Accueil Séances plénières Tables des matières Biographies Livres numérisés Bibliographie et
liens Note d’intention
Séance précédente Séance suivante
Chambre des représentants de Belgique
Séance du vendredi 17 février 1832
Sommaire
1) Pièces adressées à la chambre
2) Explications fournies par le gouvernement sur
des pétitions relatives au sort des habitants des territoires cédés par le
traité des 24 articles (essentiellement dans le Luxembourg) et des officiers
volontaires (de Muelenaere, d’Huart,
Berger, Ch. de Brouckere, Gendebien, Jullien, Gendebien, A. Rodenbach, Ch. de Brouckere, Gendebien,
Lebeau, Jullien, Gendebien, de Robaulx, H. de Brouckere, de
Muelenaere, Barthélemy, de
Robaulx, de Muelenaere, Lebeau,
H. de Brouckere, Gendebien,
de Robaulx)
3) Proposition visant à interpeler le ministre
de la guerre sur la passation d’un marché militaire (marché Hambrouck)
4) Fixation de l’ordre des travaux de la
chambre. Organisation provinciale et communale (Lebeau, Fallon, d’Huart, de Robaulx)
5) Projet de loi organisant le système monétaire
(Moniteur belge n°50, du 19 février 1832)
(Présidence de M. de Gerlache.)
La
séance est ouverte à une heure et quart.
Après
l’appel nominal, le procès-verbal est lu et adopté.
PIECES ADRESSEES A LA
CHAMBRE
M. Lebègue analyse plusieurs pétitions, qui sont renvoyées à la
commission.
EXPLICATIONS DU
GOUVERNEMENT SUR DES PETITIONS
M. le président. - L’ordre du jour appelle les explications de MM. les ministres sur
les pétitions qui leur ont été renvoyées.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Messieurs, le gouvernement
n’a pas attendu que des réclamations lui fussent adressées par les chambres,
pour s’occuper du sort des personnes qui ont laissé dans l’intérieur de la
ville de Luxembourg leurs familles et tous leurs intérêts.
Dans
les premiers jours de mon entrée au ministère, S. M. m’a chargé de transmettre
au gouverneur militaire de la forteresse de Luxembourg les dix-huit articles
préliminaires de paix ; la lettre, en date du 29 juillet, que j’écrivis à cette
occasion à S. A. le landgrave de Hesse-Hombourg, se trouve page 73 de mon
rapport du 14 janvier. Bien que cette pièce doive être connue de tous les
membres de la chambre, vous me permettrez d’en rappeler la fin.
« Il
sera doux à V. A. de pouvoir saisir l’occasion que lui offre le changement
survenu dans les rapports politiques de la Belgique pour soulager le sort de la
population luxembourgeoise qui, pendant vos quinze années de séjour parmi elle,
a su apprécier votre noble caractère et vos sentiments d’humanité. V. A. a trop
de grandeur d’âme pour aggraver, par des rigueurs inutiles et à la veille
d’arrangements définitifs, la situation des Luxembourgeois qui résident dans
l’intérieur de la forteresse, ou de ceux qui, l’ayant quittée, y ont laissé
leurs familles et leurs intérêts. »
Le
prince de Hesse-Hombourg étant absent, M. le commandant de place accusa
réception de ma lettre, en se bornant à annoncer qu’elle serait transmise à la
diète.
Celle-ci,
ayant pris connaissance de la demande du gouvernement belge, déclara qu’elle
n’avait reçu aucune notification officielle des préliminaires de paix, et
enjoignit au gouverneur de la forteresse de Luxembourg de ne pas se laisser
induire à changer en rien sa conduite vis-à-vis des autorités et sujets belges
: ce sont les expressions dont se sert la diète dans son protocole du 11 août,
inséré page 75 de mon rapport du 14 janvier.
Les
pièces jointes à ce rapport vous ont également appris que la diète a depuis
consenti à ce qu’il fût ouvert des négociations relatives au grand-duché de
Luxembourg, sur la base d’un dédommagement territorial, en exceptant toutefois
de l’échange la partie allemande. Les pleins pouvoirs donnés à la conférence le
13 septembre 1831 se trouvent page 87 de mon rapport du 14 janvier. Vous savez
que ces négociations ont eu pour résultant le morcellement de la province.
Le
gouvernement belge a pensé qu’il pourrait se prévaloir du consentement donné
par la diète pour invoquer, en faveur des Luxembourgeois allemands, l’article
21 du traité du 15 novembre stipulant une amnistie complète.
La
pétition des tirailleurs-francs a été renvoyée à mon département le 2 décembre
; le même jour, à l’issue de la séance, le secrétaire-général du ministère, a,
en mon absence motivé par un congé de S. M., adressé la lettre suivante à notre
envoyé extraordinaire, ministre plénipotentiaire à Londres.
« Bruxelles,
le 2 décembre 1831.
« Monsieur
le ministre,
« La
chambre des représentants vient d’ordonner le renvoi au département des
affaires étrangères d’une pétition de plusieurs officiers du ci-devant
9ème bataillon de tirailleurs-francs ;
la position des personnes qui ont fait partie de ce corps est digne de toute
notre sollicitude.
« Ce
bataillon a été organisé en mars dernier ; il était composé en grande partie de
Luxembourgeois appartenant au quartier allemand, et à la ville même de
Luxembourg.
