attendre qu’il soit nommé
pour voter l’allocation et ne pas dire d’avance : Nous accordons une somme pour
le cas où un évêque serait nommé par-ci et un évêque par-là. (Rire général.)
M. Devaux. - Je ne crois pas non plus que l’on puisse réclamer
l’exécution des concordats qui sont abolis pour l’érection d’un évêché à Bruges
; mais il y a un engagement moral et de bonne foi pris à cet égard depuis
longtemps et que l’on doit remplir. Je ne partage point l’opinion de M.
Barthélemy, qu’il faut attendre la nomination pour voter l’allocation ; je suis
d’un avis tout contraire, et je pense qu’il faut la voter avant la nomination
pour ne point soumettre le nouvel évêque à une décision particulière de la
législature. Puisque nous avons le bonheur d’avoir un clergé qui aime la
liberté, n’hésitons point, messieurs, à accorder un crédit nécessaire pour un
point déjà résolu.
M.
Jullien.
- J’aurais désiré avoir des détails que je ne trouve pas dans le budget sur la
répartition de la somme considérable que nous allons voter pour le culte
catholique, et je crois que M. le ministre de l'intérieur sera à même de nous
les donner. Je veux bien voter tout ce qui est nécessaire au clergé, mais je
veux savoir comment il est payé, car, suivant un mot qu’il connaît aussi bien
que moi, il ne fait pas mettre la lumière sous le boisseau. Aussi longtemps que
le ministre ne m’aura pas donné des explications sur le point que je demande,
il est tout naturel que je n’en sache rien. (On rit.)
M. d’Huart pense aussi qu’il faut ajourner la proposition de la
section centrale, et que, dans le moment actuel, on ne doit voter que les
dépenses strictement nécessaires, pour consacrer le plus de fonds possibles à
des achats de canons et d’approvisionnements.
M. Angillis
fait observer que, bien que le concordat de 1827 n’existe plus, il en résulte
la preuve que la nécessité d’un évêché à Bruges a été reconnue, et il insiste
pour l’érection de cet évêché dans un pays où l’on ne compte, dit-il, que
quatre familles protestantes.
M. le ministre de
l’intérieur (M. de Theux).
- J’aurai l’honneur de répondre à M. Jullien que j’ai donné tous les détails
convenables à la section centrale sur les traitements du culte. Du reste, je
puis lui dire que la somme totale de l’article actuellement en discussion
servira à payer les traitements de l’archevêque, des évêques, des
vicaires-généraux, des chanoines, des curés de première classe et des annexes,
des professeurs des séminaires et des bourses affectées à ces séminaires, ainsi
que les frais des palais épiscopaux. Quant au moment du traitement des évêques,
il a été fixé par un arrêté du régent.
M. d’Hoffschmidt. Vote contre la majoration proposée par la section
centrale.
M. Jullien. - M. le ministre a trouvé le moyen de me répondre de
manière à ce que je ne sois pas plus avancé qu’auparavant. (On rit.) Je lui demande des détails, et
il me répond qu’il les a fournis à la section centrale, mais la section
centrale ce n’est pas moi. Je lui adresse la même interpellation : on a parlé
de chanoines et d’un état-major que je ne connais pas. (Nouveaux rires.) Il faut bien que j’aie des explications. Nul ne
respecte plus que moi le clergé quand il le mérite, mais je suis curieux de
savoir comment il est payé. La chambre donnerait d’elle une singulière idée si
elle ne tenait pas à avoir cette explication.
M. Mary insiste pour l’ajournement de la proposition de la
section centrale, par le motif qu’il a déjà signalé, et il interpelle de
nouveau le ministre pour avoir des explications sur la différence des diverses
allocations affectées aux provinces.
M. Ch. Vilain XIIII appuie les observations que M. Devaux a faites avec
autant de raison que de mesure, et combat l’opinion de M. Barthélemy. Quant au
bruit relatif à la nomination de l’archevêque de Malines, et qui consiste à
dire que le pape n’aurait fait cette nomination qu’après avoir consulté le roi
Guillaume, il sait pertinemment, dit-il, que ce n’est qu’une calomnie inventée
à dessein. Il profite de cette occasion pour justifier le saint-siège d’une
autre calomnie inventée contre lui et imprimée dans les journaux, de celle que
le pape aurait désapprouvé la révolution. Le roi Guillaume a fait demander par
le comte de Liedekerke si cet fait était vrai, et le pape a répondu
négativement par une note officielle.
-
La discussion est close sur l’article premier du chapitre VIII.
La majoration
proposée par la section centrale est mise aux voix et adoptée.
M. le président se dispose à mettre aux voix le chiffre total de
l’article premier.
M. Gendebien. - Mais il nous est impossible de voter une allocation
de 1,600,000 florins sans avoir du ministre les détails qu’on lui a demandés.
M. Ch. Vilain XIIII fait observer que M. le ministre de l'intérieur a
déjà expliqué que cette somme était destinée à payer les traitements de
l’archevêque, des évêques, des curés de première classe et des annexes, des
professeurs et des bourses des séminaires.
M.
Gendebien.
- Il est étonnant que le ministre ne s’explique pas lui-même ; ce n’est pas un
représentant qui doit le faire à sa place.
M. le ministre de l’intérieur (M. de Theux).- J’ai expliqué la destination du crédit, mais je n’ai
pas tous les détails présents à la mémoire.
M.
Fallon et M. Destouvelles demandent la remise à demain pour donner le temps à M. le ministre de
se procurer les détails.
- Cette
proposition est adoptée.
La séance est
renvoyée à demain à dix heures, et levée à neuf heures et demie.