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« Aperçus de la part que j’ai prise à la révolution de 1830 » (« Mémoires »), par A. Gendebien (1866-1867)

 

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A. LES PRODROMES DE LA RÉVOLUTION.

 

IX. Résumé à méditer.

 

(page 235) Ici, Gendebien retrace, en un résumé saisissant, les événements qui viennent de se dérouler, et les propose à la méditation de ses lecteurs.

Le 28 du mois d'août 1830, première réunion à l'Hôtel de Ville de Bruxelles ; timide, irrésolue, elle n'a guère d'autre préoccupation que de rester dans la plus stricte légalité.

Le 31 du même mois, les princes, arrivés à Vilvorde, veulent entrer à coups de canon à Bruxelles, ils exigent soumission complète et immédiate.           .

Une première députation est fort mal reçue par les princes qui menacent de faire usage des articles du code pénal qui prononce la peine de mort.

Le peuple s'émeut, s'indigne, menace ; la seconde députation est mieux accueillie.

L'irritation du peuple grandit, il fait des barricades ; la troisième députation stipule d'égal à égal, le prince d'Orange entrera à Bruxelles avec quatre officiers seulement et le peuple conservera ses couleurs, ses drapeaux, ses armes !

Le Prince entre le 1er septembre, non en maître, mais contrit, fasciné par l'imposante attitude du peuple qui fier, dans sa force, en a le calme et le dédain presque.

Dès ce moment tout change : Depuis la nuit du 1er au 2 septembre, le Prince discute, il hésite pendant trois heures toujours sous la pression de la terrible image du peuple en armes, il finit par comprendre les périls de la situation.

Le 2 septembre, une commission instituée par le Prince discute, se divise, ne résout rien, parce qu'elle ne comprend pas la situation.

Le Prince qui l'a comprise demande une prompte décision ; le 3, la commission, dès dix heures du matin, proclame à l'unanimité la séparation des deux parties du royaume..

Les députés aux Etats-Généraux arrivés à Bruxelles depuis quelques heures, ignorant l'attitude du peuple, décident, dans la nuit du 2 au 3 septembre, qu'ils ne sortiront pas de la stricte légalité ; ils n'osent pas même inviter leurs collègues absents à se réunir à Bruxelles.

Le lendemain à midi, ils déclarent au prince d'Orange, que la séparation est nécessaire, urgente ; qu'ils ne se rendront pas à la convocation  (page 236) des chambres à La Haye ; et publient une proclamation au peuple, dans laquelle ils confirment ce qu'ils ont dit au Prince.

De Brouckère qui, dans la nuit du 2 au 3 septembre avait refusé, en sa qualité de secrétaire, de signer les invitations aux députés absents de se rendre à Bruxelles, n'hésite pas à contresigner, quelques heures plus tard, cette proclamation.

M. le colonel de Roisin, qui était au nombre des officiers d'état-major du Prince, qui nous avaient fort mal accueillis au palais, le 1er septembre à 9 heures du matin, s'empressa, 36 heures plus tard, d'approuver et signer la proclamation de ses collègues aux Etats-Généraux.

L'Etat-Major de la garde bourgeoise et les délégués des sections, qui, à la réunion du 29 du mois d'août, s'étaient montrés si scrupuleux observateurs de la stricte légalité, et qui, le 2 septembre n'osaient encore s'arrêter à l'idée de la séparation, n'hésitent plus le 3 septembre à midi, d'acclamer la séparation, en présence du Prince, et ils refusent de crier « Vive le Roi ».

Le 31 du mois d'août, le 1er septembre au matin, le Prince menace Bruxelles d'un assaut.

Le 3 septembre, à 2 heures, le Prince et ses soldats quittent la capitale - Bruxelles est libre et indépendante !

Toutes ces conversions subites sont le résultat des réflexions, des méditations sérieuses et logiques, de la démonstration de force et d'énergie, donnée par le peuple, le 2 septembre, lors de l'entrée du prince d'Orange à Bruxelles, ou plutôt à l'occasion des menaces qui avaient précédé cette entrée.

Cette première journée, c'est le peuple qui l'a gagnée : elle a été a peu près aussi décisive que les dernières du. mois de septembre qu'il a gagnées aussi, par son énergique initiative et par son dévouement.

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