« Ce
corps ayant été licencié, ceux des Luxembourgeois qui n’ont pu obtenir du
service dans l’armée belge ont cherché en vain à rentrer dans la ville de
Luxembourg, où ils ont laissé leurs familles et tous les intérêts : jusqu’à
présent ils ont été impitoyablement repoussés par le commandant de place, qui
paraît avoir déployé une extrême sévérité dans cette circonstance.
« Le
29 juillet, j’ai adressé au prince de Hesse-Hombourg la lettre ci-jointe ; S.
A. était absente, et ma démarche est restée sans résultat.
« Les
motifs politiques qui pouvaient s’opposer à la rentrée de ce petit nombre de
Luxembourgeois dans leurs foyers ont cessé ; leur fermer encore aujourd’hui
l’accès de la ville serait aller au-delà de ce qu’exige la prudence politique.
L’autorité militaire peut d’ailleurs les surveiller, et prendre à leur égard
des mesures de police. Ils ont droit à l’amnistie stipulée par l’article 21 du
traité du 15 novembre 1831 qui, étant signé par le plénipotentiaire de S. M. le
roi de Prusse à Londres, ne peut être récusé par le général prussien à
Luxembourg.
« Veuillez
faire connaître cet état de choses à M. le baron Bulow, et réclamer ses bons
offices près de la cour de Berlin.
« Agréez,
etc.
« Pour
le ministre en congé :
« Le
secrétaire général du ministère,
« Signé,
Nothomb. »
Il a été écrit, dans les mêmes termes, à notre envoyé
à Paris, pour l’inviter à réclamer également les bons offices des ministres
prussiens.
Nos
envoyés ont mis le plus grand empressement à satisfaire à l’invitation qui leur
était faite, et, dès le 9 décembre, M. Van de Weyer m’informa que le
plénipotentiaire prussien avait transmis nos réclamations à son gouvernement.
Les
menées par lesquelles on a cherché à agiter le grand-duché de Luxembourg dans
les derniers jours de décembre, et à y opérer une contre-révolution, n’ont pu
qu’influer d’une manière défavorable sur nos réclamations et retarder l’époque
où les autorités militaires de Luxembourg croiront pouvoir, sans danger, permettre
aux hommes qui s’étaient si généreusement associés à notre cause de rentrer
dans nos foyers. Toutefois, je n’ai pas hésité à engager nos agents
diplomatiques à renouveler leurs démarches.
-
Il est ensuite donné lecture du rapport de M. le ministre de la guerre sur la
pétition des tirailleurs-francs, rapport qu’il avait adressé le 26 décembre au
bureau.
M. d’Huart.. - D’après les explications que vient de donner M. le
ministre des affaires étrangères, je vois que malheureusement ses efforts ont
été inutiles jusqu’à présent pour faire respecter le prescrit de l’article 21
du traité de paix du 15 novembre 1831.
Je
rends hommage aux démarches philanthropiques de ce ministre, et je me plais à
lui en exprimer ma reconnaissance au nom de mes compatriotes.
Mais,
messieurs, si notre diplomatie est impuissante pour protéger des malheureux qui
ont tout exposé pour le succès de la révolution, et qui sont aujourd’hui
l’objet de vexations formellement proscrites par les stipulations d’un acte
diplomatique, le gouvernement est-il dans l’impossibilité de soulager leur
infortune ? Certainement, non.
Je
ne ferai pas à la représentation nationale l’injure de croire qu’en votant au
département de la guerre les énormes crédits qu’il engouffre, elle n’ait pas
entendu qu’il serait pourvu aux dépenses commandées par l’équité, l’humanité et
la reconnaissance nationale. Lorsque nous voyons des entrepreneurs s’enrichir
avec les deniers de l’Etat, et faire chaque jour un bénéfice avoué de 5 à 6
mille francs, nous ne saurions voir avec déplaisir M. le ministre de la guerre
allouer quelques florins par mois à des hommes honorables réduits à la misère
pour avoir couru au secours de la patrie lorsqu’elle était en danger, et avoir
mis leur vie à sa disposition.
Dans
ses explications, M. le ministre de la guerre dit qu’aux termes de l’article 3
de l’arrêté de M. le régent, en date du 8 avril dernier, les officiers de
tirailleurs n’avaient aucun droit à la conservation de leurs grades, mais que
cependant ceux dont la conduite avait été exempte de reproche furent mis à même
de profiter du dernier paragraphe de l’article précité, en subissant un examen,
à la suite duquel 26 sur 61 d’entre eux furent placés dans la ligne et 6 dans
la garde civique ; les autres, jugés incapables, n’ont pu être employés.
Il
ajoute que trois seulement des quatre pétitionnaires en faveur desquels je
m’intéresse ont passé cet examen, et que le quatrième, le sieur Gelhart, ne
figure pas sur les contrôles du 9ème bataillon ; ceci résulte d’une erreur
commise par l’employé du greffe, qui a fait la copie de la pétition envoyée à
M. le ministre, et qui a mal écrit ce nom : les signataires sont, comme on peut
s’en assurer, les nommés Schlim, Geyer, Motte et Printz, qui tous figurent sur
les contrôles du 9ème bataillon.
D’après
ce qui précède, vous croiriez sans doute que les quatre pétitionnaires qui ont
été admis à l’examen susmentionné, passé devant le général Goethals, ont été
jugés incapables, puisqu’aucun d’eux n’a été replacé. Pour que M. le ministre
ait agi sans partialité, il faudrait absolument que cela fût ainsi : eh bien !
je vais vous prouver le contraire.
Un
de ces officiers, plus tenace que les trois autres, voyant qu’ils ne recevaient
aucune réponse, plusieurs semaines après leur examen, alla trouver le général
Goethals, alors au camp de Diest, pour savoir positivement de lui quelles
avaient été ses propositions sur son compte. Il en reçut la pièce dont je vais
avoir l’honneur de vous donner lecture.
L’orateur
lit cette pièce ainsi conçue :
« Le
général de division Goethals, ayant été chargé par le département de la guerre
de l’examen des officiers qui ont précédemment servi dans les bataillons de
tirailleurs-francs, déclare avoir proposé le sieur Geyer (Jean-Baptiste) pour
commander une compagnie de gardes civiques, en fondant cette proposition sur sa
bonne conduite, ses antécédents et ses anciens services. L’âge seul de cet
officier s’est opposé à ce qu’il fût proposé pour le service actif.
« Au
camp de Diest, le 20 octobre 1831
« Le
général commandant les troupes réunies au camp de Diest,
« Ch.
Goethals. »
Vous
voyez donc que, loin d’avoir reconnu de l’incapacité ou de l’inconduite chez
cet officier, l’examinateur, M. le général Goethals, déclare tout le
contraire ; seulement il allègue qu’il l’a proposé pour la garde civique
et non pour le service actif, à cause de son âge, ce qui est assez étrange ;
car cet homme, qu’on voudrait faire passer pour un vieillard, n’a que 45 ans,
et, j’ose l’affirmer, il n’est peut-être pas dix officiers dans toute l’armée
plus vigoureux que lui et aussi capables de supporter les fatigues de la
guerre. J’en appelle, à cet égard, au témoignage de mes collègues du Luxembourg
qui le connaissent.
M.
le ministre de la guerre ne donne aucune suite à la proposition du général
Goethals, et le sieur Geyer se trouve aujourd’hui dans la nécessité de recourir
à votre protection ; il est donc évident qu’il a été l’objet d’une exception
réprouvée par la justice distributive.
Les
trois autres pétitionnaires n’ayant pas fait la même démarche que leur
confrère, je ne puis produire pour eux des pièces analogues à celle dont je
viens de vous donner connaissance ; mais il est permis de croire qu’ils sont
dans le même cas que le sieur Geyer.
Il
est une chose digne de remarque, messieurs, et sur laquelle j’appellerai
spécialement votre attention, c’est que le 9ème bataillon de tirailleurs
luxembourgeois, composé d’une quantité d’anciens militaires, est le seul des 10
bataillons de volontaires licenciés dont M. le ministre de la guerre n’ait pas
replacé un seul officiel ; et cependant ce bataillon est l’un de ceux contre
lesquels il ne s’est jamais élevé la plus légère plainte, et dont la
comptabilité a été parfaitement assurée.
Messieurs,
quand même les pétitionnaires, dont je plaide la cause, n’auraient à invoquer
que leur position particulière, pour réclamer à l’Etat des moyens d’existence,
il faudrait, pour être justes, les leur accorder aussi longtemps que cette
position ne sera point changée. N’est-ce pas, en effet, le gouvernement belge
la cause de leur malheur ? N’est-ce pas pour avoir répondu à son appel qu’ils
sont aujourd’hui repoussés du lieu où ils vivaient autrefois dans l’aisance, du
fruit de leur industrie et de leur travail, au sein de leurs familles ?
Que
M. le ministre de la guerre se rappelle qu’il contresigna, le 11 mars 1831,
cette belle proclamation du régent, pleine d’énergie et de dignité, qui porta
au dernier point l’enthousiasme des Luxembourgeois, et il se persuadera que
lui-même a contribué à la démarche patriotique qui vaut aux hommes en faveur
desquels j’élève aujourd’hui la voix tous les maux qu’ils souffrent ; que M. le
ministre médite attentivement les passages suivants de cet acte, l’un des plus honorables
de la régence : « Luxembourgeois, la guerre a prononcé entre le roi
Guillaume et nous, et l’autorité légitime est celle que la volonté nationale a
fondée. Vous n’êtes pas étrangers à nos combats, à nos victoires, vous vous
êtes spontanément associés à la révolution belge, et les noms de vos
volontaires sont inscrits dans l’histoire de nos journées.
« Luxembourg,
restez unis et fermes : au nom de la Belgique, acceptez l’assurance que vos
frères ne vous abandonneront jamais. » Que M. le ministre, dis-je, médite
ces passages de la proclamation à laquelle il s’est associé, et il ne pourra
rester sourd aux réclamations qu’il m’était un devoir sacré d’appuyer de tous
mes efforts.
Avant
de terminer, qu’il me soit permis de dire deux mots de la doctrine mise en
avant dans la séance de mardi dernier, et par laquelle M. Devaux prétendait
introduire comme une règle de nos débats que, lorsqu’un ministre aurait donné à
la chambre des explications quelconques sur une pétition, tout serait fini.
Si
une pareille doctrine était admise, incontestablement le droit de pétition
pourrait devenir illusoire ; car, au moyen d’une réponse quelconque, les
ministres auraient en toute occasion un moyen commode d’éconduire les demandes
les plus fondées.
C’est d’une manière beaucoup plus libérale, messieurs,
qu’il faut entendre ce précieux droit consacré par l’article 43 de la
constitution. Les représentants du peuple doivent toujours conserver la faculté
de présenter à la tribune les observations qu’ils jugent utiles.
Je
sais que sur une infinité de pétitions, et notamment sur celle qui donne lieu à
la présente discussion, le pouvoir exécutif peut, en dépit de nos observations
et de l’équité même, refuser toute espèce de suite ; mais, lorsqu’il en agit
ainsi au mépris des arguments irréfutables qui ont retenti au sein de la
représentation nationale, l’opinion publique est là pour frapper de sa terrible
réprobation le ministre obstiné dans son refus d’accueillir de justes plaintes,
et j’aime à croire qu’il s’en trouverait peu d’assez imprudents pour braver ce
jugement : l’exemple des conséquences d’un semblable entêtement est trop récent
pour qu’on l’ait oublié. J’ai dit.
M. Berger. - Messieurs,
je prends la liberté de présenter quelques considérations tendantes à établir
que les tirailleurs-francs luxembourgeois ne sont pas aussi sans droit à
quelques secours que M. le ministre de la guerre veut bien le supposer. En
effet, messieurs, on ne saurait trop faire attention à la position spéciale
dans laquelle se trouvent les pétitionnaires, établis dans la ville même de
Luxembourg ; ils y vivaient honorablement au sein de leurs familles. Aussi, si
après le licenciement des corps-francs, ils avaient pu retourner à Luxembourg,
le produit de leur travail aurait pu les nourrir après comme avant la
révolution, et vous n’auriez pas aujourd’hui à vous occuper de leurs
réclamations ; mais la rentrée dans la ville leur fut interdite, et cela,
messieurs, en haine du gouvernement belge ; et, dans cet état de choses, n’est-il
pas juste que ce même gouvernement vienne à leur secours, au moins jusqu’au
moment où ils puissent rentrer au sein de leurs familles ? Il y a plus,
messieurs, c’est aux applaudissements de toute la population de la ville de
Luxembourg que les pétitionnaires étaient venus se ranger sous le drapeau belge
; ils avaient, pour ainsi dire, été choisis par
leurs concitoyens comme les plus braves et les plus dignes de les représenter ;
leur réputation, comme ayant avec honneur servi dans l’armée française, était établie,
non seulement dans l’enceinte de la ville, mais dans une partie de la province
; les vœux de toute une population accompagnaient leur départ. Cependant, leur
courage n’a servi qu’à les rendre malheureux, qu’à les réduire à la mendicité.
Je vous laisse donc à penser, messieurs, quel sentiment doit inspirer la
conduite du gouvernement à tous les Luxembourgeois qui connaissent les
pétitionnaires et l’abandon dans lequel ils sont laissés. Sommes-nous donc déjà
si forts que, de sa hauteur, notre gouvernement puisse traiter avec autant de
dédain le sentiment public ? Je regarde donc le secours réclamé par les
pétitionnaires comme une dette sacrée, non seulement envers eux, mais envers
tous les Luxembourgeois. Eh quoi ! avec un budget de tant de millions, à côté
de tant de gros traitements, il ne resterait plus une obole pour le courage
malheureux ? Messieurs, je n’ajouterai plus qu’un mot : lors des derniers
événements du Luxembourg, si ceux que notre gouvernement a laissés manquer de
moyens de subsistance dans les environs de la forteresse avaient pris fait et
cause pour le roi Guillaume, bien du mal aurait pu s’ensuivre. J’ai été sur les
lieux, et vous pouvez m’en croire. Mais ces braves ont refusé l’or que
Guillaume prodiguait à pleines mains ; leur patriotisme l’emporta sur leur état
de détresse et l’abandon dans lequel ils se trouvent. Si je le dis, ce n’est
pas qu’ils veuillent s’en faire un titre, ils savent bien qu’ils n’ont fait que
remplir un devoir ; mais aussi, messieurs, que le gouvernement remplisse le
sien, et qu’il ne les laisse pas périr de misère.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere) fait observer qu’on s’était trompé sous le nom d’un des
pétitionnaires, et qu’il lui est impossible de répondre maintenant à son égard.
M. Gendebien. - Une erreur de nom ne fait
rien à l’affaire ; peu importe celui qui le réclame. L’honorable membre
rappelle les circonstances où ont été créés les bataillons de
tirailleurs-francs, et il soutient que, d’après l’arrêté de M. le régent, où
les devoirs de ces corps sont déterminés, ils ont pris l’engagement de servir
jusqu’à la paix, mais aussi que le gouvernement a pris, de son côté,
l’obligation de leur conserver leur rang et leur solde pendant tout le temps où
l’on serait en état de guerre, et l’on y est encore.
Il
cite l’article 7 de cet arrêté, pour prouver que le gouvernement n’avait pas le
droit de les licencier, et il s’appuie, en outre, sur une consultation des
avocats de Bruxelles rédigée dans leur intérêt. Il déclare, en outre, que les
pétitionnaires ont le droit d’attaquer personnellement le ministre de la guerre
devant les tribunaux, et qu’il est prêt à soutenir leur demande.
M. le
ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - On vient d’élever une
question de droit sur laquelle je prie la chambre de vouloir bien me laisser
répondre quelques mots. On a prétendu
que l’obligation était réciproque pour le gouvernement et pour les militaires.
Je ferai observer que l’Etat n’est jamais obligé de maintenir un corps sous les
drapeaux plus longtemps qu’il n’en est besoins : c’est toujours ainsi qu’on l’a
entendu, et non autrement. On dit que c’est une obligation qu’il faut payer.
Peu importe au ministère, messieurs, de payer tel ou tel article ; mais il doit
veiller à ce que l’on ne prodigue pas les deniers de la nation. Quant à la
consultation des avocats que l’on a invoquée, j’y opposerai la décision d’une
partie de la chambre. Sur une pétition semblable la commission avait conclu à
l’ordre du jour, et la chambre était sur le point d’adopter ces conclusions,
lorsque par une lettre les pétitionnaires demandèrent l’ajournement. Toujours
est-il que votre commission des pétitions avait proposé l’ordre du jour. Je
puis donc opposer à un avis venant du dehors une opinion arrêtée dans la
chambre elle-même.
M. Gendebien s’attache à démontrer, contrairement à ce qu’a dit M.
le ministre de la guerre, que l’engagement du gouvernement et du soldat est
réciproque ; qu’il s’agit ici de ce qu’on appelle en droit un contrat bilatéral
; que c’est ainsi que l’entendait les tirailleurs : car ils n’auraient pas
quitté la carrière qu’ils avaient embrassée, et ils n’auraient pas fait des
sacrifices pour s’équiper, s’ils avaient pu penser que leur licenciement fût
laissé au caprice d’un ministre. Quant à la conclusion à l’ordre du jour sur
une pétition du même jour, il a dit qu’il n’en a aucune connaissance, qu’il
faudrait faire une perquisition au greffe ; mais qu’il se rappelle bien qu’il y
a 15 jours, une de ces mêmes pétitions a encore été renvoyée au ministre. Il
ajoute, pour répondre à M. Ch. de Brouckere, que les ministres, en effet, doivent
être parcimonieux des deniers de l’Etat, non pas quand il s’agit du prix de
l’honneur, mais des entreprises des fournisseurs ; et il déclare qu’il est à
même d’établir que M. Hambrouk gagne au-delà de 5,600 florins par jour.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - Je me tais en ce moment sur
les reproches que l’on m’adresse relativement au marché Hambrouk. Une
proposition a été déposée, lue et prise en considération. Qu’on attende le jour
de la discussion, et je prouverai d’une manière évidente, et par des chiffres,
que dans cette circonstance, comme toujours, je n’ai fait que ce que j’ai à
faire.
M. Jullien cite aussi l’article 7 de l’arrêté de M. le régent et
la consultation des avocats de Bruxelles, et soutient, comme M. Gendebien, que
le contrat était bilatéral, et engageait le gouvernement comme les tirailleurs
jusqu’à la paix. Il fait observer qu’une pareille question intéresse toute
l’armée, et il invite M. le ministre à donner des explications plus étendues.
M. le
ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - En réponse à l’article 7 de
l’arrêté qu’ont invoqué deux honorables membres, je citerai, à mon tour,
l’article 3 de ce même arrêté. (M. de Brouckere donne lecture de cet article,
où il est dit que les grades de ces corps-francs ne donneront pas à ceux qui en
sont revêtus le droit d’être placé dans l’armée active après leur
licenciement.)
M. Jullien. - Je ne connais pas bien l’arrêté, je n’en ai sous
les yeux que l’article 7 ; mais je ferai observer que des brevets avaient été
délivré à plusieurs de ces officiers par le gouvernement provisoire. Voici un
brevet de capitaine : je me trompe, messieurs, c’est un brevet de deuxième
lieutenant ; je suis bien fâché… (Hilarité.)
-
On fait observer à l’orateur que ce lieutenant est d’une autre catégorie.
M. Gendebien. - L’article 3, qu’a invoqué
M. le ministre de la guerre, ne change rien à la question ; car à quelle époque
les officiers des corps-francs n’auront-ils pas droit d’être replacés dans
l’armée active ? Après le licenciement ; et quand doit avoir lieu ce
licenciement ? A la paix. Or, nous sommes toujours en état de guerre. Ainsi ma
démonstration reste entière.
L’orateur
ajoute qu’à part toute l’injustice qu’on leur a faite, il y a eu une grande
faute politique à renvoyer sans pain des troupes aussi braves qui valaient à
elles seules toute une armée. Il rappelle leur ardeur lors de l’envahissement
des Hollandais, et répète qu’il est prêt à leur consacrer, devant les
tribunaux, les connaissances de droit qu’il possède.
M. A. Rodenbach dit qu’il ne faut point être avocat pour décider une question
aussi simple ; et il soutient que les pétitionnaires ont des droits à la
sollicitude du gouvernement.
M. le ministre de la guerre (M. Ch.
de Brouckere) Répète que le
gouvernement n’était pas engagé à l’égard des tirailleurs-francs, et il
demande, par exemple, si l’armée étant de 50,000 hommes engagés pour cinq ans,
le gouvernement ne pourrait pas la réduire de 25,000 hommes. Evidemment il
aurait ce droit. Eh bien ! il en est de même pour les corps-francs.
M. Gendebien. - Il est impossible que ce
soit là le sens de l’arrêté. J’invite M. le ministre à consulter M. d’Hane, qui
en est l’auteur, et je suis sûr qu’il ne l’entend pas comme lui.
________________
M. Lebègue, l’un des secrétaires, lit ensuite un long rapport de
M. le ministre de la guerre sur diverses pétitions des tirailleurs de la Meuse.
M. Gendebien demande la parole.
M. Lebeau. - Je la demande pour faire une motion d’ordre. Il est
impossible d’engager une discussion sur les explications des ministres, sans
qu’une proposition formelle soit faite à cet égard ; car à quoi aboutirait-elle
? A rien. La chambre ne pourrait prendre aucune décision. Je conçois que, quand
la matière est grave, on veuille examiner les explications fournies par MM. les
ministres ; et voilà pourquoi je demanderai l’impression et la distribution du
rapport, pour que chacun de nous en ait connaissance. Ensuite, si un des membres
de l’assemblée le juge convenable, il pourra déposer une proposition sur le
bureau. Mais, si l’on continue à discuter, cela ne servira à rien, absolument.
M. Gendebien soutiendra une thèse, M. le ministre ou autres une thèse
contraire, et il sera impossible à la majorité de se prononcer : car il n’y
aura rien à mettre aux voix. Je veux bien qu’il y ait une discussion, mais sur
une proposition formelle ; et je demande l’impression, afin que tous les
membres aient une connaissance exacte du rapport.
M. Jullien. - Il n’y a pas de mal qu’il y ait eu une discussion
sur les explications ministérielles, car le ministère pourra en tirer quelque
fruit. Cependant je pense comme M. Lebeau que, pour mettre plus d’ordre et de
régularité dans nos débats, il serait nécessaire qu’une proposition fût faite à
cet égard. Il me semble que la chambre ne refusera pas d’ordonner l’impression
pour éclairer la chambre, et qu’ensuite chacun de nous avise à ce qui reste à
faire.
M. Gendebien. - Je ne m’oppose pas à ce que le rapport soit
imprimé, quoique cela doive occasionner un retard de plusieurs jours. Je
croyais que nous pouvions réfuter, dès aujourd’hui, les explications du
ministre de la guerre, et que, si nous parvenions à établir le droit des
pétitionnaires, la question était décidée. Je suis tout prêt à établir ce droit
; mais si la chambre adopte une marche plus longue, je ne puis l’en empêcher :
seulement je prierai le bureau de faire mettre dans l’impression le plus de
promptitude possible.
M. le président se dispose à mettre l’impression aux voix.
M. de Robaulx. - Je ne comprends pas la voie
dans laquelle vous voulez entrer ; car plusieurs fois déjà la cause des
pétitionnaires a été plaidée dans cette chambre, et je puis dire avec succès.
Les explications que nous avons demandées ne nous satisfont pas : il faut une
décision. Maintenant que vous renvoyez le rapport qui contient ces explications
à l’impression, où cela vous conduira-t-il ? A rien. Si la chambre veut obtenir
un résultat, il faut nommer une commission, sans passer par toutes les
formalités du règlement, comme on l’a fait pour le marché Hambrouk. Quant au
conflit qui existe entre un ministre et la chambre, je ne sais qu’un moyen de
le faire cesser, je ne connais qu’un moyen de faire marcher tous les ministres
: c’est de leur refuser des subsides… (Quelques
applaudissements se font entendre dans les tribunes publiques.)
M. le président. - J’invite les personnes qui sont dans les tribunes
à garder le silence.
Après
cet incident,M.
de Robaulx insiste pour que
l’on nomme immédiatement une commission, et fait remarquer qu’il y a nécessité
d’en finir d’une manière ou de l’autre avec les pétitions des volontaires, sur
lesquelles il y a une discussion presque chaque semaine. Cette commission
décidera ensuite si la question doit être portée devant les tribunaux.
M. H. de Brouckere. - J’ai évité de prendre la
parole dans le cours de la discussion qui a précédé celle-ci, et la chambre
appréciera facilement les motifs de mon silence. Sans ces motifs, il ne
m’aurait pas été difficile de réfuter la consultation des avocats dont on s’est
appuyé, quoique je ne sache pas s’il est bien parlementaire de venir entretenir
la chambre d’une pareille pièce. Mais j’ai cru devoir répondre deux mots à M.
de Robaulx relativement à la proposition qu’il vient de faire.
L’orateur
soutient qu’il n’y a dans le règlement aucun article qui autorise une pareille
commission, et il pense que M. de Robaulx, qui a donné tant de preuve de son
bon jugement, en demeurera d’accord avec lui. Si la chambre est d’un avis et le
ministère d’un autre, ajoute-t-il, vous avez deux moyens en votre faveur :
d’abord refuser le budget, ou bien, si l’époque du vote du budget est encore
éloignée, rejeter toutes les lois que vous présentera le ministre auquel vous
n’aurez pas de confiance, en expliquant le motif de votre refus.
Quant
à moi, je déclare que j’en agirai toujours ainsi quand je verrai entrer au
ministère un homme qui ne m’inspirerait pas de confiance.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Un honorable préopinant a
eu raison de dire que la question était de la plus haute importance, et qu’elle
intéressait, non seulement quelques individus, mais l’armée tout entière ; j’ajouterai
à mon tour qu’elle n’intéresse pas seulement l’armée, mais encore tout le pays
; car le pays a intérêt à voir maintenir l’ordre et la discipline dans les
rangs de ses défenseurs, et cette question, qui se reproduit sans cesse et que
l’on plaide avec beaucoup de chaleur sans en avoir examiné le fond, tend à
introduire l’insubordination. Je désire donc qu’elle soit examinée à fond et
tranchée définitivement. Maintenant je déclare que je suis de l’avis de M.
Lebeau, et son argument me paraît sans réplique. Mon collègue, M. le ministre
de la guerre, vous a présenté un rapport détaillé sur la position de chacun des
pétitionnaires. D’après les termes de votre règlement, vous pouvez le faire
imprimer, afin que chacun de MM. les membres y puise les lumières dont il a
besoin ; et, si quelqu’un ensuite croit devoir soumettre à cet égard une
proposition à la chambre, cela lui est permis, car il a le droit d’initiative.
Mais je désire qu’il en soit ainsi pour un autre motif encore.
On a été jusqu’à dire qu’il y avait conflit entre M.
le ministre de la guerre et la chambre ; on a dit qu’il paraissait s’entêter
dans son opinion, tandis qu’il est bien évident qu’il n’a ici aucun intérêt
personnel et qu’il n’a en vue que de ménager les deniers du trésor. Je souhaite
que le gouvernement fixe son attention sur les tirailleurs luxembourgeois, que
je connais plus particulièrement ; mais je me demande si, comme on l’a
prétendu, il existe un conflit entre le ministre de la guerre et la chambre, et
je réponds : Non, il n’y a pas de conflit. Que la majorité prononce, et M. le
ministre se conformera à sa décision. Chaque fois qu’une pétition de cette
nature se présente, cinq ou six membres seulement prennent part à la
discussion, et la majorité se tait, faute de renseignements. Il faut,
aujourd’hui, qu’elle soit éclairée et se prononce, car l’opinion de la majorité
est la règle de conduite du gouvernement. Mais il faut, pour cela, qu’une
proposition formelle soit faite. Ensuite, interviendra une décision qui sera
une loi pour tous, pour M. le ministre de la guerre comme pour les autres. (Mouvement d’approbation.)
M. Barthélemy. - Messieurs, on a dit qu’il
fallait refuser le budget au ministère pour les forcer à rendre justice aux
pétitionnaires ; je pense, moi, qu’il faut au contraire porter au budget le
traitement qu’on veut accorder à ces gens-là. (Hilarité générale.)
M. de Robaulx. - Je répondrai d’abord à M.
le ministre des affaires étrangères, qui a prétendu qu’il n’y avait que 5 ou 6
orateurs qui parlaient ordinairement sur la question sans l’avoir examinée ;
que dire aux gens : « Vous parlez de ce que vous ne connaissez pas »
n’est guère parlementaire.
M. le ministre
des affaires étrangères (M. de Muelenaere). - Je demande la parole.
M. de Robaulx. - Ensuite je répondrai à M.
de Brouckere cadet… (Rire général.) A
M. Henri de Brouckere, veux-je dire.
L’orateur
s’attache à réfuter l’argument de M. H. de Brouckere en disant qu’il ne faut
pas s’attacher seulement à la lettre ; car, selon un vieil adage de droit :
« La lettre tue et l’esprit vivifie. » Il persiste à demander la
nomination immédiate d’une commission, et dit que, si la chambre ne procède pas
ainsi, elle ne fait déjà pas trop d’ouvrage, elle en fera encore bien moins. (On rit.)
M. le ministre des affaires étrangères (M. de
Muelenaere). - L’honorable
membre a mal saisi ma pensée. Je ne blâme personne de plaider la cause des
volontaires ; je ne fais de reproche à personne d’en parler avec chaleur, car
je sais que les motifs des orateurs qui les soutiennent sont très honorables.
Voici quelle était ma pensée : c’est que cinq ou six membres seulement se
livraient à des développements sur des pétitions de cette nature, sans en bien
connaître le fond, tandis que le reste de la chambre se taisait. Mais ce
reproche, je ne l’adresse pas plus aux autres qu’à moi-même ; car plusieurs
fois il m’est arrivé de regretter d’avoir parlé à l’improviste sur une question
que je ne connaissais pas bien.
M. Lebeau. - Je persiste à demande
l’impression du rapport de M. le ministre, et je ne crois pas que l’on puisse
adopter une autre marche.
L’honorable
membre réfute une partie des observations de M. de Robaulx, et termine ainsi :
Je ne pense pas, comme M. de Muelenaere, que le ministre de la guerre devra se
conformer à la décision de la majorité. Non, messieurs ! Quand un ministre a
une opinion consciencieuse, et qu’il n’en croit pas devoir changer, il ne cède
pas, mais se retire.
M. le ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere) incline la tête en signe d’assentiment.
M. Lebeau. - Quant à moi, je déclare
que, si je me trouvais dans une pareille position, je ne me laisserais pas
entraîner par l’opinion de la chambre, et je me retirerais à l’instant.
M. H. de Brouckere réfute aussi l’opinion de M. Gendebien, et soutient
que sa proposition n’est autorisée ni par l’esprit, ni par la lettre du
règlement ; et il fait remarquer que le précédent sur le marché Hambrouck, qu’a
invoqué l’orateur, n’est pas du tout semblable au cas qui se présente, car la
proposition de M. Jullien a passé par toutes les formalités du règlement.
Après
une réplique de M. Gendebien, qui propose de renvoyer le rapport à la commission
des pétitions, et de nouvelles observations de M. de Robaulx, la question de l’impression du rapport proposée par
M. Lebeau est mise aux voix et adoptée à une forte majorité.
-
Le renvoi à la commission des pétitions, demandé par M. Gendebien, est rejeté
après une double épreuve.
PROPOSITION VISANT A
INTERPELER LE MINISTRE DE LA GUERRE SUR LA PASSATION D’UN MARCHE MILITAIRE
(MARCHE HAMBROUCK)
M. le président. - La suite de l’ordre du jour est le rapport ordinaire des pétitions ;
mais M. Jonet demande la parole pour faire le rapport de la section centrale
sur la proposition de M. Jullien.
M. Verdussen. - Les explications
ministérielles ne sont pas épuisées ; il y a encore une pétition des habitants
d’Anvers.
M. le
ministre de la guerre (M. Ch. de Brouckere). - J’ai eu l’honneur de dire à
l’honorable membre lui-même que les demandes des deux pétitionnaires de la
ville d’Anvers, qui ont été expropriés, ont été liquidées.
M. Jonet
présente le rapport de la section centrale sur la proposition de M. Jullien,
dont la conclusion est ainsi conçue :
« Il
sera nommé, par la voie du scrutin et à la majorité des suffrages, une
commission de sept membres, chargée d’examiner si le marché Hambrouk est
onéreux au pays et en quoi ; et, dans ce cas, fera tel rapport et telle
proposition à la chambre qu’elle jugera convenable. »
La
discussion est remise après le vote des crédits provisoires.
FIXATION DE L’ORDRE DES
TRAVAUX DE LA CHAMBRE
M. Lebeau demande la parole pour une motion d’ordre, et
s’exprime ainsi. - Dans la première section, à laquelle j’ai l’honneur
d’appartenir, on s’est livré à l’examen du projet de loi sur l’organisation
provinciale ; mais des doutes se sont élevés sur la question de savoir s’il n’y
avait pas lieu, vu le nombre et l’urgence des travaux de la chambre, de ne
s’occuper maintenant que de l’organisation des corps municipaux, et de leur
maintenir provisoirement les anciennes attributions, jusqu’à ce que le temps
permette de s’occuper de cette question importante.
L’orateur
rappelle que la France a agi ainsi, lors de la discussion de la loi
départementale ; il fait observer qu’outre les projets qui sont déjà à l’ordre
du jour, il va encore en survenir d’autres sur l’instruction publique, les
routes et le système monétaire, et il a cru bon de soumettre à la chambre la
question de savoir s’il ne conviendrait pas de séparer la discussion sur
l’organisation des corps municipaux, de celle sur leurs attributions.
M. Fallon
soutient que la proposition de M. Lebeau est inadmissible en la forme, parce
qu’elle n’est autorisée par aucune disposition du règlement, et au fond, parce
que les lois qui règlent les attributions provinciales sont un véritable chaos,
qu’il est urgent de les modifier, et que d’ailleurs l’article 139 de la
constitution impose à la chambre l’obligation de le faire dans la session.
M. Lebeau. - Je prie notre honorable collègue M. Fallon de remarquer
que je n’ai pas fait une proposition, mais que j’ai seulement soumis un doute à
la chambre, pour qu’elle vît s’il ne serait pas bon d’adopter la séparation
dont j’ai parlé. Quant à l’obligation que nous impose l’article 139 de la
constitution, si elle doit être remplie dans cette session, si nous sommes
enchaînés sur nos bancs jusqu’à ce que nous ayons exécuté cet article en
entier, il se passera plus de 18 mois : car il nous ordonne de faire, outre
l’organisation provinciale, un grand nombre d’autres lois.
Je
ne conçois pas qu’on puisse dire que les lois qui règlent aujourd’hui
l’obligation provinciale ne sont qu’un chaos et qu’il n’y a rien de bien. Elles
sont infiniment supérieures à celles qui régissent la France, et cependant la
chambre des députés a commencé à organiser le personnel des corps municipaux et
à maintenu provisoirement les anciennes attributions. A plus forte raison
devons-nous le faire en Belgique.
M.
d’Huart demande à parler
contre la proposition de M. Lebeau.
M. de Robaulx. - M. Lebeau déclare lui-même
qu’il ne fait point de proposition.
M. Lebeau. - Je ne fais qu’une simple
motion d’ordre, et la chambre décidera à la prochaine séance, ou quand il lui
plaira, s’il est utile de discuter séparément l’organisation du personnel et
les attributions des corps municipaux.
-
Sur la proposition de M. de Robaulx, la chambre passe à l’ordre du jour.
PROJET DE LOI
ORGANISANT LE SYSTEME MONETAIRE
M. le ministre des
finances (M. Coghen) présente un
projet de loi sur le système monétaire, conforme au système français. (Nous le ferons connaître.)
La
chambre ordonne l’impression et la distribution.
-
La séance est levée à 5 heures.